Noyer la « foule haineuse » dans le débat  ?

Noyer la « foule haineuse » dans le débat  ?

La pérennité du mouvement et de son soutien dans l’opinion traduit la profondeur du mal être qu’il exprime. 

On pouvait penser que la trêve des confiseurs allait marquer l’essoufflement du mouvement des gilets jaunes. Et que les premières semaines de 2019 permettraient sinon de tourner la page, du moins de calmer momentanément le jeu, en attendant les conclusions de la grande consultation nationale voulue par Emmanuel Macron. Or voilà que le 5 janvier l’acte 8 de la mobilisation a rassemblé quelques 50 000 personnes, soit une participation en hausse par rapport au samedi précédent. Dans le même temps un nouveau sondage faisait apparaître que le mouvement bénéficiait toujours du soutien d’une majorité de Français. (1)

Le mal être de millions de nos concitoyens

Redisons-le ici : si les gilets jaunes ne sont pas le peuple, ils n’en expriment pas moins, au travers de revendications disparates, de propos parfois irrecevables, d’actes de violence condamnables, le mal être de millions de nos concitoyens. Et je regrette, pour ma part, que dans ses vœux aux Français pour 2019, le Président de la République s’en soit tenu à évoquer sans autre nuance « certains qui prennent pour prétexte de parler au nom du peuple (…) n’étant en fait que les porte-voix d’une foule haineuse. » Qui peut, raisonnablement, réduire les acteurs du mouvement, dans leur extrême diversité, à cette caricature ? Peut-on appeler les citoyens à prendre acte de la réalité du monde et se tromper à ce point de diagnostic sur la réalité de son propre pays plus subtilement analysée, il y a deux ans, par le candidat Macron, dans son livre « Révolution » ? 

Aujourd’hui, que conclure du maintien de la mobilisation et du soutien de l’opinion sinon que les gestes consentis par le gouvernement ont été perçus comme insuffisants tant par les gilets jaunes eux-mêmes que par l’opinion publique. Certes, dix milliards ont été engagés qui, à eux-seuls, devraient empêcher la France de tenir ses engagements européens en matière de déficit public. Mais qu’on y réfléchisse un instant : qu’est-ce que dix milliards vont bien pouvoir changer aux conditions de vie réelles de millions de femmes seules, d’agriculteurs, de chômeurs ou de travailleurs précaires, de retraités modestes et de jeunes sans formation en quête d’emploi ? « Aider les pauvres avec de l’argent doit toujours être une solution provisoire pour  affronter des urgences, écrit le pape François. Le grand objectif devrait toujours être de leur permettre d’avoir une vie digne, par le travail. » (2) Les chefs d’entreprise le savent bien : une revendication salariale, si légitime soit-elle, est toujours, plus profondément, le signe d’un mal être. Il en est de même dans la société. 

Comment imaginer que dix milliards inversent la vision que les Français se font de territoires laissés à l’abandon ? 

Si le mouvement des gilets jaunes est – ce que je crois – l’expression, sans doute partielle et contestable, de la désespérance d’une France périphérique qui depuis vingt ou trente ans a basculé dans la paupérisation et la marginalisation, comment imaginer une seconde que dix milliards puissent suffire à inverser la vision que les Français se font de l’avenir de territoires laissés à l’abandon au niveau du logement, des emplois, des transports, des services publics ou de la santé ? Que nous vivions, comme l’a rappelé le chef de l’Etat, « dans l’une des plus grandes économies du monde » qui redistribue près de la moitié de la richesse produite, rend le scandale plus insupportable encore ! 

La politique est-elle la bonne ?

Certes « les résultats ne peuvent pas être immédiats » mais la politique conduite est-elle la bonne ?  Voilà bien la question qui sous-tend la mobilisation et son soutien dans l’opinion. Lorsqu’Emmanuel Macron confirme sa volonté de « changer en profondeur les règles de l’indemnisation du chômage afin d’inciter davantage à reprendre le travail »… on s’interroge sur la pertinence à vouloir réduire le taux de chômage – comme en Allemagne ou en Grande Bretagne – par la simple transformation de demandeurs d’emploi indemnisés en travailleurs précaires ! (3) Lorsque la recherche de plus de croissance continue à être présentée comme la panacée, on s’inquiète de cet entêtement dans une fuite en avant qui engendre et nourrit la catastrophe écologique. (4) Lorsque le président ironise sur le désir du pays de voir « baisser nos impôts et accroître nos dépenses », on a envie de lui rétorquer que l’évasion fiscale – 100 milliards – qui creuse les déficits publics est rarement le fait de la France qui souffre (5) et que l’accroissement des dépenses tient, pour une part, à la prise en charge par la collectivité du coût (santé, dépollution, infrastructures…) d’une « économie du gaspillage » dont les bénéfices, eux, sont privatisés et parfois même défiscalisés. Lorsqu’il plaide que « le capitalisme ultralibéral et financier va vers sa fin »… on voudrait connaître les contours de la politique économique, fiscale et monétaire européenne qu’il entend promouvoir et mettre en œuvre…

Le sentiment de vivre moins bien qu’il y a vingt ou trente ans…

Plus profondément, les Français s’interrogent : comment expliquer que tant de nos concitoyens dans les petites villes, le monde rural, ou à la périphérie des grandes métropoles aient le sentiment de vivre moins bien qu’il y a vingt ou trente ans ? De perdre leur vie à tenter de la gagner ? Quel sens y a-t-il à courir sans cesse après le progrès technologique, à vivre dans le stress permanent, l’angoisse du lendemain, le mépris de soi par incapacité à vivre de son travail et sentiment d’inutilité sociale, le poids de la solitude et l’exclusion de l’univers consumériste érigé en ultime projet collectif ! 

Quel sens peut-il y avoir à entériner le combat permanent de tous contre tous, à magnifier la compétitivité quel qu’en soit le coût humain, à troquer la gratuité du don et de la solidarité contre le recours aux services marchands, à renoncer à toute autonomie en important du bout du monde ce que l’on pourrait produire sur place, à se faire lâchement les complices du saccage de la planète ? Et si le pape François avait raison lorsqu’il écrit : « nous devons nous convaincre que ralentir un rythme déterminé de production et de consommation peut donner lieu à d’autres formes de progrès et de développement » (6) A un mode de vie où  l’épanouissement de l’être prévaudrait sur l’accumulation de l’avoir. N’est-ce pas là, au fond, même inconsciente ou informulée, l’aspiration profonde au bonheur de notre peuple ? Au-delà de toutes ses contradictions et de ses revendications palliatives en termes de pouvoir d’achat ! 

