« Chroniques du temps de peste » : nos évêques pourront-ils assumer pareil questionnement ?
Il est des livres qui valent essentiellement pour leur contenu. D’autres que l’on se surprend à goûter aussi pour ce qu’ils laissent paraître d’un processus d’élaboration qui en modifie la portée et le sens. C’est le cas de ces « Chroniques du temps de peste » du moine bénédictin François Cassingena-Trévedy. (1) Il s’agit là de la reprise des articles publiés sur le réseau social qu’il traduit fort justement « Le livre des visages » (Facebook) durant le premier confinement, au printemps 2020, puis vers la fin de la même année. J’avais été de ses lecteurs. Je redécouvre aujourd’hui comment, de semaine en semaine, un public aussi nombreux qu’insoupçonné, entré spontanément en dialogue avec lui, l’a convaincu d’aller bien au-delà de son projet initial d’écriture puis de rassembler ses chroniques en un volume. Au moment de refermer le recueil de ses textes, me revient en mémoire cette phrase de Christian Bobin : « Un livre, un vrai livre, ce n’est pas quelqu’un qui nous parle, c’est quelqu’un qui nous entend, qui sait nous entendre. » (2) L’audience soudaine de François Cassingéna-Trévedy trouve là son explication.
« Etre à l’heure exacte de l’Histoire est peut-être le plus grand exercice de piété. » FCT
« C’est une chose incroyable comme ces temps que nous vivons peuvent nous faire grandir en gravité. » Les chroniques démarrent en mars 2020, sur le ton de la confidence faite à quelques amis, comme des milliers de nos compatriotes l’ont expérimenté sur la même période. Le moine bénédictin de l’abbaye de Ligugé où il réside alors, nous fait partager sa conviction que ce temps de confinement, propice à l’approfondissement de la vie spirituelle, « peut être la chance d’une conversation plus profonde et plus vitale entre nous (c’est si rare, au fond), sur l’essentiel qui nous travaille, qui nous inquiète, qui nous habite, qui nous unit. » Au fil des lettres, on le voit prendre la défense des autorités publiques accusées de « complot » contre le culte catholique; plaider que la « liturgie virtuelle (qui explose sur les réseaux sociaux) n’est pas tenable »; dénoncer dans les manifestations exigeant un rapide retour au culte des « esclandres d’enfants gâtés, de gamins capricieux. » Des propos certes segmentant mais qui, venant d’un moine bénédictin, attirent l’attention puis séduisent et fidélisent. A son grand étonnement. Dans ses lettres, lui-même prend acte de l’émergence d’une vraie communauté, d’une « paroisse d’un genre nouveau » qui l’oblige désormais.
A la veille du déconfinement, il exprime sans doute le ressenti de nombre de ses lecteurs en écrivant : « Nous n’avons plus envie d’avant. Nous avons envie d’autre chose ». Et l’on devine que cette réflexion ne porte pas uniquement sur les enjeux d’une planète confrontée au défi écologique, dont la pandémie n’est jamais qu’un avatar, mais aussi sur « le paysage religieux contemporain » notamment catholique. Des échanges nourris, suscités par ses premières lettres, il tire l’observation que « quelque chose s’est dénoué, détendu, dilaté, en nous et entre nous. » Dont il conclut l’existence d’un Kairos à saisir, où dire des choses qu’il porte en lui, profondément, dont il pressent une secrète attente de la part ses lecteurs. Ce seront les trois textes qui suivront, exceptionnellement riches de saveurs nourricières, trois pépites qui, lors de leur publication initiale, ont pu dérouter de par leur longueur, peu habituelle sur les réseaux sociaux, et qui trouvent dans le livre l’espace nécessaire à leur respiration (et à la nôtre) comme à leur déploiement.
Epitres aux Facebookiens
Trois « épitres aux Facebookiens » dont il ne saurait être ici question de faire l’exégèse ou de citer abondamment, ce qu’elles mériteraient pourtant. Disons simplement qu’elles portent sur l’appréhension de la sexualité dans l’univers de la pensée catholique; sur la nécessaire émancipation eucharistique au regard de son carcan sacré; sur l’urgence à revisiter le dogme et la doctrine catholiques pour mieux nourrir une « foi modeste » adaptée aux exigences du temps présent. Quelques mots cependant à propos de chacune d’elles :
De angélisme à l’honnêteté en matière de sexualité.
Sur la sexualité, nous dit-il, c’est l’incohérence qui domine, de par l’incapacité de l’institution à passer de l’angélisme à l’honnêteté. Car enfin, la sexualité incarne en chacun de nous le dynamisme même de la vie et « on ne sublime pas la sexualité ». Il nous faut donc « descendre au plus profond », « descendre vers ce centre de gravité qu’est notre chair, sur notre tout-bas. » Et l’on trouve là des pages vibrantes, bouleversantes, qui invitent à « promener dans l’obscur la lampe d’une parole partagée. » Sauf, nous prévient l’auteur, qu’en monde catholique cette démarche se heurte à un triple écueil : l’incompatibilité définitive du concept de péché originel, dans son acception traditionnelle, avec l’acquis des sciences humaines; l’idolâtrie de la mariologie qui nourrit un discours obsessionnel sur la virginité réduite à une idéologie matérialiste; enfin, la « dangereuse fascination du prêtre séparé, supérieur, environné en imbu d’une sacralité qui l’ignifuge » en totale contradiction avec les textes du Nouveau Testament.
De la messe qui divise à l’Eucharistie signe d’unité
« La messe, nous confie encore l’auteur, n’est pas une machine rituelle garantie pour fabriquer de la Présence Réelle ». Autant dire que dans son esprit, la messe “exigée“ à hauts cris sur cette période de confinement par quelques lobbies cathos pouvait se trouver fort éloignée de la véritable Eucharistie qui échappe à tout utilitarisme. Bien qu’il existe, de fait, un « consumérisme sacramentel », notamment urbain, entretenu par un clergé qui impose et défend là son monopole de sacrificateur. Or « ce n’est pas le prêtre, encore moins le prêtre seul, qui “fait“ l’Eucharistie, mais l’Eglise. » Et la faillite, déjà présente en bien des lieux, du modèle territorial de la pastorale invite dès aujourd’hui à opter pour des Eucharisties “peut-être plus rares mais plus sommitales“, à éveiller les communautés à leurs responsabilités baptismales, comme à redécouvrir qu’ « il se passe de l’eucharistique dans nos vies et pas seulement à l’heure et au lieu de la messe. »
De la mythologie chrétienne à la foi modeste
Enfin, concernant la crise globale ( à la fois civilisationnelle et ecclésiale ) qui sert de toile de fond à ses réflexions, François Cassinguena-Trévedy estime que : « l’état des lieux qu’il nous incombe de faire n’est pas seulement d’ordre institutionnel, éthique, politique, il est d’ordre métaphysique. » Parce que nous sommes entrés dans “une grande nuit commune de la foi“. Parce que « des pans entiers de notre édifice intérieur, de nos représentations familières et de nos certitudes tranquilles se sont effondrés. » Et qu’il devient urgent de sortir d’une approche mythologique concernant l’origine du monde et de l’homme, les origines mêmes de Jésus, la résurrection ou les “fins dernières“. Afin de passer « de la mythologie chrétienne à la théologie chrétienne ». Ainsi, tout en respectant celles et ceux qui, dans l’Eglise, confessent la “foi du charbonnier“ et tout en « réaffirmant (son) appartenance à l’institution au titre de sa vocation baptismale et monastique », l’auteur se sent-il autorisé à formuler une attente dont il devine qu’elle sera partagée par nombre de ses lecteurs, et au-delà : « Nous demandons simplement, face à nos frères, la permission, la grâce, d’être des hommes qui doutent. » Ce doute qui est, depuis toujours, pleinement constitutif de la foi.
Dans la richesse des échanges suscités par ses lettres, durant le temps pascal, l’auteur veut voir une « expérience de la présence du Ressucité » de nature quasiment liturgique.
