Le désir et la peur du changement ont assuré, conjointement, la victoire d’Emmanuel Macron.
Les sondeurs, ces pestiférés, avaient donc vu juste. Pour l’essentiel, les résultats de dimanche soir ont confirmé les chiffres annoncés depuis des semaines. Des chiffres dont il faut tenter de retenir l’essentiel. Le premier enseignement est le naufrage des partis de gouvernement dont l’alternance au pouvoir avait rythmé un demi-siècle de vie politique nationale et qui n’ont recueilli que le quart des suffrages des électeurs. (1) C’est donc le désir de changement qui l’a emporté, dimanche, après deux quinquennats jugés négativement par une majorité de Français.
La «France en colère» totalise 40,9% des suffrages
Ce désir de changement se concrétise par le score cumulé de 40,9% pour les deux principaux candidats qui incarnaient «La France en colère». Mais une France elle-même divisée, à parts quasi égales, entre extrême droite et extrême gauche. De sorte que c’est le candidat du centre qui l’emporte et pourrait devenir, le 7 mai prochain, le nouveau Président de la République française. «La France veut être gouvernée au centre» apprenait-on jadis sur les bancs des facultés de droit. Mais, ajoutaient nos maîtres, point besoin pour cela d’un parti centriste. François Bayrou, dernier héritier de Jean Lecanuet dans une présidentielle, en a fait l’expérience amère. Il suffisait à Valery Giscard d’Estaing, élu à droite toutes, de mener au final une politique de centre droit et à François Mitterrand, candidat de l’union des gauches, de négocier le virage de la rigueur de 1983 au centre-gauche.
La victoire, inimaginable il y a seulement un an, de ce parfait inconnu qu’était alors Emmanuel Macron, s’explique par l’effet cumulé du rejet des partis de gouvernement, de l’incapacité des deux candidats de la «France extrême» à rassurer sur leurs propositions, et à la présence d’une offre alternative – au centre – du nouveau parti En marche.
Il y aurait une grande irresponsabilité à vouloir saborder, dans les législatives, le vote des Français
On peut – on doit – s’interroger sur la capacité réelle d’Emmanuel Macron d’apporter une réponse durable à la crise économique, sociale et politique qui frappe notre pays. Mais il faut aussi savoir regarder la bouteille à moitié-pleine : ce que ce vote exprime, positivement : le désir des Français, dépassant leurs divisions, de tenter une ultime forme d’alternance non-extrémiste en associant dans un même effort de redressement et de justice sociale, des hommes – et des femmes – de bonne volonté, issus de la gauche, de la droite et du centre, là où nos mœurs politique l’interdisaient jusqu’à présent. Ce sursaut n’est pas méprisable en soi. Et il y aurait une grande irresponsabilité à vouloir saborder, dans les législatives, le vote des Français, par pur dépit, par incapacité des uns et des autres à assumer, lucidement, leur échec et à se remettre en question. Ou par refus de tout compromis faussement perçu comme de la compromission.
Le premier défi pour Emmanuel Macron sera d’entendre et de prendre en compte dans son projet, une partie du pays réel qui aspirait à un autre changement. Jacques Chirac a failli, en 2002, d’avoir été sourd aux attentes d’un électorat de gauche qui n’avait voté pour lui que par refus de Jean-Marie le Pen et ne se reconnaissait pas vraiment dans so programme ; et François Hollande, dix ans plus tard d’avoir joué le mépris vis-à-vis de François Bayrou et du Modem qui avaient largement contribué à sa victoire. Savoir entendre aussi les espérances de ceux qui n’ont pas voté spontanément pour lui sera, pour le leader d’En marche, une première épreuve. Paradoxalement, le flou de son programme pourrait, de ce point de vue, lui servir d’atout en lui laissant une marge de manœuvre.
Quelle force politique pour une possible alternance en 2022 ?
Mais l’essentiel n’est pas là. Il se joue déjà dans la perspective de la présidentielle de 2022 et de la recomposition de la vie politique française qu’exigent les circonstances. Il pose la question de la force politique qui, à cet horizon, pourra incarner une possible alternance car on ne voit pas pourquoi un «parti centriste» échapperait à cette loi. Et la réponse est claire : ce sera soit un nouveau courant politique aujourd’hui à construire, soit le Front National de Marine le Pen.