Définir ensemble un avenir désirable

Le grand débat national qui s’engage sera-t-il à la hauteur des enjeux ? On en connaît les thèmes officiels : transition écologique, démocratie, citoyenneté et immigration, fiscalité, organisation de l’Etat. Le champ est vaste ! Il englobe et déborde tout à la fois la seule question économique. Impossible d’anticiper les résultats de la consultation. Mais on imagine mal qu’à la veille de l’été, le chef de l’Etat se résigne à adopter des propositions, formulées par les Français, qui seraient en contradiction avec sa propre vision de l’avenir du pays. Là se situe la limite de l’exercice.

Oui le Président de la République, quoi qu’en pensent et disent certains, reste parfaitement légitime a diriger le pays. Mais on voit bien que les contradictions qui ont présidé à son élection demeurent, qui ont généré la crise que nous traversons. Des contradictions inhérentes à ce moment précis de l’histoire de nos sociétés libérales développées. Elles ont conduit, autour de nous, à l’avènement de régimes populistes remettant en cause les acquis les plus précieux de la coopération internationale. Dans l’hexagone, elles pèsent à égalité sur l’ensemble des formations politiques au point de rendre, à ce jour, totalement opaque et aléatoire la perspective d’une alternance démocratique capable de les surmonter. Lorsque le Président de la République clôt ses vœux pour 2019 sur l’injonction à « Retrouver la maîtrise de notre quotidien et de notre destin. Ne plus subir. En finir avec le sentiment d’impuissance… » il traduit assurément le souhait le plus profond d’une majorité de Français. Mais un souhait qui se prète à des traductions politiques divergentes. Si le mouvement enclenché voici bientôt trois mois, enfin purgé de ses excès et de ses violences, nous permettait de définir ensemble un avenir désirable pour nous-mêmes, notre pays et pour l’Europe, il n’aurait pas été vain ! 

  1. Ce sondage Elab pour BFMTV, confirme une tendance constante depuis des semaines : un soutien au mouvement (60%) en même temps qu’une condamnation des violences (78%). 
  2. Pape François, Laudato si’ n°128
  3. Royaume Uni et Grande Bretagne ont des taux de chômage très bas qui cachent un fort taux de travail partiel (de l’ordre de 25%). Conséquence : les deux pays figurent en tête des pays européens pour le taux des bas salaires, de l’ordre de 22%. 
  4. C’est l’analyse reprise et développée par le pape François dans son encyclique Laudato si’. « Nous sommes bien conscients de l’impossibilité de maintenir le taux actuel de consommation des pays les plus développés et des secteurs les plus riches des sociétés, où l’habitude de dépenser et de jeter atteint des niveaux inédits. Déjà les limites maximales d’exploitation de la planète ont été dépassées, sans que nous ayons résolu le problème de la pauvreté. (n°27)
  5. En France l’évasion fiscale annuelle est estimée à 100 milliards d’Euros. Par comparaison la TVA rapporte environ 185 milliards et l’impôt sur revenu 75 milliards.  
  6. Pape François, Laudato si’ n°191

 

Photo © Ouest-France

 

 

 

62 comments

  • Bonjour,
    La haute finance, gouverne l’économie mondiale à son profit depuis de nombreuses années. Certains politiques et hauts fonctionnaires se sont laissé corrompre et pressent leurs peuples.
    Nous sommes loin des valeurs de l’évangile !

    • Accord qui serait complet … si un grand corrompus de notre époque n’avait pas invité le gratin français, qui ne compte pas de hauts fonctionnaires et guère de politiques lambda, si on excepte le Pt Sarkozy et son épouse, leur soutien à la cause des évangiles, … pas par des prières, évidemment, juste par du matériel, de bons gros chèque (« moi, ancien légionnaire du Christ », Xavier Léger, Flammarion 2013, p 194 à 199 ). Quelques pages avant, on peut lire le rôle joué par JP II, incitateur de telles quêtes. Comme dit un proverbe chinois, le poisson pourrit par la tête!

  • « le mépris de soi par incapacité à vivre de son travail  »
    Cette phrase me semble être l’une des clefs du problème. Pour diverses raisons, nous avons fait du travail l’Alpha et l’Oméga du développement humain. Le travail qui fondamentalement nous sert à assurer notre subsistance est devenu un but en soi. Une divinité de l’ancien temps qui exige qu’on y consacre toujours plus : de fatigue, de frustration, de vie…, pour recevoir toujours moins de satisfaction : on s’aperçoit finalement que ce qui s’achète par le travail ne vaut pas l’investissement que l’on y a mis, plus on possède, moins ce que l’on peut posséder de plus n’a d’intérêt.

    C’est en tout cas ce que je comprends du mouvement des GJ : il ne s’agit pas d’émeutes de la faim, il s’agit « d’émeutes d’insatisfaction », Qui semblent dire : nous avons tout donné, ce qu’on reçoit en retour ne nous suffit pas. Je partage tout à fait votre constat : ce n’est pas 10 milliards (ni 100, ni 1000) qui régleront le problème.

    « Définir ensemble un avenir désirable »
    J’aime tout particulièrement cette formulation. C’est en quelque sorte ce que fait Jésus lorsqu’il arrive en Palestine. Bien loin de régler les problèmes politiques locaux, il donne une vision désirable du Royaume. Quelque chose qui va transcender son époque, au delà du judaïsme, au delà des nations.

    J’ai un peu de mal a accepter que le pape veuille nous : « convaincre de ralentir notre consommation », alors que seul un avenir plus désirable que la consommation la fera ralentir. Homo sapiens n’a pas arrêté de tailler des cailloux par manque de cailloux, ni parce que c’était dur, ni parce que c’était « mal », mais parce qu’il à trouvé le bronze qui était plus efficace.

    La ou je sèche en revanche, c’est sur cet « avenir désirable ». J’ai l’intuition que les évangiles peuvent nous y aider (que l’on soit croyant ou non), j’ai trouvé des choses très intéressantes chez Emmanuel Mounier (Le Personnalisme), et pourtant j’ai l’impression qu’il nous manque encore des « maillons théoriques » pour reconstruire une pensée pérenne.