Pour autant il entend rassurer ceux qui pourraient le croire “tenté de fonder quelque phalanstère ou quelque secte » pour capitaliser sur sa lancée. Il les « renvoie au seul “Compagnon blanc“ (le Christ) et à sa seule compagnie qui est l’Eglise comme mystère. »
Plaidoyer pour une Eglise plurielle
Il me souvient avoir écrit dans un billet de ce blog, au printemps dernier, combien durant cette période qui nous avait tous ébranlés au plus profond, et de manière durable, des paroles à la fois posées, enracinées, essentielles comme celles de François Cassingena-Trévedy ou du théologien Tchèque Thomas Halik nous avaient rejoints et nourris là où il nous avait semblé – peut-être à tort et de manière injuste – que nos évêques étaient absents. A la relecture, je me sens pris à leur égard d’une indulgence à la fois rétrospective et provisoire. Comment pourraient-ils assumer publiquement des interrogations aussi radicales sur le contenu de la foi ou le basculement des structures de l’Eglise, de hiérarchiques à ministérielles ? Pour autant, peuvent-ils faire semblant d’ignorer qu’une partie du peuple qui leur est confié a vibré à ces réflexions, y reconnaissant le reflet de sa propre quête spirituelle ? Ce qui justifie largement cette ultime questionnement de François Cassingena-Trévedy : « Aujourd’hui, l’institution est-elle en mesure de comprendre, d’accompagner, davantage : de bénir le désarroi de tous ceux qui en l’espace d’une vie, de quelques années parfois seulement, se découvrent sans rien ou reposer leur tête. Est-celle capable de se convertir en institution de la nuit ? (…) Mais se peut-il qu’il existe jamais une institution de la nuit ? »
- François Cassingena-Trévedy, Chroniques du temps de peste, Tallandier, 176 p., 18 €. Moine de l’abbaye de Ligugé pù il était précédemment émailleur et maître de chœur, François Cassingena-Trévedy a choisi, en accord avec son père abbé, de poursuivre sa vie de moine en s’ancrant durablement en Auvergne. Il s’y consacre à son œuvre d’écrivain et de traducteur ainsi qu’à la rencontre de groupes et à son métier d’enseignant.
- Christian Bobin, Autoportrait au radiateur, Gallimard 1997, Collection Folio 176 p.
J ai suivi régulièrement les publications de FR Cssingeda-Trevedy et elles m ont profondément nourrie pendant ces mois, rejoignant mes aspirations les plus profondes.
Un immense merci à ce grand Monsieur.
Apres Marcel Legaut, Jean Sulivan et bien d autres amis spirituels, la route se poursuit.
Yveline Guicheteau
J’ai élagué le passage suivant, central à mes yeux car « hors de l’actualité » ou, au contraire, « en pleine actualité » depuis des décennies, une actualité que l’institution a, jusqu’ici, reportée à « plus tard » obligeant ainsi l’essentiel de l’Eglise à « partir »: « Alors que nous sommes entrés dans une grande nuit commune de la foi, que des pans entiers de notre édifice intérieur se sont effondrés, il devient urgent de sortir d’une approche mythologique en passant d’une mythologie chrétienne à la théologie chrétienne. » Ce passage exprime bien le chemin parcouru, pas forcément achevé, engagé vers 1990, j’avais alors 45 ans.
Voilà qui rejoint la lecture de l’article « métamorphoses du clergé » d’Ivan Illich écrit essentiellement en 1959 selon Etudes de ce mois, alors qu’il était vice recteur de l’université de Ponce (Porto Rico), et publié seulement en 1967*. Cette courte citation de l’article de 1967 dit l’essentiel « La crise dont je parle ne provient pas d’un « mauvais esprit du siècle » mais plutôt d’un état clérical qui a absorbé la fonction ministérielle de l’Eglise. » ainsi que cette phrase du dernier paragraphe, consacré au Saint-Esprit qu’il qualifie d’esprit utopique: « Le faux prophète se trompe parce qu’il se met à la place de Dieu ».
D’une toute autre manière, ce passage rejoint la préoccupation qui anime la CCBF quand elle propose, pour ce 29 mai, des conférences sur » L’Eglise en mal de transformation » **.
* Lien, mais 18 pages dont au moins la dernière mérite d’être lue! https://esprit.presse.fr/article/ivan-illich/metamorphose-du-clerge-31262
** https://baptises.fr/agenda/rdv-ccbf-ndeg3-leglise-en-mal-transformation
Tant pis, je me risque à dire une énormité peut-être à ceux qui la liront et qui me traiteront de sclérosé partisan absolu de l’obscurantisme, j’en passe et sans doute des meilleurs mais à lire le compte redu que vous faites des écrits de ce Bénédictin il me semble que l’intéressé serait infiniment mieux chez nos frères protestants lesquels ont à peu près basardé l’Eucharistie célébrée en général une fois par mois et en 5 minutes environ (sauf si l’on est obligé de faire deux tables compte tenu de l’assistance)
En plus il leur arrive tout de même de parler en bien de Marie mais sans insister surtout pas; quant au péché originel il ne me semble pas d’en avoir jamais entendu parlé tant à l’écoute du Service Protestant sur France Culture qu’au cours des cultes auxquels j’ai assistés pour accompagner mon épouse
Par ailleurs je n’ai jamais participé aux mouvements réclamant la Messe ce qui ne m’empéchait nullement de souffrir véritablement de cette interdiction non pas parce que je ne n’avais pas droit à MA Messe à moi,mais parce que je n’avais même plus la possibilité d’être ensemble pour prier avec des frères dans la foi, connus ou inconnus et donc de « faire Eglise »
Enfin je ne considère jamais un homme d’Eglise comme faisant partie d’une élite à part. Ce n’est qu’un homme comme les autres avec les mêmes défauts que nous, mais,du moins je l’espère, un peu moins développés que nous surtout s’il s’agit d’un homme de prière, mais chargé d’un rôle saint dont, simple laïc, je n’ai pas la charge
Enfin, bien entendu je ne prends pas le prêtre pour fabricant de Présence Réelle, bien sûr que non mais c’est l’Eglise qui nous enseigne que par sa prière adressée à Dieu le Pére celui-ci accepte que les offrandes présentées deviennent le Corps et Le Sang de notre Seigneur.
Donc le prêtre n’est qu’un intermédiaire indispensable, certes, mais qu’un intermédiaire et pas un surhomme.
Enfin je ne doute pas que ce Bénédictin n’obtienne un grand succès par ses réflexions sur la sexualité.
« Faire l’Église » ne se limite pas à adhérer ou pratiquer une « religion ». Être chrétien, n’est-ce pas adhérer au Christ connu aujourd’hui par l’Évangile (qui pourtant, dès le 1er siècle a conduit à des interprétations « variantes » !).
Jésus est présent dans bien des religions (juifs, musulmans, francs-maçons…) et est même reconnu par bien des non-croyants comme source de sagesse et de Paix.
Et ben alors, qu’attendons-nous pour nous « unir » autour de Lui ?. Pour moi, c’est ça l’Église (du latin ecclesia, issu du grec ekklesia ( ἐκκλησία), qui signifie « assemblée »).
Remarque perso : Dans des cérémonie œcuméniques, il m’est arrivé de participer à la
célébration de la sainte Cène. J’y ai vécu le même lien au Christ que dans la Communion.
Rappel : L’Eucharistie instituée plus de 1000 ans après Jésus a été à l’origine de l’une des plus dures déchirures de la chrétienté. Mon Dieu !
Nous avons vraiment « savouré » ce livre , …réelle poésie pour aborder des sujets concrets, profonds, avec des paroles claires sur la sexualité des personnes consacrées, sur le verbiage de l institution qui nous enfume, .sur les dogmes, l eucharistie etc
FCT se décrit comme un « athé chretien » , en cela aussi il nous rejoint.
Parce que je travaille et suis en compagnonnage ecclésial et amical avec des personnes que cette prose a impressionnée, j’ai voulu y voir de plus près, j’ai lu les dernières épîtres facebokiennes, et et j’ai même correspondu sur le réseau social avec leur auteur, qui n’était pas mécontent de s’entendre écrire qu’il chantait « un chant nouveau » et qui promettait que ça allait continuer. Je le trouvais très prolixe pour un moine, mais pas plus que le Père André-Marie Foutrin, fondateur de l’abbaye de Croixrault et auteur de la série des recueils du « Petit moine qui ne dort pas la nuit ». Notre moine bénédictin de Ligugé François Cassingena-Trevidy ne manquait-il pas à son voeu de silence?
