A y regarder de près, le drame de cette affaire reste l’incertitude dans quelle nous sommes de ce qu’aurait pu souhaiter Vincent Lambert en pareille circonstance.
En début de semaine, la publication sur le site de Famille Chrétienne d’une courte vidéo montrant Vincent Lambert, sur son lit d’hôpital, est venue exacerber l’émotion soulevée par la récente décision de la Cour Européenne des droits de l’homme de confirmer l’arrêt du Conseil d’Etat autorisant l’arrêt éventuel des soins qui lui sont prodigués. Ces quelques images «volées» sont empreintes d’une grande émotion. En d’autres circonstances elles auraient pu tout aussi bien être utilisées, dans son combat, par l’Association pour le droit de mourir dans la dignité. Car au-delà précisément de l’émotion produite et recherchée, elles ne disent rien qui soit de nature à infirmer le diagnostic médical porté sur la situation de Vincent Lambert.
Est-il encore un vivant ?
Pour les trois experts mandatés par le Conseil d’Etat, Vincent Lambert, âgé de 38 ans, est aujourd’hui un patient tétraplégique en état végétatif, atteint de lésions irréversibles qui interdisent toute possibilité d’amélioration. Sa situation se traduit par une absence totale de communication avec ses proches, les réactions telle qu’elles peuvent apparaître sur une vidéo, étant hélas assimilables à de simples réflexes. Alors oui Vincent Lambert n’est ni malade au sens habituel du terme, ni en fin de vie pour peu que la «machine» continue d’être alimentée. Mais est-il encore un vivant ?
Ecrire cela avec respect, compassion et gravité, est non seulement possible mais nécessaire. Sauf à se résigner, dans ce cas précis, à entretenir pour des années voire des décennies, la douloureuse illusion d’une humanité réduite de fait à une simple fonction biologique. A ce stade, ce n’est pas la dignité de la personne qui est en cause, c’est l’existence même des conditions constitutives de la personne qui fait question. C’est en tout cas la manière dont nombre de Français, appartenant à toutes les traditions philosophiques et religieuses se situent face à ce drame. Et il n’est ni honnête ni responsable d’en faire pour autant des barbares prêts à toutes les compromissions.
Evêques : des propos inopérants
Qui a peur de la mort et de son mystère : celui qui, humblement, se résigne à «laisser partir» un frère, ou celui qui croit devoir faire du «tu ne tueras pas» une lecture qui lui interdit l’exercice de sa propre liberté ?
Depuis le 5 juin, plusieurs évêques Français ont pris publiquement la parole pour défendre le «droit à la vie» de Vincent Lambert, voire même pour dénoncer dans la décision «scandaleuse» de la CEDH une «perspective euthanasique». (1) C’est leur droit et, sans doute, à leurs yeux : leur devoir. Disant cela, ils expriment également la conviction de nombre de catholiques et plus largement de citoyens de ce pays. Ont-ils conscience néanmoins que leurs propos sont désormais quasi inopérants dans une France sécularisée ?
Réaffirmer, en toutes circonstances, le principe du «respect inconditionnel de toute vie depuis sa conception jusqu’à sa fin naturelle» est une manière de s’interdire d’entrer dans la complexité de ce qui fait la vie humaine. Et donc d’en rester à une «éthique de conviction» là où des hommes et des femmes se compromettent, en conscience, à tenter de définir les contours d’une «éthique de responsabilité» sans cesse confrontée aux progrès de la connaissance. Par instinct plus que par lâcheté, c’est vers eux que se tourne aujourd’hui avec confiance une majorité de nos concitoyens.
Une liberté fondamentale à respecter
Concernant Vincent Lambert, le seul concerné par l’arrêt du Conseil d’Etat comme par la décision de la Cour européenne des droits de l’homme (2), l’inconnu est semble-t-il de savoir avec certitude quel aurait été son souhait face à la situation dans laquelle il se trouve aujourd’hui : être maintenu en vie ou arrêter un traitement perçu comme un acharnement thérapeutique. Evoquant cette question dans la Croix, Mgr Pierre d’Ornellas, responsable des questions éthiques au sein de la Conférence des évêques de France, s’exprime en ces termes : «Si Vincent Lambert, en prévision d’un éventuel état végétatif, avait clairement exprimé sa volonté de ne pas subir de traitements, en connaissant la distinction entre ceux qui luttent contre la maladie et ceux qui, comme l’hydratation et l’alimentation, correspondent à un besoin naturel, il aurait été juste de respecter cette liberté fondamentale.»
Le propos est sans ambiguïté. Il manifeste un déplacement significatif de la part d’un haut dignitaire catholique. Il laisse entendre qu’il n’y aurait donc pas contradiction absolue entre l’interdit de tuer et le respect de la volonté de la personne de voir sa vie interrompue. Même si cela ne doit concerner que des cas extrêmes. On est là me semble-t-il dans la prise en compte de cette «très grande complexité» de la situation évoquée par Mgr Ribadeau-Dumas, porte parole de la Cef, le jour même de la décision de la CEDH. L’Eglise catholique s’honore lorsqu’elle risque ainsi, en toute fidélité, une parole de liberté qui lui permet un dialogue ouvert, confiant et responsable avec la société civile, comme j’y invitais il y a quelques mois, sur cette question de fin de vie. (3)
© René Poujol
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(1) Notamment le cardinal Philippe Barbarin et Mgr Marc Aillet.
(2) Cela rend totalement abusifs les propos dénonçant la menace que cette décision ferait peser sur les 1 500 à 1 700 personnes qui, en France et à des degrés divers, se trouvent dans une situation comparable à celle de Vincent Lambert.
(3) Une société civile qui et loin d’être unanime sur la suite à donner à ce jugement du 5 juin comme en témoigne ce texte du professeur Emmanuel Hirsch, spécialiste d’éthique médicale.
Merci René pour ce billet qui m’a permis de comprendre que les lignes bougent et qu’il y a une évolution dans le discours de l’Eglise.
Merci pour ce texte mesuré et qui mérite respect.
« Concernant Vincent Lambert, le seul concerné par l’arrêt du Conseil d’Etat comme par la décision de la Cour européenne des droits de l’homme », dites-vous.
j’ajouterais et le seul à ne pouvoir en prendre connaissance…. privé qu’il est « plaider sa cause »…. puisque tout se passe « sans lui », le grand absent, le muet, le privé d’expression, autrement privé de sa liberté humaine et de sa conscience personnelle.
La capacité de se penser par soi-même n’est elle pas la caractéristique de l’humain vivant ?
Quelles soient partiellement détruites cela arrive et des manières de s’exprimer existent. Que des pathologies telle le « locked-in syndrome » permettent aussi cette communication, et les choses sont différentes.
Où s’arrête « la vie HUMAINE » pour passer dans la survie végétative mécanisée ?
Vers quelle folie irions-nous à garder comme concept que la survie mécanisée d’organes assistés serait à maintenir indéfiniment ? Car nous nous en approchons médicalement parlant…..