      • Oui, René, bien sûr…
        Plusieurs remarques contradictoires :
        – Je vois des gens malheureux, en colère, parce qu’ils se sentent exclus d’une société qui a changé ; c’est particulièrement vrai en milieu rural ou dans les petites villes de province, laissées pour compte (la fracture territoriale dont parlait Guilluy)
        – Je vois aussi des « petits blancs » marginalisés qui n’acceptent pas la mondialisation, les immigrés, etc.
        – Je vois encore la haine et la violence se développer de façon inacceptable et irresponsable
        – Je vois des gens qui prennent en otage la population en bloquant les rond-points pour exprimer leur mécontentement
        – je vois la frustration de ceux qui voudraient « avoir » comme les autres, l’envie et la jalousie d’un côté, le mépris de ceux qui « ont » de l’autre côté, les deux renvoyant comme en miroir l’image du consumérisme, de l’avoir toujours plus et de la frustration qu’elle engendre
        – je vois l’incompréhension du gouvernement, ou du président qui font quelques gestes qui ne peuvent répondre au mal-être et qui s’étonnent de n’être pas remerciés
        – je vois les autres partis exploiter la colère et le ressentiment sans aucun sens des responsabilités
        – Je vois ce mouvement composite des gilets jaunes poursuivre cette fuite en avant qui ne mène à rien et se durcir car le plus extrémiste a toujours le dessus sur le plus responsable
        – je ne vois pas en revanche les plus malheureux, les plus pauvres, ceux qui sont au chômage, ceux qui sont sans domicile fixe, ceux qui sont demandeurs d’asile…
        – Je vois plus généralement ce peuple qui depuis deux cents ans cherche un père et qui depuis deux cents ans veut ensuite lui couper la tête
        Bref, je vois toute cela « en même temps »… et je demeure perplexe !

    • Intéressante mais ambiguë. Lorsqu’on prétend fédérer autour d(un projet, on veille à ce que la liste des premiers sgnataires soit représentative. Que s’agissant du christianisme social on ne trouve aucune signature issue des Semaines sociales de France pas plus que de la revue Projet ou des pères jésuites du Ceras laisse perplexe. Dans le meilleur des cas, cela dénote une totale improvisation, dans le pire une volonté de manipulation. Je crains que quelques signataires, sollicités, ne se soient fait piéger…

      • Oh, René, vous avez l’esprit mal tourné ! Peu importe l’étiquette, plus important est le contenu, et je ne vois pas d’inconvénient à ce que les représentants des Semaines sociales ou des jésuites du Ceras se joignent à ce texte et apportent leur contribution !
        Le catholicisme social, dès le XIXème siècle a toujours eu deux courants, un courant conservateur et un courant libéral.

      • D’accord avec vous , René ; ambiguë cette initiative . On perçoit derrière cela la tentation de la résurgence d’un parti catholique dont on sait qu’il conduit toujours à une impasse . Signe qui ne trompe pas les premiers signataires sont les représentants d’un catholicisme identitaire .

        Sur la crise des gilets jaunes , je partage votre analyse et considère que le capitalisme, s’il a des vertus , doit être fermement régulé par la fonction politique pour que les forces de destruction et de déstructuration qui sont inhérentes à sa logique ne détruisent pas notre lien social . Le drame est qu’aujourd’hui cette fonction politique contaminée par une idéologie ultra libérale se rend elle même de plus en plus incapable d’exercer cette nécessaire régulation .
        Concrètement , plus qu’à la doctrine sociale de l’Eglise qui a certes une réelle valeur éthique,, mais dont je doute de l’efficience politique , je pense que le programme du Conseil National de la Résistance garde toute sa pertinence . Je pense aussi à ce petit livre d’Edgar Morin « introduction à une politique de l’homme » qui bien qu’ancien , n’ a rien perdu de sa pertinence dans l’analyse de la situation

        • « Représentants d’un catholicisme identitaire »… le mot est lâché et les signataires disqualifiés d’emblée…

    • Je me demande comment comprendre cette phrase de l’appel « Les catholiques doivent se mobiliser pour édifier des communautés solidaires »

      => Sur le fond, je suis d’accord – c’est d’ailleurs fondamentalement le rôle des chrétiens de se mobiliser pour créer des communautés fraternelles. Et je suis tout à fait convaincu que les chrétiens sont (ou devraient être) porteurs d’une espérance qui fait gravement défaut a notre société – et aux GJ en particulier.

      Pour autant, dans le contexte, qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce qu’il s’agit physiquement de créer des communautés rurales – pourquoi pas ? Est-ce qu’il s’agit de fédérer des moyens d’actions ? De faire du lobbying (rédiger des lois pour le gouvernement, qu’il n’ait plus qu’a les voter ?).

  • « un avenir désirable »!!
    Fichtre! et que mettons-nous donc sous cette belle formule particulièrement creuse d’ailleurs?

    • Un avenir désirable est un projet collectif et fédérateur pour notre peuple, au-delà des différences des uns et des autres. Sommes-nous dans une logique libérale « la France d’abord », et après nous le déluge, quitte à déveloper par exemple nos ressources en gaz de schistes ? Ou avons-nous l’ambition de construire, avec nos partenaires européens, une économie de transition énergétique pour peu qu’il en soit encore temps ? Nous résignons nous à une société du travail rare où l’on achèterait la paix sociale en versant un revenu universel sans contrepartie ou préférons-nous une société où le droit d’accès au travail est reconnu à tous ? Voulons-nous prendre notre part dans le développement du Sud pour donner un avenir à ses populations et contenir les phénomènes migratoires ou continuer à exploiter leurs ressources, au travers de nos propres multinationales et nous armer aux frontières pour repousser par les armes ceux qui viendraient troubler notre tranquillité… Et je pourrais multiplier les illustrations de ce nécessaire débat… toujours esquivé !

      • Vu ainsi je suis évidemment preneur,mais pour autant je ne suis pas du tout convaincu que ce que vous dîtes soit vraiment le reflet de ce que désirent les GJ lesquels n’ont pas entièrement tort non plus

        • Mais je ne parle aucunement au nom des gilets jaunes. Je dis simplement ma vision de la crise qui a provoqué leur émergence et explique, à mes yeux, leur longévité. Point !

  • Oui, hélas! Car ce mouvement ne sera salutaire que s’il parvient à interpeler l’UE au delà de la France, … sinon il sera catastrophique pour la France donc pour l’UE. Car l’UE aurait seule la puissance nécessaire pour sortir de la spirale, mortelle pour la planète, du « toujours plus » * … sans négliger le frein que sont les paradis (fiscaux bancaires et judiciaires) nombreux dans la zone Europe, et au sein même de l’UE.
    On a remplacé « faut pas désespérer Billancourt » « par « faut pas désespérer la finance »!
    Il est écœurant de voir agité comme un chiffon rouge la rémunération de Ch. Jouanno, quand les meilleurs footeux émargent à 10 à 20 fois plus, quand un journaliste de talent double ou triple son revenu en faisant des ménages ce qui explique qu’il crache sur les fonctionnaires avec un air très intelligent et bien élevé. Sans parler de ceux qui, comme C. Ghosn se font pousser des ailes par leurs féaux afin de gagner le sommet du classement Forbes. Ch Jouanno sert ici de bouc émissaire à ceux qui tirent les ficelles, à la manière des céréaliers de la Beauce qui, larme à l’œil, parlent de la misère de l’agriculture de montagne.

