C’est un long et nécessaire processus, à l’issue incertaine, que vient d’enclencher le pape François.
(Cet article a été repris par la revue Golias Hebdo, dans son numéro 688 du 23 au 29 septembre 2021, que je remercie vivement.)
Le document préparatoire au prochain Synode de 2023 sur la synodalité (et la collégialité) dans l’Eglise a été rendu public, par le Vatican, le mardi 7 septembre. Cette publication donne le coup d’envoi d’un long processus, étalé sur deux ans. Son enjeu est considérable car il porte en germe une double révolution copernicienne pour l’Eglise. Contre une conception cléricale de l’institution, aujourd’hui mise en accusation à travers une multitude de scandales, il entend réaffirmer que c’est à l’ensemble du peuple de Dieu – invité à « marcher ensemble » (signification du mot synode) – qu’est confiée, depuis toujours, la mission d’évangélisation. Dans une Eglise catholique fortement marquée par la centralisation, au nom de l’unité, il entend ouvrir, progressivement, à une légitime diversité dans la communion. Une manière pour l’Eglise de tenter de combler le fossé qui ne cesse de se creuser entre ses modes d’exercice de l’autorité et les aspirations de nombre de ses fidèles, fils et filles de la modernité démocratique. Sans renoncer pour autant, rappelle le pape, à sa structure hiérarchique. Mince défi !
La nouveauté d’une phase de consultation « par continent »
La comparaison vient immédiatement à l’esprit entre ce Synode sur la synodalité et le précédent de 2014-2015 sur la famille. Différents, l’un et l’autre, des synodes antérieurs conformes au schéma établi en 1965 par le pape Paul VI. Comme pour le synode sur la famille, le prochain synode est prévu sur une durée de deux ans et il s’ouvre par une large consultation de l’ensemble du peuple de Dieu à travers le monde. Mais il diffère sur un autre point. Alors que le synode sur la famille prévoyait deux Assemblées synodales d’évêques successives (extraordinaire en octobre 2014 puis ordinaire en octobre 2015), celui-ci n’envisage qu’une seule Assemblée synodale à l’horizon d’octobre 2023. En revanche, et c’est là la nouveauté, elle sera précédée à l’automne 2022 par une phase « intermédiaire » au niveau de chaque continent. C’est là une innovation majeure qui dévoile bien l’horizon vers lequel le pape François veut conduire l’Eglise : un avenir où les Conférences épiscopales au niveau des Eglises locales (c’est-à-dire dans chaque pays) et les Episcopats de continents marqués par des réalités économiques, sociales, politiques et culturelles différentes, pourraient effectuer des choix pastoraux qui leurs seraient propres, étant sauf le respect d’une même doctrine commune à tous. C’est, on le sait, l’ambition du pape François, telle qu’il l’exprime avec constance depuis son élection. Cela correspond à sa conviction qu’une saine – et légitime – diversité dans la communion est la seule alternative à un centralisme uniformisateur aujourd’hui mis en échec. (1)
L’Eglise est par essence synodale
Que nous dit le texte préparatoire ? Que « Le chemin de la synodalité est précisément celui que Dieu attend de l’Eglise du troisième millénaire » expression extraite du discours du pape François lors de la célébration du 50e anniversaire de l’institution synodale. Que l’enjeu est : « La capacité d’imaginer un futur différent pour l’Église et pour ses institutions, à la hauteur de la mission qu’elle a reçue. » Que cette pratique fut celle de l’Eglise tout au long du premier millénaire puisque Saint-Jean Chrysostome lui-même estimait que « Eglise et synodalité sont synonymes » ; qu’elle resta une réalité durant le second, malgré l’accent mis progressivement sur la fonction hiérarchique dans l’Eglise ; que Vatican II la remit à l’honneur dans un souci de fidélité à la Tradition authentique et qu’il convient aujourd’hui d’y voir le prolongement naturel, dans le temps, de l’aggiornamento conciliaire (2).
Le texte rappelle, en s’appuyant sur les Ecritures, que « Tous les baptisés participent à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ » (3) Et que c’est en s’appuyant sur le sensu fidei fidelium (le « bon sens de la foi » du peuple chrétien) que doit se construire, synodalement, un processus de communion qui, nous dit le Magistère, ne peut se confondre avec une délibération de type démocratique basée sur l’émergence de majorités. De ce point de vue, la démarche synodale est d’abord et par essence une expérience de nature spirituelle où les antagonismes ne peuvent être dépassés, au service du bien de la communauté ecclésiale, qu’en se mettant les uns et les autres à l’écoute de Dieu.
« Marcher ensemble, en Eglise », mais aussi avec la société
Enfin, et cela introduit directement sa fonctionnalité, le document rappelle qu’une démarche synodale doit s’ouvrir sur une large consultation qui suppose une écoute réciproque des uns et des autres. Une écoute qui dépasse les seules frontières de nos communautés et qui doit prendre en compte, outre la voix des autres « confessions » chrétiennes, celle des plus pauvres et des exclus de nos sociétés avec lesquels nous sommes aussi appelés à « marcher ensemble ». Car la « responsabilité partagée » que sous-tend la démarche synodale concerne non seulement l’annonce de l’Evangile mais également « l’engagement à construire un monde plus beau ». La consultation qui sera lancée officiellement à Rome les 9 et 10 octobre prochain et dans tous les diocèses le dimanche suivant, s’adresse donc « «aux prêtres, aux diacres et aux fidèles laïcs de leurs Églises, tant séparément que collectivement, sans négliger l’apport précieux qui peut venir des hommes et des femmes consacrés.»
Le document préparatoire définit enfin « Dix pôles thématiques essentiels à approfondir » formulés sous forme de questions, proches de la vie de chacun, qui représentent une aide à la réflexion et à la participation, soit individuellement, soit en groupe. « Quels sont les lieux et les modalités de dialogue au sein de notre Église particulière? Comment sont gérées les divergences de vue, les conflits et les difficultés? » ou encore : « Comment est exercée l’autorité au sein de notre Église particulière? Quelles sont les pratiques de travail en équipe et de coresponsabilité? Comment sont encouragés les ministères laïcs et la prise de responsabilité de la part des fidèles? »
Il se termine sur cette envolée, extraite du discours du pape François, le 3 octobre 2018, en ouverture du Synode sur les jeunes pour rappeler que le but du Synode, et donc de cette consultation, n’est pas de produire des documents, mais de «faire germer des rêves, susciter des prophéties et des visions, faire fleurir des espérances, stimuler la confiance, bander les blessures, tisser des relations, ressusciter une aube d’espérance, apprendre l’un de l’autre, et créer un imaginaire positif qui illumine les esprits, réchauffe les cœurs, redonne des forces aux mains.»
Pas de synodalité sans évêques formés pour la faire vivre
Il appartient désormais aux Conférences épiscopales et aux évêques, dans leur diocèse respectif, de mettre en œuvre ce processus de consultation. (4) Exercice d’autant plus délicat que le calendrier romain peut venir, ici ou là, télescoper des dynamiques diocésaines déjà engagées sur la même période. Dans un article de la revue Christus, sœur Nathalie Becquart, désormais numéro deux de l’institution synodale, écrit ceci : « Pour se mettre en œuvre à tous les niveaux de l’Église tant locale qu’universelle, la synodalité a besoin de leaders aptes à conduire et accompagner des processus synodaux. Car, en régime catholique, il n’y a pas de synodalité sans primauté. (…) Pour mettre en œuvre la synodalité, pour déployer une pastorale synodale, l’Église a besoin aujourd’hui de pasteurs formés à la synodalité qui exercent un nouveau style de leadership – que l’on peut caractériser comme un leadership collaboratif – non plus vertical et clérical mais plus horizontal et coopératif. Un leadership de service qui se traduit par un nouveau rapport au pouvoir et une nouvelle manière d’exercer l’autorité qui se conçoit comme un service de la liberté. » (5) Le premier défi de ce processus synodal qui en comporte de nombreux sera bien là : permettre l’expression et la prise en considération de toutes les opinions, même celles qui exprimeront une forme de défiance vis-à-vis d’un principe hiérarchique perçu comme source de dérives cléricales… et d’abus !
La synodalité n’est pas la délibération démocratique
Un second, intimement lié au premier, sera de convaincre sur une logique de communion là où s’expriment parfois des aspirations d’une autre nature, nées de l’immersion des fidèles dans des cultures démocratiques. Or le document préparatoire est tout à fait explicite : « la consultation du Peuple de Dieu n’entraine pas que l’on se comporte à l’intérieur de l’Église selon des dynamiques propres à la démocratie, basées sur le principe de la majorité, car à la base de la participation à tout processus synodal se trouve la passion partagée pour la mission commune de l’évangélisation et non pas la représentation d’intérêts en conflit. » (n°14)
Dans son livre, Un temps pour changer publié à l’automne 2020, le pape François ne mâchait pas ses mots : « Chez les catholiques à la conscience isolée, les raisons de critiquer l’Eglise, les évêques ou le pape ne manquent jamais : soit nous sommes en retard sur notre temps, soit nous nous sommes abandonnés à la modernité ; nous ne sommes pas ce que nous devrions être ou ce que nous étions censés être. C’est ainsi qu’ils justifient leur retrait et leur scission de la marche en avant du peuple de Dieu. » Il poursuivait : « La synodalité commence par l’écoute de tout le peuple de Dieu. Une Eglise qui enseigne doit d’abord être une Eglise qui écoute. (…) Dans la dynamique d’un synode, les différences sont exprimées et polies jusqu’à ce que l’on parvienne, sinon à un consensus, du moins à une harmonie qui conserve les fines nuances de ses différences. » Mais au terme du processus : « Les disciples du Christ devraient aimer et écouter l’Eglise, la construire, en assumer la responsabilité, y compris dans ses péchés et ses échecs. Dans ces moments où l’Eglise se montre faible et pécheresse, aidons-là à se relever ; ne la condamnons pas et ne la méprisons pas, mais prenons soin d’elle comme de notre propre mère. » (6) Tout était dit, déjà, de son état d’esprit à la veille de l’ouverture de ce synode dont les conclusions, à l’horizon 2023-2024 seront suivies « de la phase de mise en œuvre qui impliquera à nouveau les Églises particulières. »
La quête de communion connait aussi ses limites et ses échecs
La quête de « communion » pour mieux dépasser les limites de la délibération démocratique ? Voilà un débat, avec les différents acteurs de la société, qui aurait de l’allure, si nous n’étions pas à ce point corsetés par les tabous de la laïcité à la française. Signe des temps ? Ce plaidoyer pour la communion est au cœur d’un ouvrage récent écrit par trois jeunes catholiques. (7) Mais dans ce “débat à la loyale“ qui traverse la conscience de nombreux catholiques attachés tant à leur Eglise qu’à la société démocratique dans laquelle ils vivent, l’arbitrage ne va pas de soi. Car la quête de communion connaît aussi ses limites et ses échecs. Vatican II fut incontestablement un grand moment de communion. La plupart de ses textes furent votés avec plus de 90% des suffrages. Ce qui n’empêcha pas le Schisme Lefebvriste. En 2007 le motu proprio de Benoît XVI Summorum pontificum fut sans doute motivé par un même désir de préserver la communion… Sauf que quatorze ans plus tard son successeur est contraint de l’annuler, précisément parce que, dans les faits, il a figé des comportement dans un « refus de communion » avec l’Eglise conciliaire.
Les quelques réflexions qui précèdent n’entendent, bien évidemment pas, relativiser l’importance de ce synode, majeur pour l’avenir de l’Eglise catholique, ni dissuader quiconque d’y apporter son concours. Elles voudraient simplement appeler chacun à une forme d’humilité et de respect au regard de jugements, parfois rapides, sur les convictions, la fidélité ou les requêtes des autres.
- On peut lire, dans cet esprit de décentralisation des responsabilités pastorales, la décision récente de François, dans son motu proprio Traditionis custodes, de confier la responsabilité du discernement dans les modalités de sa mise en œuvre à chaque évêque diocésain. De même son Exhortation apostolique post synodale sur l’Amazonie, si elle ne retenait pas l’idée d’ordonner des diacres permanents, semblait ne pas fermer la porte et renvoyer la maturation de ce dossier aux épiscopats concernés. L’un des enjeux du présent synode pouvant être de savoir si l’Eglise universelle accepte le principe d’une telle délégation. (voir le billet de mon blog)
- Ceci prouve bien que le « Concile réel » n’est pas réductible à des textes figés mais intègre un « esprit du Concile », une dynamique, une exigence qui est celle d’une inculturation permanente du message chrétien dans des sociétés diverses et plurielles en pleine évolution.
- C’est bien pourquoi chacun est baptisé « prêtre, prophète et roi » (même les femmes).
- « Pour accompagner et coordonner ce chemin synodal en France, une équipe a été constituée sous la responsabilité de Mgr Alexandre Joly, évêque auxiliaire de Rennes. L’équipe est composée du père Hugues de Woillemont, secrétaire général de la CEF ; de Guillaume Houdan, diacre du diocèse de Rouen ; de Lucie Lafleur, responsable de la pastorale des jeunes du diocèse de Belfort-Montbéliard ; et de la théologienne Agnès Desmazières, maîtresse de conférences au Centre Sèvres à Paris. » (La Croix)
- Revue Christus, n°270, avril 2021.
- Pape François, Un temps pour changer, Ed. Flammarion 2020, 224 p. (voir la recension du livre sur ce blog)
- Paul Colrat, Foucauld Giuliani, Anne Waeles, La communion qui vient, Ed. du Seuil 2021, 228 p. 20 €. J’en ferai prochainement recension dans ce blog.
POST SCRIPTUM
On lira avec grand intérêt l’interview publiée sur le site de la Vie, trois jours après la mise en ligne du présent billet, d’Arnaud Join-Lambert, théologien franco-suisse spécialiste de la synodalité, récemment nommé par le Vatican membre de la commission de la méthodologie en vue de la préparation du Synode.
Extrait : « La question de l’universel et du particulier émerge particulièrement sous ce pontificat. C’est l’une des plus grandes tensions qui soit apparue lors du synode sur l’Amazonie : peut-on faire quelque chose de spécifique pour l’Amazonie – et donc, qui ne vaille pas au niveau universel ? L’Église n’a pas pris ce chemin pour le moment. Ce point touche à la gouvernance. Quelle autonomie pour les diocèses ? Pour les conférences épiscopales ou continentales ? C’est un débat théologique assez ancien.«
Merci pour cette belle présentation du document préparatoire à cet important synode. En effet, le débat dans l’Eglise doit être franc et sincère mais il n’implique pas que ça soit la majorité qui l’emporte, car nous ne sommes pas dans le registre politique mais dans celui de la foi et du salut ce qui fait que ce que l’on recherche, ça n’est pas la façon de vivre ensemble grâce à la majorité, mais la solution du Saint-Esprit. La solution du Saint-Esprit n’est jamais la synthèse de tous les avis mais l’unité supérieure qui fait que chaque membre demeure satisfait. J’ai souvent vérifié ça dans les assemblées religieuses ou les communautés où il fallait prendre une décision. En proposant ce modèle, comme celui qu’on lit dans les Actes des Apôtres 15, 6-7 : « Les Apôtres et les Anciens se réunirent pour examiner cette affaire. Comme cela provoquait une intense discussion, Pierre se leva et leur dit … » Le processus du synode est donc clair : on examine, on discute intensément et puis à la fin, celui qui a l’autorité au nom du Seigneur tranche. Examiner sans trancher ou trancher sans avoir écouté sont peut-être les deux erreurs extrêmes à éviter. C’est l’ensemble du processus qui est vital et je me réjouis qu’il soit proposé pour l’Eglise universelle. Je ne sais pas si je vois juste mais ce que le Pape François est en train de proposer est d’une importance capitale pour l’avenir de la foi chrétienne catholique. Continuer sur le modèle autoritaire aboutirait à un suicide collectif ; se diluer dans des disputes sans fin procurerait le même résultat. Comme je ne suis pas traditionaliste ni progressiste, malgré la réprobation que j’encours, j’apprécie et même j’aime le Pape François qui nous conduit présentement au Nom du Seigneur. Il est en train de sauver le navire mais que peuvent en savoir les rats en fond de cale ? Pour ma part, je suis heureux : la solution ne sera ni intégriste ni progressiste, elle transcendera les factions et ce sera celle, inédite et toujours nouvelle, du Saint-Esprit. Je suis tellement content que je ne vois même pas que je m’envole. J’arrête donc, mais, cher René, une fois de plus, merci.