Ne contestons à Emmanuel Macron ni sa jeunesse, ni son optimisme, ni sa modernité, ni sa capacité d’entrainement et sa volonté de changement, y compris au niveau des institutions européennes. Mais il reste foncièrement le candidat du néolibéralisme économique et culturel, là où François Fillon incarnait le libéralisme économique – et non sociétal – dans son acception la plus classique. Si les conséquences de la mondialisation libérale restent le ferment de la contestation politique qui a porté les candidatures de Marine le Pen et de Jean-Luc Mélenchon, ce n’est pas la mise en œuvre du programme annoncé d’Emmanuel Macron qui sera en mesure de calmer le jeu politique.
Encore une fois, interrogeons-nous sur cette étrange destinée de notre vie politique qui voit les plus modestes, les exclus de la croissance mais aussi une partie de la jeunesse voter pour les extrêmes, tandis que les mieux lotis partagent leurs suffrages entre les candidats – l’un d’eux fut-il de gauche – qui se réclament de la mondialisation. Est-ce un hasard si la ville la plus riche de ce pays, Paris, dominée par la gauche donne 61,2% de ses suffrages à Emmanuel Macron et François Fillon réunis (contre 43,8% de moyenne nationale), là où les Hauts-de-France de tradition ouvrière, broyés par la crise et le chômage, ont crédité Marine le Pen et Jean-Luc Mélenchon de 50,5% des suffrages exprimés, dix points de plus que leur score national. (2)
Croissance ou décroissance : le débat escamoté !
Si le financement du projet de Jean-Luc Mélenchon a pu nourrir le doute, si ses paroles ambigües sur l’Europe n’ont pas convaincu, si son laïcisme de combat et la radicalité de ses réformes sociétales ont contribué à révulser ici et là parmi les plus ouverts à sa contestation des dérives de la mondialisation, nul doute qu’il a visé juste en évoquant le sort des plus pauvres, l’avenir sans espoir d’une partie de la jeunesse, l’urgence écologique et l’exigence de la transition énergétique.
La question de la décroissance a quasiment été absente du débat de la présidentielle. (3) Là où le pape François l’envisage ouvertement dans Laudato si’ conduisant les évêques de France à revenir, dans un ouvrage récent (4) sur les «Nouveaux modes de vie» à adopter en cohérence avec «une révision radicale de nos modes de développement pour en corriger les dysfonctionnements et les déséquilibres.» (5)
L’art de masquer la question sociale derrière une posture morale
La littérature abonde pour décrire, notamment, la trahison de la gauche qui a renoncé à son combat historique pour l’émancipation sociale des classes populaires, lui préférant le combat pour les revendications, notamment sociétales, des minorités ethniques ou sexuelles… Il faut lire, entre autres, Christophe Guilly lorsqu’il écrit : «La véritable fracture oppose ceux qui bénéficient de la mondialisation et qui ont les moyens de s’en protéger et ceux qui en sont les perdants et ne peuvent se protéger de ses effets. (…) Si un vernis culturel et politique permet encore de distinguer nouvelle et ancienne bourgeoisie sur les questions sociétales, elles défendent le même modèle économique. (…) Abritées derrière le discours de la modernité, de l’ouverture et du vivre ensemble, les catégories supérieures participent ainsi violemment à la relégation sociale et culturelle d’une majorité des classes populaires. (…) Cette opposition culturelle tend à occulter deux choses. La première est que cette fracture idéologique est d’abord sociale : les catégories supérieures d’un côté, celles qui bénéficient à plein du nouveau modèle économique, et de l’autre des catégories populaires, grandes perdantes de la mondialisation. Mais cette opposition est plus perverse, car elle tend à déplacer la question sociale derrière une posture morale qui vise à légitimer les choix économiques et sociaux des catégories supérieures depuis plusieurs décennies. Le clivage société ouverte/société fermée place de fait les catégories supérieures dans une position de supériorité morale : toute critique du système économique et des choix sociétaux s’apparente alors à la posture négative du repli, elle-même annonciatrice du retour des années trente. A ce petit jeu, les classes populaires sont forcément perdantes socialement, culturellement et politiquement. L’échec politique, de Chevènement à l’extrême droite en passant par l’extrême gauche, illustre l’efficacité de cette stratégie.» (6) Du moins jusqu’à ce jour…
La France pour incarner la résistance à l’hégémonie libérale
Tout est dit sur l’enjeu réel que cache la probable victoire d’Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle. Oui, l’urgence est à la recomposition politique de ce pays, à la clarification du projet des uns et des autres. A l’émergence d’une force politique ouverte à tous les courants de pensée philosophiques et religieux, capable de porter un autre projet que le néo-libéralisme économique et culturel dénoncé avec constance par la Doctrine sociale de l’Eglise. Dans un tribune récente, l’intellectuel musulman Abdennour Bidar écrivait : «Le pire écueil aujourd’hui, pour notre génie, c’est le libéralisme mondialisé. Il constitue la négation de tout ce qu’est la France. Il uniformise les modes de vie tout en rendant les peuples captifs d’une surconsommation servile de biens standardisés. Il dissout les sociétés, les solidarités dans un “chacun pour soi“ déguisé en liberté d’entreprendre, en “libération des énergies“. L’avenir de la France, si elle en veut encore un, sera de se décider à être enfin le pays d’où s’élance la résistance à l’hégémonie libérale. Nous sommes son contre-modèle, prédestinés en quelque sorte à lui dire non.» (7)
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- François Fillon et Benoît Hamon totalisent à eux deux 26,4% des voix.