    Trois économistes « officiels » (agence française de développement) invitent à s’approprier les inégalités: revenus et territoire, et aussi santé, éducation, genre , enfin changement climatique (Etudes, janvier 2019).
    Une phrase au moins mérite de résonner puissamment à l’esprit de ceux qui agissent : « … l’acceptabilité du cout de la transition énergétique sera d’autant plus faible que les inégalités sociales resteront exacerbées, comme en témoigne l’épisode en France des GJ » … sachant que le décile supérieur de l’humanité émet 45% des GES quand la moitié inférieure en émet 14%.

    * Ce tjs plus est multiforme, par exemple:
    – Réduire les mailles d’un filet règlementaire (quel que soit son objet), est naturel. Or multiplier le nombre de mailles, c’est multiplier d’autant le cout des contrôles et les « opportunités » de fraude.
    – Aller chercher dans la terre (voire dans l’espace) des matériaux indispensables, présent dans une proportion toujours plus petite (il y eut l’âge de pierre, puis on vit à l’oeil nu les premiers métaux à la surface, puis on creusa, … charbon, pétrole, …) … on en est à chercher des substance présentes au millionième et donc à bouleverser 1 millions de tonnes pour en « raffiner » une tonne, … les gros dégâts écologiques sont en cours, …. mis pas chez nous, chez nous c’est propre.

  • A l’automne 2017, une officine du pouvoir présentait la France inégalitaire (avec grand angle sur l’UE et le reste du monde) ainsi *. Ce doc gommait comme d’hab -c’est plus correct- les écarts considérables au sein du dernier décile et plus encore du dernier centile au dernier dix millime (6500 ménages). Il a mis en lumière les écart forts au sein des zones urbaines sans insister sur le caractère dominant « pauvre et égalitaire » des territoires ruraux (page 11, en vert clair et rose).
    Un travail de l’économiste Camille Landais compare présente l’évolution de la société française comparée à l’anglo-saxonne (partie 4, p 23 et 24) **. Il montre des inégalités de revenus -déjà considérables auparavant, fortement accrues entre 1998 et 2005, … le revenu des 90% de foyers les moins riches augmentait de 4.6% quand celui des 0.01 % les plus riches (6500 du dix millime) s’envolait + 42,6 %.
    Sous l’angle sociologique, le couple de chercheur Pinçon-Charlot, a pendant 40 ans observé de l’intérieur la micro-société du gotha. Le parti pris égalitaire de leurs travaux n’enlève rien à l’acuité du regard sur la dérive qui a conduit au ghetto international d’aujourd’hui.
    Vers 1975 la machine infernale a été mise en route dans le monde anglo-saxon (au temps de Reagan, Thatcher, JPII, …) et en France à partir de 1985 avec les sagas (B. Tapie, J8M ***, M. Bouygues,Crédit Lyonnais, …) avec Maciel faisant la manche à Paris

    Le mouvement de fond que décrivent ces quelques travaux, parmi tant d’autres, s’est produit en pays de culture dite chrétienne! Ce fruit de tant de discours main sur le cœur, discours dont fait partie l’inaudible doctrine sociale d’une Église qui a renié VII, n’est-il pas monstrueux?! L’élite hypocrite de notre culture a ainsi mis KO la mixité sociale dans les zones urbaines et péri-urbaines (80% de la population), a transformé les campagnes et petites villes en réserve d’indiens. Heureusement, cette société demeure saine (chrétienne au fond) et crie ses peines. Et ce sont de « bons chrétiens », issus des écoles de pensées qui ont accompagné ce sinistre mouvement -au moins en laissant faire- qui signent l’appel publié par la Vie! C’est aussi répugnant que les tentatives de récupérations de partis politiques qui poussent les plus radicaux GJ et les infiltrent … en sous main.

    * http://www.observatoire-des-territoires.gouv.fr/observatoire-des-territoires/sites/default/files/Fiche-OT-les%20inegalites%20de%20revenus_0.pdf
    ** http://hussonet.free.fr/htrev.pdf
    *** J M Messier, Moi-Même, Maître du Monde, Merci Maman … Il a cassé les équipes dirigeantes de nos grandes entreprises ensemblières dans le domaines des services publics, remplaçant des personnes honnêtes et compétentes, par des caïmans inexpérimentées sortis de grandes écoles de commerce et des équipes d’avocats (comme M. Bouygues).

    • >ue les évolutions que vous décrivez se soient produites « en pays de culture dite chrétienne » ne vous autorise pas à en conclure que l »Eglise catholique porterait une responsabilité directe dans ces dérives. Il suffit de lire les textes pontificaux de ces dernières décennies qui ont enrichi la doctrine sociale de l’Eglise, jusqu’au plus récent : l’encyclique Laudato si’ du pape François, pour voir la continuité dans la critique ur ne pas dire la condamnation du système libéral. Ce ne sont pas les évêques, ni le pape, qui dirigent la finance internationale et l’économie mondiale, et seraizent-ils tentés de le faire qu’on le leur reprocherait fort légitimement. Il y a suffisamment de reproches fondés que l’on peut faire à l’Eglise pour se dispenser d’en rajouter, pour le simple plaisir !

    • C’est vous, Jean-Pierre Gosset, qui êtes inaudible avec vos jugements sommaires et controuvés, surtout quand vous attribuez la paternité des méfaits de l’ultralibéralisme sur notre société à ceux qui ont le plus combattu les dérives que vous dénoncez.

      • Et vous, Michel, êtes de cette Église que tant ont fui, celle d’un Dieu tout puissant que St Michel protège des méchants, celle dont les clercs exigent obéissance, sinon, le réponse usuelle cingle  » je vais prier pour vous », celle qui abuse du secret et d’une autorité en lambeau, celle que ses erreurs refoulées ont obligé tant de chrétiens à quitter.
        J’avais pensé partager avec vous et les autres, sur le sujet GJ, le point de vue d’un chrétien qui ne se la joue pas, qui agit en chrétien sans se proclamer tel,… http://mouvementdemocrate.fr/article/interview-de-francois-bayrou-dans-la-republique-des-pyrenees

        • Votre sortie caricaturale sur l’Église qui serait la mienne en dit plus sur vous et vos aigreurs que sur moi…

          Merci pour le lien vers l’interview de François Bayrou avec laquelle je me sens en consonance.
          Je n’y vois pas de contradiction avec ce que j’exprimais plus haut sur mes motifs de perplexité devant le mouvement des gilets jaunes.

  • Pourquoi l’appel pour un nouveau catholicisme social est ambiguë et de mon point de vue stérile .