L’homme devenu « objet médical » et probablement de recherche… mais ça … silence absolu !! …., même si certain médecin vous confie à l’oreille : intéressant à observer combien de temps « ça peut tenir » notre tringlerie médicale … c’est plein d’enseignement….
De quoi faire réfléchir l’homme ordinaire que je suis….
Merci René pour ces propos équilibrés et que je ressens comme profondément justes. Ils nous renvoient à l’éternelle interrogation : qu’est-ce que la vie ? Et à son corollaire : qu’est-ce qu’une personne ?
L’instrumentalisation de Vincent Lambert est absolument insensée. Tout un chacun (et je m’y inclus) prétend donner son avis sans connaître la réalité de son « dossier » et en tirer des conclusions générales.
Je voudrais rappeler une « évidence » un peu oubliée : toute vie est singulière, toute mort aussi. J’éviterai donc soigneusement demain, quelle que soit l’issue, de généraliser ce cas particulier.
Il n’en reste pas moins vrai qu’il me semble contradictoire de prôner le respect de la vie « de son commencement à sa fin naturelle » et sa prolongation artificielle.
Au-delà de tous les débats, il me semble que « laisser partir en paix » relève de l’humanité la plus élémentaire. Que l’on croit ou non au ciel.
Merci encore René pour ta sagesse et ces paroles d’apaisement.
Vous évoquez, en reprenant les propos de Mgr Ribadeau-Dumas, la « très grande complexité » de cette situation. Je vous propose d’entrer davantage dans cette complexité en approfondissant certaines de vos remarques et réflexions.
1. Vincent Lambert est en état d’éveil sans réponse. Ses réactions ne doivent pas être sur interprétées, laissant penser que son état se serait amélioré. Seuls des examens poussés pourraient confirmer ou infirmer une telle évolution. Ses réactions ne peuvent pas et ne doivent pas non plus être incontestablement et définitivement interprétées comme de simples réflexes. Dans les établissements spécialisés accueillant ces patients, les soignants restent extrêmement prudents sur l’interprétation à donner à ces réactions. D’ailleurs, ils font comme-ci le patient les entendait, les voyait. Cette prudence et cette attention de leur part démontrent que l’humanité d’une personne possède sa part de mystère, et que la médecine n’a pas toujours réponse à tout. Ou du moins qu’un doute persiste toujours. « Que savons-nous du siège de la conscience ? », disait l’autre jour à l’antenne d’Europe 1, le professeur Emmanuel Hirsch (1).
2. Vous évoquez la diffusion de la vidéo reprise sur le site de Famille Chrétienne, réalisée par le comité de soutien de Vincent Lambert. Je souhaite simplement évoquer celle de l’émission Zone Interdite (M6), où le Dr Kariger apparait (2), pour illustrer mon précédent propos. Mon intention ici n’est pas de débattre du bien-fondé de la diffusion de telles vidéos. Mais peut-on à la fois affirmer que Vincent Lambert est réduit à ses simples fonctions biologiques – et donc s’interroger sur son état de vivant, et dans le même temps, comme le fait le Dr Kariger à la fin de la vidéo, lui adresser un « au-revoir » en quittant la chambre ? Cet « au-revoir » a-t-il un sens ? Si on a un doute sur la conscience qu’a Vincent Lambert du monde qui l’entoure, oui il a un sens. Si on affirme, comme le professeur Debré, qu’il « n’a plus en vie », ou, comme le Dr Devalois, qu’on lui « lirait le bottin, il réagirait de la même manière », non il n’a pas de sens. Avoir un « regard humain » sur Vincent Lambert, comme l’affirme aussi Mgr d’Ornellas, n’est-ce pas prendre en compte ce doute ? « Avons-nous le cœur assez ouvert pour le considérer comme une personne capable, dans son état pauci-relationnel sans manifestations de conscience, de nous apporter quelque chose ? (…) Ne nous appelle-t-il pas à un surcroît d’humanité ? » (3)
3. J’avoue avoir quelques difficultés à percevoir où est la nouveauté de la position de l’Eglise dans les mots de Mgr d’Ornellas. Ce dernier ne fait rien d’autre que de rappeler ce que les papes et le Magistère disent depuis déjà plus de 50 ans. L’Eglise condamne l’acharnement thérapeutique, et reconnait comme légitime de demander l’arrêt d’un traitement jugé inutile ou disproportionné. « On peut en conscience « renoncer à des traitements qui ne procureraient qu’un sursis précaire et pénible de la vie, sans interrompre pourtant les soins normaux dus au malade en pareil cas ». Il est certain que l’obligation morale de se soigner et de se faire soigner existe, mais cette obligation doit être confrontée aux situations concrètes; c’est-à-dire qu’il faut déterminer si les moyens thérapeutiques dont on dispose sont objectivement en proportion avec les perspectives d’amélioration. Le renoncement à des moyens extraordinaires ou disproportionnés n’est pas équivalent au suicide ou à l’euthanasie; il traduit plutôt l’acceptation de la condition humaine devant la mort » (Evangelium vitae, 76-77). Mgr d’Ornellas fait bien la distinction dans son propos entre les traitements à visée médicale, et l’alimentation et l’hydratation qui sont considérées par l’Eglise comme des soins de base. Ainsi, affirme-t-il que Vincent Lambert aurait pu légitimement demander, dans ses directives anticipées, l’interruption des traitements « qui luttent contre la maladie » mais, sachant la nature de l’alimentation et de l’hydratation (des besoins naturels), il aurait su que ces derniers ne pouvaient, eux, pas être arrêtés. C’est dit d’une manière différente qu’habituellement, mais ces propos sont exactement ceux de l’Eglise catholique.
4. Tout le débat de l’affaire portant sur Vincent Lambert réside dans la définition de ce que sont l’alimentation et l’hydratation artificielles. Traitements ou soins de base toujours dus à la personne ? Nous touchons là l’une des parties les plus complexes de l’affaire. Vous avez choisi dans votre post de n’évoquer que la position de l’Eglise catholique. Cela est, à mon avis, extrêmement limitatif. L’Eglise apporte son « discernement » sur ces questions délicates, elle n’impose rien. Il convient d’entendre ce qu’elle a à dire, mais également d’écouter la voix d’autres acteurs directement concernés par cette affaire. Je pense à l’association France Traumatisme Crânien, regroupant les professionnels de santé en charge des personnes plongés dans un état similaire à celui de Vincent Lambert. Que dit cette association sur la question de l’alimentation et de l’hydratation artificielles ? « L’alimentation et l’hydratation, même administrées par sonde, font partie des soins habituels dans ces situations. Ces soins ne sont pas déraisonnables » (4). Lisons encore leur communiqué : « L’arrêt du Conseil d’Etat signifie qu’aujourd’hui en France il est légalement possible de provoquer volontairement la mort d’une personne en état végétatif chronique qui n’est pas en fin de vie, dès lors que la procédure est respectée ». Pourquoi leurs propos ne sont-ils pas davantage pris en compte ? N’ont-ils pas l’expérience et la compétence nécessaires ? Sont-ils, eux aussi, aveuglés par un dogme intangible ? Tout cela m’interroge. Et il convient, il me semble, de ne pas omettre cette partie de la complexité du dossier.