Je ne sais qui sont les rats en fond de cale ni si j’en fais partie, mais j’adhère à l’essentiel de votre commentaire qui nous fait sortir par le haut et votre enthousiasme, lié à votre foi dans le Saint Esprit, Père Pierre Vignon, fait du bien.
Complétement d’accord !!!!!!
Je retiens particulièrement, René, ce passage que vous citez du document préparatoire :
« La consultation du Peuple de Dieu n’entraine pas que l’on se comporte à l’intérieur de l’Église selon des dynamiques propres à la démocratie, basées sur le principe de la majorité, car à la base de la participation à tout processus synodal se trouve la passion partagée pour la mission commune de l’évangélisation et non pas la représentation d’intérêts en conflit. »
Je comprends que vous le souligniez. Pour autant on voit bien que c’est là une pierre d’achoppement avec la « modernité démocratique » et les aspirations partagées par nombre de croyants. Raison de plus pour en débattre… loyalement !
Sur Facebook où cet article a été mis en lien, un ami commente en ces termes : « Et si un problème majeur c’était justement la structure hiérarchique ? Un ancien consultant de McKinsey, Frédéric Laloux, a fait un travail de recherche passionnant sur l’histoire des organisations pour identifier quelles organisations étaient les plus adaptées à notre époque. Une de ses conclusions est que les organisations hiérarchiques ont et auront de plus en plus de mal à fonctionner… » Ce n’est là qu’une opinion mais qui me semble devoir être prise en considération. L’une des faiblesses de l’Eglise institution est de penser que sa spécificitén la met à l’abri et que ce qui vaut pour d’autres ne vaut pas pour elle ! Il se pourrait que ce soit une grave erreur !
Débattons, oui, mais ne cédons pas au mirage de la « modernité démocratique », je n’ai qu’une confiance limitée (euphémisme) dans le diktat de la majorité qui semble être la valeur suprême de la modernité démocratique…
J’ai été voir sur Facebook et j’ai trouvé un autre commentaire d’un ami commun : « Je suis bien d’accord avec le pape et le défi est périlleux mais l’Esprit Saint a toujours été un atout inconditionnel, parfois inattendu et à chaque fois merveilleux. Il faudra certainement beaucoup de conversions sur des plans que beaucoup ont voulu ou planifié. Les divines surprises sont peut-être devant nous !?!: »
Michel,
Sans parler du sujet de la synodalite, dont je ne ne comprends pas grand chose, je l’avoue, mais en évoquant les problèmes de la gouvernance dans les institutions humaines, depuis le début de la réflexion politique, les limites et dangers de la démocratie sont bien connues.
Pour autant, comme l’a dit Churchill, je crois, si la démocratie n’est pas le meilleur des systèmes politiques, il s’avère ( à l’expérience de l’histoire ) que c’est le moins mauvais. Et, dans les faits, elle est une des caractéristiques essentielles de la « modernité « dont il faut tenir compte.
Sur un autre plan « spirituel « , bien sûr que dans l’Eglise ( qui n’est pas une institution comme une autre ); il ne devrait pas y avoir de conflits d’intérêts mais au contraire un désir commun de « communion » et de recherche du bien commun. Cela, je le conçois très bien dans l’idéal. Cependant est ce si évident à mettre en place, les humains étant ce qu’ils sont, et les sensibilités, les opinions étant bien diverses voire parfois contradictoires, me semble t il ?
Par ailleurs, qui décide que l’Esprit saint a parlé ? Qui est en dernière instance depositaire de ses « instructions « car il faut bien décider ?
Il y a là des questions dont je ne vois pas clairement les réponses. Majorité ou primauté ? Comment associer ces deux réalités qui me paraissent a priori antagonistes ?
Ceci dit, je ne veux offenser personne.
Je fais simplement part de ma perplexité et de mes questions ( peut être dues à mon ignorance ). Et surtout j’ai mémoire que trop de personnes se sont prévalues bien vite et sans recul critique de la caution de l’Esprit saint pour assoir leur pouvoir, que « l’idéalisme angelique» et la négation de problèmes bien réels ( en particulier de conflits de personnes ou d’opinions ) ou se sont complues trop de communautés ont fini par faire des ravages.
Toutes ces questions ne me semblent pas donc pas si simples à régler et les solutions m’en paraissent bien difficiles à manier. Les difficultés ne devraient donc pas en être niées, justement par souci de vérité.
Bien sûr, Marie-Christine, toutes les questions que vous soulevez sont pertinentes, et je n’ai pas plus que vous la réponse définitive, mais je pense que vouloir calquer la synodalité sur le fonctionnement démocratique serait une erreur.
Rene,
Je n’avais pas fait attention à votre reponse claire a ce problème des structures du système.
Tout à fait d’accord.
Je pense que la synodalité est déjà une réalité dans l’Église.
Nous qui sommes nés et avons grandi ailleurs l’expérimentons au quotidien; l’Église donne l’impression de ne pas avoir le même visage partout. Seulement, les évêques n’ont pas le courage de l’afficher de manière claire, au risque de passer pour des irrévérencieux vis-à-vis de la hiérarchie romaine.
La perche est tendue une fois de plus aux responsables des Églises particulières. Ils ont dès lors du pain sur la planche en vue de la construction d’un monde plus beau.
Merci à vous, René
« consulter tout le peuple de Dieu » et qui est donc ce peule d’une part et d’autre part sur un plan bassement pratique comment fait-on pour le consulter?
Le Peuple au sens du Concile Vatican II n’est pas, comme certains l’ont parfois avancé un peu rapidement, le monde des laïcs contre les clercs et la hiérarchie, mais l’ensemble des baptisés : laïcs, religieux, clercs qu’il soient diacres, prêtres, évêques ou le pape lui-même.
La consultation ne prétend pas que chacun s’exprimera mais que ceux qui ont envie de le faire doivent pouvoir le faire, selon des modalités qui appartiennent à la fois aux Conférences épicopales et aux évêques dans leur diocèse. Pour ce que j’ai compris…
Considérations sans ordre, ni pour, ni contre, mais en contrepoint comme toujours, à propos du synode sur la synodalité:
-Qu’Eglise soit synonyme de synodalité est à la fois vrai et stimulant: une Assemblée qui marche ensemble, se convertit ensemble, reçoit (et ne fait pas) son salut ensemble.
– Le pouvoir n’est pas (en tant que tel)un service, mais est au « service de la liberté ». Si c’est la définition qui émerge des débats sur le cléricalisme, je trouve ce débat plus fécond qu’attendu, moi qui n’en attendais que confusion, le concept de « cléricalisme » étant théologiquement flou et « quand c’est flou, il y a un loup », la formule est devenue proverbiale depuis Martine Aubry.
-L’Eglise ne s’est pas affranchie de sa peur de la démocratie, pour que ce document préparatoire la définisse comme « la représentation d’intérêts en conflit », comme si la discussion d’où jaillit la lumière ne cherchait pas à les résoudre, comme si le forum était réductible à une foire d’empoigne et comme si la vie en commun ne comportait pas, au-delà des tensions inévitables qu’entraîne la promiscuités, des affinités, la volonté de tracer un « avenir en commun » comme dirait J.L. Mélenchon et de chercher ensemble le « bien commun » comme dit la Tradition de l’Eglise. L’Eglise (et singulièrement le pape actuel, dans la tradition péroniste), semblent préférer le populisme à la démocratie.
-Ironie du calendrier, ce synode sur la synodalité intervient peu après la parution du motu proprio « traditionis custodes », qui bride l’expression liturgique d’une piété populaire ancestrale, quoi qu’on puisse penser de l’agressivité des dévots de cette piété, qui se montrent fort peu attachés au caractère apostolique de l’Eglise à force de se croire plus catholiques que le pape. Le populisme de l’Eglise a donc aussi ses limites.
-Le magistère de l’Eglise s’est engoncé dans une canonicité documentaire qui se voudrait issue, sur la forme, du caractère épistolaire des exhortations apostoliques de Pierre, Paul, Jacques, Jean ou encore Jude. Cette tradition épistolaire a l’inconvénient de rendre très juridique la religion de l’affranchissement de la loi, comme le proclament précisément les épîtres de saint Paul aux Galates et aux Romains. Elle fige aussi la manière qu’a la Parole de se proférer qui, verbale en tant qu’issue du Christ-Verbe, gagne à être portée par l’oralité. Le canon de la messe, par exemple, est beaucoup trop littéraire. A cet égard, il est heureux qu’il n’y ait pas seulement la lettre, mais aussi un esprit du concile, dont les synodes sont l’actualisation et le prolongement.
-A condition d’éviter deux écueils:
-L’autoréférentialité (un « synode sur la synodalité » n’est pas très rassurant pour éviter cet écueil). Il ne faudrait pas que ce synode soit une consultation de la démocratie du « Cause toujours » comme est souvent la démocratie participative, dans la « praxis » de laquelle s’inscrit la forme synodale.
-Et le fait de marcher pour prouver le mouvement en marchant, sans autre but que la marche et le mouvement. Ce qui distingue les « serviteurs » que nous étions des « amis » que nous Lui sommes devenus, le Christ nous l’explique en propres termes: le serviteur ne connaît pas les desseins de son maître. A ses amis, on dit où on veut aller. La vie est jalonnée d’imprévus et comme telle, elle est une vaste improvisation. Moi qui aime à surprendre, j’aime le « Dieu des surprises ». Mais il ne faudrait pas qu’à force de se méfier de la doctrine, nous soyons perméables à tout « vent de doctrine », errant comme un bateau sur la mer des choses. Le flottement est aussi dangereux que la rigidité. Le flottement dans la mystique, c’est l’évanescence de la stagnation.
-Il est heureux d’appeler à la responsabilité des laïques, mais les laïques veulent-ils prendre des responsabilités? Veulent-ils se retrousser les manches? Veulent-ils prendre leur balai et leur seau pour faire le ménage dans l’Eglise? Veulent-ils « réparer l’Eglise »?
Comme souvent répondre à toutes vos interpellations demanderait des pages et des pages. Ce qui n’est pas une critique.
Je retiendrai votre réflexion sur la démocratie dont vous écrivez : « L’Eglise ne s’est pas affranchie de sa peur de la démocratie. » ce qui est vrai. Je crois que la question est au cœur du problème. Si j’ai bien suivi l’actualité, le crois que cette question du sensus fidei fidelium (expression du bon sens de la foi commun à tous les baptisés) était au cœur de l’intervention de la conférence de rentrée de l’Institut catholique de Paris, donnée conjointement par le cardinal Mario Grech et sœur Nathalie Becquart (N° 1 et 2 de l’institution synodale).
Sans doute les orateurs y ont-ils développé cette idée, chère à la Commission théologique internationale, qu’il ne faut pas confondre opinion publique dans l’Eglise et sensus fidei, ce dernier demandant à être « discerné » dans son authenticité… par celui qui exerce l’autorité. Et c’est bien là que le bât blesse. Nos démocraties, pour éviter les emballements, ont imaginé le concept de vote qualifié au-delà de 50% des suffrages pour certaines décisions importantes, comme la réforme de la Constitution par exemple, en France.
C’est également le cas des procédures synodales dans l’Eglise puisque les orientations mises au vote doivent être approuvées aux 2/3 des votants. On pourrait imaginer que c’est suffisant ! Eh bien non, le législateur (évêque ou pape) garde le pouvoir de décider in fine s’il retient ou non la proposition sans avoir à se justifier. On comprend l’intention de parvenir à une sorte de consensus (communion) sauf que l’expérience nous montre que c’est illusoire, même à ce stade, comme je l’ai illustré dans mon billet avec le les décisions du Concile, votées à la quasi unanimité, qui n’ont pas empêché le schisme.
J’ai longtemps siégé au Conseil d’administration d’une association catholique de renom qui avait intégré cette idée de communion dans son mode de fonctionnement. Lors des séances du CA, chacun était invité à s’exprimer en toute liberté. Au terme de ce tour de table c’est le Président qui tranchait « en son âme et conscience ». Naïvement, il m’est arrivé une fois de suggérer qu’on mette la décision au vote. J’ai cru que j’allais être foudroyé sur place. J’ai gardé de cette expérience associative un souvenir partagé lié à cette illusion de prétendre dépasser la délibération démocratique en faisant appel au sens du bien commun sensé être incarné par le chef. Comme si les membres du CA ne partageaient pas une même exigence éthique.
Il est des évolutions sociétales qui finiront par s’imposer à l’Eglise qu’elle le veuille ou non. Elles touchent, à mon avis, la question homosexuelle, l’égalité des femmes et la requête démocratique. On peut m’opposer tous les arguments pseudo théologiques ou exégétiques qu’on voudra… ma conviction est totale.
Julien, René,
Pour compléter peut être vos réflexions vraiment très intéressantes sur la democratie, il est dommage en effet de résumer cette dernière à l’arbitrage par la majorité de divergences d’intérêts ou d’opinions ( qui existent bien sûr ). La démocratie suppose au préalable un consensus sur les valeurs à défendre. Une majorité peut aller contre ses valeurs si elle n’a pas ou refuse de prendre conscience du fondement comme du but des décisions prises en démocratie, par exemple en portant au pouvoir un dictateur, comme cela s’est vu dans l’histoire. Toute décision de la majorité n’est pas en effet obligatoirement legitime.
En ce sens, en France, la République et ses valeurs de défense de la liberté, de l’égalité et de la fraternité donne un cap à la démocratie et fonde sa légitimité.
Rousseau, se référant aux Anciens, parlait déjà ainsi de République ( « res publica » si on en est à l’étymologie ) non de démocratie, pour montrer qu’un peuple n’a pas le droit de renoncer à sa liberté et de prendre des décisions, meme majoritairement, pour s’asservir lui meme a un tyran ou a un démagogue ( populisme ).
Bergson conçoit la démocratie comme un système éthique; la devise de la République française devant, selon lui, être lue à l’envers, la fraternité exigeant l’égalité entre tous et l’égalité étant la condition de la liberté c’est à dire de l’absence de domination du plus faible par le plus fort ( principe, entre autres, de l’égalité de tous devant la loi )
Pour en revenir au sujet, la combinaison du système de gouvernement monarchique de l’Eglise et de la consultation de type « démocratique » me semble par conséquent bien difficile à mettre en œuvre. Deux légitimités différentes s’y affrontant. Ce n’est, bien entendu, que mon opinion qui peut être basée sur des confusions dues à une ignorance.