    La doctrine sociale de l’Eglise, n’a pas et n’a pas à avoir de portée politique opérationnelle pour la simple raison qu’elle relève de l’ordre du souhaitable , alors que la fonction politique a pour objet de rendre le souhaitable possible . Il s’agit de deux champ différents . Exemple : Le rôle de l’église est de rappeler que l’accueil des migrants est un impératif catégorique éthique . Le rôle du politique est de déterminer les conditions concrètes dans lesquelles cet impératif peut être mis en oeuvre sans générer de réactions de rejets menaçant l’unité d’une société et la paix sociale . La phrase de P Ricoeur : « l’église doit être l’éthique vivante du politique » n’a rien perdu de sa pertinence et de son actualité .

    Prétendre incarner politiquement la doctrine sociale de l’Eglise , c’est oublier ( mais est ce vraiment un oubli ?) que la bonne décision politique , en démocratie procède nécessairement d’une confrontation institutionnalisée entre ceux qui partagent le même objectif en ce qui concerne le « souhaitable  » mais diffèrent sur ses modalités d’application . La doctrine sociale de l’Eglise ne peut donc , si on souhaite véritablement la voir mise en oeuvre être portée exclusivement par un seul parti . Voilà pourquoi, cher Michel de Guibert ,je regarde avec circonspection cette initiative sur laquelle se précipitent les catholiques « identitaires » qui en sont resté à la notion de parti chrétien (pour les plus démocrates) voire de chrétienté (pour les autres) qui reste un fantasme irréaliste comme l’a démontré en son temps Jean Delumeau .

    Enfin comme me l’avait fort justement rappelé lors d’une conversation informelle , un ancien ministre socialiste qui n’a jamais renié son christianisme d’origine: si nos idées sont incarnées par un seul parti , toute alternance , saine par définition en démocratie , renverra alors aux extrêmes , « .Ce qui n’est pas responsable et dont nous percevons les dangers du fait du positionnement politique sur lequel président de la république actuel s’est fait élire .

    • Cher Guy Legrand, j’ai relu l’appel en question et je n’y vois nulle part une invitation à créer un « parti chrétien », encore moins à revenir à une « chrétienté » fantasmée…
      Il me semble que vous projetez vos propres fantasmes sur les personnes à l’origine de cet appel !
      Bien sûr la politique est l’art du possible, je suis d’accord avec vous sur ce point, mais en quoi cela serait-il contradictoire avec le souci du bien commun ?

      • à Michel de Guibert
        1) Dans une démocratie , pour faire entendre sa voix , il faut être légitime . Pour être reconnu comme légitime , il faut s’organiser , se structurer , et donner à cette structuration une forme qui permettra de prouver que l’on est suffisamment représentatif pour se faire reconnaitre comme interlocuteur institutionnel . Peu importe que les gilets jaunes se structurent ou simple mouvement d’opinion ,ou en parti politique , ils devront en toutes hypothèses s’institutionnaliser quelqu’en soit la forme . C’est pourquoi je trouve inquiétant de voir que les courants obscurantistes catholiques sont prêt à s’emparer du pouvoir dans ces futures entités institutionnalisées .

        2) Le souci du bien commun n’est en rien contradictoire avec l’art du possible . Le bien commun doit se concrétiser et il ne suffit pas de l’incanter pour qu’il prenne forme . C’est bien là toute la fonction du politique . Ce n’est pas faire injure aux idées de Tugdual Derville , bien au contraire , que de dire qu’elles ne correspondent pas à la conception du bien commun d’une république laîque quand il travaille à la promotion et à la prééminence d’une forme de morale catholique dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle ne doit pas grand chose aux conseils évangéliques .

        • « Pour être reconnu comme légitime , il faut s’organiser , se structurer »
          => Juste une remarque en passant : cela n’est vrai que dans le cadre de la démocratie représentative par élections.
          On peut imaginer d’autres formes de démocraties, par exemple par suffrage direct – c’est partiellement l’idée du RIC – qui permettent de donner le pouvoir au peuple et évitent l’écueil inhérent aux formations politiques.

          Il y a aussi la démocratie par tirage au sort expérimentée notamment en Islande avec des résultats intéressants (https://fr.wikipedia.org/wiki/Tirage_au_sort_en_politique). A titre personnel cela me plairait bien d’avoir au moins un genre d’assemblée consultative composée de personnes tirées au sort : on y trouverait un reflet de la population Française bien plus fidèle et légitime que notre assemblée actuelle.

          • à Emmanuel,
            – D’accord avec vous . la démocratie représentative n’est pas la seule forme possible de démocratie .
            – la démocratie représentative permet la stabilité mais n’est pas toujours très réactive pour prendre en compte les évolutions sociétales .
            – Peut être faut il envisager d’instiller et de faire cohabiter d’autres formes (citoyens tirés au sort) de démocratie dans la composition de nos assemblées délibérantes .
            – mais il ne faut pas sous estimer , vu nos traditions et notre culture politique, les risques d’inégalités de légitimité entre représentants élus et citoyens tirés aux sort, ainsi que la difficulté à fixer la juste pondération entre ces différentes formes de légitimité .

            Mais ces difficultés ne constituent pas une excuse valables pour refuser d’ envisager ces questions .

          • « la démocratie représentative permet la stabilité »
            => Je pense que c’est le cœur de notre problème actuel. L’instabilité que nous connaissons prend ses racines de l’incapacité du jeu démocratique à élire des personnes représentatives du peuple.
            Typiquement, 3 des 4 dernières élections présidentielles se sont jouées sur des coups de poker (Chirac en 2002, Hollande en 2012, Macron en 2017). Les élections se font par défaut uniquement, le peuple n’est plus représenté.

            « les risques d’inégalités de légitimité entre représentants élus et citoyens tirés aux sort, ainsi que la difficulté à fixer la juste pondération entre ces différentes formes de légitimité »
            Oui, il faudrait probablement trouver une articulation. Peut-être que les tirés au sort pourraient remplacer le sénat, avec la même logique de régulation (dans l’Eglise, c’est la tradition qui joue ce rôle – lorsqu’elle fonctionne).
            L’énorme avantage du tirage au sort est de replacer les personnes au cœur de la démocratie.

        • à Guy Legrand
          Votre sectarisme vous aveugle.
          Être assimilé ainsi par vous aux « courants obscurantistes catholiques » est une dégustation de fin gourmet !

  • « qui sème la misère récolte la colère »affirme la banderole que vous avez choisie pour illustrer votre propos. Le problème , pour moi c’est que les « gilets jaunes » que l’on voit à côté de cette banderole ne paraisse pas du tout faire partie des miséreux ni bien sûrd es plus riches,c’est certain , mais cette banderole me parait absolument indécente lorsqu’on pense au nombre invraisemblable de personnes que l’on voit couchées la nuit sur les trottoirs dans les rues de Paris notamment et je ne crois décidément pas qu’ils s’intéressent aux « gilets jaunes et à leur action si brouillonne et dans certains cas si partisanes notamment à l’égard des journalistes.
    Les « gilets jaunes » ont incontestablement des raisons de protester mais pour proposer quoi concrêtement alors que personne n’a le droit de parler en leur nom au risque de lourdes représailles.Ce mouvement risque à mon avis d’être repris sous la coupe de professionnels de la provocation et finissent par mettre le pays à feu et à sang

    • Et lorsque des députés montent à la tribune de l’Assemblée pour défendre des mesures en faveur des classes populaires, ont-ils eux-même le loook de la France qui souffre ? Allons, ce n’est pas un argument !