5. Enfin, vous faites une allusion rapide à la fin de votre post sur les conséquences de la décision du Conseil d’Etat, puis de la CEDH, sur les 1700 autres patients en état végétatif permanent ou pauci-relationnel. Je trouve votre affirmation un peu rapide et manquant, là aussi, de prudence. Que disent les mêmes professionnels de France Traumatisme Crânien ? « Cette décision va leur faire se reposer [aux proches] la question de l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation artificielles, alors qu’elle n’était plus d’actualité », affirme le Dr Chevrillon, membre fondateur de cette association, sur le plateau de KTO (5). Pour Jérôme Alric, psychologue à Montpellier, « la CEDH, en laissant entendre que les patients diagnostiqués pauci-relationnel ne doivent plus rester en vie – c’est-à-dire, au fond, que leur vie ne vaudrait plus la peine d’être vécue – conforte l’idée qu’accompagner ces personnes en état de conscience minimale serait inutile » (6). Les familles ne seront-elles pas tentées de baisser les bras, de dire « à quoi bon » ? Je me suis rendu il y a un an dans un établissement spécialisé accueillant des personnes EVC/EPR. Parmi les patients, deux avaient été « abandonnés » par leur famille. Je ne porte pas ici de jugement, je constate. Un risque existe. Pas celui de débrancher demain les 1700 patients, mais d’engendrer des « dommages collatéraux ». Ne sous-estimons pas ce risque et prenons réellement l’ampleur de la complexité de l’affaire Vincent Lambert devenu, malgré lui, « un symbole », selon l’expression d’Emmanuel Hirsh.
Antoine Pasquier, journaliste – Famille Chrétienne
1)http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-d-europe-1-nuit/emmanuel-hirsch-il-y-a-une-affaire-intime-que-lon-doit-respe
2) http://www.dailymotion.com/video/x2a5tr5_zone-interdite-droit-de-mourir-le-16-novembre-sur-m6-2_tv
3) http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Mgr-Pierre-D-Ornellas-Vincent-Lambert-nous-oblige-a-la-reflexion-2015-06-11-1322440
4) http://www.france-traumatisme-cranien.fr/upload/proposition-texte_decision-24juin14_ce-et-cedh_vlambert_juillet2014-1-.pdf
5) https://youtu.be/rH0c9SSuTws
6) http://www.famillechretienne.fr/politique-societe/bioethique/affaire-lambert-la-decision-de-la-cedh-met-en-peril-l-accompagnement-des-patients
Merci de cette longue contribution que je soumets à nos lecteurs. Le seul commentaire que je m’autoriserai pour l’heure est pour dire que je ne lis pas comme vous la déclaration à la Croix de Mgr d’Ornellas. Il semble clair à vos yeux que pour lui l’hydratation et l’alimentation restent objectivement des soins de base à différencier d’un traitement. Je crédite Mgr d’Ornellas de suffisamment d’intelligence et de maîtrise du langage pour savoir que c’est là là question au cœur du débat. S’il n’est pas plus explicite dans son propos pour dire qu’il ne faut pas confondre les deux et que seuls les traitements peuvent le cas échéant être interrompus sans déroger à une certaine éthique, c’est qu’il accepte ouvertement le risque de l’interprétation qui est la mienne. C’est en soi une manière de faire bouger les lignes…
Dans le même esprit, tout Français, même peu au fait de ces questions, est capable d’établir une distinction entre le fait d’hydrater et de nourrir une personne tétraplégique, incapable de parler mais consciente d’elle-même et du monde qui l’entoure et une personne dont ne demeure qu’une fonction biologique. Les mêmes vous diront que si un doute demeure sur la réalité ou non de cette conscience, il appartient alors aux proches et au personnel soignant de décider, en conscience, ce qu’il est bon de faire. Sachant qu’ils peuvent se tromper ! Mais pour échapper à cette incertitude et au risque d’une erreur, est-il plus « humain » de condamner un handicapé de l’âge de Vincent Lambert à survivre trente ans dans les conditions qui sont les siennes.
Et puis, à parler d’éthique, regardons le monde tel qu’il est. Il y a, de par le monde, des centaines de milliers d’enfants qui ne demandent qu’à vivre, et qui continuent de mourir de faim et de soif sans que nous nous inquiétions de savoir s’il s’agit de l’arrêt d’un traitement ou d’un manque de soins… de notre part ! Est-il éthique, et conforme à l’évangile, de déployer tant de moyens ici et si peu là bas ?
Enfin, pardonnez-moi, mais entre le propos de Mgr d’Ornellas appelant à « se demander sereinement ce qui est « humain » vis à vis de Vincent Lambert » et le twit de Mgr Aillet : « Aujourd’hui en Europe, 12 individus ont voté la mort d’une personne handicapée », il y a plus qu’une nuance ! Ils sont évêque de la même Eglise.
Béotien, sans doute, il me manque aussi quelques éléments de base pour me faire une idée complète…
Je pense à Rachel, épouse de Vincent… et quoiqu’il en soit de sa décision à elle, je m’interroge : un couple Vincent et Rachel ? Sont-ils passés ? Sont-ils mariés ? Civilement ? Religieusement ? Divorcés…
Je ne sais pas ce que dit la loi sur la place des parents, en chacun de ces cas… Statut des mariés… Quitter père et mère ! Que vaut alors « légalement », « religieusement » la parole d’une épouse ?
Pour tous ceux qui ne connaissent que de loin ces situations médicales extrêmes et qui ne sont pas médecins : lisez le livre du Dr Kariger, le médecin de Vincent Lambert : « ma vérité sur l’affaire Vincent Lambert » (Editions Bayard) médecin spécialiste des soins palliatifs depuis longtemps et même chef de service, lui-même catholique.
Vous en apprendrez beaucoup sur les soins palliatifs, sur les combats menés pour faire vivre une personne. C’est un livre qui part des faits et propose de parcourir le long chemin des soignants et de l’épouse.
C’est une réflexion profonde en matière d’éthique catholique.
Ecrit par un médecin qui a une certaine compétence, par ces temps si durs, j’aimerai que beaucoup prennent la peine de lire ce livre.
Je suis atterrée à l’idée que sa mère pense encore à demander d’autres expertises au motif que l’équipe médicale n’étant plus la même elle peut ré-enclancher le processus des recours .
Dans cette « affaire » quelle est la place de l’épouse, vouée depuis des années à se débrouiller seule et sans aide avec l’homme qu’elle aime et qu’elle a voulu sauver de toutes ses forces ?
Quel est le rôle de la mère soutenue, y compris financièrement, par une famille idéologique qui a choisi de prendre Vincent Lambert en otage et de faire de cette situation difficile un drapeau, un combat ?