Votre dernier paragraphe souligne, à mes yeux, tout l’enjeu de ce synode. Car les deux logiques se défendent. Remettre la décision finale à une autorité peut en effet permettre d’échapper à des rapports de forces qui ne sont pas toujours absents de la délibération démocratique et que l’on maquille aisément en volonté populaire. Ce n’est pas si simple. Et « entendre » réellement ce que dit le peuple chrétien quitte à revisiter telle ou telle disposition du Magistère peut être aussi une manière de respecter, chez lui, la présence de l’Esprit. Nous sommes-là sur un chemin de crête. Il est possible que le panachage entre les deux logiques ne soit pas le même dans toutes les cultures, sur tous les continents. C’est bien pourquoi il est aujourd’hui essentiel de pouvoir introduire une part d’autonomie et d’initiative au niveau des Eglises locales et des Episcopats par continent… ce qui doit être validé par le synode. C’est là son principal en jeu.
Merci René de poser en termes nuancés les enjeux car en effet le « sensus fidei » ou le « sensus fidelium » heureusement redécouvert au Concile Vatican II ne peut être assimilé à une simple opinion majoritaire.
Cela est particulièrement délicat en ces temps de médiatisation dans les réseaux sociaux et de risque de manipulation de l’opinion.
Nous sommes en effet sur « un chemin de crête », et il y faut beaucoup d’humilité.
Je ne suis pas certain que la réponse se trouve dans la délégation par pays ou par continent car d’une part ces continents ne constituent pas un bloc homogène et d’autre part il me paraît opportun de s’enrichir des autres cultures.
Pour m’en tenir à la réflexion de votre dernier paragraphe, je crois pourtant que c’est la seule porte de sortie imaginable. Si l’Eglise n’est pas une démocratie elle n’en a pas moins connu, à travers l’Histoire, des pratiques démocratiques. L’essence même de la vie monastique n’est-elle pas démocratique dans la désignation du père abbé et la tenue des chapitres ? Sauf qu’une fois élu le père Abbé incarne en effet l’autorité et sans doute aussi le pouvoir. C’est, à mon sens, d’ans l’articulation entre autorité et pouvoir que se situe la réponse à la question qui nous est posée. Ne peut-on reconnaître une autorité d’origine divine exerçant un pouvoir tempéré par des pratiques proches du vécu démocratique ? Je cherche avec vous !
L’Eglise devrait dédramatiser la démocratie. Au moment de « La manif pour tous », je n’étais pas encore banni du forum catholique (qui serait plus justement baptisé « forum traditionaliste »), modéré au gré de ses humeurs par un petit chef qui ne représente que lui-même et certainement pas toute la mouvance lefébvriste, mais qui a ses raisons et ses blessures d’enfance pour agir comme il le fait. Parmi d’autres, j’avais soutenu que le mariage pour tous devrait être soumis à référendum après une révision constitutionnelle qui permettrait à la question d’être posée. Le modérateur me répondit: « Comme si la vérité pouvait être mise au voix! » Passée ma stupéfaction, car il ne s’agissait pas de cela, j’ai réfléchi à son interpellation et je me suis dit que les « ultras » comme disait Stendhal, faisaient erreur sur leur conception de la démocratie. La démocratie ne prétend pas mettre la vérité aux voix. La démocratie n’a pas l’ambition de décider du vrai. Elle essaie de décider du bien, du mieux possible, du moindre mal pour une société donnée se déterminant à un instant T. En fin de compte, elle veut moins décider de tout cela qu’elle ne mesure le degré d’adhésion d’une société au vrai ou à la volonté de Dieu, s’il faut à toute force adopter un critère théologique ou de vérité dans la décision démocratique. La démocratie mesure, s’il faut absolument en juger, le degré d’adhésion d’une société donée à la Volonté de Dieu, telle que Dieu doive répudier ou non ladite société, comme Il est censé l’avoir fait maintes et maintes fois pour Son peuple Israël, au fil du balancier constant de ses rébellions et de ses conversions.
L’Eglise devrait dédramatiser la démocratie, mais ce n’est pas facile, car elle a un double passif avec la démocratie: le passif théocratique des monarchies très-chrétiennes qui portaient leur garantie séculière de son primat spirituel, et un passif venu du fait que l’Eglise n’a jamais pratiqué la démocratie, ce qui ne se fit pas dès les temps apostoliques, où l’Esprit-Saint était mis en tiers des décisions conciliaires des apôtres et où, pour s’assurer de ce qu’Il voulait, on se fiait au tirage au sort. Or, n’en déplaise aux partisans de la démocratie directe qu’ils croient être la plus pure, rien n’est plus contraire à la démocratie, régime de la décision rationnelle, que le tirage au sort, remise entre les mains d’une boule de cristal irrationnelle.
Avoir l’ambition de décider du bien n’est pas plus assuré que décider du vrai !
C’est vrai.
Disons alors le moindre « mal «, ou plutôt le plus « émancipateur «, le moins néfaste au bien être matériel et psychique des générations présentes et futures, au respect des droits humains, dans une société donnée.
Pas facile…
Si l’on se veut chrétien, il est bien évident que l’on a foi dans l’intervention de l’Esprit Saint.
Le problème est en effet de comprendre et d’accepter par avance les modalités de son intervention.
Et de toute façon, quelques soient ces modalités, il y faut de la part de chacun, me semble t il, grande ouverture à l’opinion des autres et donc grand désir de conversion pour échapper aux blocages et crispations personnels et collectifs, chacun ayant a priori son « pré carre », ses positions à défendre.
C’est donc d’abord un pari sur la conversion à la responsabilité de chacun pour tous, et surtout des plus faibles, des « différents « ,qui comporte le risque d’echouer puisqu’elle dépend de la liberté toujours imprévisible des uns et des autres, sans négliger le poids des structures existantes.
Il se pourrait cependant que l’Esprit Saint « parle « dans et par cette conversion personnelle et collective toujours à reprendre.
Du moins c’est comme cela que je peux vraiment le comprendre.
Pour faire le parallèle,( et non l’assimilation pure et simple ni la différence radicale ), la démocratie suppose un accord sur des valeurs préalables à défendre qui comporte une part d’éthique( ne serait ce que par le renoncement à la violence pour faire prévaloir ses intérêts ), la synodalite suppose au préalable un désir d’écoute réciproque et de conversion de tous.
Serions-nous en train de conjuguer l’ἐκκλησία et le σύλλογος ? La traduction n’est pas une simple transcription.
ἐκκλησία : assemblée par convocation, assemblée du peuple, lieu de réunion pour une assemblée
σύλλογος : rassemblement, réunion, assemblée accidentelle, colloque, entretien
https://www.universalis.fr/encyclopedie/ecclesiologie/1-les-origines-et-les-sens- du-mot-eglise/
Les origines et les sens du mot « église »
Le réflexion sur l’Église est liée à l’origine du terme. Le mot « église » vient du latin ecclesia, simple transcription du grec ἐκκλησία qui, comme εὐχαριστία, ἀπόστολος, n’a pas été traduit par les chrétiens de langue latine afin de lui garder sa signification primitive. Les chrétiens de langue anglo-saxonne, au contraire, ont adopté plus tard un terme de la langue populaire, Kirche, church. Le mot grec ecclesia, abréviation de ἐκκλησία του̃ Κυρίου (assemblée du Seigneur), traduit l’expression biblique qahal Yahvé, le « peuple de Dieu ». Cette expression apparaît dans la Bible surtout à trois moments de l’histoire du peuple juif : au temps de l’Exode, elle désigne la communauté du désert sortie de la servitude d’Égypte, la coalition des tribus en marche vers la Terre promise ; lors de la réforme du roi Josias et de la nouvelle promulgation de la loi (Deutéronome), l’expression apparaît chargée du contenu de la prédication des prophètes : elle exprime l’idée de l’élection du peuple d’Israël, témoin de Yahvé devant les nations (cf. Is., XLIX, 22) ; après l’exil de Babylone, elle désigne l’assemblée culturelle des juifs dispersés et rassemblés autour du Temple de Jérusalem, dans l’observance de la Torah et l’offrande d’un sacrifice spirituel. Dans la version grecque des Septante, qahal est traduit en général par ἐκκλησία, mais quelquefois aussi par συναγωγή.
Dans le Nouveau Testament, l’ἐκκλησία désigne la communauté des derniers temps, le « reste d’Israël » qui confesse Jésus au nom de tout le peuple comme le Messie attendu. Le mot est fréquent chez saint Paul, et il est probable qu’il a été emprunté par l’apôtre à la communauté de Jérusalem. On le rencontre, en effet, dans l’Évangile judéo-chrétien de Matthieu (XVI, 18 ; XVIII, 17) et dans les […]
… et le mot σύλλογος signifie parler avec
Pour ceux qui ne savent pas lire l’alphabet grec, ce serait gentil de traduire. Merci !
Marie-Christine, je renvoie car ma réponse n’a pas dû passer jusqu’à René…
Le mot grec σύλλογος (sýllogos) est composé de σύν (syn, « avec ») et λόγος (logos, « parole ») et signifie « parler avec ».
C’est ce que nous faisons ici !
Et entre le 1) et le 2) : Eucharistia (grâce, merci).
Encore aujourd’hui les grecs disent dans le langage profane « εὐχαριστῶ » (eucharistô), prononcé aujourd’hui efkaristô pour dire « merci ».
René, vos chroniques suscitent un torrent de commentaires…Trop littéraires….
comme le canon de la messe.
Comment appréhender l’Eglse sans vous ?..
Un torrent c’est beaucoup dire ! Je sais en revanche qu’elles sont lues régulièrement par des fidéles de ce blog qui ne commentent jamais, parce qu’ils n’osent pas. C’est dommage.
Trop littéraires ? Je ne sais pas. Mais c’est vrai que certaines questions ne sont pas faciles, supposent des réponses également complexes qui peuvent paraître peu accessibles aux non initiés.
Je ne pense pas être indispensable pour appréhender l’Eglise. Tant mieux si mes contributions iadent certains à s’y retrouver, et à accéder à un débat ouvert là où il est souvent inexistant.
Comme j’ai du mal à comprendre, et que j’ai envie de comprendre, je vais poser deux questions probablement stupides, qu’on me pardonne :
Comment quelqu’un peut-il trancher en tenant compte de l’avis de tous et en apportant, même à peu près, satisfaction à tout le monde ?
Par ailleurs, je ne m’y connais pas, mais existe-t-il autre chose que la « monarchie » ou la démocratie ? Si oui, est-ce parce qu’on compte ici sur l’Esprit Saint ? Dans ce cas, comment sait-on que celui-ci a parlé ? Qui en décide ??
A vrai dire, Anne, ce n’est pas nouveau, relisez le chapitre 15 des Actes des Apôtres relatant le fameux « Concile de Jérusalem » :
« L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci, qui s’imposent » (Actes 15, 28)
Bonjour,
Voyez l’exemple d’humane vitea et vous aurez la réponse à vos questions. Voyez aussi l’exemple des diacres mariés en Amazonie que le pape souhaitait ordonner
C’est ceux qui sont derrière que vous ne connaissez qui décident ……
A Michel et Michel,
Merci pour vos réponses. Je ne sais pas pourquoi, aucune des deux ne me rassure.
Je pense que beaucoup de clés sont à présent dans les mains des fidèles. Comme le dit Julien, voudront-ils saisir l’occasion ? Et dans quel sens ?
« mais existe-t-il autre chose que la « monarchie » ou la démocratie ? » Oui, Anne, il existe l’aristocratie. L’aristocratie se définit comme « le gouvernement des meilleurs ». L’aristocratie ne serait-elle pas le nom d’une Eglise cléricale, gouvernée par les clercs, par ceux qui se croient ou qu’on ordonne, car on les croit les meilleurs? L’Eglise a été vue comme « une monarchie de monarchies », où chaque évêque était empereur en son royaume en tant que lieutenant du roi des cieux. Le Royaume de Dieu semble être monarchique. L’idée de hiérarchie est étymologiquement liée à celle de sacré. Aujourd’hui, il semble qu’on répudie le sacré, comme verticalité peut-être, mais avant tout comme séparation. Car le sacré désigne l’espace séparé et réservé. Or nous sommes dans une société qui refuse toute discrimination. Je ne sais pas si c’est bon ou mauvais, mais il risque d’en résulter une spiritualité horizontale. Quand je dis que je ne sais pas si c’est bon ou mauvais, ce n’est pas qu’un mot, je ne fais pas fausse profession de neutralité axiologique, car d’accord, j’aimerais aller au ciel et j’aimerais mettre du ciel dans ma vie,et pas seulement du poivre ou du piment; mais « le Royaume des cieux est au-dedans de nous ».
Je pense Julien, que le sacré n’est pas où le place l’institition. Comme vous le dites très bien, « le Royaume est au-dedans de nous ».
Et je réalise, peut-être parce que je suis une mécréante, en lisant tous ces commentaires passionnants, combien cette notion de « hiérarchie », de mise à part, de séparation entre sacré et profane, entre clercs et laïcs, entre celui qui sait et celui qui reçoit, entre celui qui pense connaitre Dieu et celui qui ne le connaît pas ou mal, entre l’élu et le moins élu, le donné et le moins donné… m’a pesé et a pesé sur toute ma vie dans l’Eglise.
Et je ne comprends plus ce fonctionnement ecclésial. Du moins je ne peux plus le relier à une « amitié » avec Dieu, à ce que j’ai, ce que chacun a en soi de plus intime.
Anne, Julien
Il me semble que le Christianisme est justement la « religion « de la fin de la séparation entre le sacré et le profane ( « pro fanum « = devant, à l’extérieur du temple ). De par l’Incarnation, toute activité profane devient « sacrée « et inversement le « sacré « ( présence de Dieu par l’Esprit Saint ) est révélé se manifester en tout et en tous qu’Il transfigure en retour.
( voir le dialogue du Christ avec la Samaritaine, l’adoration en « Esprit et en vérité « et non en tel ou tel lieu précis- en particulier le Temple– considère comme « sacré «, ses démeles avec la caste sacerdotale, les écrits de Paul sur « l’unique sacerdoce, l’unique sacrifice du Christ, unique grand prêtre », le Chrétien en son corps même, a priori « profane » ; « Temple de l’Esprit Saint » etc.. )
La dimension verticale de la Transcendance n’est pas du tout abolie. Elle change de « lieu » et, même cachée, s’exprime dans l’âme, comme dans toute la création en attente de son plein achèvement. « Dieu plus intime que l’intime de moi même « écrit en ce sens saint Augustin.
Le Christianisme signerait donc la fin de la religion considérée comme le lien établi entre deux entités radicalement séparées; lien qu’il faudrait constamment retablir par le culte ( en amadouant les divinités par offrandes et sacrifices ).
Mais des relents de cette séparation entre profane et sacré; caractéristique de toute religion, ce fond inconscient et archaïque de religiosité païenne, peuvent être fortement présents en Christianisme, de diverses façons,( à l’extrême, tradi comme charismatique ), en confondant par exemple le service « demandé à des clercs « séparés « ou des hommes directement inspirés par l’Esprit Saint, avec le pouvoir absolu sur les âmes .à la fois effrayant et séduisant, du « sacré » païen ( Le « cléricalisme « n’étant pas ainsi seul en cause à mon avis ). De même que l’héritage de la philosophie grecque, résumé en son mépris du corps et de la vie terrestre, n’est pas à négliger non plus.