      • excusez-moi, mais je vous retourne le compliment car enfin je ne savais pas que le but des « gilets jaunes » était évidemment de se préoccuper des plus pauvres qu’eux et non pas de leur propre sort. Par ailleurs je m’étonne que vous ne trouviez pas cette banderole indécente

        • Excusez-moi également mais si je l’avais trouvée indécente je ne l’aurais pas choisie. Et si vous m’avez lu elle illustre parfaitement mon propos : à savoir qu’à mes yeux ce mouvement est d’autant mieux soutenu par l’opinion qu’il exprime un malaise qui n’est pas uniquement celui des gilets jaunes, mais plus profondément d’une France qui souffre, donc d’une France en colère parce qu’elle a le sentiment d’être victime d’un système qui, de fait, crée de la misère. Libre à vous de ne pas partager cette analyse.

          • Si ce système crée la misère,ce qui me parait un peu excessif tout de même, par quoi allons-nous le remplacer concrètement?
            C’est en cela que je trouve particulièrement brouillonne l’action des « gilets jaunes »

          • Je m’interroge tout de même sur la nature de la « misère » en question.
            – est-ce celle du corps, la pauvreté extrême : les souffrance de la faim, l’impossibilité de se soigner et finir par en mourir ?
            – est-ce celle de l’âme, une misère « sociale » : la solitude, plus globalement le sentiment d’être rejeté, de n’être plus considéré comme une personne ?
            – est-ce celle de l’esprit, une « misère d’espérance » : on ne va pas si mal aujourd’hui, mais on a le sentiment que « demain, ce sera pire », alors on a peur pour ses enfants ?
            – est-ce tout à la fois, « la misère de l’homme sans Dieu », l’humanité ayant perdu successivement le Dieu des religions, celui des philosophes, celui des scientifiques, et découvrant aujourd’hui qu’il va lui falloir abandonner celui des financiers ?

            Ma crainte étant qu’en identifiant mal la misère dont il s’agit, on applique des remèdes pires que le mal actuel.

          • Je ne peux pas parler à la place de ceux qui ont rédigé la pancarte. Mais lorsque j’analyse la souffrance que je perçois dans notre peuple et qui s’exprime au travers des gilets jaunes, même s’ils n’en ont pas le monopole, j’aurais tendance à penser que la misère dont il est question est tout à la fois physiques, sociale et spirituelle.

          • Est-ce à dire que nous nous trouvons face à un monde à massivement ré-inventer ?

            Ce que j’essaye de comprendre, c’est si nous nous trouvons face à une crise – ponctuelle par définition – qu’il « suffira » de temporiser (=grosso modo ce que l’on fait aujourd’hui), ou face à un effondrement contre lequel la stratégie de l’attente sera désastreuse.

            A l’inverse, si nous sommes face à un effondrement – c’est à envisager – dans quelle direction regarder pour trouver des solutions ? (le documentaire « Demain » était intéressant sur le sujet).

            Et bien sur en filigrane la question : qu’est-ce que les chrétiens peuvent apporter dans tout ça ? Non pas dans une utopie identitaire, mais pour y apporter notre « grain de sel » ?

          • Difficile de répondre à ce type de question. C’est vrai que l’hypothèse d’un possible « effondrement » agite aujourd’hui les esprits et nourrit le débat. Il me semble que la meilleure préparation à un avenir qui, de toute manière, nous échappe, est une attention aux personnes, une réappropriation de tout ce qui dépend de nous contre la logique qui consiste à confisquer l’initiative individuelle au nom d’une plus grande efficacité. Et je pense que le meilleur service/témoignage que les chrétiens puissent apporter est de ne pas renoncer à l’espérance et en leur foi en l’homme. Mais je suis bien conscient que disant cela, je ne dis rien !

          • >est une attention aux personnes
            => Je souscrit absolument, Mounier m’a converti, même si je cherche pourquoi cette idée n’a pas porté les fruits qu’elle aurait du depuis qu’elle à été émise

            >une réappropriation de tout ce qui dépend de nous contre la logique qui consiste à confisquer l’initiative individuelle au nom d’une plus grande efficacité
            => principe de subsidiarité, je souscrit tout autant

            >ne pas renoncer à l’espérance et en leur foi en l’homme. Mais je suis bien conscient que disant cela, je ne dis rien !
            => Certes, il n’y a la rien d’efficace, d’immédiatement utilisable. Pour autant j’aimerais bien entendre rappeler l’espérance et la foi en l’homme dans la bouche de mes frères chrétiens – comme de mon curé (et d’autres).
            Le défi qui s’annonce mérite probablement que l’Eglise quitte sa « posture d’opposition » actuelle, qu’elle cesse de reprocher au monde ce qu’il est, et tente d’y jouer son rôle.
            A ce titre d’ailleurs, le silence des évêques sur les gilets jaunes est assez incroyable.

  • selon une enquête faite par l’insee en 2017 une majorité de Français donne un peu plus de 7 sur 10 à la qualité de leur vie et seule une très petite minorité lui attribue une note inférieure à 4. Certes, tout n’est pas pour le mieux dans le meilleur des mondes,certainement pas,loin de là. Pour autant cela pousse à relativiser l’importance du mouvement des Gilets Jaunes lesquels ontt bien sûr de bonnes raisons lorsqu’ils déplorent notamment la disparition des services publiques dans bien des localités du monde rural

    • Sauf que dans le même temps, chacun entend que ce mode de vie qui peut momentanément donner satisfaction, est condamné par le fait qu’il repose sur un mode de développement incompatible avec la préservation des ressources de la planète, et dont la généralisation entrainerait l’accélération de son saccage. Je pense, pour ma part, que cette claire vision, nourrie notamment par les effets actuels du dérèglement climatique, constitue le paysage de fond des manifestations actuelles des gilets jaunes. Comment leur sort pourrait-il, éventuellement, se trouver amélioré demain par le libre jeu d’un système économique qui a généré les maux collectifs dont nous souffrons ?