- Paris : Emmanuel Macron 34,8%, Françoi Fillon 26,4% ; Hauts-de-France : Marine le Pen 31%, Jean-Luc Mélenchon 19,5%.
- Doux euphémisme : on a encore entendu tels candidats s’interroger sur les conditions d’une reprise durable de la croissance toujours perçue comme seule créatrice d’emplois.
- Conseil famille et société, Nouveaux modes de vie ? L’appel de Laudato si’, Coédition Bayard-Cerf-Mame
- Op cit p. 8
- Christophe Guilly, Le crépuscule de la France d’en haut, Flammarion 2016, p. 19 à 22
- L’Obs du 30 mars 2017, p.8
C’est tout à fait l’état des lieux au lendemain du 1er tour et le rappel des enjeux à venir… Je pense que la notion de vote de colère est à discuter. Il est difficile de placer en vis-à-vis la colère qui s’est exprimée à travers le vote JLM et celle qui s’est portée sur le vote MLP. Ces votes sont fondamentalement différents par la place qu’occupe l’autre, l’étranger, le pauvre dans chacun des projets. Surtout le vote JLM a me semble t-il dépassé le vote incantatoire ou tribunitien avec la construction d’un projet de société complet et ambitieux (cf. les 27 livrets thématiques). Certes cela rappelle le projet du candidat Miitterrand de 1981 et je pense pas que c’était un projet d’extrême-gauche …
Je pense qu’une partie de l’électorat de Marine le Pen est d’abord en souffrance de se sentir exclue et abandonnée avant que d’être contre l’autre… C’est d’ailleurs une espérance pour l’avenir car une parie de cet électorat qui, jadis votait à gauche, pourrait rebasculer dans un « camp progressiste » si elle avait à nouveau la conviction d’être entendue ailleurs qu’au FN.
Les partisans de MLP sont divers. Pour avoir été piégée lors de la messe de l’Annonciation par une association d’Anciens d’Algérie, pour avoir dû prier « pour que le drapeau français flotte de nouveau sur notre terre natale » ce qui ne laisse aucun doute sur le vote de la plupart des membres de cette association je peux dire aussi qu’ils appartenaient clairement à la « bonne société » contrairement aux petites gens qui étaient venues pour la messe et qui n’étaient pas invitées au couscous. Il est vrai que cela se passe dans le sud … et que le maire d’extrême droite annonce clairement son appartenance à l’Eglise catholique.
Merci beaucoup pour cet effort de clarification des enjeux.
Nous avons bien compris que tout reste à faire.
Nous avons une boussole , négative , contre les excès du libéralisme économique . Je partage cette option.
Il manque le travail d’alliance entre des réseaux prêts à s’engager ( avec tous les compromis que cela entraîne) dans l’arène de la construction politico économique d’un programme à « positiver ». Qui peut contribuer à l’accouchement politique ( au sens large du politique et étroit de l’action politique) …de ces inventions ?
La pensée sociale chrétienne peut donner des perspectives. Une invention est elle possible à partir du constat négatif de Bidar et de la propositions positive (mais très générale de la Conf. des evêques de France ? Voilà en tous cas un attelage étonnant. Peut-il devenir détonnant c’est à dire politiquement inventif ? Vraiment il reste beaucoup à faire !