Marie-Christine,à vous lire il me semble qu’au fond de vous vous êtes de mentalité réformée (ce n’est évidemment pas une injure chez moi bien sûr)
Dans son ouvrage (en libre service) SOCIÉTÉ, ÉCONOMIE ET CIVILISATION, Bernard Billaudot donne, à la page 595, la formule de la construction des trois formes pures de toute organisation intermédiaire (voire globale) moderne :
1.Hiérarchie : valeur de référence pour justifier le collectif ; mode de règlement des transactions internes, la planification
2.Marché : valeur de référence pour justifier la liberté ; mode de règlement des transactions internes, le marchandage
3.Auto-organisation : valeur de référence pour justifier l’efficacité technique ; mode de règlement des transactions internes, la direction
La formule de toute organisation intermédiaire moderne est donc celle dont les pôles sont ces trois formes idéal-typiques. Toute organisation concrète relève rarement d’une seule de ces trois formes pures ; le plus souvent, toute organisation concrète se comprend en tant que combinaison des trois en diverses proportions. Il n’en reste pas moins que, sauf exception, l’une d’entre elles est dominante.
https://books.openedition.org/emsha/422
On peut imaginer une Eglise qui soit simultanément monarchique et démocratique, comme l’Angleterre est une monarchie tout en étant un pays démocratique (peut-être même plus démocratique que notre république, je pense à l’application du Brexit vs la mise en place du traité de Lisbonne pour contrer le rejet par le peuple du traité de Rome).
Il y aurait alors un genre de « grand pape », garant des traditions et de l’union de tous les Chrétiens, dont le périmètre serait restreint et bien défini, par exemple le Kerygme. Il ne se prononcerait pas sur les affaires courantes – comme la reine d’Angleterre ne se prononce pas sur la politique de ses ministres, même s’ils lui rendent compte régulièrement de leur action.
Et localement, des églises ou des communautés religieuses de sensibilités différentes, certaines avec des prêtres mariés, femmes, certains élus par leurs fidèles, d’autre choisis par un collège de pairs, d’autres sans prêtres, etc… Les membres de la curie – sorte d’aristocratie – viendraient régulièrement visiter les communautés, non pour les diriger mais comme symbole de l’unité de tous les chrétiens.
On pourrait imaginer que les représentants des différentes églises se rencontrent pour échanger sur divers sujets (l’homosexualité, les règles de la communion, etc…), enrichir leur vision dans la diversité, puis s’en retournent avec de nouvelles idées pour leurs églises locales. L’important est que les représentants ne votent pas pour figer la vérité, mais qu’ils dialoguent pour savoir quelle décisions prendre chacun dans leur communauté propre.
Oui Marie-Christine, je suis bien d’accord.
L’homme est par essence « vertical » et en attente de la transfiguration comme toute la création. Nul besoin d’introduire du sacré dans tous les coins en le séparant soigneusement du profane, puisque, depuis le Christ, il est normalement partout,
au moins en espérance. Encore faut-il le voir. Je me suis souvent fait la réflexion que d’une certaine manière nous en étions encore au stade vétéro-testamentaire. Sans doute parce que le bouleversement apporté par le Christ, qui fait toutes choses radicalement nouvelles , était à la limite du concevable. Il est inouï. Il faut lire à ce propos le splendide essai de François Jullien, agnostique, « Ressources du christianisme mais sans y entrer par la foi ».
Peut-on attendre aujourd’hui une « double révolution copernicienne », c’est-à-dire une remise en cause de certains dogmes fondateurs ? après l’annonce du prochain synode 2023, on aimerait bien y croire.
Ce que la science nous apprend aujourd’hui du passé de l’évolution des espèces et de l’homme ne permet plus de maintenir la croyance à un premier couple humain doté de privilèges extraordinaires, exempt de la mort, vivant dans un paradis terrestre.
Le jésuite et paléontologue Teilhard de Chardin déclarait : « on n’a pas retrouvé la trace…et capable de commettre, en toute liberté et en pleine conscience, une faute énorme méritant une punition exemplaire. »
Jean Delumeau concluant dans son livre L’avenir de Dieu : « Nous entrevoyons au contraire l’humanité des origines se dégageant péniblement de l’animalité, apprenant péniblement à se tenir debout et à parler et développant peu à peu l’usage de la liberté. Face à l’évidence scientifique de l’évolution, faut-il avec ceux qui croient encore à la Création en six jours, nous engager dans une nouvelle affaire Galilée ? »
Sur la condamnation de l’humanité à la mort, il est clair que la mort, si angoissante soit-elle, est un processus lié à la reproduction sexuée».
Cette remise en cause du dogme du péché originel par Teilhard de Chardin, Jean Delumeau, François Cassinguena-Trévedy et bien d’autres n’est pas sans conséquences et Benoît XVI reconnait, sans détour, les conséquences d’un tel désaveu : « accepter la vision teilhardienne de l’évolution revient à renverser la perspective du christianisme ».
Ce qui faut observer c’est que cette notion de péché originel est totalement absente des évangiles et que Jésus n’a jamais parlé du péché originel, ni s’est prononcé sur l’origine du mal.
Cependant François Cassinguena-Tévedy nous prévient : « qu’en monde catholique cette démarche se heurte à un triple écueil : l’incompatibilité définitive du concept de péché originel, dans son acception traditionnelle, avec l’acquis des sciences humaines; l’idolâtrie de la mariologie qui nourrit un discours obsessionnel sur la virginité réduite à une idéologie matérialiste; enfin, la « dangereuse fascination du prêtre séparé, supérieur, environné en imbu d’une sacralité qui l’ignifuge » en totale contradiction avec les textes du Nouveau Testament. »
Pour Jacques Neirynck : « Si l’on faisait l’effort capital de se débarrasser du dogme du péché originel, d’imposer des croyances invraisemblables, il serait plus facile alors d’abandonner une culture patriarcale, la relégation des femmes, le blâme des homosexuels, la complicité avec les abus sexuels.
François Cassinguena-Trévedy estime que : « l’état des lieux qu’il nous incombe de faire n’est pas seulement d’ordre institutionnel, éthique, politique, il est d’ordre métaphysique ». Parce que nous sommes entrés dans “une grande nuit commune de la foi“. Parce que « des pans entiers de notre édifice intérieur, de nos représentations familières et de nos certitudes tranquilles se sont effondrés »
Et qu’il devient urgent de sortir d’une approche mythologique concernant l’origine du monde et de l’homme, les origines mêmes de Jésus, la résurrection ou les “fins dernières“.
Afin de passer « de la mythologie chrétienne à la théologie chrétienne ».
Le défi de ce synode est donc de taille et malgré ma foi chrétienne j’ai quelques doutes sur l’action de l’Esprit Saint, le même qui n’a pas su éclairer les auteurs de livre de la Genèse, environ 500 ans avant JC.
J’ai bien peur que les conclusions de ce synode soient une fois de plus dictées par la politique et l’acceptabilité d’une partie des croyants traditionnalistes. Une politique des petits pas pour ne froisser personne.
Bernard JANUEL
Je me retrouve ici et là dans votre réflexion. Sauf peut-être lorsque vous écrivez : « j’ai quelques doutes sur l’action de l’Esprit Saint, le même qui n’a pas su éclairer les auteurs de livre de la Genèse, environ 500 ans avant JC. » Ce qui semble signifier que les auteurs auxquels vous faites référence auraient du, voici deux-mille six cents ans, écrire avec les codes qui sont aujourd’hui les nôtres. Cette « écriture sous la dictée » me semble plus proche du Coran que de la Bible. Si en revanche, on considère que les auteurs ont été inspirés par ce Dieu dont ils sentaient la présence et tentaient de décrypter les intentions à l’égard de l’humanité, alors ils n’ont pu le faire qu’à partir de la manière de penser et des connaissances qui étaient les leurs. Moi cela ne me trouble pas. Mais ça suppose qu’on sache aujourd’hui « décoder » précisément ces textes sacrés.
Sauf que ce n’est pas à mon sens le propos du synode. J’ai lu ailleurs, pareillement, que ce synode serait un échec dans la mesure où il n’aborderait aucune des questions qui fâchent, à l’ordre du jour du synode allemand : sexualité, place des femmes dans l’Eglise, célibat des prêtres. En réalité c’est le quatrième axe de réflexion du synode allemand qui me semble être le plus « dans la ligne » du synode qui s’ouvre : l’exercice du pouvoir dans l’Eglise. Car en réalité l’enjeu ici est moins ici de trancher par exemple sur le célibat des prêtres que de décider qui a autorité – ou peut se voir reconnaître par le synode – autorité pour trancher : le pape seul, ou aussi, par exemple sur la question de l’ordination de diacres permanents, les épiscopats locaux comme en Amazonie ? Sur la place des femmes, sujet éminemment culturel, ne pourrait-on rien faire en Europe Occidentale uniquement parce que les évêques africains y seraient hostiles ? C’est je crois, dans un premier temps, ce type de carcan que le pape François voudrait briser.
Cela peut sembler minime mais c’est déjà considérable !
Pour le reste, les questions restent posées en effet en termes de réexamen des fondements de la doctrine. Je l’ai souvent écrit : François n’est pas un réformateur. Il souhaite aller le plus loin possible dans une ouverture pastorale à propos de laquelle le Synode pourrait déterminer la marge de manœuvre des différents acteurs. Rien de plus ! D’aucuns vont juger que c’est déjà hérétique. D’autres que c’est insuffisant !
« J’ai bien peur que les conclusions de ce synode soient une fois de plus dictées…. » Vos craintes sont tout à fait fondées , voyez l’article publié par le journal La Croix hier et concernant la charge de benoît 16 contre l’homosexualité et la sexualité en général dans son nouveau livre rendu public le 16/09. Bien sur je doute qu’à son age benoît 16 écrive encore des livres mais c’est la clique qu’il y a derrière les Burke Sarah Schneider et autres qui dirigent
Etonnamment le Pape François a préfacé ce livre . C’est vraiment à désespérer
Mais si l’homme est innocent depuis toujours était-il donc nécessaire que Dieu envoie son fils mourir sur la croix? A toutes fins utiles je suis nullement fondamentaliste et ne prends pas l’Ancien Testament pour un livre scientifique
Vous me semblez prisonnier de la lecture qui a été faite pendant des siècles de la faute et de la Rédemption et que chacun acceptait parce qu’elle était compatible avec la raison. Mais peut-on raisonner de la même manière après Copernic, Darwin et Freud ? Nul, à ma connaissance, ne conteste l’existence du mal, notamment en l’être humain. Ce qui reste un profond mystère. Faut-il à tout prix s’encombrer d’un récit mythique aujourd’hui contredit par la théorie de l’évolution, reconnue par l’Eglise, et contraire à tout bon sens comme à l’enseignemet de l’Evangile en termes de « péché héréditaire » ? Ne peut-on revisiter le rôle salvateur du Christ venu vaincre la mort autrement que comme rétribution à l’égard de son Père offensé par la désobéissance d’Adam et Eve ? Je me crois aujourd’hui en mesure d’assumer l’essentiel de la Christologie sans m’encombrer du péché originel.
Borné,comme je le suis pour moi Copernic , Darwin Freud ne sont pas des personnages secondaires loin de là, mais j’ai la faiblesse de croire que Paul n’est nullement un personnage secondaire lui non plus même si bien évidemment il ne connaissait rien de ces personnages.
et puis quoi « le Christ venu vaincre la Mort »argument auquel on peut facilement répondre que la mort est toujours là et bien là.
Rassurez-vous , moi non plus je n’en suis plus à chanter « Minuit Chrétiens » de même que la notion de courroux de Dieu dont parle tant l’Ancien Testament mais aussi ..Jésus dans certaines de ses paraboles me trouble quelque peu mais je ne crois pas que l’on puisse pour autant jeter aux oubliettes cette notion
Ah la tentation de créer Dieu à notre » image et à notre ressemblance » est toujours là
Il ne s’agit pas de créer Dieu à notre image mais de tenter de percer son mystère à partir du monde où nous vivons. Paul pensait que la fin des temps était proche… Nous attendons depuis deux mille ans.
Copernic a mis fin à notre vision de la terre au centre de l’Univers; Darwin à celle de l’humain au centre de la Création; et Freud à celle de la consc ience et de la liberté au centre du comportement humain. Comment ne pas en tenir compte dans notre appréhension du message chrétien ?
où ai-‘je donc dit le contraire et qu’il ne fallait tenir aucun compte de leur opinion, où pouvez-vous me le dire?
Quant à l(attente de la Parousie je suis bien persuadé que nous aurions fait comme Paul et les autres en oubliant que » 1000 ans c’est comme un jour »
et puis tenter de percer le mystère de Dieu ( c’est ce que tout le monde essaie de faire) en s’appuyant sur nos petits raisonnements et exclusivement eux, pour moi n(est pas le meilleur moyen et c’est aller à la création d’un Dieu acceptable à notre regard t donc un dieu à notre mesure. et déjà à l’époque de Paul certains trouvaient déjà que le Christ mettait bien du temps à revenir et nous nous en sommes toujours là…
Pour moi ne plus mettre l’humain au centre de la création, c’est tout simplement le ramener au niveau de l’animal et croire,peut- être, (???) en un dieu créateur de l’univers mais assurément pas au Dieu d’amour de Jésus-Christ.
Dieu,ainsi, aurait donc créé l’univers en se fichant absolument des conséquences pour nous de cette création et se moquerait éperdument de notre sort ;c C’est là le dieu de Voltaire qui se déclarait étonné que cette horloge existe et qu’il n’y ait pas d’horloger »
Mais là encore vous partez d’une lecture littérale de la Bible aujourd’hui mise en échec par des découvertes de la science validées par l’Eglise. Où situez-vous l’humain de l’imagerie traditionnelle biblique dans le récit de l’évolution ? Entre Néandertal et Cro-Magnon ? Est-ce un hasard si on revient aujourd’hui, à la faveur de la crise écologique, à une meilleure vision de la place de l’humain dans la nature dont il fait partie ? Réflexion au cœur de Laudato si’. Et cette vision renouvelée empêche-t-elle d’imaginer un lien particulier – préférentiel pour le coup – entre Dieu et l’humain ?
Je ne voudrais pas en rajouter mais tout de même :
D’une part, le péché originel est une invention de Saint Augustin, reprise et développée jusqu’où l’on sait car c’était, à mon avis, une réponse au mal qui tuait dans l’oeuf toute interrogation à ce sujet et qui a permis le développement de tous les dogmes suivants.
– cette notion de péché héréditaire, que l’on vous renvoie automatiquement quand vous êtes devant l’inacceptable, corollaire de la liberté de l’homme, me donne plutôt une idée d’un Dieu monstrueux : devant la shoah, la torture, les cataclysmes, la cruauté inscrite dans la nature, toutes ces horreurs qui provoquent à travers les siècles la souffrance sans nom d’innombrables innocents, autant qu’un être vivant puisse l’être, ne fait que m’éloigner de la notion d’un Dieu qui aurait joué à ce terrible jeu-là, sous prétexte de liberté donnée à celui qu’il a créé par amour et dans l’amour. C’est complètement inaudible pour moi, d’autant plus que nous savons bien avoir et toujours avoir eu une liberté très limitée et conditionnée, l’exercice de celle-ci n’ayant donc servi qi’à attirer la mort et la soufffance sur toutes les générations et la création tout entière.
Ce Dieu-là, pour moi, puisque c’est comme habitude complètement personnel, serait juste scandaleux. La souffrance et la mort du Christ, en tant qu’il est venu racheter la faute originelle d’Adam, en rajoutent encore dans l’indicible horreur.