      • « chacun entend que ce mode de vie qui peut momentanément donner satisfaction est condamné par le fait… »
        Pour ma part je ne suis pas du tout convaincu que chacun entende vraiment ce discours malgré son exactitude.
        Par ailleurs il me semble que nous sommes bien obligés de reconnaître que ce système n’a pas généré que les maux collectifs dont nous souffrons.
        On ne meurt plus autant qu’il y a 50 ans sur les trottoirs e Calcutta. Maigre consolation? Absolument cela ne fait aucun doute mais je ne crois pas du tout que la grande majorité des »gilets jaunes »se préoccupent beaucoup de ce genre de problème

        • Que ce système, comme vous dites, n’ait pas généré que des maux – ce qui me semble indiscutable – ne règle rien à nos problèmes du moment puisque les promesses qu’il a fait naître d’une amélioration des conditions de vie pour tous à travers la planète est aujourd’hui sans objet. Notre « mieux vivre » s’est fait au détriment de la planète et d’autres peuples exploités… ce qui rend désormais le modèle non généralisable. Je pense, comme le souligne Guy Legrand, que l’un des ressorts de la mobilisation des gilets jaunes vient de cette conscience désespérée.

          • J’aimerais bien être convaincu que l’un des ressorts de la contestation des « gilets Jaunes » soit la prise de conscience par eux que nous allons dans le mûr, j’aimertais bien…

  • Pour entrer en débat, il est nécessaire d’être au moins deux. L’efficacité de l’échange implique au moins que chacun pénètre bien l’idée de l’autre, ne serait-ce que pour « être sur la même longueur d’onde », de sorte qu’il ne s’agisse pas de la juxtaposition de deux monologues…Ceci étant posé, je voudrais apporter ma pierre à votre réponse :
    Le livre d’Emmanuel Mounier trônait en bonne place sur la table de chevet du pape Jean XXIII. Le père Maurice Zundel lui fait référence à plusieurs reprises. Etty Hillesum en a certainement entendu parler..etc.. Le seul problème est que cette philosophie n’est pas du goût de tout le monde.
    Il ne faut pas en vouloir à nos évêques pour leur violent silence, ils ont, me semble-t-il été bâillonnés par une sordide histoire de pédophilie…
    Quant à cette histoire de « gilets jaunes », manifestement initialement spontanée, révolte de ceux qui voudraient bien faire ce qui leur est demandé, mais qui s’insurgent, qu’en même temps ils soient privés des moyens de le faire, cette histoire, disais-je, me laisse vraiment perplexe. La récupération est tentante, mais se heurte à l’exaspération de ceux qui ne font plus confiance aux « sachant » qui leur (nous) racontent des salades sous forme de poncifs depuis plus de 40 ans. Leur imagination de « sachant » est tellement tarie, le silence de l’intelligentzia est tellement assourdissant, le tout sur un fond de désert culturel, que le champ est totalement laissé à l’improvisation.
    « …Si le Christianisme peut être l’Evangile, quand il est bien compris, s’il est la bonne nouvelle, c’est dans la mesure où il nous ramène toujours à ce don parfait, à cette vérité qui est la candeur d’une vie sans adhérence à soi, où il est éternellement communiqué. Enfin le christianisme est lui-même dans la mesure où avec saint François d’Assise, il voit en Dieu la pauvreté absolue, la dépossession radicale, l’impossibilité de s’attacher à soi et le Don infiniment, parfaitement et éternellement accompli. Le christianisme nous confirme dans ce sentiment très net que la connaissance est une naissance, et que la vérité se trouve dans ce monde personnel dont Mounier nous a rappelé toute l’importance, dans ce monde où il s’agit toujours d’une histoire à deux, et où il est impossible de rien atteindre à moins de se donner.
    Des époux deviennent nécessairement étrangers l’un à l’autre lorsqu’ils cessent de progresser, lorsqu’ils ne sont pas ou ne sont plus l’un pour l’autre, une exigence de grandeur, lorsque leur amour ne veut pas passionnément la grandeur de l’autre. La vérité donc ne peut pas tenir dans une formule. La vérité est Quelqu’un. Les formules certes peuvent la médiatiser et la communiquer dans la mesure où la parole peut exprimer une personne. Mais vous savez bien que pour exprimer une personne, il faut que la parole devienne elle-même une Personne. … » (in « « Dignité de l’homme». Conférence donnée à l’Hôtel Royal de Lausanne le 1er mars 1965, Maurice Zundel)
    La pauvreté n’est pas forcement celle du portefeuille !

  • Une des causes du mal être dans nos sociétés , dont le mouvement des gilets jaunes constitue une des manifestations parmi tant d’autres , réside aussi peut être dans le paradoxe suivant :
    Nous prenons laborieusement conscience que nous vivons dans un monde dont les ressources et tous les éléments qui conditionnent notre vie sont limités alors que tout notre modèle de développement , c’est la logique même du capitalisme, repose sur l’hypothèse d’une extension à l’infini destructrice de ces ressources .
    Bien sûr ceux qui sont les « perdants » du système capitaliste perçoivent alors plus fortement et plus immédiatement que leur sort non seulement ne pourra s’améliorer , mais au contraire se dégradera plus encore et de plus en plus vite . Ce qui engendre une désespérance faute d’issue visible pour résoudre cette contradiction .

    La perception de cette urgence à réduire la contradiction entre notre modèle économique et sociétal et le fait que nous sommes tous sur le même vaisseau « terre » aux ressources limitées et aux conditions de survie fragiles , n’est pas partagée et , a du mal à trouver une expression politique dans le cadre institutionnel traditionnel .

    A cela s’ajoute la remise en cause des légitimités jusqu’ici admises . Ainsi la légitimité du savoir n’est plus communément admise et la parole de l’expert n’est plus perçue comme objective , mais comme une opinion comme une autre , réfutable par une autre opinion . La légitimité de la démocratie représentative est malmenée etc … Une prise de conscience trop lente et les outils pour réagir qui se dérobent : il y a de quoi désespérer .

    Je partage le contenu de ce billet de René : il s’agit d’une mutation profonde de nos perceptions de la réalité qu’aucun pansement financier, traitement symptomatique de court terme ne saura apaiser .
    Entre les prophètes de malheur qui théorisent un effondrement rapide et soudain de nos sociétés et ceux qui croient encore avoir intérêt à nier l’inadaptation croissante d’un modèle économique et sociétal de plus en plus inhumain, le temps du politique , c’est à dire de la capacité à formaliser et à faire accepter un projet de vie ensemble est sans doute venu .

    Fondé sur quelles valeurs ? Ces sur ce champ là d’abord qu’il me semble que les chrétiens ont leur mot à dire . Comment ? Je n’en sais rien , mais rien n’empêche de commencer dès aujourd ‘hui à des échelles très locales .

    • Là, cher Guy Legrand, je suis pleinement d’accord avec vous et je « déguste », et il me semble, si je puis me permettre sans vous offenser, que vous n’êtes pas très éloignés des « obscurantistes » signataires de l’appel qui font ce même diagnostic.