Je trouvais qu’il chantait bien, avec un certain lyrisme, qu’il écrivait bien et même un peu trop bien, mais que bien écrire n’est pas inventer un nouveau langage. Or ce dont a besoin l’Eglise d’aujourd’hui, c’est d’un nouveau langage qui, soit confirme et réécrive la doctrine dans des termes qui la retraduisent de manière à la rendre compréhensible comme l’a fait en son temps François Varillon, qui fut trop modeste pour laisser entendre qu’il avait écrit la somme théologique du siècle de l’ère du soupçon, soit l’infirme et la démonte, mais de toute façon fasse de la théologie fondamentale pour exprimer les vérités chrétiennes ou le kérigme, ou la foi du charbonnier à frais nouveaux.
Je m’avisai un jour d’approfondir le profil de notre moine et pensai qu’il était avant tout un normalien. Dès lors je fus moins étonné, et je ne le suis pas que notre moine bavard soit une espèce d’ancien moine, qui ne soit pas tout à fait sorti de son couvent comme il peine à quitter l’institution ecclésiale par manque de courage, mais qui ne soit plus tout à fait dans son ordre non plus, ou comment garder de vieilles outres pour faire du vin nouveau au risque de faire crever les outres et perdre le vin nouveau par manque de courage de se débarrasser des outres ou pour ne pas gâcher, faire des économies de bouts de chandelle et finalement perdre le neuf et le vieux.
Qu’allait faire notre poète à la « vocation tardive » à Ligugé, qui respecte la tradition grégorienne dans sa plus pure sobriété, sans la platitude neumatique et apogiaturée de Solesme ou de Fontgombault? On a vu des membres de cette communauté venir offrir l’aubade grégorienne au pape Benoît XVI en pèlerinage à Lourdes. J’y étais et j’ai beaucoup aimé. C’était frugal et habité.
Tout normalien paraît d’abord inclassable, mais finalement classifie, normalise et cristallise. Un normalien cristallise la norme de son temps. C’est ce qu’a fait François Cassingena-Trevidy (FCT). Qu’a-t-il cristallisé ? Pour moi, une chose à la fois très simple et assez grave: c’est qu’au moment du confinement qui réclamait de retrouver l’esprit des catacombes, non seulement la génération de l’enfouissement n’en a pas fait preuve; non seulement elle n’a pas vu la faillite de sa stratégie, mais telle un loup qui sort du bois, elle est venue avouer ce que les traditionalistes avaient soupçonné depuis toujours :
-Ellle était d’abord solidaire du siècle: il ne fallait pas défendre la liberté de culte; il ne fallait pas emmieller l’Etat qui y attentait; il fallait préférer le temporel et le séculier au spirituel, surtout s’il était doté d’un pouvoir clérical, péché suprême sous le pontificat de François.
-Au fond, la messe l' »emmerdait », mais c’était plutôt à la manière de Luther que de Georges Brassens. La génération confinée de l’enfouissement trouvait que la messe était « mal produite » comme le pensait Thierry Ardisson, cet excellent publicitaire. Le folklore en était dépassé. On n’avait qu’à aller la célébrer chez la vieille dame malade qu’on n’allait jamais voir avant et qu’on ne visiterait pas non plus après. Il fallait passer à autre chose. La fraction du pain devait se pratiquer dans des petites cellules d’Eglise ou être remplacée par le « sacrement du frère » non pas virtuel, mais éventuel et idéal, un peu comme le migrant et le prêtre africain fidei donum ou le réfugié syrien, tant qu’ils n’exportent pas leurs coutumes.
-Car pour ce qui était du frère virtuel ou de la liturgie qui se saisirait du numérique pour dépasser les frontières territoriales de la paroisse fermée et condamnée à ne pouvoir célébrer de liturgies « en présentiel » en période de confinement sec, on n’en voulait pas, c’était artificiel. Du moins notre moine n’en voulut-il pas jusqu’à ce qu’il s’aperçût qu’il avait fondé sa paroisse personnelle à son corps défendant, qu’il irait cultiver dans son jardin d’Auvergne en accord avec son Père abbé qui avait dû lui donner un discret coup de pied au derrière. Mais tant que notre normalien n’aurait pas tiré personnellement les conséquences de ce qui se passait autour de lui, les fidèles ne devaient pas compter sur la consolation sacramentelle par les moyens virtuels, le numérique n’était pas un support capable d’étendre le mémorial du Christ dans l’espace et dans le temps, et ceux qui diraient le contraire n’étaient que des enfants gâtés et capricieux.
– Sur le principe, FCT était disposé à respecter ceux qui avaient la foi du charbonnier, à condition qu’ils ne la ramènent pas, qu’ils ne présentent pas un recours devant le Conseil d’Etat, qu’ils restent dans la posture passive qui leur avait toujours convenu, et qui consistait à répondre « Amen » au prêtre dans le cadre de la messe dialoguée, en se ralliant à l’Etat et en considérant que Dieu a parlé quand l’Etat a parlé. Or en général, ceux qui répondent « Amen » aux messes basses la ramènent beaucoup, à tort ou à raison, devant l’Etat laïque. Les catholiques devraient être les seuls à ne pas faire du lobbying selon FCT.
-Puisque les abuseurs nous y poussent, parlons sexe! J’ai aimé la lettre de FCT sur le sujet, mais que m’en reste-t-il? Qu’il fallait approfondir! Nous avons tous une sexualité, il ne faut pas la nier et « on ne peut pas la sublimer », la psychanalyse dit précisément le contraire. Mais faut-il aborder frontalement l’impossibilité pour un clerc d’être sexuellement inactif? FCT ne le pense pas et Marie-Jo Thiell est tout aussi réservée sur le sujet. La question est tabou. Il vaut mieux rester à la périphérie du sujet selon notre ancien moine et notre vierge consacrée spécialiste des abus sexuels en milieu clérical, et critiquer la mariologie, en tant que mettre l’accent sur la virginité de la Theotokos conduirait nécessairement à l’obsession sexuelle inversée de saint Paul qui ne se posait pas la question de la virginité de Marie, car elle était anachronique, et ce fut l’encratisme (essénien?) de l’apôtre des gentils qui a amené l’Eglise dans le déni de la sexualité qui lui fait commettre des abus sexuels ou édicter des lois morales impraticables. Ou il vaut mieux interpréter le péché originel come ouvrant la voie à la concupiscence pour dire que ce mythe (sic: un mythe est un archétype vivant), n’est pas compatible avec les sciences humaines. Alors que le péché originel est le revers de la communion des saints et est une manière d' »en finir avec le jugement de Dieu » qui a refusé que l’homme sépare le bien et le mal comme l’ivraie et le bon grain en mangeant de l’arbre de la connaissance des catégories morales par excellence, morale dans laquelle Dieu voulut si peu entrer que, quand Il a envoyé Son Fils, Il a affranchi l’homme de la loi.
FCT est, une fois de plus, un « séducteur » à l’écriture charismatique au charme duquel on se mordra les doigts d’avoir cédé dans vingt ans, car enivré par son propre style qui ne va pas jusqu’à créer un langage nouveau, il n’aura pas su s’arrêter et aura créé -il a beau s’en défendre-, le phalanstère des derniers des mohicans de la secte des babyboomers contestataires des enfouis confinant leur foi qui ne veulent pas être personnellement confinés…
Je lis toujours vos commentaires avec attention, parce qu’ils ne sont jamais médiocres. Même si je m’essouffle, parfois, à vous suivre (sans doute est-ce là l’effet de mon grand âge) comme vous, si j’ai bien compris, à lire les longues épitres de FCT (ce qui m’évitera de réécrire à chaque fois : François Cassingena-Trévedy).
Il est au moins deux manières de vous répondre : soit de manière analytique, en reprenant point par point votre propos pour tenter d’argumenter, soit de manière synthétique en opposant à votre lecture une autre logique. Je tenterai le panachage !