Qui prend réellement en compte la dignité de cet homme : l’épouse ou la mère et ses soutiens ?
Qui osera révéler le coût exorbitant pour la collectivité de toutes ces années, sans un seul signe de réveil ?
Qui se dira que, de ce fait, d’autres personnes ne pourront avoir accès à des soins équivalents leur donnant une seule chance de « se réveiller » ?
Comme catholique engagée en Eglise sur ces questions, je m’interroge sur ce que cela implique de manque de confiance en la Résurrection.
Pourquoi violer avec autant d’acharnement le souhait de Vincent qui avait dit à son épouse qu’il ne voulait pas d’obstination déraisonnable, pourquoi forcer à maintenir en survie artificielle un homme déjà mort ?
Pour répondre à une question souvent formulée, quel que soit le respect que l’on peut avoir sa mère et ses proches, la seule personne ayant légalement qui a le droit de se prononcer c’est la personne de confiance telle que définie par la loi Leonetti, ici : son épouse.
Quand on est jeune on n’y pense pas et pourtant aujourd’hui il faut le faire : écrire ses intentions sous forme de directives anticipées sur papier libre. Il existe des formulaires sur le site de la Sécurité sociale.
Cela permet aux médecins de soigner sereinement de tout leur coeur. Cela permet à la personne de se mettre à l’abri des conflits familiaux, des obstinations déraisonnables.
Il y a peu encore, Vincent serait mort paisiblement, à l’abri des polémiques et des surenchères .
Que le Seigneur, malgré la folie de certains, le prenne auprès de Lui, c’est ma prière de soignante catholique en ce dimanche.
Il faudra regarder de près cette question des « directives anticipées ». Et j’invite chacun, s’il le peut, à lire sur le site de La Croix, la chronique de Geneviève Jurgensen, ancienne journaliste du groupe Bayard, dont je m’autorise à publier cet extrait.
« Sur le site de l’assurance-maladie, j’ai consulté puis imprimé le formulaire qui doit aider à faire connaître ces directives personnelles, afin que notre départ de cette terre se rapproche si possible de ce que nous aurions voulu qu’il fût. Le formulaire est composé d’une petite quinzaine de questions auxquelles chacun est invité à répondre avec trois options : « oui », « non », « ne sait pas ». Après avoir réfléchi un temps raisonnable, j’ai constaté que pour la totalité, j’avais coché la case « ne sait pas ». Il me semble donc, au terme de cette introspection, plus simple de faire confiance à ceux qui, si tout va bien quand tout ira mal, m’entoureront : médecins, famille, Dieu. »
Connaissant ce questionnaire j’ai répondu « ne sais pas » uniquement à DEUX questions….
Pour les autres, je SAIS à la fois de quoi il s’agit exactement,
et Je SAIS ce que je désire qu’il soit fait ou pas….
Ce n’est pas parce qu’une personne entend s’en remettre pieds et poings lié aux « autres » qui devront décider à sa place, que cela puisse remettre en cause ce principe de « directives anticipées »…..
Ayant discuté ouvertement de cette question avec mes enfants largement adultes, ils sont « soulagés » que j’aie exprimé mes choix.
Je le suis également : en Paix….
Je pige pas pourquoi vous reprenez justement ce passage….
avec quelle intention ?
Aucune autre intention que de me faire l’écho, à la suite de la « recommandation » de Claudine Onfray, d’un son de cloche différent, venant d’une personne expliquant que, de son point de vue, les choses n’étaient pas aussi simples. C’est tout ! C’est ce qu’on appelle nourrir un débat… auquel vous venez d’apporter votre propre contribution, ce dont je vous remercie. Pour le reste, je ne vois pas de mon côté ce qui vous autorise à penser qu’il y aurait là une remise en cause des directives anticipées. Ce n’est pas parce qu’une personne dit renoncer pour elle-même à utiliser une procédure qu’elle interdit aux autres d’en faire usage.
Vous répondez à votre tour à mon interrogation…
Certes il n’y a pas « remise en cause »…. Je reste cependant avec ce sentiment que l’auteur dit, sans le dire, que « tout ça » est bien inutile….. Il suffit de « s’en remettre »….
Ce n’est pas dit ainsi, je fais une lecture personnelle « entre les lignes »….
Et bien évidemment rien ne peut être simple en ce domaine.
J’ai vécu de genre de situation délicate lorsqu’on m’a demandé ce que mon père aurait souhaité… C’était il y a 25 ans…. Je m’en souvient comme d’hier…
Heureusement nous en avions parlé quand il était à même de s’exprimer.
Comment dans cette affaire peut-on, prendre parti pour la mère ou l’épouse de Vincent Lambert ? Que savons-nous des motivations réelles de l’une ou de l’autre ? Strictement rien ! Alors cessons donc de les juger, de grâce !
Il est quand même insensé qu’une vidéo contestable puisse avoir plus d’autorité que les avis médicaux les plus autorisés et les plus hautes décisions de justice.
La diffusion de cette vidéo, moralement condamnable, est mise au service d’une cause discutable : la défense de la vie au prix de l’acharnement thérapeutique.
François, je n’ai pas vu cette vidéo et je ne la regarderai pas de toute façon. Par ailleurs pour moi ce cas ne relève plus de la médecine seule et les avis des experts médicaux aussi nécessaires soient-ils ne répondent pas à ce problème
Dire « je ne sais pas », c’est s’en remettre à ce que dira quelqu’un d’autre, qui pourra dire à son tour : « je ne sais pas » et ainsi de suite …
Durant toute sa vie, on a toujours le choix de s’en remettre à quelqu’un d’autre, afin que ce dernier intervienne à votre place. C’est un manque de courage.
Tant qu’on n’a pas fini de vivre, on a la responsabilité de sa propre vie.
Aussi dire « je ne sais pas » est, à mon avis, une démission, où on attend encore une fois que quelqu’un d’autre « fasse le boulot » à votre place.
C’est un dernier manque de courage
et la porte ouverte à des procédures interminables, comme dans ce cas dramatique de Vincent Lambert).
Non, Robert, je n’ai strictement aucun élément en ma possession pour dire objectivement les motivations de la mère et de l’épouse de Vincent Lambert. Je ne connais ni l’une ni l’autre. La seule chose dont je sois sûre c’est qu’elles vivent une situation absolument dramatique, l’une et l’autre et pas plus l’une que l’autre.
Les opposer, pour moi, est absolument indécent.
A l’attention de Dominique :
Lorsque vous dites « n’avoir strictement aucun élément en votre possession… », je vous crois sur parole.
Je crains toutefois que le « je ne sais pas » dans mon post du 15 juin ci-dessus n’ait absolument rien à voir avec ce que vous dites là, car nous ne parlons pas de la même chose.