      • à Michel de Guibert ,
        Il me semble que le clivage entre catholiques réside moins dans le diagnostic que dans le traitement à administrer .
        Face à ces défis nouveaux , les vieilles recettes ne fonctionnent plus . Or nous avons tous la tentation, face à l’angoisse et l’incertitude de nous replier en terrain connu alors qu’il faut aller de l’avant pour affronter ces nouveaux défis .
        Ce que je nomme » obscurantisme  » c’est une attitude dans le combat spirituel ; c’est la tentation de Jonas de retourner vers le sein matriciel plutôt que d’affronter nos Ninives symboliques . Il ne suffit pas d’invoquer la doctrine sociale de l’Eglise comme LA solution . Le véritable enjeu est de savoir ce que nous faisons de cette doctrine sociale et comment nous l’apportons ou pas comme contribution nécessaire dans un projet commun à inventer pour mieux répondre à ces défis environnementaux , sociaux et économiques .

        Face à cette mutation dans notre manière de percevoir la vie sur terre et ses conséquences sur les modalités de notre contrat social , il me semble que les clivages traversent les courants religieux ou philosophiques et même quelque fois nos propres personnes dans le combat spirituel propre à chacun d’entre nous .
        Ce clivage réside dans le choix entre la régression, repli sur des positions fixées à l’avance ( la doctrine sociale ou autre) ou la construction ensemble de solutions nouvelles fondées sur des valeurs partagées par le plus grands nombre .
        C’est mutatis mutandis la même problématique que celle du CNR (cité dans mon post précédent ) dont le programme et les valeurs face à l’effondrement de la nation furent partagées « par ceux qui croyaient au ciel comme par ceux qui n’y croyaient pas  » .

        J’appelle obscurantiste celui qui ne veut pas voir que nous pouvons et devons faire valoir , notre conception de l’homme issue de notre foi chrétienne non de manière autonome et séparée , non comme la solution miracle ,mais , comme apport substanciel dans la construction commune avec tous les autres courants de pensée d’une société fondée sur un développement humain et solidaire respectueux des écosystèmes qui garantissent notre survie . ( ce qu’Edgar Morin appelle « une politique de l’homme »)
        Voilà pourquoi cet appel pour un nouveau catholicisme social est ambigüe: il ne prend pas en compte que le clivage entre la tentation du repli sur soi et l’ouverture à une adaptation de nos manière de vivre aux nouveaux défis , traverse aussi l’église catholique et parfois chaque catholique .

        • En gros il me semble que si ce fameux appel avait été établi par les mêmes personnes s’abstenant de faire référence ouvertement à la doctrine sociale de l’Eglise , mais n’en pensant pas moins pour autant tu trouverais bien des qualités à cet appel.

          • Désolé de constater Dominique, que tu n’as rien compris . Ton approche reste binaire , exclusive et donc excluante . Tu confonds assumer son identité et adopter une attitude identitaire .
            Je plaide pour que nous , les chrétiens apportions nos convictions relatives à la doctrine sociale de l’Eglise dans un débat ouvert et constructif et cherchions à trouver des synergies avec d’autres courants de pensées qui se réclament des mêmes valeurs : le respect de la création , le respect de l’homme et de ses droits imprescriptibles et la confrontation institutionnalisée au service d’un projet commun dans un cadre démocratique .
            Il ne s’agit pas de ne pas assumer ouvertement son identité chrétienne , mais en l’assumant de la mettre au service de l’intérêt général , dont nul en démocratie ne peut prétendre avoir le monopole à priori .
            Je ne suis pas sûr , sous réserve d’inventaire , que les signataires de cet appel se situent tous dans cette logique là .

          • … ou alors le même appel mais signé par des personnes réputées « dignes de confiance » (Semaines Sociales, Jésuites du CERAS) !

            Cela dit, je me retrouve dans le dernier message de Guy Legrand à condition de ne pas voir la tentation du repli sur soi uniquement chez les autres et l’esprit d’ouverture uniquement chez soi….

          • Je précise pour éviter toute ambiguïté que quand je disais que je me retrouvais dans le dernier message de Guy Legrand à condition de ne pas voir la tentation du repli sur soi uniquement chez les autres et l’esprit d’ouverture uniquement chez soi, je ne parlais pas de celui qui s’est intercalé, mais de celui de Guy Legrand 17 janvier 2019 at 16 h 05 min

  • Dans la clinique où je travaillais, j’ai croisé un matin une aide-soignante très dépressive : Elle avait mis tout son cœur pour apporter une aide efficace à une patiente très fragile…Grâce à cette attention de tous les instants, la malade passa un cap délicat. Nombre d’entre nous ont témoigné leur reconnaissance à cette personne méritante, sauf le chirurgien, qui devant la famille médusée, s’attribua tout le mérite de cette réussite. « Je suis méprisée, je ne suis pas reconnue dans mon travail… ». Si vous voulez bien comparer cette histoire malheureuse avec les mots déversés sur les rondpoints, vous y verrez une similitude de situation qui ferra évidement capoter le «…faire accepter un projet de vie ensemble… ». Fondé sur quelles valeurs ?? Sur l’Homme, bien sûr, sur l’Homme Incarné par l’Esprit, sur l’Homme qui siège au cœur de la Fécondité Divine, sur l’Homme dont le « Corps et lui-seul est capable de rendre visible ce qui est invisible, le Spirituel et le Divin, et qui est caché depuis toujours dans le cœur de Dieu » (JPII, TDC 019, Février 1980). Malheureusement, je ne pense pas que le christianisme actuel, qui trahit le Christ depuis 20 siècles, soit le mieux placé pour en débattre, empêtré qu’il est dans un déni de la Parole Divine, sur un fond de lutte de pouvoir.

  • je viens de lire sur le site de La République des Pyrénées les 64 (forcément car dans le 92 ils devront en trouver92 et je ne parle pas des habitants des départements d’outre-mer bien sûr…)revendications établies par les Gilets Jaunes du Grand Pau traduisant parfaitement leur hauteur de vue, e leur préoccupation d’ordre spirituel et leur profond désir au niveau mondial de créer un monde plus juste… Qui oserait en douter?,,,

    • A Guy ,ainsi, à tes yeux je serais « binaire »? Fort bien mais alors comment appelles-tu donc quelqu’un qui à longueur d’années ne cesse de condamner tout ceux qui ont l’audace (ou la stupidité) d’être d’un avis différent du tien. Et puis dois-je te souligner le fait que dans les ignataires de cet appel se trouvent Tugdual Derville dont je n’en doute pas une seconde,tu es un fervent partisan et le Président des Poissons Roses
      C’est donc bien un ramassis de « chrétiens identitaires »Pouah!quelle horreur!

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