En toute franchise je trouve inélégant de votre part, cette allusion au statut un peu particulier il est vrai, d’un moine bénédictin choisissant, avec l’aval de ses supérieurs, de vivre en solitaire hors de son abbaye. Sans doute est-ce révélateur d’un tempérament. Cela ne suffit pas à discréditer une pensée. Je m’honore d’une amitié de quarante ans avec le frère André Gouzes, religieux dominicain de la Province de Toulouse, qui a quitté son couvent de Rangueil en 1975… pour ne plus jamais y retourner qu’à l’occasion de courtes visites. Aurait-il réalisé son œuvre liturgique (La liturgie chorale du Peuple de Dieu), musicale, intellectuelle sans cette forme de liberté à laquelle ses propres supérieurs l’ont autorisé ? Quant à qualifier FCT de « moine bavard » (au moins vous en parlez en connaissance de cause) qui « peine à quitter l’institution ecclésiale par manque de courage », il y a un propos purement injurieux et sans fondement qui suffirait à lui seul, à ce que je m’en tienne là de ma réponse à votre commentaire.
Vous persistez à ne pas comprendre pourquoi des catholiques dont vous rappelez bassement l’appartenance à la « génération de l’enfouissement » – comme pour mieux discréditer cette attitude profondément évangélique – ont choisi de suivre les consignes sanitaires éditées par les autorités, comme y invite Saint-Paul avec constance. Vous persistez à ne pas vouloir différencier la constitution, durant cette période, de « communautés virtuelles » de dialogue dont je puis témoigner qu’elles m’ont aidé à tenir le coup, avec ce que je persiste à qualifier d’exhibitionnisme liturgique. Et vous accusez notre bénédictin d’être un « séducteur » ! Au moins ne s’est-il risqué à aucun strip-tease vidéo ! Et tenez-vous vraiment à ce que je vous dresser la liste de tous les « séducteurs » des Communautés Nouvelles portés aux nues par l’institution avant que d’être acculée à en reconnaître les déviances ou la perversion ? Et de quelques autres qui sévissent encore dotés des sacrements de l’Eglise dont la seule inconnue est de savoir la date où ils seront confondus. Et c’est FCT qui incarnerait le grand séducteur ? Diable !
Je ne vais pas débattre ici du péché originel dont vous semblez penser que son questionnement serait l’exclusivité de notre moine. Je me contenterai de rappeler ici que le concept même de « péché héréditaire » puisqu’il s’agit bien de cela, est contraire à :a simple raison comme à l’enseignement du Christ lui-même qui nous renvoie à notre liberté et responsabilité sans faire porter le poids de nos misères à la faute de nos parents, fussent-ils les premiers. Oui la question du mal, en nous, nous travaille. Dieu merci ! Cela ne justifie pas que toutes les réponses théologiques élaborées au fil des siècles soient de nature à convaincre l’homme contemporain !
Vous reprochez à notre auteur de n’être point capable d’inventer un nouveau langage, de ne pas se risquer au registre de la théologie fondamentale. De se limiter à déconstruire… Réfuter un questionnement, qui est aujourd’hui celui de nombreux chrétiens, au seul motif qu’ils ne servent pas « la réponse » en seconde partie de leur développement, est une manière facile de passer à côté de la « crise de foi » qui travaille notre société. Au moins a-t-il le courage de plaider pour une foi « modeste » qui n’en est pas moins pleinement la foi. Oui, comme à différents carrefours de l’Histoire, le christianisme doit aujourd’hui s’inculturer à nouveau, parce qu’il est religion de l’incarnation, parce que c’est là son génie propre. Il n’est pas médiocre, il n’est pas lâche, de se reconnaître dans cette démarche, non point parce qu’elle serait simplement « sincère », mais parce qu’elle se veut également « honnête » ce qui suppose d’intégrer l’idée de se tromper, certains diraient d’être trompés par le Malin, et d’accepter les remises en question.
Oui, on peut respecter profondément, et non avec mépris ou calcul comme vous le laissez entendre, la foi du charbonnier, et aspirer pour soi-même à un autre espace de liberté. Je ne vois pas d’autre issue à la crise que traverse notre Eglise que l’acceptation d’une pluralité en son sein même. Il est différentes demeures dans la maison du Père. Dans l’un des ses ouvrages (Cette Eglise que je cherche à comprendre), le théologien Maurice Vidal écrit ceci : « Je suis certain que l’Eglise catholique a les moyens, non pas de tolérer mais de favoriser une très grande diversité qui ne provoque pas des ruptures, des schismes ou de nouvelles Eglises… » Je le crois aussi. Mais nos évêques sont-ils capables d’en comprendre la nécessité et la légitimité, et d’en mettre en œuvre la dynamique ?
Vous cultivez une forme de suffisance satisfaite vis-à-vis de tout ce que l’Eglise a pu produire et entasser au fil des siècles. Au point de déverser votre mépris sur ceux qui « osent » avouer qu’en bien des domaines, ils ne savent plus… mais qu’ils cherchent. Vous vous gaussez de « l’échec » prétendu de notre génération qui expliquerait chez nous une forme d’amertume et d’agressivité. Dites moi : dans quel état les pontificats de Jean-Paul II et Benoît XVI ont-ils laissé l’Eglise ? Quel sens donner à la démission du pape Allemand sinon le constat cruel de son échec ?
Je sais qu’à ma propre diatribe vous opposerez votre savoir, et que ce jeu de balles peut se prolonger à l’infini. Je pense ne pas en avoir vraiment le goût.
Que,voulez-vous René entre Benoit XVI et » St Merry » vous prenez manifestement St Merry comme sans doute le »très mystérieux » ancien archevêque( mais qui donc est-il, mystère insondable s’il en est…) pour ma part je fais totalement le choix inverse mais alors je me demande sérieusement si nous faisons vraiment partie de la même église et cela me parait assez grave…
Toujours le discours qui vous arrange. Je ne choisis pas entre Benoît XVI et Saint-Merry, l’un et l’autre font partie de l’héritage. Qant à savoir si nous appartenons à la même Eglise, ce peut être en effet, une bonne question. Est-ce grave ? Je ne sais pas !
Dès la lecture du commentaire de René concernant le livre de François Cassingena-Trévedy – FCT – je me suis précpité pour commander cet ouvrage. Je vais le recevoir dans les jours prochains.
Les 3 points abordés (Sexualité – Eucharistie – Foi modeste – pour faire court – sur lesquels se posent des questions à propos de l’enseignement de l’Eglise pour le monde d’aujourd’hui ) font partie de mes propres interrerogations , réflexions et recherches .
Je vois par ailleurs que les commentaires n’abordent guère de réflexions sur ces sujets de fond, mais se situent dans des positionnements de personnzes, voire de groupes qui s’opposent au nom de conceptions arrêtées, voir d’accusations touchant aux personnes dont on veut remettre en cause le droit à penser autement. Je pense que FCT doit sourire de ce dont on l’accuse ! ( tout en regrettant que l’on n’avance pas sur le fond.)
Je comprends que René se demande si les évêques si nos évêques pourront assumer un tel questionnement. Ce serait pourtant bien utile, nécessaire. On ne peut pas laisser traîner des questions qui s’expriment et qui sont présentes dans tant de silences où va se nicher de plus en plus l’indifférence et le doute sur la mission de l’Eglise !
Ceci dit, je crois qu’un nouvel « aggionamento » va surgir. Qu’il n’attende pas trop.
Il faut y croire. Notre Dieu n’a pas abandonné la partie. Continuons, si possible, d’avancer en proporsant des pistes de rfélexion écalrées et écalrantes pour une meiulleure compréhension du message évangélique qui peut aider la marche de l’humanité, au moins dans le souci d’une vraie miséricorde face à ce qui est peine et souffrance (une autre manière sans doute de parler de « péché originel ». Il y a des pistes à ce sujet dans Teilhard de Chardin.
Bien d’accord avec vous, René. Votre réponse éveille en moi (et peut-être d’autres) une question qui me semble être à l’origine de bien des désaccords. Je reviens sur ce que j’évoquais précédemment : n’y a-t-il pas dans nos expressions trop de confusions entre Église et religion(s) (et même « sous-religions »). Excusez-moi si question trop lourde, j’essaie, en principe, de faire court et clair.