En effet, je faisais référence, moi, à la troisième possibilité de réponse citée par René dans son post du 14 juin 9h12 :
« Le formulaire est composé d’une petite quinzaine de questions auxquelles chacun est invité à répondre avec trois options : « oui », « non », « ne sait pas » »
Effectivement ma réponse est sans rapport avec le sujet que vous évoquez. Néanmoins je suis moi aussi incapable de répondre par oui ou par non à la plupart des questions. Je sais que je refuserai bien sûr l’acharnement thérapeutique mais à partir de quand commence-t-il ?
Et je ne vois pas comment on peut répondre à l’avance aux questions concernant la respiration artificielle ou une éventuelle intervention chirurgicale. Si c’est pour me prolonger de quelques heures la réponse est évidemment non ou si bien sûr il n’y a aucun espoir sérieux d’amélioration.
Ce questionnaire est beaucoup trop succinct.
Dans d’autres « documents » il n’y a qu’une case vide pour y écrire tout ce qu’on veut….
Celui-là a le mérite du concret et de pouvoir en dialoguer avec son médecin habituel. Il ouvre à la réflexion et au dialogue.
Ainsi par exemple, si je suis « en fin de vie », dans le coma et ne pouvant m’exprimer, … mais on peut me prolonger longtemps et ce sera de plus en plus vrai…. je peux ne pas souhaiter en plus une chimiothérapie pour mon cancer de la prostate….
🙂
si je n’ai rien dit… il est du devoir du médecin de le faire…
Si, ce qu’à Dieu ne plaise, je suis un jour dans la situation de cet homme, je ne confierai jamais mon existence à l’avis de mon médecin. Pour moi il est là pour soigner et dire si oui ou non un traitement est justifiable ou pas, mais son rôle s’arrête là.
Que vous la « confiez » ou non, Dominique, c’est lui, le médecin, qui aura le dernier mot (ou plus exactement le staff médical qui se penchera sur votre cas, chacun y allant de sa petite opinion…tandis que vous « comatez ») pour justement ce que vous dites « traitement justifiable ou pas »…
ainsi en est-il de la vie moderne !
Evidemment ce sera différent si demain matin un autobus vous transforme en bouillie on si quelqu’un de mal intentionné vous étrangle… 🙂
Ce que je ne vous souhaite pas… Que serions nous sans vos commentaires !!!
🙂
Ah çà, croyez bien que je suis parfaitement conscient de ce que représenterait pour vous mon éventuelle disparition… Pauvre de vous…
Toujours est-il que d’ores et déjà, si mon état de santé n’exigeait que des soins d’alimentation et d’hydratation je refuserais par principe à mon médecin le pouvoir de décider de lui-même d’arrêter ces soins lesquels n’ont rien de thérapeutiques à mes yeux.
Bonjour René
Bravo pour le titre, remarquablement juste.
Je reste cependant réservé sur l’utilisation de l’antinomie éthique de conviction / éthique de responsabilité. Disons qu’elle est généralement invoquée par ceux qui se placent dans le camp de la responsabilité et constitue en creux, si l’on inverse les termes, une accusation d’irresponsabilité envers les autres. C’est le cas bien de d’autres slogans, comme les « croyants en liberté » ou « l’union libre », qui sous-entend qu’on est persuadé d’être libre soi-même, toujours, et que ce sont bien sûr les autres qui sont prisonniers de leurs idéologies.
Par ailleurs cette distinction entre les deux éthiques peut être assez facilement interprétée comme se superposant avec l’opposition entre les défenseurs de la vie à tout prix et les promoteurs de l’euthanasie, les uns incarnant l’éthique de conviction, les autres l’éthique de responsabilité. Ce n’est, me semble-t-il, pas ce que tu cherches à dire, mais je sais aussi que beaucoup aimeraient réduire ainsi la discussion.
D’autant que la situation a ceci de terrible qu’on n’est pas dans le cas d’un acharnement thérapeutique, et qu’il ne s’agit pas de « débrancher » quelqu’un, mais de continuer à le nourrir ou bien de le laisser mourir de faim et de soif. Je regrette que beaucoup de médias fassent l’impasse sur ce point, empêchant de comprendre ce dont il est question.
PY.
Contrairement à ce que vous dites : il est branché, « gavé » artificiellement a vie.
Il n’a ni faim ni soif pour la bonne raison que ce sont là des notions de bien portants .
Sur un plan médical il est emmuré dans un corps, sans cerveau fonctionnel .
Cela fera bientôt 7 ans que ça dure.
Les premières années les meilleurs centres ont tenté de le sortir de cette mort clinique .
Je voudrais que ceux qui parlent sans expérience imaginent cette situation
Tout serait je pense plus clair pour eux .
Alors Claudine si son cerveau ne fonctionne pas comment se fait-il que l’EEG n’est pas plat ce qui devrait être le cas, non ? La mort clinique ne se traduit-elle pas justement par un EEG plat ? Si vous pouvez m’apporter la preuve formelle de la mort clinique de ce malheureux je n’attends que cela pour changer de point de vue.
Quand vous n’avez plus depuis sept ans aucune réaction vraie qui soit autre chose qu’un simple réflexe, vous êtes dans un état végétatif chronique.
Vous savez ce que veut dire végétatif ?
Un jour on pourra sans doute hiberner des corps ( en particulier pour des personnes richissimes ) pensez-vous que cela sera un bien ?
il y a un moment où la finitude, qui est notre nature, doit être acceptée pour la personne, pour ses proches.
Oui la vie a une fin et les médecins doivent pouvoir dire à un certain moment : là nous dépassons la raison, le simple bon sens et nous apportons la mort et non la vie .
Dominique, Est-il excessif de dire que la rançon du progrès de nos sociétés modernes et de la connaissance, est de nous faire entrer dans la complexité des êtres, du vivant et des réalités humaines ? Pendant des millénaires, je pense, on a considéré, en bonne logique, que tout ce qui n’était pas mort était vivant. Même si, pour les religions, le passage de la vie à la mort était perçu, déjà, comme un long processus qu’il convenait d’accompagner de la prière des fidèles… (pensons aux « livres des morts » des Egyptiens, des Tibétains ou à nos propres neuvaines catholiques…)
Le « nouveau » si je puis dire, est que la non-mort cérébrale ne peut pas toujours être identifiée à la vie telle que les médecins s’engagent à la protéger dans le serment d’Hyppocrate. Le « nouveau » est aussi que nous avons aujourd’hui les moyens techniques de maintenir artificiellement et indéfiniment cet état entre vie et mort… qui, il y a peu, n’aurait duré que quelques jours, la nature « faisant son œuvre ».
Est-il pour autant raisonnable et humain d’y consentir ? Est-ce respecter la vie et la volonté divine que de maintenir pendant trente ans Vincent Lambert dans cet état végétatif, sachant par ailleurs le coût que cela représente pour la collectivité et les arbitrages financiers que cela suppose au détriment d’autres patients ? La technique médicale est-elle au service de l’homme et de sa vision de la vie humaine ou l’homme devient-il, même involontairement, l’esclave des potentialités qu’offre la technique ? Admettez que l’on puisse formuler la question sans passer pour des disciples de Josef Mengele !
il y a un point à redire c’est que le soignant a tout intérêt aujourd’hui à prolonger sans se poser des questions .