Je préfère pour ma part voir l’amitié de Dieu, venu accompagner l’homme et le guider vers lui, dans un monde où le mal existe de toute façon.
Evidemment, tout cela met en question la toute-puissance de Dieu, mais de nombreux théologiens semblent à présent embarrassés avec cette notion.
Anne, il me paraît difficile de rendre Dieu responsable du mal et d’en avoir une image de Dieu scandaleux au motif qu’il nous aurait donné la liberté !
Il n’y a pas d’amour sans liberté.
Je vois plutôt un Dieu non impuissant mais innocent et sans idée du mal et qui se prend le mal en pleine figure…
Je crains que nous ne réglions pas une telle question en trois phrases alors que philosophes et théologiens s’épuisent sur le sujet depuis des siècles. Car « la liberté » donnée par Dieu à l’homme ne répond ni à l’existence des maladies, ni aux tremblements de terre, ni aux éruptions volcaniques. J’aimerais tant que Dieu reste pour nous une question plutôt que d’être enfermé dans des réponses dont on voit bien aujourd’hui les limites !
Mais Dieu est bien au delà de tous nos raisonnements tous les actuels ou futurs Copernic Freud et cie n’arriveront jamais à aucune certitude en la matière car » vos pensées ne sont pas mes pensées » et puis que voulez-vous quitte à me faire une idée de Dieu je préfère m’appuyer sur Thérèse,Charles de Foucauld, mére térésa et tant d’autres que sur les personnes citées plus haut lesquelles ne n’aideront en rien à vivre dans ce monde dans lequel il m’arrive aussi de croire à la manière de Voltaire mais son « horloger » ne m’intéresse vraiment pas.
Michel, il est vrai qu' »il n’y a pas d’amour sans liberté » et je m’attendais un peu à cette remarque. Quand on aime vraiment, c’est gratuit. L’autre doit pouvoir être heureux même en me rejetant ou en tout cas n’étant pas assujetti à moi. Il est possible que vous me répondiez que c’est en quelque sorte « techniquement » impossible : on ne peut rien pour celui qui rejette et fait donc lui-même son malheur – c’est ce qu’on m’a toujours rétorqué -, mais vous voyez bien je pense les grandes limites de cet argument et ce que cela implique quant à la fameuse « liberté » qui n’est alors qu’un leurre.
Si Dieu a laissé faire la shoah à cause de la « liberté » de l’homme, c’est insupportable. Et si certains juifs ont découvert dans les camps le visage du Christ, eux seuls sont autorisés à le dire et en parler, je ne peux que l’entendre, et avec tremblements. Mais pour beaucoup, Dieu n’était pas là.
René, Anne, je ne prétends rien régler et n’ai pas réponse à tout, et certainement pas au mal et à la souffrance.
Claudel écrivait : « Dieu n’est pas venu supprimer la souffrance. Il n’est même pas venu l’expliquer, mais il est venu la remplir de sa présence »…
Cela ne résout pas la question de son silence voire de son absence lors de la Shoah ou lors de catastrophes naturelles…
Cette question du silence de Dieu traverse toute la Bible; et notamment les psaumes :
« Quand je crie, réponds-moi, Dieu, ma justice ! Toi qui me libères dans la détresse, pitié pour moi, écoute ma prière ! » (Ps. 4,2)
« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Le salut est loin de moi, loin des mots que je rugis.
Mon Dieu, j’appelle tout le jour, et tu ne réponds pas ; même la nuit, je n’ai pas de repos.. » (Ps. 21,2-3)
« Écoute, Seigneur, réponds-moi, car je suis pauvre et malheureux. » (Ps. 85,1)
« Vite, réponds-moi, Seigneur : je suis à bout de souffle ! Ne me cache pas ton visage : je serais de ceux qui tombent dans la fosse. » (Ps. 142,7)
Nous ne pouvons que faire nôtres ces paroles du psalmiste, comme du reste fît Jésus sur la croix (cf. psaume 21 ci-dessus).
Il me semble que, loin des idoles ou des fausses images, l’icône la plus juste de Dieu est celle du Christ aux outrages qui se prend le mal, les moqueries et les injures, en pleine figure et qui se tait, qui garde le silence.
Oui Michel et dans la bible combien de psaumes sont les échos de la terrible souffrance supoortée par ceux qui veulent croire malgré tout qu’ils ne sont pas abandonnés par Dieu,et combien d’autres traduisant la plainte terrible se terminent par « mais tu m’as entendu »
Bien sûr quand on prie il faut s’attendre éventuellement à une réponse ne correspondant en rien à ce que l’on souhaite et je pourrais vous parler d’une mère de famille laquelle malgré des prières quotidiennes pendant 12 ans n’ a pas obtenu la guérison de sa fille laquelle après plusieurs tentatives a « réussi » son suicide à l’age de 24 ans. Je pense que la réponse de Dieu a été de donner à cette femme admirable de supporter malgré tout cette terrible épreuve sans perdre la foi pour autant.
Anne, en plein accord, au sens artistique, musical, je dirais même, et ce n’est pas un jeu de mot, je dit que le péché est tout entier dans l’idée religieuse de péché. Il s’agit probablement d’un de ces grosses erreurs (peccatum) contrairement à la peccadille. Je ne sais pas les divers cheminement de cette notion de péché (qui na plus rien à voir avec l’erreur), avant le latin, mais en tous cas actuellement, cette notion devient un contresens.
Le récit de la chute est symbolique et, comme tel, source d’un sens jamais clos. Et les Écritures ne sont pas la « dictée « de Dieu comme le Coran. Elles sont inspirées à des hommes situés dans une époque et une civilisation données. St Augustin n’est pas non plus « parole d’Evangile. »
Nous savons tous en effet, il me semble, que le mal est autour de nous et en nous, en particulier, depuis Freud, qu’il y a en nous des pulsions mortifères inconscientes ( « désirant » la mort d’autrui comme la nôtre propre ) en lutte avec des pulsions de vie. Nous risquons de projeter ces pulsions sur « l’idée « que nous nous faisons de Dieu ( « Dieu pervers » , châtiant, nous punissant donc de ces pulsions qui nous culpabilisent aussi quand on a intégré les interdits moraux fondamentaux dont celui essentiel du meurtre.)
Notre inconscient archaïque est ici à l’œuvre.
Il y a donc idée « de Dieu dont le « courroux « doit être « apaisé » par « offrandes et sacrifices « ( dont l’offrande suprême de son Fils unique ) et « idée « de Dieu qui libère, tout en prenant conscience que tout ce que nous pouvons dire et savoir de Dieu n’épuisera jamais son mystère. On peut dire en effet ce que n’est pas Dieu et non pas ce qu’Il est ( théologie négative ).
Et le plus important n’est pas en fait notre « savoir « impossible et bien orgueilleux sur Dieu mais de comprendre qu’Il se manifeste par ses actions libératrices au contraire des idoles aliénantes. Ćest toute l’histoire du peuple hébreu.
Et le Christ, me semble t il, est venu justement nous « sauver «, nous libérer de cet attrait pour la mort des autres et la notre propre, et surtout de la culpabilité mortifère qui en résulte, en nous apportant l’Espérance et la Vie, en incarnant jusqu’au bout l’Amour du Père qui n’est que don. C’est un don absolument gratuit et non un rachat qui supposerait en retour de notre part une dette infinie par conséquent impossible à rembourser et donc une une culpabilité sans fin, apaisée, il est vrai, par le recours à la Miséricorde.
« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. »
« L’amour parfait bannit la crainte «
« L’idée « ou plutôt l’action libératrice de Dieu ne surgit par effraction dans notre vie quotidienne comme dans notre psychisme de « vieil homme « que de ce don inouï.
Nous sommes à la fois « vieux «, « pesants «, encombrés de toute notre histoire personnelle et collective et « infantiles. » immatures , je pense.
A l’inverse donc, Dieu n’est pas non plus un « papa gâteau » qui nous maintiendrait dans un état infantile mais Il nous appelle à une responsabilité d’adultes comme Il l’a fait en confiant à Adam la « gestion » du monde. La encore, pas de savoir sur Dieu mais un acte inauguratif de Dieu.
Excusez ce « sermon » tâtonnant 🙂 Mais, personnellement, je n’ai jamais pu croire « à cet œil dans la tombe « à l’affût de la moindre de nos fautes et à ce « Dieu » qui aurait besoin du sacrifice de Son Fils pour racheter la faute d’Adam.
Pour compléter, et en lisant les autres commentaires, la « gestion » du monde confiée à Adam, être intelligent, est une responsabilité envers la nature, les générations présentes et futures et pas du tout le droit à une maîtrise absolue risquant d’aboutir à une destruction et de la nature et de l’humanité.
Comme quoi, le sens du récit biblique n’est jamais clos et peut être réinterprété en fonction du devenir de l’histoire humaine comme des découvertes scientifiques et des interrogations qui en résultent nécessairement.
Michel, il est vrai qu' »il n’y a pas d’amour sans liberté » et je m’attendais un peu à cette remarque.
Quand on aime vraiment, c’est gratuit. L’autre doit pouvoir être heureux même en me rejetant ou en tout cas n’étant pas assujetti à moi. Il est possible que vous me répondiez que c’est en quelque sorte « techniquement » impossible : on ne peut rien pour celui qui rejette et fait donc lui-même son malheur – c’est ce qu’on m’a toujours rétorqué -, mais vous voyez bien je pense les grandes limites de cet argument et ce que cela implique quant à la fameuse « liberté » qui n’est alors qu’un leurre.
Si Dieu a laissé faire la shoah à cause de la « liberté » de l’homme, c’est insupportable. Et si certains juifs ont découvert dans les camps le visage du Christ, eux seuls sont autorisés à le dire et en parler, je ne peux que l’entendre, et avec tremblements. Mais pour beaucoup, Dieu n’était pas là.
René, vous rappelez que ce synode de 2023 n’a pas pour vocation d’aborder «les thèmes qui fâchent» et on ne peut que le regretter pour nos jeunes générations qui vont continuer à s’éloigner de l’Église.
Cette Église n’a pas toujours pas le courage de faire une autre lecture de ses textes fondateurs et pour esquiver une fois de plus cette révolution «copernicienne» préfère allumer un contre-feu, face au très déterminé synode allemand.
En ce qui concerne la présence du «mal» en l’homme vous écrivez : «Nul, à ma connaissance, ne conteste l’existence du mal, notamment en l’être humain».
Pourtant tout le monde peut observer que la «bienveillance», la «malveillance», la beauté, l’intelligence, la santé physique et psychique ne sont pas réparties uniformément entre tous les Hommes.
Bien au contraire et pour illustrer cette remarque il suffit de prendre l’exemple de la «malveillance extrême» d’Hitler responsable de la mort d’environ 80 millions de morts dans la seconde guerre mondiale de 1939 – 45 et de la «bienveillance aussi extrême» de l’abbé Pierre qui a offert sa Vie entière au profit des plus démunis, alors qu’il aurait pu vivre une vie de «nabab».
St Paul, nous enseigne que l’homme doit sans cesse lutter contre le péché et ne peut obtenir la miséricorde de Dieu que par sa grâce. Dans sa lettre de St Paul aux Romains (7,18-25a) il écrit : «Frères, je sais que «le bien n’habite pas en moi», je veux dire dans l’être de chair que je suis. En effet, ce qui est à ma portée, c’est d’avoir envie de faire le bien, mais pas de l’accomplir. Je ne réalise pas le bien que je voudrais, mais je fais le mal que je ne voudrais pas. Si je fais ce que je ne voudrais pas, alors ce n’est plus moi qui accomplis tout cela, c’est le «péché», lui qui habite en moi»
Dans toutes mes actions j’ai toujours eu personnellement la liberté de faire le bien ou le mal en toute conscience et en responsabilité. Je n’ai été empêché de faire le bien et personne ou une aucune force occulte dans mon inconscient ne m’a encore imposé de faire le mal que je ne le voulais pas.
Je ne suis pas un saint pour autant je me suis simplement attaché, tout au long de ma Vie de chrétien, à développer la bienveillance autour de moi, aidé en soi par les messages de bienveillance de Jésus.
Être chrétien ne doit pas s’arrêter à remplir son devoir dominical, mais aussi et surtout à vivre au quotidien la bienveillance enseignée par Jésus.
Sans aucun doute la meilleure manière de poursuivre l’évangélisation.
St Paul croyait à l’œuvre du «diable» qui lui avait été enseignée et vivait lui-même dans sa chair avec un mal-être profond ; ce qui pourrait expliquer sa vision particulièrement tourmentée et pessimiste.
Je crois au «Dieu Esprit» de Teilhard, à l’origine de l’Univers, il y a plus de 13 milliards d’années, que je retrouve dans le prologue de l’Évangile de Saint Jean : «Au commencement était le Verbe et le Verbe était Dieu, tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe. En lui était la Vie, et la Vie était la lumière des hommes» ; par contre je peux difficilement imaginer qu’à l’origine de l’Univers coexistait avec le «Verbe» une force du mal : le «diable».
Il m’est tout aussi impossible de croire que ce «Dieu Esprit» avait pré-créé à cette origine, des forces du mal, en vue de mettre à l’épreuve ses créatures humaines, y compris pour tenter Jésus dans le désert.
Aussi je pense, comme le père vénézuélien Arturo Sosa Abascal et supérieur général de la Compagnie de Jésus, que le «diable» est tout simplement une construction humaine pour justifier la théologie de la peur.
Et depuis on continue à généraliser le «mal» en tout homme, cette culture malsaine de la culpabilisation héréditaire du péché, et à faire remarquer, en priorité, la présence du mal.
Et si à l’expression «banalité du mal» on parlait plutôt de la «banalité du bien» selon Matthieu Ricard dans son plaidoyer pour l’altruisme : La force de la bienveillance ou «Oser la bienveillance» de la protestante Lytta Basset.
Enfin l’absence de ce «Dieu Esprit» tout puissant dans les cas extrêmes d’actes de barbarie, pendant la nuit de la Saint Barthélémy ou à Auswitch, pour ne prendre que ces deux exemples, reste néanmoins pour moi un des plus grands mystères.
Cette absence de «Dieu», dans de nombreux cas, a au cours des siècles entretenu un climat de suspicion, de doute, encore bien présent pour certains et c’est bien normal.
Bernard Januel
Si j’ai bien compris ce que vous voulez dire, effectivement il existe des etres bienveillants, des méchants, des pervers, et, entre les deux, toutes les gammes possibles.
Mais je comprends aussi très bien, par expérience personnelle, la réaction de Paul regrettant de ne pouvoir faire le bien qu’il discerne clairement et au contraire de faire le mal qu’il discerne tout aussi clairement.
L’élan de compassion pour celui qui souffre me semble en effet assez general. En revanche, l’engagement pour le bien de l’autre, aux dépens de son propre bien, et surtout dans la durée, et surtout si ce dernier nous est inconnu, comme l’a fait l’abbé Pierre, demande de s’arracher à son égoïsme, sa paresse, sa négligence « naturelles «. Donc la Charité vraie qui est conversion jusqu’à l’abnégation ne me parait pas si facile et si répandue que cela. C’est pourquoi nous admirons de tels etres qu’ils le fassent en tant que croyants ou pas d’ailleurs.