Brièvement:
-Je reprenais le mot de « séducteur » du titre de votre billet et je me risque à penser que l’on pourrait nourrir la même désillusion vis-à-vis de FCT, car il coche toutes les cases de la parole facile, que des fondateurs de communautés nouvelles qui les cochaient aussi et qui étaient capables de vous parler de « purification passive des sens » comme le faisait Philippe Madre en commentant saint Jean de la Croix, tout en ayant à son propre égard une conception de la purification des sens pour le moins particulière et particulièrement activiste.
-Pour avoir une « foi modeste », il faut commencer par écrire modestement.
-Souffrez un peu d’ironie à l’encontre de votre génération qui ne m’avait jamais semblé manifester tant d' »agressivité » ni d' »amertume », à quelques franges militantes près (comme la CCBF qui ne se montre pas vraiment aigrie et n’a jamais avancé masquée), que depuis ce confinement providentiel qui semble avoir libéré beaucoup de paroles.
-Vous balayez un peu vite à mon avis l’objection que quand on déconstruit, il faut proposer une alternative. Sans quoi on est un rapeur qui démolit la société sans dire par quoi il compte la remplacer. Le Rap m’a toujours paru une expression assez chimiquement pure de la première révolution nihiliste de grande ampleur et influence sur les masses.
-Si vous trouviez que les pontificats de Jean-Paul II et de Benoît XVI étaient à ce point calamiteux, que ne l’avez-vous dit ouvertement du vivant de l’un et quand l’autre était en activité? Et pourquoi ne pouvez-vous envisager que le second ait démissionné parce que ses forces l’abandonnaient et qu’il voulait éviter à l’Eglise une seconde agonie pontificale qui avait des chances d’être durable?
Je limiterai ma réponse à votre dernier paragraphe. Vous admettrez avec moi que pour dresser le bilan d’un pontificat – ou de deux – il faut avoir un peu de recul. Le recul nous l’avons aujourd’hui, notamment depuis la prise de fonctions du pape François dont je ne prétends pas pour autant qu’il fera des miracles. Mais enfin, l’ampleur des réformes envisagées est à la hauteur des exigences de l’héritage reçu…
Pour ce qui est des deux pontificats de JPII et BVXI j’étais alors journaliste, en responsabilité, dans la catholique. J’ai fait mon travail en toute honnêteté et loyauté. Sans sombrer dans un manichéisme qui par ailleurs ne correspond nullement à mon caractère. Mais j’étais là pour faire connaître la position de l’hebdomadaire qui s’inscrivait dans sa propre histoire, pas pour donner mon point de vue personnel. J’ai écrit, et ici même, je crois, dans la notice de présentation de ce blog, que je reprends à mon compte la distinction de Marritain entre l’agir « en chrétien » et « en tant que chrétien ». J’ai dirigé Pèlerin « en tant que chrétien », assumant la part de solidarité avec l’institution qui me semblait découler de ce statut ; je m’exprime dans ce blog « en chrétien », libéré de toute sujétion vis-à-vis d’une quelconque hiérarchie ecclésiastique. Ce qui ne me dispense aucunement d’un devoir de responsabilité et d’honnêteté. Et, tout en conservant la discrétion requise sur les courriers que je reçois, j’ai tout de même quelque satisfaction à recevoir régulièrement quelques « retours » sur tel ou tel papier, de la part de responsables de mon Eglise, me remerçiant d’exprimer ce qu’ils pensent et que leur propre statut leur interdit de formuler publiquement. Ce faisant j’ai la naïveté de penser servir mon Eglise et l’annonce de l’Evangile.
Permettez-moi de revenir sur mes propos concernant l’échec de Benoît XVI que je trouve symbolisé dans sa décision de se démettre de ses fonctions où vous pensez ne devoir lire que la conséquence de son état de santé et de son grand âge. Selon moi il s’agit d’un échec au regard d’un projet de Nouvelle Evangélisation reposant sur une Eglise ayant retrouvé sa puissance, son pouvoir, son unité, sa doctrine, autour d’un corps clérical nombreux et incontesté… Que reste-t-il de tout cela ? L’illustration la plus impitoyable de cet échec nous est donnée dans un film dont je ferai recension dans un prochain billet de ce blog, consacré, précisément à Benoît XVI. A travers l’histoire récente de l’Eglise catholique en Irlande, confrontée à de multiples scandales. En 1979, la « catholique Irlande », donnée en exemple au monde entier et notamment à l’Europe occidentale sécularisée, fait un accueil triomphal au pape Jean-Paul II. Moins de trente ans plus tard elle est le premier pays au monde à adopter le mariage gay par referendum, puis dans la foulée le droit à l’avortement. En une génération tout a basculé ! Et je ne pense pas que ce soit par la faute de la « génération de l’ensevelissement » hexagonale !
Comme ils sont courageux et même Héroïques ces responsables de votre église, en faisant semblant d’être d’accord avec Rome pour le disqualifier en aparté c’est bien là l’exemple même du courage et de la plus stricte application de « que votre oui, soit oui et votre non soit non »
Par ailleurs dans un précédent message vous me faisiez observer que le terme de justice était sans doute le terme le plus utilisé dans toute l’Ecriture. Bizarre mais pour moi ce qui ressort de l’Ecriture c’est l’Amour et il me semble que les trois vertus théologales sont la foi, l’espérance et la charité.
Toujours la même obsession chez vous de la transparence. Que n’avez-vous été conseiller du Vatican durant ce dernier demi siècle. Vous lui auriez évité bien des naufrages. Et j’imagine la nature de vos commentaires si, comme vous les y invitez, lesdits épiscopes disaient tout haut ce qu’ils confient en toute discrétion.
Pour le reste, vous faites référence au Nouveau Testament, moi au Premier, même si la notion de justice est loin d’être étrangère aux Evangiles.
Dominique,
Je me demande si ce que vous défendez avec un grand systématisme n’est pas l’Eglise avant le Christ (car ce n’est pas la même chose, même dans saint Paul), et la tradition lisant l’Evangile avant l’Evangile (car nous aussi élaborons la tradition, elle ne peut être figée sous peine de mourir). Vous en avez le droit, mais penser que vous défendez une foi plus juste ou plus droite, non.
En ce qui concerne la charité, qu’est-elle si elle ne se soucie pas de la justice ? Rien d’autre que de petits arrangements pour esquiver les responsabilités et laisser le mal se perpétrer, 70 fois 7 fois. Les chrétiens pensent avoir tout résolu en brandissant le mot Amour, et il me semble pourtant que l’amour ne fonctionne pas tout seul, ne disiez-vous pas quelque chose de ce genre à propos des gays, par exemple ?
Quant à la nouvelle évangélisation, terme dont je n’ai jamais compris le sens, on voit à présent les dégâts qu’elle a pu faire. Mais, comme se justifiait,
auprès de moi l’ex-vicaire général de Paris, pur produit des JMJ et de JPII : « C’était l’époque… »
Et vous cher René que de choses n’auraient jamais eu lieu si vous et vos amis responsables mais courageux dans l’anonymat, avaient été à la place de ces lamentables pontifes… Quant aux deux testaments, dans mon insondable ignorance je croyais que le Second apportait quelque chose de neuf et que justement si le second parlait si peu de la justice mais principalement de la charité ce n’était pas accessoirement.
Quant à ma prétendue obsession, de la transparence où dons ai’-je pu me mettre dans la tête que vous et vos amis ne cessiez, avec raison d’ailleurs, de reprocher justement aux responsables de l’Eglise d’avoir si longtemps cacher les choses ?
Enfin je vous remercie de savoir à l’avance ce que j’ aurais dit sI vos courageux anonymes avaient renoncé justement à l’anonymat et en conséquence démissionné.
Je mets une bouteille au frais pour le jour où vous saurez dire les choses sans vous obliger cette ironie permanente qui semble vous être devenue une seconde nature.
Sur le fond, votre amalgame ne tient pas. Si nous dénonçons, dans l’Eglise, un manque de transparence sur les affaires de dérives en tous genres, c’est parce que ce « secret » (notamment au travers des procédures canoniques) a eu pour effet de négliger, de nier le droit des victimes et donc de ne pas leur rendre justice au regard des préjudices subis. Alors que la transparence que vous revendiquez, en écho à mes propos, ne porte que sur des « confidences » dont la non-publicité ne porte strictement tort à personne.