Car le technicien soignant peut tout faire y compris décider d’une dialyse dans un état végétatif chronique , changer une pile cardiaque à une personne sourde, aveugle, en état d’Alzheimer très avancé ne reconnaissant plus personne. Il ne risquera aucun procès, peu importe le coût inutile, les douleurs prolongées, les vies des proches bouleversées.
Cela peut même être rentable pour lui.
Alors qu’entendre la question du déraisonnable prend un temps fou. Il faut réunir la famille, parler, se revoir, prendre le temps, s’exposer à des conflits familiaux, les gérer, expliquer des états que seuls les soignants de ces services connaissent bien. Puis décider de réunir une fois, plusieurs fois, une commission pluridisciplinaire qui pourra donner son avis.
Il y a pas si longtemps Vincent Lambert serait décédé naturellement.
Vous savez ce que représente attendre qu’un coeur s’arrête , qu’un dernier souffle arrive en étant lié de toute son âme à une personne ?
Oui la technique fait des merveilles mais elle a son revers et elle ne doit jamais être au service du déraisonnable .
René,bien sûr je ne peux pas récuser entièrement votre position laquelle est parfaitement sensée c’est incontestable. Bien sûr que ce malheureux il y a encore quelques années serait décédé depuis longtemps sans doute. Mais il est là ! Son cerveau n’est pas mort, et pouvons-nous affirmer qu’il n’entend rien, qu’il ne ressent rien ni physiquement ni psychologiquement ? C’est là la question que je me pose. Quant au coût pour la société, si on entre la-dedans alors fixons un âge limite au-delà duquel toute intervention chirurgicale ou traitement particulièrement coûteux seront interdits. Sur un autre blog j’ai fai allusion au film troublant mais magnifique d’Almodovar « Parle avec elle ». En l’espèce je dirais « parle avec lui »
Mais l’âge limite au-delà duquel on n’accepte plus de faire certaines opérations jugées trop onéreuses… cher Dominique, c’est déjà une réalité dans la plupart de nos hôpitaux !
En lisant les arguments de Pierre, Paul, Jean, Jacques, je me dis que n’importe qui risque, à présent, de se prendre comme un spécialiste incontournable de n’importe quelle discipline, n’ayant parfois comme seule référence qu’un article trouvé sur Wikipédia !
C’est un dommage collatéral du Net…
Claudine onfray a dit :
17 juin 2015 à 18 h 48 min
« Contrairement à ce que vous dites : il est branché, « gavé » artificiellement a vie. »
J’achoppe sur cette première ligne :
Le terme « gavé », même mis entre guillemets me paraît inapproprié.
D’après le « Centre national de ressources textuelles et lexicales », le verbe « gaver », dans son sens prosaïque, signifie : « faire manger de force et abondamment pour dans un but d’engraissement » (ou aussi : « Manger avec excès »).
Or, au contraire, je pense que le personnel en charge de Vincent Lambert possède le savoir-faire et les compétences nécessaires pour le nourrir d’une façon savamment dosé en quantité, et équilibré sur le plan diététique.
D’autre part, en l’absence de renseignements incontestables sur cette « alimentation artificielle », il semble probable que Vincent Lambert soit alimenté par gastrostomie (endoscopique percutanée ? – en continu ou en nocturne ? ).
La gastrostomie est un moyen d’alimentation satisfaisant, avec peu de complications et d’un coût faible.
A tel point qu’elle est conseillée pour éliminer les risques de fausses routes et d’infections respiratoires, même en l’absence de nécessité vitale.
D’ailleurs, si l’aptitude à pouvoir recracher est conservée, il reste la possibilité de rincer la bouche avec des liquides sapides, ou même, éventuellement, de faire sucer des bonbons.
J’ai connu un de mes oncles qui a vécu quelques années à domicile en étant alimenté par gastrostomie. Il ne paraissait pas particulièrement gêné (par cela), si ce n’est que ne pouvant rien avaler, il utilisait constamment un crachoir avec couvercle pour évacuer sa salive et ainsi éviter de baver.
UNE DIFFICULTÉ INDÉNIABLE :
« L’administration de médicaments par gastrostomie implique qu’ils soient totalement solubilisés ou réduits en poudre très fine avec un rinçage important, au moins 50ml d’eau PPI, pour éviter des dépôts sur les parois du tuyau d’introduction. »
Jean Daniel Reuss, le 6 août 2015
Pierre-Yves, je te rejoins volontiers dans ta première interrogation. Cette opposition peut, en effet, sembler privilégier la notion de responsabilité sur celle de conviction, et du fait même assimiler cette dernière à une forme d’irresponsabilité. Je crois, pour ma part, que les deux éthiques sont moins exclusives l’une de l’autre que complémentaires. Elles sont nécessaires au débat citoyen et au progrès éthique. Peut-il y avoir progrès éthique si le légal est confondu avec le moral ce qui, j’en conviens, est très fréquent. Encore une fois : il n’appartient pas au Parlement le dire le vrai ou le bien mais simplement le permis et le défendu.
C’est pourquoi je ne « condamne » pas ceux que je perçois comme incarnant une éthique de la conviction. Pour autant j’ai du mal à imaginer que l’on puisse organiser une société et la conduire, sur une ligne idéale, sans tenir compte de la réalité et donc sans accepter des compromis. Refuser la légitimité de ces deux attitudes pour éviter les dérives possibles que tu soulignes me semble pour le coup… irresponsable ! Entre défendre la vie à tout prix au travers de la législation et faire de l’avortement et de l’euthanasie des droits opposables, sans aucune limite, pour tout citoyen… il y a tout de même une marge !
Concernant la fin de ton propos, la question, telle que je la formule dans mon papier et telle que se la posent nombre de nos concitoyens, est bien, précisément, de savoir si le « quelqu’un » dont tu parles, est encore quelqu’un, s’il se trouve réduit à un état végétatif. Dès lors, comme le souligne Claudine Onfray dans l’un des commentaires il est donc impropre de parler de laisser mourir de faim et de soif… puisque la faim et la soif ne sont des sensations accessibles qu’aux personnes qui ne sont pas en état végétatif.
J’observe enfin que dans son texte, Mgr D’Ornellas n’oppose pas traitement et soins mais bien deux sortes différentes de traitements. Hydratation et nutrition sont bien présentés dans ce cas comme étant également des traitements… que la loi permet désormais, dans certains cas, d’interrompre. C’est en ce sens que, quoi qu’en pense mon confrère de Famille Chrétienne, je vois dans sa prise de position une évolution de la réflexion de l’Eglise sur ce sujet.