Le Christianisme qui, selon certains penseurs, a formé « une conscience malheureuse « contraire à la sagesse antique ( Hegel) ou a rompu, à la suite du Judaisme, avec l’innocence païenne ( Nietzsche) : toutes réalités visant à atteindre le bonheur, me semble faire passer la responsabilité pour autrui avant la recherche de son propre bonheur à tout prix, donc au prix du malheur des autres.
Et, personnellement, de même que la notion de « péché « ( comme mal fait à autrui), cela ne me choque pas. La conséquence pouvant en être bien sûr une culpabilisation excessive.
La « grandeur » et la « misère « de l’homme tiraille entre le bien et le mal , telles qu’on les voit relatées dans la Bible et jusqu’à la tentation du Christ au désert, sont, à mon avis, deux contraires à maintenir ensemble pour rendre compte de la totalité de l’expérience humaine.
Ceci étant, le mal reste un mystère.
Pour finir, si la bienveillance peut paraître « banale « c’est à dire assez répandue, la Charité ne me semble pas l’être du tout.
Et si le terme de « banalité du mal « se réfère à H.Arendt, rendant compte du procès Eichmann à Jérusalem, il désigne en fait pour elle, la banalité voire la médiocrité de ces fonctionnaires de bureau ; artisans zélés de la « solution finale « qui n’ont jamais pourtant personnellement tue. Ceci différenciant structurellement la Shoah de tous les autres massacres de masse de l’histoire.
Quand on aura allégé le plus possible les servitudes inutiles, évité les malheurs non nécessaires, il restera toujours, pour tenir en haleine les vertus héroïques de l’homme, la longue série des maux véritables, la mort, la vieillesse, les maladies non guérissables, l’amour non partagé, l’amitié rejetée ou trahie, la médiocrité d’une vie moins vaste que nos projets et plus ternes que nos songes : tous les malheurs causés par la divine nature des choses. (Marguerite Yourcenar)
« Maintenant, Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma vie : je ne vaux pas mieux que mes pères. » (1 Rois 19, 4b)
Le désir universel, l’universel gémissement tend vers toi. (Hymne Ô TOI L’AU-DELÀ DE TOUT)
« Tu nous as faits pour toi Seigneur et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose pas en toi. » (Augustin, évêque)
Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; * tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : « Voici, je viens. « Dans le livre, est écrit pour moi ce que tu veux que je fasse. * Mon Dieu, voilà ce que j’aime : ta loi me tient aux entrailles. » (Ps 39)
Quelle est en effet la grande nation dont les dieux soient aussi proches que le Seigneur notre Dieu est proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? (Deutéronome 4, 5)
En attendant ce synode, qui n’abordera donc pas les « thèmes qui fâchent », je fais mon petit synode avec vous tous et vos réflexions très intéressantes 😊.
J’ai donc une question, sans doute naïve, peut-être choquante. Suis-je la seule (on dirait que non) à être gênée à ce point par les dogmes catholiques (qui sont finalement une des conséquences de la place très particulière donnée à la hiérarchie) ?
Les protestants ont pointé là encore quelque chose de capital : ils n’ont pas de dogmes, considérées comme vérités révélées, donc intouchables – au nom de quoi ? -, mais une doctrine, qu’ils voient je crois comme une tentative d’explication de l’être de Dieu, c’est-à-dire de l’inexplicable, pas plus. Là, on respire dejà mieux. Et on ne peut pas dire qu’ils ne sont pas chrétiens.
René, je ne peux que vous rejoindre : on aimerait que « Dieu reste une question » et ne soit pas « enfermé dans des réponses dont on voit bien aujourd’hui les limites ». On les voyait certainement avant aussi, mais on ne discutait pas, en interne du moins.
Mais, Anne, les dogmes chrétiens ne sont pas le fait des seuls catholiques, mais de toute l’Eglise pour l’essentiel, nous les partageons avec les orthodoxes jusqu’au schisme de 1054 et avec les protestants jusqu’à la Réforme (donc tous les dogmes issus des premiers conciles, à l’exception des dogmes mariaux des 19ème et 20ème siècles et de l’infaillibilité pontificale).
Nos frères chrétiens d’autres confessions croient aussi à la Sainte Trinité !
Les dogmes sont des balises, ni plus ni moins.
Mais, Anne, les dogmes chrétiens ne sont pas le fait des seuls catholiques, mais de toute l’Eglise pour l’essentiel, nous les partageons avec les orthodoxes jusqu’au schisme de 1054 et avec les protestants jusqu’à la Réforme (donc tous les dogmes issus des premiers conciles, à l’exception des dogmes mariaux des 19ème et 20ème siècles et de l’infaillibilité pontificale).
Nos frères chrétiens d’autres confessions croient aussi à la Sainte Trinité !
Les dogmes sont des balises, ni plus ni moins.
Les questions pas naïves ne manque pas. Ainsi, la déclaration du Pape qui dit que l’institution a commis des erreurs et doit reconnaitre ses échecs. Pourquoi erreur et non péché? Quel sens donner à cette distinction, en terme de foi?
Anne,moi qui suis quelque peu catho comme vous l’avez peut être remarqué… si vous pensez que pour moi (et quelques autre tout de même y compris dans la hiérarchie cztho d’ailleurs) Dieu n’est pas une question,c’est, à mon avis, à désespérer
Mais alors Dominique, pourquoi appiorter tant de réponses toutes faites (je parle de la doctrine)
auxquelles on se doit d’adhérer quand on est catho ?
En tout cas, un grand merci à tous pour vos commentaires sur le mal. Paradoxalement, je trouve rassurant et apaisant qu’il n’y ait pas de réponses, c’est pour moi signe de justesse et d’authenticité et me touche au coeur. Que le Christ soit venu vivre ce mal est bien sûr un secours puissant. Pour ma part je ne peux aller plus loin et aucune explication par les dogmes ne m’apporte quoi.que ce soit. C’est tout ce que j’essayais d’exprimer.
Anne, les dogmes. ne sont pas un simple catéchisme absolument pas qui donnerait la foi ;pour comprendre les dogmes et ne pas les prendre pour des élucubrations parfaitement sans intérêt,il faut avoir une connaissance certaine de l(Ecriture
Encore faut-il regarder sereinement le contenu des dogmes. Certains sont essentiels au « dépot de la foi »commune à tous les chrétiens (Catholiques, orthodoxes et réformés…). D’autres spécifiques à telle ou telle confession, comme ceux qui concernent Marie ; ou réellement problématiques comme l’infaillibilité pontificale. Mais je suis d’accord qu’il y a bien un moement où il faut se mettre d’accord sur un noyau dur de la foi, au risque de voir chacun cultiver sa différence dans son coin en revendiquant malgré tout son appartenance à la même famille.
Anne,
On aimerait aussi, en tout cas c’est mon souhait, que l’on ne se hasarde pas à prétendre savoir ce qu’ »est « Dieu mais qu’on prenne avant tout en compte ses actes inouïs de libération telles qu’on les voit se révéler progressivement dans la Bible et dans l’Evangile. Dieu » est « ce qu’ Il « fait « en faveur des hommes.
Merci pour toutes ces réponses.
Ce que je retiens principalement est que les dogmes sont des essais d’explicaton de la foi chrétienne et qu’ils forment pour les premiers (apparus comme toujours en réponse à des hérésies) un tronc commun (des balises) nécessaire à la cohésion. Cela, je le comprends très bien, c’est le propre d’une religion. Soit on adhère, soit on n’adhère pas.
Cela ne signifie pourtant pas que ces dogmes soient des vérités révélées.
Tout de même, je répète que les protestants ne parlent pas de dogmes mais de doctrine, ce qui me semble plus juste.
A mon sens d’ailleurs, les derniers dogmes catholiques s’apparentent plus à une doctrine qui, elle, est susceptible d’évoluer. On l’a bien vu avec le tour de passe passe opéré à propos des « limbes » : elles ont tout à coup disparu. Peeuve que nous sommes là au niveau de la spéculation. Ce n’est pas une critique, j’essaie de comprendre. Pardon si c’est embrouillé.
Sur cette question des dogmes, n’oublions pas le contexte historique. Les premiers dogmes sont issus des premiers conciles, eux mêmes convoqués par des Empereurs (Constantin 1er, Théodose 1er, Théodose II…), pour des raisons probablement plus politiques que religieuses.
L’intrication du politique et du religieux à cette époque justifie probablement le besoin d’une « ligne officielle » pour maintenir la paix sociale. Sont-ils tous toujours nécessaires maintenant ?
Dans une société ou l’ordre social s’est détaché du religieux, Je ne vois pas vraiment de soucis à ce qu’un Orthodoxe continue de « cultiver sa différence » en pensant que l’esprit saint procède uniquement du Père, tout en continuant de se revendiquer appartenir à la famille chrétienne.
En tout cas ça ne me choque pas plus qu’un Catholique qui considère la tradition interprétative du magistère comme une source de la révélation (concile de trente – il y a eu depuis des dogmes encore plus discutables).
Le seul socle dont il me semble difficile de se passer reste le kérygme : Jésus Christ, fils de Dieu, mort et ressuscité nous appelle à le suivre.
Et sans doute aussi la Trinité, en évitant, comme vous le soulignez, de nouvelles empoignades sur le fait de savoir si l’Esprit procède du Père et du Fils, ou du Père seul !
… ou du Père par le Fils !
L’Eglise aussi a ses guerres picrocholines. Et je lis régulièrement l’avis de personnes que je tiens pour intelligentes qui m’expliquent à quel point cette clarification est essentielle à leur foi !
@René : c’est la tout le drame de l’intelligence. Il me semble bien vain de vouloir expliquer en mots humains la relation de la trinité, et il me semble bien dommage qu’en tentant de se l’expliquer certains se fâchent avec d’autres.
Quoiqu’il en soit effectivement, au dessous d’une « supra Eglise Kerygmatique », il faudrait effectivement tout une ribambelle de chapelles permettant à chacun d’obtenir la nourriture spirituelle qui lui convienne.
Pour apporter une des réponses possibles à la question du silence de Dieu à Auschwitz…et au problème de sa toute puissance face au mal.
Par fidélité à ceux qui ont continué à croire en Dieu comme à ceux qui n’ont pu plus le faire, pendant et après la Shoah, le rabbin Eliezer Berkovits écrit ceci: « Nous devons croire ( en Dieu ), parce que notre frère Job a cru ; et nous devons questionner ( son existence ) , parce que notre frère Job a si souvent cessé de croire «.
A Jean-Pierre,
Tout d’abord j’ai envie de saluer ce pape, qui continue à faire ce qu’il peut, puisqu’il a déclaré hier : « Le bien-être des victimes (des crimes sexuels) ne doit pas être mis de côté au profit d’une préoccupation malvenue pour la réputation de l’Eglise ». Puisse-t-il être entendu, compris et suivi par les clercs comme par les laïcs, qui sont parfois les plus difficiles à convaincre.
Ensuite, il est vrai que ce terme d » »erreur » est dérangeant. Il banalise à l’extrême les fautes commises en déresponsabilisant les auteurs et ceux qui les ont couverts (« errare humanum est » après tout…)
« Péché » ne convient d’ailleurs pas non plus ou seulement partiellement, puisque le terme désigne une offense faite à Dieu et pas une faute juridique. Or, dans les problèmes d’abus, il y a aussi faute juridique (sur mineurs et personnes vulnérables, sachant aussi l’énorme difficulté qu’il y a à prouver qu’une personne sous emprise spirituelle est vulnérable, bien que ce soit l’évidence pour les observateurs. Mais nous sommes là dans un monde « à part » pour le meilleur comme pour le pire).
Donc nous sommes toujours devant la même difficulté : il existe, dans le monde ecclésial, un gros problème de langage.
On se réfère automatiquement à Dieu en oubliant ou minimisant, ou faisant passer au second plan (puisque la réponse suprême est toujours le pardon qu’il faut donner) la personne victime, ce qui est évidemment un non-sens, humainement comme évangéliquement.
C’est bien en effet parce que la hiérarchie catholique a d’abord vu un « péché » dans ces crimes pédophiles (comme la masturbation, la contraception, les relations hors mariage…) qu’elle a longtmemps pensé suffisant de les « pardonner » au nom de Dieu. Sans se soucier de ce que les victimes avaient pu endurer ! Pour certains… nous en sommes encore là !
« Sans se soucier…. » et qui s’en souciait réellement alors? Avait-on réellement conscience des conséquences d’un viol par exemple et n’acceptions nous pas sans sourciller ceux qui se glorifiaient de leur pédophilie notamment?
Faut-il encore répéter, Dominique, que ce qui est partout scandaleux l’est doublement dans l’Eglise catholique, qui prône une religion de l’amour et du respect absolu du plus faible, qui se dit « experte en humanité » et passe son temps à faire la leçon puisqu’elle se pense détentrice de la plus haute morale ?
Pour parler beaucoup plus simplement, n’est-ce pas juste contraire à l’Evangile qu’elle prêche et une terrible atteinte à la personne du Christ dont elle se revendique et du prochain qu’il faut aimer et protéger ? Quand on a de si hautes exigences, bien sûr difficiles à mettre en pratique, on a normalement le sens moral, l’empathie et la compassion un peu plus éveillés que le tout-venant et on essaie de regarder où on met les mains, la bouche et le sexe, ensuite de ne pas récidiver, ni le cacher, ni couvrir ceux qui commettent ces crimes car on sait, quand on est chrétien, que c’est un crime.
Sinon, vraiment, à quoi bon le christianisme ??
Que je sache, ni Matzneff, ni Pivot ni les autres ne prétendaient agir ou camoufler des crimes au nom de Celui qui a donné sa vie par amour.
Ces comparaisons, qui veulent dédouaner ou en tout cas relativiser, ramener à quelque chose d’ordinaire, de sociologique, d’excusable en somme et qu’on entend depuis des années comme ligne de défense, ne sont vraiment pas recevables.
Et c’est bien pour toutes ces raisons aussi que les crimes sexuels, comme les abus spirituels qui en sont le socle, sont encore bien plus destructeurs lorsqu’ils sont commis par des clercs ou des personnes ayant autorité spirituelle, puisqu’ils touchent au plus intime de la personne, en traversant toutes les strates, du corps jusqu’a l’âme.
Vous êtes incroyable à toujours vouloir défendre l’indéfendable comme si vous aviez reçu mission du Ciel pour cela. Je vous renvoie ici au livre : La pédophilie dans l’Eglise, de la Révolution à nos jours (Seuil) signé de Claude Langlois, historien spécialiste du monde catholique paru en janvier 2020. J’en faisais recension quelques jours plus tard sur mon blog (voir lien en fin de page). Je relevais l’affirmation de l’historien selon laquelle « dès les années 1970 » la hiérarchie catholique savait pour les « dégats psychologiques causés aux victimes ». Et n’en a pas moins continué à nous faire le coup du « péché » et de la miséricorde. Extrait de ma recension du livre :
« C’est sur la période postérieure à 1900, que les observations de l’historien nous paraissent les plus immédiatement en prise avec la question qui nous occupe. D ‘un croisement statistique issu des archives consultées, il pense pouvoir évaluer à 600 le nombre de cas de pédophilie impliquant un prêtre ou un religieux, identifiés par l’épiscopat sur la période 1900-1960 et à une centaine le nombre des condamnations. En fait si la gestion des coupables semble depuis toujours l’emporter sur l’attention aux victimes, les évêques ne se désintéressent pas, dès le lendemain du second conflit mondial, de la gestion des « prêtres en difficulté » Ce terme générique recouvrant aussi bien ceux auxquels on connaît des relations féminines que les alcooliques, les homosexuels parfois encore mal différenciés des pédophiles, les réfractaires à l’autorité de leur évêque ou ceux qui semblent douter gravement de leur vocation… et de leur foi !