Sauf que des « confidences »données à un journaliste qui plus est, me parait une bien étrange démarche sauf bien sûr si on a stipulé au journaliste en question que cela relevait strictement de la conversation privée bien sûr , et pour moi si le journaliste en cause fait publiquement état de ces « confidences » il en trahi le secret même s’il se garde d’en donner l’auteur.Pour ma part on m’a bien sûr déjà fait des confidences et je les ai gardées pour moi intégralement.Le genre : « je te le dis à toi mais n’en parle pas » est le meilleur moyen pour que ce »secret » court les rues et d’ailleurs c’est peut-être le but recherché…
Je ne conteste pas vos compétences Dominique, mais permettez à un journaliste professionnel qui a 35 ans de métier derrière lui de connaître les pratiques « éthiques » de sa profession. Je vous le dis tout net : vous n’y connaissez rien et continuez à nourrir vos fantasmes en vous refusant à écouter ce qu’on vous dit. Il est dans notre profession des confidences faites « top record » c’est-à-dire symboliquement magnétophone éteint ce qui signifie que la personne nous dit des choses pour notre information personnelle, pour mieux nous aider à comprendre un contexte ou une situation, sachant que nous nous engageons à ne rien révéler, à ne pas en faire état, même sous couvert d’anonymat ; par comparaison le « off record » signifie que la confience qui nous est faite peut être utilisée dans un article à condition de ne pas citer la source. Tous les journalistes du monde ont adopté ces pratiques. Si cela vous pose des problèmes, c’est votre affaire. Mais vous n’êtes sans doute pas le seul sur terre à avoir une conscience morale. Alors, s’il vous plait restons-en là !
J’ajouterai René que ces pratiques enkystées, en plus de l’inacceptable injure faite aux victimes, ont profondément choqué la grande partie des chrétiens qui se donnent la peine, oui la peine ce mot lourd, de croire après un « travail » (lectures, questionnements, recherches, méditations) au lieu de rejeter ce qui dérange, d’un revers de main hautain et dédaigneux, dans l’oubli, ajoutant ainsi aux injures du système le déni, forme la plus aboutie de la cruauté. Affaire de sensibilité peut-être,une sensibilité dont quelques spécimens humains semblent, pour l’instant, encore dépourvus. L’Église heureusement n’attend pas l’institution pour dire un grand merci à ceux qui ont osé, loin des palinodies compassionnelles, des demi-reconnaissances et autres demandes de pardon.
Monsieur Dominique Bargiarelli, par une comparaison sans queue ni tête, nous en remet une couche Saint-Merry dont il ne sait probablement pas grand chose sinon ce que l’archevêque Aupetit et quelques porte- flingues en service disent. A titre d’information, je lui livre l’une des dernières saillies épiscopales à ce sujet (sur RND) : « il s’est passé à Saint-Merry des choses indignes de l’Evangile ». Diable ! Je ne savais pas que ce Centre Pastoral faisait partie de la nébuleuse des communautés nouvelles. Il remarquera aussi la précision du propos qui lui permettra de choisir ou de comparere en toute connaissance de cause cette fois.
Je ne connais pas FCT et ne me permets donc en aucune manière de porter un quelconque jugement sur sa personne ou son itinéraire.
Pendant le confinement j’ai lu ses textes et ils m’ont beaucoup apporté en ce qu’ils étaient le signe tangible de ce que nous affirmons trop souvent sans l’expérimenter réellement : le message de Jesus est toujours une parole vivante , une parole qui fait vivre .
Les lettres de FCT m’ont permis de faire cette expérience et manifestement beaucoup d’autres l’ont faite sans pré-requis d’appartenance à l’eglise ou « d’avoir la foi »
Rien que pour cela comme homme je lui sais gré de m’avoir, par ses lettres , permis d’être attentif au signes des temps et de les affronter de manière plus humaine .
Comme chrétien catholique , j’y vois un témoignage du fait que l’Evangile peut rejoindre les hommes et les femmes de ce temps dans la réalité de leur vie .
FCT s’est rendu , via ses écrits procheet fraternel avec toute personne confrontée à la difficulté de vivre ce temps de pandemie .
N’est ce pas l’essentiel ?
Voilà enfin un témoignage au-delà des polémiques et accusations en tous genres.
Il reste à aborder sereinement les questions de fond sur l’Eucharistie, la sexualité et la Foi modeste;
On aura sans doute besoin pour cela de l’aide de théologiens et de biblistes. Mais peut-être auparavant faut-il entendre les questions, les difficultés de compréhension que les uns et les autres portent en eux !
Merci à ceux et celles qui vont s’engager sur ce chemin sans commencer par mettre en accusation les personnes qui « se permettent » de penserr autrement que SOI
Sans rien enlever à l’intérêt des textes de FCT on peut rappeler que sur le péché originel, les liens entre la mariologie et la conception catholique de la sexualité, ainsi que sur la sacralisation exacerbée du prêtre, des théologiens comme Hans Küng et Eugen Drewermann avaient fait ces même constats et y avaient apporté des arguments forts convainquant à l’appui de leurs thèses.
Sur la question de la possibilité d’une institution ecclesiale de la nuit.., je ne pense pas qu’il faille poser la question en ces termes.
La finalité d’une institution est de construire l’unité en gommant les différences et en mettant l’accent sur ce qui est commun .Elle ne peut pas être l’instance du doute et du questionnement. Par contre l’institution ne peut pas avoir le monopole de l’autorité légitime , elle doit pouvoir laisser un espace au questionnement et au doute .C’est le rôle des prophètes par rapport à la royauté dans l’antique Israël.
La sacralisation de l’institution ecclesiale pour des raisons historiques connues , la prive de cette capacité à se laisser legitimement questionner , l’empêche d’evoluer et donc affaiblit sa capacité à faire autorité. L’assimilation de l’Eglise à une seule de ses composantes , le magistère, amalgamant ainsi l’Eglise à son institution constitue une faiblesse structurelle qui est préjudiciable à l’Eglise toute entière et même in fine à son institution.
Quelle place laisse-t-on aujourd’hui à la fonction prophétique dans l’Eglise me paraît être une manière légitime de poser la question. C’est bien la vigueur des critiques de Nathan qui a influencé le comportement de David .
Avec beaucoup d’autres les textes publiés par FCT remplissent cette indispensable fonction prophétique qui ne peut pas être remplie par l’institution ecclésiale (Je partage le point de vue de René relatif au comportement des évêques pendant la pandémie). Leur rôle était de maintenir l’unité, c’est à d’autres qu’il revenait d’explorer des pistes nouvelles. Les évêques devaient seulement écouter leur parole et les laisser s’exprimer. L’ont ils fait ?
Je suis d’accord avec vos premières observations. Mais FCT ne prétend nulle part faire œuvre pionnière au niveau d’une réflexion théologique. Ce qui mérite qu’on s’y attarde est que, quelle que soit la valeur de référence des deux théologiens que vous citez, peu les ont lus et je n’ai vu personne, sur la période de confinenemtn que nus avons traversée, aller chercher des citations de l’un ou de l’autre pour nous aider à « passer l’épreuve ». je veux dire par là qu’il faut savoir se laisser saisir par l’événement et que d’évidence les lettres de FCT publiées sur son blog ont fait le buzz, au moins dans le monde chrétien, parce que beaucoup y ont trouvé des réflexions en résonnance avec leur univers intérieur.
Merci Guy de faire référence à ces deux éminents théologiens qui ont posé, il y a déjà bien longtemps, des problèmes de fond, qu’apparemment aujourd’hui on ne peut plus ignorer, si on veut élaborer une véritable réflexion et non rester dans l’a peu près.
A Guy.