Merci Guy de ce commentaire. Je crois que l’une des richesses de notre pays est le dynamism du vécu associatif. Braucoup de militants sont à la recherche d’un « débouché politique » qui respecterait leurs convictions. Peut-être fallait-il que les idéologues connaissent cette défaite pour qu’une reconstruction soit désormais possible, sans a-priori, en acceptant que chacun puisse se mettre au service d’un ^rojet commiun sans avoir à renier ce qu’il est, notamment dans ses choix éthiques, philosophiques et religieux.
Ce n’est pas le désir de changement qui l’a emporté dimanche, mais son exact contraire avec l’élection certaine, d’un Hollande bis, Valls-Bayrou, sans doute un peu plus habile. Et ce n’est pas le libéralisme qui est en cause, car celui ci ne fait qu’occuper la place qu’on lui laisse, la crise n’est pas foncièrement économique, elle est déjà politique, morale et même métaphysique. Macron n’invente rien , il n’est que la n° version d’une France MRP-SFIO, d’une France au fond radical-socialiste…Giscard, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Rocard, Delors, Hollance etc….qui se ment à elle même, et laisse à l’Europe, l’Allemagne, la finance internationale le soin de décider de son avenir. Le tout soigneusement enrobé et masqué par les idéologies dont la domination médiatique nous abreuve, droits de l’homme après trois mois de gestation du machin à naïtre, laïcité, république, valeurs, valeurs, valeurs, la France de Pierre Bergé, BHL,
Et chez les catholiques, le balancier a fui les erreurs et les péchés de Vichy, pour se faire aujourd’hui, avec la même absence d’intelligence et de courage, chrétiens de gauche, hier derniers marxistes, aujourd’hui Macron-Mélenchon : voyez les prêches de nos « mouvements » catho….En marche, toute….
C’est le banal désir que ça dure encore 5 ans qui l’a emporté hier, dans l’illusion on ne peut plus franchouillarde, de se croire « révolutionnaire » !
Vous citez Christophie GUILLY : « Abritées derrière le discours de la modernité, de l’ouverture et du vivre ensemble, les catégories supérieures participent ainsi violemment à la relégation sociale et culturelle d’une majorité des classes populaires. »
Il faut aller plus loin : « Abritées derrière le discours de la modernité, de l’ouverture et du vivre ensemble, les catégories supérieures participent ainsi violemment à la relégation religieuse d’une majorité des classes populaires. »
En effet tous la plupart des nouveaux mouvements ecclésiaux s’installent dans les paroisses riches et bourgeoises, ou constituent des paroisses sociologiques aristocratiques et friquées , et non plus des paroisses géographiques. Qui va vers les périphéries ? Quel mouvement, quelle Fraternité, quelle congrégation vient s’implanter dans le « 93 » ? Pourquoi privilégier Blagnac, Valbonne, et Levallois Perret si ce n’est parce que ce sont des paroisses où il y a de l’argent et des classes cultivées ? Où est l’option préférentielle pour les pauvres ?
Quelle communauté envisage de s’installer dans les Hauts de France ?
Une analyse comme souvent balancée et qui voit loin, mais qui pêche peut être par excès d’optimisme sur le vote d’adhésion à Macron qui, après tout, ne recueille que 24 % des votants et par omission puisque pas un mot n’est dit des affaires qui ont entaché, brouillé et empêché la campagne de Fillon détournant un nombre certain nombre d’électeurs de droite de ce candidat au point de l’empêcher d’être au second tour d’une élection « imperdable ». Mais passons. Je partage avec toi l’essentiel : 1. souhaitons qu’Emmanuel Macron, pour qui je voterai pour faire barrage à Marine Le Pen, réussisse mieux là où tous les autres ont échoué à faire de la France un pays où chacun trouve sa place 2. En attendant ses résultats, engageons nous, chacun selon ses désirs et ses capacités, à promouvoir une politique de croissance durable, qui se soucie des plus fragiles et de la defense des biens communs et de l’intérêt général au service de l’homme, ici et ailleurs. J’espère qu’au-delà des clivages qui les séparent les Chrétiens sauront prendre toute leur part à cet ouvrage.