C’est ainsi que naissent le Secours sacerdotal puis l’Entraide sacerdotale ; et qu’est créé, à partir de 1970, le centre de Montjay, clinique destinée à soigner prêtres et religieux, pas uniquement pédophiles. Ils seront quelques centaines à y être accueillis jusqu’à sa fermeture en 1990. On tente donc de prendre en charge les prêtres à la sexualité problématique, mais, relève l’historien, sans pour autant modifier les pratiques de déplacement et d’évitement des procès. « Dès le début des années 1970, le diagnostic est clair. Rousseau (responsable de l’Entraide sacerdotale) pointe une volonté de l’épiscopat de ne pas voir la réalité de la pédophilie cléricale. Eck (neuropsychiatre catholique) identifie les dégats psychologiques causés aux victimes. Ce que l’épiscopat va découvrir vingt-cinq ans plus tard, en 1998, comme une nouveauté. »
http://www.renepoujol.fr/la-pedophilie-dans-leglise-de-1789-a-nos-jours/
Ce dimanche 19 septembre, sur le site du Monde, Cécile Chambraud publie un portrait du Président de la Ciase, Jean Marc Sauvé. Elle révèle comment ce dernier a découvert, lors de sa prise de fonctions, à 72 ans, par un ancien condisciple, que leur professeur de musique des années soixante, dans le diocèse de Cambrai, qui avait mystérieusement disparu du jour au lendemain du collège où il enseignait et qui n’avait eu aucun geste déplacé à son égard, avait en fait abusé de dizaines d’enfants dont cet ancien camarade. Le prêtre s’est éteint en 1990 sans avoir jamais été inquiété. Un « pauvre pécheur »… !
Je ne cherche pas à défendre l’indéfendable absolument pas , mais je cherche? vainement assurément? à rappeler certaines vérités qu’on se garde bien de faire entre gens du même monde toujours prêt à condamner l’Eglise et sa hiérarchie, non pas qu’elle soit innocente loin de là et sans doute plus coupable que les autres compte tenu du rôle qu’elle a à jouer mis un peu d’objectivité dans le débat ne ferait pas de mal ,je pense.
@Dominique, la situation est inextricable :
– d’un côté vous semblez voir des personnes dont le but permanent serait de condamner l’Eglise sans objectivité,
– de l’autre coté des personnes pourraient voir en vous quelqu’un décidé à défendre l’Eglise quoi qu’il en coute en relativisant systématiquement ses fautes
Tant que chacun campera sur ses positions, on n’en sortira pas.
Pourquoi donc alors ne pas reprendre les termes juridiques de crime ou de délit sexuels ?
Autre question ; pourquoi ne pas faire passer tous les crimes et délits sexuels dans la catégorie de l’infraction au 5 ème commandement : » Tu ne tueras pas », au lieu du 6 ème; « Tu ne commettras pas d’adultère », englobant dans les mêmes péchés » des actes qui n’ont pas grand chose a voir les uns avec les autres en fait de dommages causés à autrui, surtout maintenant que la société a pris conscience des conséquences dramatiques que ces crimes et délits peuvent engendrer sur les personnes qui en sont victimes ?
Pourquoi être ainsi toujours à la traine ?
Doiminique, je ne vois pas de quelles vérités vous parlez. Il ne s’agit que de réflexions éminemment subjectives, circulant dans un autre petit monde que celui que vous évoquez (vous voulez parlez de celui du blog de René par exemple ? que j’ai éprouvé comme au contraire bien minoritaire dans l’Eglise et qui me paraît plutôt courageux puisqu’il se préoccupe du plus faible et non du plus fort qui lui a toute une cohorte de défenseurs).
Les faits sont pourtant les suivants, à moins que vous ne contestiez arbitrairement les études, livres, articles, témoignages etc… :
Les crimes sexuels commis par des clercs ont toujours existé, et bien avant mai 68 qui a eu bon dos. Et le livre de Claude Langlois ne remonte « qu »‘à la Révolution.
La hiérarchie les a toujours couverts, au point qu’on ne retrouve très souvent aucune trace de ces crimes dans les archives. Tout juste voit-on que certains prêtres sont régulièrement déplacés, avec un terme latin en marge de leur nom (« puer », enfant, si j’ai bonne mémoire ou en tout cas un mot relatif à l’enfance).
Le supérieur des Jésuites chargé de recevoir les victimes m’a même expliqué que, jusqu’à son arrivée, les dossiers étaient régulièrement détruits, en commençant par les plus chauds. Et pourtant, il a retrouvé, sur témoignages et par recoupements : des femmes avec enfants de pères jésuites abandonnées, parfois plusieurs femmes pour un prêtre ; des femmes ayant été poussees à avorter ; des enfants, surtout garçons violés par tous les moyens imaginables (en commençant par les « plus mignons », m’a-t-il dit d’après les photos, c’est le seul critère pour les enfants – pour les femmes ou hommes, c’est la situation de vulnérabilité due a leur histoire personnelle) ; des jeunes femmes ou jeunes hommes violés en direction spirituelle etc… Autres faits notables : un abusé le sera encore ou l’a déjà été. Beaucoup d’entre eux ont essayé de parler avant l’enquête qu’il mène mais n’ont jamais été entendus.
Au point que lorsque ce Jésuite se trouve à présent dans une salle avec 40 frères, il sait que plusieurs d’entre eux, statistiquement, sont des abuseurs jamais inqiuiétés.
La hiérarchie se trouve obligée actuellement de se pencher sur le problème (merci à la Parole libérée), mais traîne tant et plus des pieds. Hormis ce qu’elle en pense humainement, et ce n’est pas simple de le savoir, elle est très ennuyée car son besoin de prêtres reste criant.
Je peux pourtant répéter ici la substance d’une réflexion que m’a faite l’évêque auxiliaire de Paris l’an dernier : « Les gens (les fidèles) me disent que dans ces histoires d’abus sexuels l’Eglise prend cher. Mais je réponds que non, parce qu’elle a trahi sciemment sa mission ».
Le pape l’a dit lui-même : l’Eglise ne s’en sortira qu’en faisant la vérité.
Pourquoi refuser de la voir et la dire ? Elle ne peut que s’en trouver grandie. Le déni ou les excuses et défaussements au contraire ne font que la rabaisser sans cesse un peu plus et finir de provoquer la perte de confiance.
Anne, il est parfaitement inutile de me faire un long discours sur la responsabilité de l’Eglise responsabilité indéniable que je n’ai jamais contestée et d’ailleurs Emmanuel le r econnais lui-même. Je ne défends pas l’Eglise quoi qu’elle fasse absolument pas,mais je crois voir chez nombre de ceux qui s’expriment sur ce blog le désir manifeste de la traîner plus bas que terre, voilà tout!
Les hommes d’Eglise lesquels devraient se tenir au dessus du lot bien souvent se révèlent fort loin de cet idéal, c’est incontestable mais je crois aussi que pour obtenir une cote de popularité remarquable il ne faut pas trop rappeler certaines paroles de l’Ecriture qui ne vont pas dans le sens du vent
A courir dans le sens du vent (ou de l’histoire comme on le disait du marxisme du temps de ma lointaine jeunesse) je ne crois décidément pas qu’on convertisse grand monde. Pour moi en tout cas, il est absolument normal qu’il y ait un conflit, non violent bien sûr entre l’Eglise et l’esprit du monde lequel bien sûr n’est pas que perversion bien entendu.
Dominique, je pense comprendre votre position. Je crois qu’il y a toutefois malentendu. Pour ma part, et me semble-t-il pour beaucoup sur ce blog, il s’agit bien moins de critiquer a priori par « esprit du monde » ou pour être « dans l’air du temps » que d’exprimer une immense déception, justement en raison des (trop ?) hautes attentes par rapport à l’Eglise. Que la plupart sur ce blog ont aimée ou aiment encore.
Et je crois que c’est à présent l’attente d’une reconnaissance des faits, crimes et manquements qui est très forte. Elle permettait de restaurer en partie les victimes en leur rendant le sentiment d’exister et, pour ce qui vous occupe légitimement, partciperait, j’en suis intimement convaincue, à sauver ce qui peut l’être dans l’Eglise.
Anne, pour ma part je sais depuis bien longtemps qu’il n’y a surtout pas à mettre de hautes attentes dans l’Eglise aussi sainte soit-elle.Comme je le disais précédemment les hommes d’Eglise très majoritairement ne sont ni Pierre ni Paul ni jean, ni Jacques( ‘ni Marie, ni Thérèse ni Claire…°) mais j’ai constamment l’impression qu’on les dépeint comme on le faisait des princes et des princesses dans mon livre d(histoire quand j’étais à l’école primaire laïque de ma commune de résidence en banlieue parisienne (pas du côté Neuilly Boulogne…)
Je ne crois absolument pas à une église quasi-parfaite,ce qui ne veut pas dire pour autant qu’il faut laisser les choses en l’état, mais pas trop rêver non plus
et puis « lorsque le fils de l’homme viendra trouvear–t-il la foi sur terre? »
Emmanuel, effectivement depuis le temps que j’encombre ce blog, ce que vous dites me parait parfaitement juste, hélas…
Dominique, en plus vous êtes maso. Si vous « encombriez ce blog » comme vous écrivez, j’aurais cessé de valider vos commentaires depuis longtemps (au compteur vous en êtes à 1 330).
Dominique, pour l’instant il s’agit bien concrètement d’une question de justice.
Ce que j’essaie maladroitement de dire est que tant que l’on minimisera, relativisera et finalement acceptera les crimes, mensonges, manquements et petits arrangements, les responsables auront beau jeu de continuer à dire qu’ils ne le sont pas et de ne pas réparer.
Ce qui, je le crois, ne grandit absolument personne et beaucoup de ceux qui se sont penchés sur ces affaires, y compris de ceux qui sont très engagés dans l’Eglise, commencent à le réaliser et à le dire.
La conversion de chacun est une autre affaire et, personnellement, je ne m’en mêlerai pas et ne compte pas dessus car je n’ai plus la vie devant moi.
Je crois qu’il y a une chose très importante à comprendre : on ne peut se placer sur le terrain de la foi, de la conversion, de l’acceptation, du pardon etc… avec des victimes qui ont été précisément abusées par ce biais-là et n’ont le plus souvent besoin que d’une chose : la reconnaissance de ce qu’elles ont vécu ET la réparation concrète.
Anne, pour moi dans certains cas il ne peut y avoir de réparation concrête réelle et je ne crois ^pas qu’un viol soit réparé parce que la victime reçoit une somme d’argent ou même que l’auteur soit incarcéré;certes la justice ne peut rien faire d’autre mais la blessure demeure au fond de la victime « T’en fais pas mon ptit Lou c’est la vie ne pleure pas,t’oublieras les ptits cons qui t’ont fait çà »chantait avec une parfaite bonne foi Pierre Perret, mais c’est infiniment plus grave
Et pourtant Dominique, ce sont les victimes qui savent ce dont elles ont besoin pour retrouver au moins le sentiment d’exister et d’avoir de l’importance. Et faute de mieux… C’est aussi pour cela que les procès et la réparation existent. Sans compter que pour beaucoup cette « réparation »est une nécessité, étant donné le gouffre financier que représentent les abus sexuels ou spirituels et leurs suites, dont on ne parle presque jamais parce que « ça la fiche mal ».
Dominique,
Je rejoins Anne.
1 ) Seules les victimes savent ce dont elles ont besoin.
2 ) La societe a instauré des tribunaux pour juger les crimes et delits.
Car il faut officiellement et solennellement, avec toute la force du droit, et l’objectivite du tribunal, dire qui est victime et qui est coupable, bien que la peine encourue par le coupable ne sera bien entendu jamais à la hauteur du dommage causé.
C’est pourtant une étape essentielle du processus de reconstruction d’une victime : processus qui peut être très lent, difficile, jamais terminé ni abouti. Peu importe. Il faut au moins que la société le permette du mieux possible.
3 ) Cette reconstruction nécessite de l’argent, ne serait ce que par les soins qu’elle demande. Il est donc normal que celui qui a causé un dommage en paye les conséquences..
4 ) La réparation financière, l’indemnisation est aussi le moins mauvais des moyens que la société a trouvé pour concrétiser la justice rendue. La différence entre culpabilité personnelle et responsabilité est aussi à prendre en compte dans certains cas, en particulier quand les coupables sont décédés, introuvables ou quand il s’agit d’une faute collective. Par exemple, et toutes proportions gardées bien sur, les survivants, les orphelins de la Shoah ont été indemnisés par le gouvernement français, après que que J. Chirac ait reconnu la responsabilité de la France dans la déportation. Je crois que l’on s’achemine vers le même type de reconnaissance officielle et d’indemnisation pour les Harkis. Il est bien évident que cette indemnisation n’a pas fait revivre les morts ni n’a compense tous les dommages matériels et les traumatismes psychologiques subis.
La Justice restera en effet toujours inférieure au dommage. Et pourtant elle est absolument nécessaire pour restaurer la dignite des victimes.
Ces quatre points que la société a compris méritent d’être aussi pris en compte par l’Eglise. Dans certains pays, elle a bien été forcée de le faire.
Marie-Christine,
En l’occurrence, c’est plutôt la société civile qui s’aligne sur ce qu’a fait l’Eglise, en créant la Commission inceste (Ciivise) sur le modèle de la Commission Sauvé (Ciase).
La question justice préoccupe l’ONU depuis 2014, au titre des droits de l’enfant . En juillet 2021, la tension est montée quand 4 des 18 experts onusiens parmi les plus importants (rapporteurs) ont estimé que la persistance de l’obstruction pourrait être considérée comme un crime contre l’humanité et ont condamné les mesures discrètes adoptées sous l’autorité du Vatican, en lien avec nombre d’autres Etats entre autre, pour protéger les auteurs **.
* La Croix 16/01/2014 « À l’ONU, le Saint-Siège répond au Comité des droits de l’enfant » et 06/02/2014 « Comment le rapport de l’ONU sur le Vatican est devenu si sévère ».
** 21/07/2021 https://www.justiceinfo.net/fr/79981-abus-sexuels-quatre-rapporteurs-onu-denoncent-obstruction-eglise.html
Communion et démocratie
Pourquoi opposer ces deux notions concernant la démarche synodale ?
L’église a adopté un fonctionnement partiellement démocratique :
– le pape est un cardinal élu par ses pairs à la majorité qualifiée.
– Les textes des conciles tant dogmatiques qu’oecumeniques sont aussi adoptés suite à des votes a la majorité qualifiee .
Mais lorsqu’il s’agit du peuple des baptisés, la démocratie devient inadaptée. D’autant plus inadaptée qu’elle est définie par le pape de manière caricaturale. La démocratie véritable est une recherche commune de l’intérêt général. Ce n’est que lorsque tous les moyens d’arriver à un consensus ont été épuisés que l’on passe au vote afin de formaliser et legitimer une décision. En démocratie le vote est la dernière étape d’un processus de construction d’un consensus. Il n’est pas la formalisation d’une confrontation de points de vue intangibles.
– Aujourd’hui dans cette forme d’église, les clercs ont le monopole de la parole légitime.
Peut on vraiment marcher ensemble , entamer un voyage commun quand certains sont aux commandes et que d’autres voyagent en troisième classe .