Les textes de FCT me donnent à penser tout comme les ouvrages de Dominique Collin. C’est cela qui est le plus important à mes yeux. J’ai particulièrement aimé le texte « De la mythologie chrétienne à la foi modeste » car c’est un texte abrupt, sans concession et surtout d’une terrible lucidité. Contrairement à vous, et en entendant notamment l’argument selon lequel » La finalité d’une institution est de construire l’unité en gommant les différences et en mettant l’accent sur ce qui est commun » et qui n’est pas dénué de fondement, j’ajouterai que cette institution Eglise ne reçoit sa justification que de l’Evangile ; elle doit donc être ordonnée à lui et à son chef, le Christ. Après la faillite de cette Eglise-institution avec tous ces scandales d’abus sexuels, d’abus d’autorité et autres, il me semble que l’Eglise-Institution doit se faire humble. Une Eglise triomphante comme elle a pu l’être parfois, me semble non seulement totalement anachronique et déplacé, mais foncièrement contraire à la simplicité évangélique. Donc je plaide moi aussi pour une Eglise de la nuit, une Eglise qui accompagne les femmes et les hommes dans leur existence, quels qu’ils soient. Et cet accompagnement ne peut se faire que dans l’humilité, l’écoute, l’économie dans les paroles etc. Une foi modeste pour une Eglise de la nuit. Car si l’Eglise n’est pas elle-même de la nuit, comment peut-elle prétendre aider nos contemporains? Cela n’empêche pas une foi charpentée au corps, de profondes convictions bien entendu. Mais toujours dans l’humilité et à l’image du Christ qui s’efface pour laisser l’homme grandir avec le secours de l’Esprit.
Je publie ici, sous mon nom, ce commentaire que m’a adressé par mail Dominique Bargiarelli, persuadé, m’écrit-il, que je ne le validerais pas. A charge pour lui de le reprendre à son compte puiqu’il n’en pas conservé de trace…)
Je m’attendais, certes à cette réponse quelque peu narquoise de votre part à mon interrogation sur note éventuelle foi commune. Rassurez-vous, je ne me prends pas pour quelqu’un de bien important et quand je disparaitrai le monde ne sera pas bouleversé de l’immense perte qu’il aura à combler si jamais il y arrive…
Toujours est-il que puisque vous estimez que les personnes qui apprécient, ô combien, les thèses de FCT qui se définirait lui-même comme « athée chrétien » sont de bons chrétiens, vous me permettrez de penser que c’est pour le moins un peu expéditif car il me semble que pour se considérer comme « chrétien » il faut au moins adhérer au kérygme.
En réalité en réponse à Dominique Bargiarelli.
Je ne suis pas l’éxégète autorisé de la pensée de François Cassingena-Trévedy, mais voilà une formule que je pourrais reprendre à mon compte. Et je peux donc expliquer pourquoi. Vous y voyez un oxymore, c’est à dire le rapprochement de deux termes qui se contredisent et donc s’excluent (comment peut-on se dire à la fois athée et chrétien ?). La formule est volontairement provocatrice pour susciter la réflexion. La contradiction est un premier niveau de lecture qu’il faut savoir dépasser. Ce que j’entends là est qu’un chrétien, parce que chrétien, réfute non pas Dieu lui-même, mais une certaine idée de Dieu (comme il y en a eu tant dans l’antiquité gréco-romaine) non compatible avec la Révélation. Et que le Dieu que rejettent nombre d’athées n’est jamais qu’une caricature de Dieu que bien des croyants rejettent eux-mêmes. Ce qui me fait penser à cette phrase de François Mauriac dans ses « Mémoires intérieurs » : « La plupart des hommes n’ont jamais connu ce Dieu auquel ils croient renoncer. » Sinon, peut-être n’y auraient-il pas, précisément, renoncé ! C’est tout le travail de l’évangélisation dont il faut tout de même comprendre qu’elle vise, en premier, les catholiques eux-mêmes souvent embarqués dans de fausses idées sur Dieu.
Cela étant, vous me direz – et vous aurez raison – que c’est reculer pour mieux sauter car encore faut-il s’accorder sur ce qu’est ou n’est pas le Dieu chrétien ! Et là il y a de quoi fournir du travail à des générations de théologiens, remplir les colloques jusqu’à la fin des temps et nourrir quelques-unes de ces querelles qui nous ravissent et où nous excellons !
Je ne comprends pas bien si ce qui choque Dominique dans l’expression « athée chrétien » est le mot ou la chose .
Si c’est le mot il faut alors tenir compte de l’aspect volontairement provocateur de cette association qui dit pourtant quelque chose de la démarche de foi à notre époque .
Si c’est la chose c’est plus étonnant . En effet de nombreux moines convergent pour dire que plus ils avancent dans la vie monastique et plus ils ont du mal à définir le contenu de leur foi et à définir précisément ce à quoi ils adhèrent quand ils se risquent à dire Dieu .
Dominique , et ce n’est pas une critique de ma part , adhère à la conception très cadrée , très conceptuelle issue de la mentalité romaine antique la foi catholique : adhérer d’abord à des croyances , faire entrer des individus dans un système pour ensuite tenter de vivre de l’Evangile .
Cette approche, quoique l’on en pense , ne fonctionne plus actuellement ou l’on a tendance entrer dans la foi d’abord par la « praxis » ; ce qui éclaire le terme » athée chrétien » ou le soin du prochain est premier avant de chercher à savoir au nom. de quoi ou de qui on adopte ce comportement .
A ce propos, j’aimerais citer deux religieux dont la mission actuelle, lourde s’il en est, est de recevoir les victimes. Un éminent Jésuite qui m’a confié, humblement, se lever « athée tous les matins » et passer sa journée à « réenclencher la machine ». Et une éminente Dominicaine à qui je rapportais cette confidence avec une certaine admiration, dont la réplique spontanée a été : « Et moi, â présent, je me lève athée tous les matins et me couche de même tous les soirs ! »
Ces deux réflexions, tellement fortes, justes et vraies, m’en ont plus appris sur la foi que bien des discours.
Tout dépend de ce qu’on entend par athée bien entendu et s’il s’agit du doute le plus profond qui nous tombe dessus à un moment ou à un autre quel catho et même quel chrétien n’est pas athée en ce sens et mère Térésa et avant elle Bernadette et tant d’autres n’étaient-elles pas « athées » quand elles voyaient le Ciel vide ? Si c’est çà l’athéisme de FCT il n’a vraiment rien de particulier !
Alors s’il n’a “rien de particulier“ (manière de rabaisser l’auteur sans le dire) pourquoi ces cris d’orfraie dans l’un de vos commentaires précédents ?
Dominique,
Vous vous faites décidément une spécialité de ne pas avoir dit ce que vous avez dit mais de l’avoir dit quand même…🙂
Y a t il quelque chose à comprendre et donc à prendre en considération dans cette position systématique ?
Je crains fort que non.
Le groupe. FCT publie depuis longtemps des ouvrages de théologie et de spiritualité qui font dire aux bien-pensants qu’il aime plus l’intellectuel que l’esprit. Mais, à la différence d’Eugen DREWERMANN, qui, voici une quarantaine d’années, dévoilait la mythologie du dogme chrétien, il ne s’est pas vu exclu de quelque manière de la Sainte Mère l’Eglise..Et son abbé le soutient.
Il est évident que nombre de positions du bénédictin normalien sont trés proches de celles que professent nos « fréres séparés ». Si, voici 500 ans, la cléricature romaine avait accepté de se remettre en question au lieu de
« contre-réformer », elle n’en serait sans doute pas aussi bas aujourd’hui.
Merci de ce commentaire relatif à la Réforme et à la Contre-Réforme qui rejoint une analyse développée dans les conférences (une douzaine faute de mieux, le Covid m’ayant coupé l’herbe sous les pieds) en lien avec la sortie de mon livre Catholique en liberté. Mais comme j’ai l’intention de publier prochainement, sur ce blog, le texte de ma conférence, en deux volets, je réserve mes commentaires pour ce rendez-vous. Merci de cette contribution.
Moi, catho comme je suis, je pense qu’effectivement il est bien dommage que l’accord auquel nous avons abouti il y a quelques années avec no frères luthériens sur la justification ait été impossible il y a 500 ans
Oui, et plus généralement, l’excommunication de ces frères au XVI siècle, au lieu de discussion entre frères, a été un grand drame pour l’Eglise. Aussi, je regrette très fortement votre attitude braquée, bloquée dès qu’une réflexion vous déplait. Vos mots tendant à renvoyer de l’Eglise ceux qui ne pensent pas comme vous, en les renvoyant chez les protestants ne me parait guère fraternel, ni évangélique… Personnellement, je l’ai beaucoup trop entendu à mon encontre, quand on voulait me faire taire… Comme s’il était interdit de réfléchir, d’essayer de dire dans une langue compréhensible par les hommes et les femmes de ce temps le message du Christ. Vouloir mettre dehors les mal-pensants, une obsession de pureté ?