Oui, René, je sais cela et on ne vous fera pas un pontage par exemple si par ailleurs votre état de santé est parf aitement délabré, ce qui se justifie pleinement d’ailleurs. Pour autant je ne crois pas que les seuls soins d’alimentation et d’hydratation aient au point de vue coùt le moindre rapport avec ce genre d’interventions
Il me semble qu’à vouloir mettre en avant le coût des soins pour la collectivité on en arrive petit à petit au malthusianisme.
Quant à l’intervention de Mgr D’Ornellas après l’avoir relue plusieurs fois je ne sais plus trop quoi en penser car au départ il fait soigneusement la distinction entre soins thérapeutiques et soins d’alimentation et d’hydratation pour finalement aboutir à déclarer qu’il s’en remet à l’avis des experts. Moi j’y vois une contradiction manifeste
Je ne veux pas prolonger inutilement la polémique mais ce qui coûte, mon cher Dominique, ce n’est pas le prix de l’hydratation… c’est l’utilisation, sur la durée, d’un lit d’hôpital et la mobilisation du personnel soignant.
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LETTRE OUVERTE : un modèle de Directives Anticipées.
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Voici mes directives anticipées qui deviendront donc appropriées lorsque je serai incapable de communiquer d’une manière ou d’une autre. (Pour envoi à : Fichier national des directives anticipées – 50, rue de Chabrol – 75010 Paris).
1) ***
Ma conception de la dignité consiste à lutter jusqu’au bout dans les conditions de survie les plus extrêmes, les plus artificielles et les plus désespérées (« Jamais abattu ! Jamais découragé ! »). La notion de situation dégradante est située en dehors de mon univers mental.
Résister à la torpeur permanente et pouvoir garder une chance d’atteindre une bref éclair de lucidité sont pour moi plus importants que le soulagement des douleurs ou autres symptômes. Je ne souhaite donc pas de sédation et encore moins de sédation profonde.
Sur le plan physique, en cas de douleurs réfractaires, je fais confiance à mes soignants pour chercher à les atténuer par des doses d’antalgiques les plus réduites possible.
Ne pas se laisser impressionner par mes plaintes, gémissements ou autres gestes de refus pour en conclure que les soins entrent dans la catégorie des souffrances intolérables.
Pour tout ce qui concerne mes souffrances morales et mes souffrances psychologiques : ne pas s’en préoccuper.
2) ***
Il va de soi que je n’ai aucune objection contre n’importe quelles formes de traitements ou de techniques artificielles.
3) ***
Pour définir l’obstination déraisonnable et l’acharnement thérapeutique chaque médecin place le curseur où il veut. En conséquences, ne pas faire confiance à l’avis d’un seul médecin, ni aux avis de toutes les personnes susceptibles d’être influencées par lui, quand ils décideront d’arrêter mon traitement de survie. Vérifiez que ma ration journalière d’eau ne soit jamais restreinte.
4) ***
J’autorise la diffusion publique sans aucune condition restrictive de toutes les images ou vidéos sur lesquelles je serais visibles.
5) ***
Pour la raison que les administrations, associations, juridictions énumérées ci-après, ont clairement exprimé ou manifesté certaines conceptions inquiétantes qui sont en désaccord avec les miennes ; pour tout ce qui viendrait à me concerner :
Je voudrais que personne ne tienne compte des avis, arrêts, ou condamnations : du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel – du Conseil d’État – de la Cour Européenne des Droits de l’Homme – de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du Conseil de l’Europe – de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité…
Jean Daniel Reuss, à Rebais le 6 Juillet 2015.
Je n’aime pas trop la tonalité de votre texte qui procède d’une forme d’anarchisme… mais bon ! Deux observations néanmoins : concernant le point 3,dès à présent l’avis de plusieurs médecins est déjà requis pour éviter ce que vous dénoncez ; sur le point 5 : désolé mais personne ne peut être autorisé par vous à se tenir en dehors des lois que des décisions de certaines de ces organisations se sont contentées de rappeler. Je ne parle pas de l’ADMD dont on ne voit pas très bien ce qu’elle vient faire là.
on voit que vous n’avez jamais réellement souffert physiquement Jean daniel Reuss, ni jamais un de vos proches j’espère.
De plus comme soignant vous ne seriez pas terrible
mais vous êtes probablement resté au rachat des fautes par la souffrance.
Quel Dieu aimez-vous? personnellement Il m’est étranger
cher Jean Daniel,
Voila d’excellentes directives.
elles seront respectées à la virgule.
L’orgeuil, l’individualisme, le masochisme bon chic bonne mort, poussés à ce point mériteront la postérité.
Je vous souhaite, bien évidemment les plus atroces souffrances, sinon ce ne serait pas marrant de vous regarder mourir !
Pourrais-je venir vous voir hurler de douleurs et vous débattre comme un diable lumineux ?
S’il-vous-plait, faites-moi cette grâce !
cher Le voyageur
vraiment trop drôle
Merci c’était la meilleure des réponses
bravo même si le sujet est loin d’être drôle
En effet le sujet n’est pas drôle, Ce J.D. Reuss ne l’est pas non plus, quand il laisse entendre que les médecins de cet homme déchiré (Vincent Lambert) sont pires que les médecins nazis qui auraient eu -parait-il – plus d’humanité qu’eux.
C’est la conclusion que l’on peut tirer de son article sur le site traditionaliste « L’homme Nouveau »….
Un expression simple me vient :Amalgame particulièrement dégueulasse !
Je cite Reuss :
« L’Affaire Vincent Lambert échappe au domaine personnel et privé parce que ses enjeux en sont civilisationnels.
Je pense qu’il est sage d’être circonspect, car les « hautes jurisprudences » autorisant (ou ordonnant ? – Je n’ai pas bien compris) la mise à mort de Vincent Lambert, impliquent (entre autres) une possibilité de glissement vers l’Aktion T4 (1939-1942).
En bref, l’Aktion T4 consistait à demander officiellement à des médecins d’accorder une « mort miséricordieuse » (en allemand : « gnadentod », qui peut aussi se traduire par « mort octroyée par pitié ») à des infirmes incurables, physiques ou mentaux, dont la vie ne valait pas la peine d’être vécue, ( d’où aussi des économies bienvenues dans le Budget National du 3° Reich ).
L’Aktion T4, qui suscita cependant plusieurs protestations de la part de quelques parents dès 1940, était fondée sur le principe médical présentable exprimé par le précepte (traduction):
« N’est-ce pas l’exigence de la charité : délivres ceux que tu ne peux pas guérir ! »
Les deux principaux médecins chefs nazis : Karl Brandt (1904-1948) et Philipp Bouhler(1899-1945), eurent l’humanité de faire utiliser, (du moins assez souvent), le monoxyde de carbone pour une mise à mort rapide de ceux qui furent les bénéficiaires (à leurs yeux) de l’Aktion T4 …et dont le nombre exact, au minimum 70000, reste mal connu, vu les circonstances historiques. » (signé Reuss).
Le site en question, n’ayant appliqué aucune censure, ni fait de quelconques réserves, accrédite donc de tels propos….
dont acte !
Réponse à : » rene dit : 30 juillet 2015 à 8 h 13 min « .