Quel beau papier, … et cette belle citation d’Abdennour Bidar … qui omet que la mondialisation n’est pas que (ultra) libérale, qu’elle peut-être en priorité le frottement des idées et des cultures, une aventure moins dangereuse et plus prometteuse que les replis nationaux, mais plus délicate à équilibrer surtout si l’Europe se défaisait au lieu de revenir à sa boussole humaniste !
Un petit -trop long!- complément, en hommage à l’authentique gaulliste qui préside la commission d’investiture du mouvement EM. Le premier signe annonciateur de la candidature d’E. Macron -étonnant « Tintin » qui refusa en 2011 l’invitation de l’Elysée à rejoindre le cabinet de F Fillon- … vint à l’automne 2013 de Bapaume en Picardie, non loin d’Amiens quand le maire quitta son vieux parti RPR/UMP, après avoir présidé dix ans Pt l’association des maires de France, été ministre de Raffarin, médiateur de la République, Pt du Conseil Économique Social et Environnemental. Cet automne 2013, J.P. Delevoye déclara « Ce qui m’intéresse, c’est le projet et la qualité des hommes, … qui ne dépendent pas de l’étiquette ».
Second complément sur la question sociale. Non seulement on peut s’interroger sur la capacité du jeune homme -de préférence avant le 1er tour- pour éviter d’avoir à choisir entre voter au sentiment ou se réfugier dans le ni ni des faibles … adopté par le front de gauche et LR. Militant du Modem depuis 1998, cette question « de la capacité » m’a préoccupé de septembre 2016 quand j’ai quitté le soutien à la campagne d’AJ à décembre quand j’ai adhéré à EM. Une fois consultée la raison, il reste une part de pari.
La raison est dans le texte de Macron dans la revue Esprit déjà cité par vous René, elle est aussi dans la longue prudence qui a précédé la décision du Modem, elle a été consolidée par la première liste d’investis, et par le ton gaulliste de l’engagement écrit et signé du candidat qui précède ses projets dont la transformation en « programme » dépend du vote aux législatives. Ma conviction est que la France a été fracturée par la posture majorité opposition regrettée par J.P. Delevoye, amplifiée par les rapprochements jusqu’à la confusion entre des valeurs de la droite et de l’extrême droite, amplifiée par le népotisme banal au sein de la classe politique et que les faux pas de F. Fillon ont mis en lumière et aussi par l’attitude générale de médias qui doivent « vendre », comme le groupe Lafarge (Daesch, mur Trump), … ou comme on le serine à la jeunesse depuis 30 ans « il faut se vendre »! Cet oukase « il faut se vendre » a gravement endommagé les digues morales qui ont fait la France.
C’est sur ce climat d’imposture et de déliquescence, plus marquée « à droite », que se fait le clivage essentiel. Les vrais « pauvres » ne réclament pas des aides mais la dignité -là Hamon a eu tout faux!-, ces sans dents sans Rolex hurlent la souffrance du déni de leur humanité … quand ceux qui se croient grands sont incapables de sortir de l’effet Mathieu « à celui qui a on donnera et il sera dans l’abondance, à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a », y voyant une sorte de fatalité qui rassure leur conscience.
Les classes populaires et les catégories aisées ne votent pas Le Pen uniquement pour des raisons matérielles. L’homme ne se nourrit pas que de pain… Ils sont sensibles aux thématiques identitaires… De même, l’ascension de Jean-Luc Mélenchon doit beaucoup à son recadrage patriotique (la Marseillaise et les drapeaux français ont remplacé l’Internationale et les drapeaux rouges, et ce n’est pas un détail superficiel)…
Il y a quelque chose d’ étrange dans la manière dont vous posez le diagnostic, en citant longuement Guilly, pour justifier à partir de là une position attentiste, en rêvant à la belle gauche de Peguy. J ai dû mal à vous comprendre, monsieur. Si la gauche a trahi le socialisme, faites comme Michea : quittez la gauche, defendez le socialisme. Soyez un Peguy en croisade, pas un Delors mitigé
Vous voulez dire que je resterais à gauche… en votant Macron ? Mais je croyais qu’il était de droite ! Trève de plaisanterie je crois avoir été clair : je n’ai cessé d’écrire, sur mon blogue, depuis des mois, que ces élections ne résoudraient aucun problème de fond et que c’est au-delà de ces échéances qu’il fallait déjà se projeter pour reconstruire. Et je n’ai souvenir d’avoir écrit que dans cet au-delà je me situais à gauche.