J’ai lu, au fur et à mesure qu’elles étaient publiées, les lettres de François Cassingena-Trévedy.
Ligne à ligne, mot après mot.
Car il ne s’agit pas de le lire seulement. Il convient d’entrer en ce qu’il dit, et les mots, les tournures, le style qu’il utilise sont l’exacte route qui permet de franchir la frontière.
Je n’ai, stricto sensu, rien appris à le lire. J’ai perçu une vie, riche et faible à la foi, lucide et questionnante.
Une parole de foi, sans les clôtures qui empêchent toute porte.
Je l’ai lu, et j’ai trouvé qu’il ne voulait pas entraîner quelque adhésion que ce soit. Totalement un « témoin ».
Un « prophète » a-t-on dit déjà dans ce blog. Oui, vraiment « prophète », et qui semble vivre en lui les oxymores que certains lui reprochent.
Il est homme de la « traversée », pour atteindre la vie, la vraie vie, et tenter de transmettre ce qu’un jour sans doute il a vraiment perçu.
Je l’ai lu, et le relis. Car le pain ne nourrit qu’une journée ou deux, et il faut recommencer.
Recommencer à naître.
Merci Victoraye, d’avoir aussi bien exprimé votre attente, partagée par tellement de chrétiens,
en moins de 10 lignes qui « respirent » la FRATERNITÉ.
René, mes compétences en ce qui concerne les moeurs journalistiques sont effectivement proches de zèro puisque je ne connais strictement personne travaillant dans le presse néanmoins permettez moi au moins d’être un peu surpris du mode de fonctionnement que vous exposez lequel me parait un peu opaque mais c’est là bien sûr une opinion de béotien.
Marie-Christine lorsqu’on me prête des propos que je n’ai jamais tenus mais que l’on croit simplement déduire de ce que j’ai dit eh bien je réagis,mais en ai-je le droit à vos yeux? Ou alors donnez-moi un exemple précis de contradiction formelle de ma part, mais il est évidement possible que cela soit dû à une évolution de ma pensée et de ma manière de l »exprimer
Merci René, comme vous j’ai lu avec attention pendant le confinement les textes essentiels du frère François Cassingena-Trévedy et du prêtre et théologien tchèque Tomás Halík.
Permettez-moi de citer la conclusion de l’une des lettres de FCT (« De la fabrique du sacré à la révolution eucharistique – Quelques propos sur le retour à la messe. ») :
« Nos églises vont ouvrir à nouveau leurs portes à tous ceux dont nous serons si heureux de revoir le visage et d’entendre la voix au terme de ces longues semaines de séparation. Fais-moi entendre ta voix, car ta voix est douce et ton visage est beau (Ct 2, 14), dit le Seigneur à son Peuple, dit la Parole de Dieu au Peuple de Dieu. Nos églises vont ouvrir bientôt leurs portes : il est temps d’y faire encore un peu de ménage. De nous mettre au clair, surtout, quant à la conception que nous nous faisons de leur finalité, c’est-à-dire de l’Eucharistie que nous y célébrons. Nos églises vont-elles ouvrir seulement pour un entre-soi confortable, pour des cérémonies où le rituel distrait du spirituel, pour la répétition de fadaises et de boniments infantiles, pour l’appel racoleur et tapageur à des émotions fugitives, pour l’entretien exténué et morose de la consommation religieuse ? Ou bien vont-elles s’ouvrir pour un questionnement et un approfondissement de nos énoncés traditionnels, pour une interprétation savoureuse de la Parole de Dieu loin de toute réduction moralisante, pour une ouverture efficace aux détresses sociales, pour une perméabilité réelle aux inquiétudes, aux doutes, aux débats des hommes et des femmes de ce temps, en un mot pour la révolution eucharistique ? Si le temps de confinement et de suspension du « culte » public nous a permis de prendre la mesure de la distance qui sépare les deux extrêmes de cette alternative, autrement dit du pas que le Seigneur de l’histoire attend de nous, alors, pour parler comme le bon roi Henri, le bénéfice que nous avons retiré valait bien quelques messes… en moins. »
Et encore cette savoureuse anecdote que racontait un prêtre de ma paroisse :
« Sur une plage, un théologien ouvre un grand livre qu’il lit avec attention. Non loin de lui, un enfant, ayant creusé un trou dans le sable, ne cesse de faire des allers et retour avec son petit seau, ramenant l’eau de la mer qu’il a puisée avant de la verser dans le trou. Au bout d’un certain temps, le théologien ferme son livre et, s’adressant à l’enfant, lui dit : « Tu ne crois pas que c’est fou de vouloir vider la mer dans un petit trou dans le sable ? » L’enfant lui répond : « C’est toi qui est fou qui veut enfermer le Mystère de Dieu dans ton petit cerveau. »
Que de belles pages dans « chroniques au temps de peste » pour dire « qu’il y a de l’eucharistie dans nos vies », et que cela peut être ritualisé judicieusement en certaines occasions. Me vient à l’esprit l’initiative de Teilhard de Chardin, lors de l’expédition de la Croisière jaune où il participait comme géologue, faisant corps avec tous, pouvant se permettre d’inviter au rituel de la célébration.
TEILHARD : Premier Janvier 1932
On voit autour de Teilhard, un groupe d’hommes composé d’une cinquantaine de personnes, de toutes conditions, mécaniciens, ingénieurs, médecins, chaussées de hautes bottes contre le froid, vêtus de pelisses, coiffé des chapkas, équipement de route en ce pays glacial, tous rassemblés autour de la haute stature de Teilhard de Chardin, et, dira-t-on, faisant corps avec lui. Tous les membres de l’expédition assistent à cette messe qu’il célèbre ce 1er janvier 1932 au cours de cette croisière jaune qui a duré plus d’une année dans des milieux particulièrement difficiles voire hostiles. Le groupe ne comptait pourtant pas un seul catholique pratiquant. L’un d’entre (Louis Audouin Dubreuil a conservé le texte de la petite allocution que Teilhard a prononcée en cette extrémité du monde.)
Texte de l’allocution de Teilhard de Chardin
Mes chers amis, nous nous trouvons réunis ce matin – dans la petite église – au cœur de la Chine, – pour commencer, en face de Dieu, l’année nouvelle.
Dieu, pour chacun de nous ici, n’a sans doute pas la même précision, la même figure. Mais, parce que nous sommes tous des hommes, nous ne pouvons pas échapper, aucun d’entre nous, au sentiment et à l’idée réfléchie que, au-dessus et en avant de nous, une énergie supérieure existe, à laquelle nous devons bien reconnaître, « puisqu’elle nous est supérieure, » l’équivalent agrandi de notre intelligence et de notre volonté.
C’est dans cette puissante Présence que nous devons nous recueillir un instant au début de cette année. A cette universelle Présence, qui nous enveloppe tous, nous nous demanderons d’abord de nous réunir, comme en un centre commun et vivant, à ceux que nous aimons et qui commencent, si loin de nous, la nouvelle année.
Nous souvenant alors de Son omni puissance, nous la prierons d’animer favorablement pour nous, nos amis et nos familles, le réseau compliqué et en apparence si incontrôlable des événements qui nous attendent au cours des mois qui viennent, – que le succès couronne nos entreprises ; que la vraie joie soit dans nos cœurs et autour de nous ; – et que, dans la mesure où la peine ne saurait nous être évitée, cette peine se transforme dans la joie supérieure de tenir notre petite place dans l’univers, et d’avoir fait ce que nous devions ! Voilà ce que Dieu peut réaliser autour de nous et en nous par son action profonde. – C’est pour que ceci arrive que je vais lui offrir, pour vous tous, cette messe, – la forme la plus haute de la prière chrétienne. (Recueilli par Louis. Audoin Dubreuil – Voir l’ouvrage « Teilhard de Chardin, une mystique de la traversée, biographie par Edtith de Héronnière. » – pages 124))
Merci de ce texte qui élève l’âme , quelle perle . Je l’ai lu et relu . Je me procurerai ce livre .
Encore merci
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