Je vous remercie beaucoup pour votre avis qui m’est précieux.
* Je réponds rapidement à vos judicieuses remarques.
>>> Je n’aime pas trop la tonalité de votre texte qui procède d’une forme d’anarchisme…
*** Vous avez tout à fait raison. Ce texte n’est pas bon, il est même plutôt contre-productif et je n’ai rien d’un diplomate.
C’est un texte rédigé, début juin 2015, sous le coup de la colère et de la déception.
* Colère contre la censure antidémocratique du CSA,(heureusement, la vidéo du 5 juin a néanmoins permis de sauver momentanément la vie de François Lambert).
* Déception vis à vis du CEDH, en qui j’avais jusqu’alors naïvement placé ma confiance pour défendre autrement les Droits de l’Homme.
>>> sur le point 3 :…dès à présent l’avis de plusieurs médecins est déjà requis pour éviter ce que vous dénoncez….
*** Il reste quand même un problème. Nous avons l’exemple de la confrérie des trois médecins : Èric Kariger, Daniela Simon, Ana Oportus qui font bloc et ne veulent pas, ou peut-être, ne peuvent pas, se déjuger. (et ne comprennent manifestement pas que l’on puisse oser contester leur (prestigieux) pouvoir de décider de la mort d’un patient).
>>> sur le point 5 : désolé mais personne ne peut être autorisé par vous à se tenir en dehors des lois….
*** Evidemment ! Personne ne peut être autorisé . C’est pourquoi j’ai bien écrit :
« Je VOUDRAIS que personne ne tienne compte… », tout en sachant pertinemment que c’est un voeux pieux qui restera lettre morte.
>>> Sur l’ADMD.
*** Pour comprendre mes réserves sur la philosophie de l’ADMD, il faut avoir sous le yeux leur « texte fondateur » (sur leur site) dont le style est, pour le moins, contestable.
De plus, l’ADMD ne met pas en valeur mon idée de base sur le suicide assisté (qu’en pensez-vous ?) qui pourrait s’énoncer candidement par :
« Avant d’aider quelqu’un à se suicider, il faut déployer tous les efforts possible pour (essayer de) lui remonter le moral. »
Jean Daniel Reuss, à Rebais le 30 juillet 2015
Vous me laissez sans voix cher « le voyageur »
le médecin catholique que je suis n’a pas de mot pour dire son horreur d’un tel amalgame
Je réponds d’abord, à la fois à « claudine onfray » et à « le voyageur » pour leurs 3 commentaires du 30 juillet 2015
– et je prendrai ensuite connaissance des commentaires du 31 juillet.
Quelle pugnacité ! Vous me faites sourire, car je n’arrive pas à prendre au sérieux vos souhaits de me voir souffrir, ou comme vous le dites « hurler de douleur ».
J’ai relu mon modèle de directives anticipés. Dans l’ensemble je persiste et signe. Le plus gros reproche à ma rédaction actuelle, que j’avais moi-même déjà vu, est son versant égoïste, car il est indéniable que, tous comptes fait, mon enthousiasme pour défendre un acharnement à vivre ( que vous trouvez, avec raison inutile et ridicule) pourrait couter un peu d’argent aux contribuables français.
Mais hormis cet aspect à compléter ou rectifier, je n’ai pas vraiment vraiment compris les causes réelles de votre commune irritation.
J’ai, bien évidemment des qualité et des défauts : l’orgueil:OUI, l’individualisme:OUI, le masochisme:NON, l’optimisme:OUI… etc, mais quel rapport cela a t’il avec les directives anticipées ??
Il faudrait que vous compreniez que ce n’est pas tellement la douleur physique qui me fait peur, mais c’est plutôt la crainte d’être envahi par la somnolence (ce qui, entre autres, m’enlèverait le plaisir de vous répondre en tapant avec un doigt sur un clavier d’ordinateur).
J’ai lu que le maître du présent blog – je veux dire René Poujol – « ..n’en reste pas moins un observateur gourmand, attentif et passionné de la vie du monde comme de notre société ou de l’Eglise catholique.. ».
Je ne suis pas catholique, mais je m’intéresse aussi à « la vie du monde comme de notre société ».
Aussi je pense que des détails sur mon état physique n’ont aucun intérêt et sont complètement hors sujet.
Néanmoins, je crois aux vertus du dialogue, et je suis à votre entière disposition pour toutes informations personnelles qui pourraient avoir une utilité.
En voici quelques unes qui pourront – peut-être – vous aider à mieux comprendre mon point de vue.
J’ai 75 ans, je suis devenu paraplégique par suite d’un accident de la route. Je peux donc dire, qu’au sens littéral, cela fait 55 ans que je ne me suis pas mis debout.
J’ai n’ai expérimenté que deux principaux séjours en hôpital, un en 1960 à Grange-Blanche à Lyon, l’autre en 2011 à Coulommiers. Je me souviens qu’alors je faisais souvent rire les aides soignantes car je demandais au milieu de la nuit « Mais où sont mes jambes ? ».
Actuellement tout va bien, car j’ai seulement besoin d’aide pour m’habiller et pour les transferts du lit au fauteuil roulant et surtout je peux me retourner tout seul dans mon lit médicalisé.
Je suis soigné à domicile par ma soeur, qui heureusement, est très experte et entrainée pour me manipuler et me nettoyer.
Chaque semaine, je vois 3 infirmières différentes (pour mon escarre qui ne guérit pas) et un kinésithérapeute.
Si vous voulez me voir mourir, je ne peux pas vous fixer de date, mais pour le lieu, ce sera très vraisemblablement à l’hôpital le plus proche, celui de Coulommiers (77120) où je serai transporté.
Jean Daniel Reuss, à Rebais le 31 Juillet 2015.
@ Jean Daniel Reuss,
Un état de santé difficile ne justifie pas que l’on puisse dire tout et n’importe quoi….
Je parle d’expérience personnelle…ayant pour ma part 56 années de paralysie (jambes + un bras) au compteur….
Vous êtes battu de 3 ans mon cher ! 🙂
Réponse à : le Voyageur dit : 31 juillet 2015 à 11 h 16 min
Je constate que des idées auxquelles je tiens, vous scandalisent au plus haut point.
Je pense alors que les conditions d’un débat fructueux et constructif ne sont plus réunies.
J’attends donc et j’espère, les conseils et aussi les directives que je suivrai, de la part de René Poujol.
Je viens de lire la section « Qui suis-je » du présent blog, en conséquences je suis persuadé que René Poujol a certainement de très grandes compétences (et expériences) pour gérer au mieux et à sa convenance, cette situation de « choc de sensibilités très différentes ».
Jean Daniel Reuss, à Rebais le 31 Juillet 2015.
Je n’ai pas de consignes particulières à donner à qui que ce soit. Je souhaite simplement que ce lieu serve à un débat courtois, sans développements qui n’auraient pas un lien direct avec le propos ou qui seraient trop longs.