Participer au synode , pourquoi pas, mais en sachant que la règle du jeu pratiquée ne sera pas celle qui est affichée : les évêques décideront seuls , sans aucun contrôle de ce qu’ils retransmetront des contributions recueillies .
Peut on espérer que leur rapport rendra compte de manière exhaustive et sincère de ce qui aura été dit ?
Guy, je crois que là encore le peuple des baptisés détient des clés ou même des leviers.
Il suffit au fond de décider que le fonctionnement actuel ne convient plus et de faire pression : par les participations ou non aux offices, par le biais financier (denier du culte, dons), par des lettres ouvertes, que sais-je ? Ce synode pourrait juste être une occasion supplémentaire de s’exprimer.
La vraie question pour moi est : les fidèles ont-ils envie du changement ?
Anne,seriez-vous donc, le cas échéant ,adepte du chantage et que suggérez-vous à ceux qui ne vous suivraient pas pour faire entendre leurs voix et qui sont eux aussi membre du « peuple des baptisés » au même titre que vous?
Eh bien, s’ils sont contents, ils viennent à la messe, répondent favorablement et généreusement aux appels aux dons, expriment leur satisfaction et leur approbation. Normal.
>les fidèles ont-ils envie du changement ?
Je pense que non. Une partie souhaite ardemment que rien ne change, ceux qui voulaient que ça change sont probablement déjà partis – et leur non participation aux offices n’a été suivie d’aucune prise de conscience de l’Eglise.
Mais sur le fond vous avez raison : les fidèles pourraient décider que cela ne leur convient plus, ils pourraient se réunir silencieusement dans les églises en priant pour demander des changements (le mariage des prêtres, la bénédiction des homosexuels, que sais-je…). Tactiquement il faudrait « déborder l’épiscopat par le nombre » en montrant qu’on motive plus de fidèles à prier pour une autre église qu’il n’y en a à la messe.
(je crois que je rêve un peu).
Oui, Emmanuel, sans vouloir vous désespérer, je crois que vous rêvez beaucoup en fait.
Les fidèles qui restent n’ont visiblement pas envie de changements. Les autres étant déjà partis ou sur le point de le faire…
Puisque cette hémorragie silencieuse des fidèles ne fait apparemment pas réagir, seul le manque de prêtres pourra peut être forcer au changement, mais hélas pas dans le sens espere: les évêques semblant prêts à accueillir les plus tradis, à condition qu’ils soient en accord avec Rome ou fassent semblant de l’être, ceci pourvu qu’ils leur « fournissent » les prêtres dont ils ont le plus grand besoin.
J’ai regardé les nominations de prêtres d’un diocèse. Dans la plupart des cas, il s’agissait de prêtres étrangers ( Afrique, Pologne… ) ou de prêtres appartenant aux communautés et instituts les plus tradis.
Mais, Anne, Emmanuel, quelle conception avez-vous des offices et de la messe pour préconiser de faire pression en ne participant pas aux offices ou en organisant des réunions de prière parallèles à la place de la messe !
Je suis abasourdi !
Les bras m’en tombent !
Comment pouvez-vous imaginer d’instrumentaliser ainsi la liturgie !
Cher Michel, merci pour cette correction fraternelle !
Dans mon espérance (que dis-je : ma naïveté) de voir un jour l’Eglise remonter la pente, je me suis égaré à imaginer des solutions dans la prière.
Quelle folie ! 😉
Michel,
Je vous répondrais bien qu’instrumentaliser la liturgie s’est fait et se fait encore – et de quelle manière ! – pour attirer et, pire, recruter et que personne ne s’en rend compte ou n’y porte remède. Mais peu importe. Vous avez sans doute raison de me faire remarquer que c’est mal et je réalise décidément que je n’arrive plus à raisonner en catholique.
Mais alors, quelles solutions pour ceux dont parlent Emmanuel, Marie-Christine, Isabelle et dont font partie certains sur ce blog : non encore partis (pour ceux qui le sont déjà c’est un peu tard), mais qui souffrent de ne pas trouver ce qu’ils cherchent, tout aussi légitimement et tout aurant dans la foi je crois,
que ceux qui ne voient rien à redire, dans l’Eglise ?
N’est-ce pas aussi cela la fraternité : les prendre en considération et essayer de répondre à leurs attentes ?
Emmanuel, vous m’avez mal lu ou mal compris.
Je mettais uniquement en cause dans votre commentaire, dans le prolongement du commentaire d’Anne, la grève de la messe et son remplacement par une prière à côté.
Pour le reste, continuez de prier, et moi avec vous, moins d’ailleurs pour ce que vous souhaitez ou ce que je souhaite, que pour que la volonté de Dieu soit faite (3ème demande du Notre Père)
Anne, l’instrumentalisation de la liturgie pour d’autres motifs ne vaudrait pas mieux bien sûr !
Pour le reste, je vous rejoins complètement.
Je pense sincèrement que des progrès ont été et sont faits en ce sens dans l’Eglise aujourd’hui, au moins pour ce qui concerne les abus sexuels ; pour ce qui concerne les abus spirituels, c’est plus complexe, mais là aussi il y a une prise de conscience, comme en témoigne par exemple Mgr Thibault Verny à Paris :
https://www.paris.catholique.fr/la-ciase-est-une-aide-que-l-eglise.html
« Les fidèles ont-ils envie du changement ? » : en voilà une bonne question…!
Je ne sais pas y répondre de manière tranchée, mais quand je regarde autour de moi, j’ai l’impression que beaucoup de ceux qui ont espéré et se sont investis pour des changements dans l’Église ces dernières années / décennies sont partis… sans bruit le plus souvent, sans conflit ouvert, mais par lassitude; partis à cause de cette impression que rien ne peut fondamentalement changer dans l’institution, qu’ils ne sont pas écoutés ni pris en compte dans leurs demandes et leurs aspirations, ni consultés dans les choix faits.
Alors, cela veut-il dire que ceux qui restent sont ceux qui se contentent du statu quo ?
Ce serait caricatural de dire ça, sans doute y a -t-il encore des « présents » qui ont envie que cela bouge (ce blog en témoigne !), mais se pose quand même, me semble-t-il, la question de la représentativité dans la démarche synodale qui s’annonce.
« Il faut que çà bouge nom de nom » et je constate que bouger consiste essentiellement à imiter le mieux possible nos frères protestants lesquels connaissent les mêmes difficultés et Dieu sait s’ils sont allés loin dans le changement…
Eux la synodalité ils la pratiquent depuis bien longtemps…et ont toutes les peines du monde à renouveler les membres de leurs conseils pastoraux qui bénéficient eux d’un vrai pouvoir de décision que le Pasteur n’a absolument pas.
Curieux non?
A vouloir suivre le monde on n’aboutit à rien.
Peut être que « bouger » signifie d’abord pour moi pouvoir dire explicitement ce qui ne va pas, ce qui fait souffrir et, contraire au sens moral et a l’Evangile, relève du contre- temoignage et éloigne inexorablement de l’Eglise ceux qui pourtant y ont été ou y sont encore attachés.
En ce sens, je participerai à ce processus de synodalite, sans illusions, simplement pour exprimer les dégâts et douleurs que l’Eglise, dans la personne des autorités ecclésiales et l’adhésion « naïve » des fidèles n’a pas pris en compte et que certains, meme au plus haut niveau, commencent enfin à percevoir.
Je participerai pour contrer la tendance qui voudrait « enfouir tout cela dans le silence « et passer le plus rapidement possible à autre chose. Ce qui est objectivement impossible s’agissant du mal associé au manque de vérité.
Et je n’ai aucune prétention d’apporter une quelconque solution à tous ces dysfonctionnements qui ont brisé des vies entières, malmené la foi et la générosité d’un grand nombre. Il s’agit seulement de témoigner du mal commis. Et tant pis si cela n’est pas compris.
Dominique, est-ce à dire selon vous, que ceux qui souhaitent que les choses bougent sont automatiquement des protestants ? Que l’Église catholique se distingue alors, elle, par l’immobilisme ? Je croyais naïvement qu’elle était, elle aussi, toujours appelée à progresser, évoluer, ce qui fait aussi sa richesse; et c’est d’ailleurs ce dont témoigne son histoire.
Michel,
Thibault Verny était responsable des dérives sectaires et à présent il l’est aussi des abus sexuels.
Il m’a reçue il y a 18 mois, bien puisqu’il n’était pas hautain et écoutait (en baiillant; mais bon). Il m’a renvoyée sur quelqu’un d’autre qui a démissionné. J’ai repris rdv avec T Verny il y a 3 mois. Il était plus concentré et inquiet, assez débordé par les événements, disant qu’il découvrait les choses (que je lui avais expliquées un an auparavant, mais Rome s’en était mêlé) et que c’etait « drôlement complexe ».
Mais rien, personne ne sait quoi faire. Je ne lui jette pas du tout la pierre, il est de bonne volonté et ne prend pas de haut, c’est déjà énorme. Je l’en ai remercié.
Tout cela pour vous dire que tout le monde découvre les catastrophes dont nous avons été nombreux à témoingner depuis 30 ou 35 ans. Et qu’en l’état actuel des choses, je peux vous l’assurer, il n’est pas prévu de faire quoi que ce soit à part des visites dans les communautésou des cellules d’écoute.
La prise de conscience et la volonté d’aider concrètement, surtout les anciens, prendront encore du temps, si cela se fait. Il y a forcément, c’est normal, les déclarations d’un côté et ce qui se fait de l’autre. Au moins tout est-il sur le tapis et je garde espoir dans le rapport de la Ciase qui peut faire électrochoc.
Mais je parlais dans mon commentaire plutôt des fidèles qui ne sont pas partis et ne se retrouvent plus dans l’Eglise telle qu’elle est actuellement.
Merci Anne pour votre témoignage.
Le rapport de la Ciase ne concernera à ma connaissance que les abus sexuels, et c’est déjà beaucoup, mais la question des abus spirituels est non moins grave mais plus complexe à mon humble avis, plus délicate à caractériser entre fragilités et emprise.
Et ce contrôle que tu souhaites ardemment comment l’imagines-tu?
Personne ne sait exactement Michel.
Nous savons qu’un volet du rapport concerne les phénomènes d’emprise dans les communautés nouvelles. Les membres de la Ciase ont compris au fur et à mesure de leur travail d’écoute qu’abus sexuels et abus spirituels pouvaient être intimement liés, fonctionnant sur les mêmes mécanismes.
Par rapport à la réparation, rien ne semble être envisagé pour les majeurs, qu’il s’agisse d’abus sexuels ou spirituels ou les deux.
Il faudrait évidemment une autre « commission Sauvé » concernant les phénomènes d’emprise, encore très mal compris par le public comme par les autorités ecclésiastiques, et pourtant très fréquents dans les communautés où l’appartenance est basée sur la confiance, en Dieu et dans le fondateur ou supérieur qui a pris la place de Dieu. Une prise de conscience semble se faire peu à peu, mais elle est bien sûr très douloureuse et questionnante.
Les communautés religieuses ou monastiques plus anciennes avaient la sagesse de distinguer gouvernance et accompagnement spirituel, qui ne pouvaient être exercés par la même personne.
Oui Michel, c’est effectivement le b- a ba, qui n’a jamais été respecté ni contrôlé dans ces communautés et qu’ignorent ou ignoraient les membres, comme ils ignoraient tout le reste, totalement pris dans leur monde clos et exaltant.
J’en profite pour vous remercier sincèrement de vous intéresser à ces questions et d’accepter de les regarder en face. Ça ne peut pas être facile ni agréable.
Merci Anne et merci à René qui nous offre ce lieu.
Oui, on s’enrichit dans ces échanges.
Michel,
Les communautés religieuses les plus anciennes n’ont pas le même statut canonique que les communautés nouvelles ou mouvements d’église dans lesquels il y a apparemment le plus de problèmes.
Les communautés nouvelles dépendent de l’approbation et de la surveillance de l’évêque du lieu.
Les laïcs qui peuvent y mener une vie quasiment religieuse, astreints a l’obéissance par exemple, n’y ont par contre aucune des garanties octroyées par le droit canonique aux religieux. Ils ne dépendent pas du même dicastère au Vatican.
Les mouvements d’Eglise ( fers de lance de la nouvelle Évangélisation ) bénéficient au contraire d’un statut spécial très enviable en dépendant directement de Rome: ce qui les fait échapper à la surveillance des évêques.
Les laïcs n’y ont la non plus guère de garanties.
Les communautés anciennes sont en général des congregations qui ont leurs propres structures avec des degrés de décision et de surveillance intermédiaires.
Le problème du statut et du droit canoniques ( avec ses lacunes indéniables pour éviter les abus de pouvoir ) me parait donc très important. La bonne volonté réelle ou seulement apparente ne suffit pas à régir une communauté d’humains. Et, pour le simple fidèle, il est bien difficile de se retrouver dans tout ce « maquis. Il lui suffit en général que la communauté ou le mouvement soit approuve par l’Eglise. Alors même que tout citoyen, usager, membre d’une profession etc..est bien au fait de ses droits et de ses devoirs.
Oui, merci Marie-Christine, il est clair que le chrétien lambda ne connaît pas le droit canonique et n’en perçoit pas les enjeux.
« Seules les victimes savent ce dont elles ont besoin » Je n’en suis pas si sûr que çà lorsque je pense aux victimes qui sont encore au stade de la culpabilité.
Quant à la baisse de la pratique religieuse elle est incontestable dans notre monde occidental llequel n’est plus le centre du monde loin de là et au niveau mondial le nombre de cathos continue d’augmenter annuellement Bien sûr je ne suis pas en train de chanter « tout va très bien Madame la Marquise mais l’Eglise a connu d’autres crises autrement plus importantes que celle que nous connaissons et s’en est toujours sortie. Et puis l’Eglise n’est pas une entreprise de commerce ayant bien évidemment besoin d’augmenter le nombre de ses clients pour continuer d’exister.
Vous pensez aux nombreux cathos qui déçus et parfois très douloureusement déçus ont quitté le navire et vous avez raison, mais peut-être aussi peut-on rendre grâce pour les millions d’autres qui l’ont rejointe.
Dominique,
Disons alors :
1) qu’au moins les victimes qui sont sorties de la culpabilité savent, quant à elles, ce dont elles ont besoin.
2 ) que l’Eglise, bien que n’étant pas une « entreprise de commerce « « gagne » ailleurs que dans le monde occidental « « « des millions » d’âmes et qu’il ne convient pas de s’interroger sur les causes qui lui en font perdre dans le monde occidental. y compris quand on y appartient.
Bref, il y quand même a des problèmes mais on ne sait lesquels a cette époque précise de l’histoire ( pas dans le passé ). Et donc on ne fait rien pour les comprendre, ni pour y remédier, puisque le destin de l’humanité semble mener par la « fatalite « au lieu de l’être par la responsabilité octroyée aux humains et, plus encore, aux Chretiens.
On peut évidemment ironiser sur la teneur de mes propos…
Michel,
-Tout d’abord fragilités et emprises sont liées: une personne fragile pouvant être mise plus facilement sous emprise. Mais des personnes « normales « , intelligentes, peuvent l’être aussi. Il suffit de leur proposer un idéal répondant à leurs aspirations et, en plus, de jouer sur des ressorts inconscients, comme savent le faire d’instinct tous les manipulateurs.
– Quand une personne sort d’une communauté à dérives sectaires dans laquelle l’abus spirituel est constant, elle peut être dans la colère, le ressentiment et le désir de vengeance donc manquer d’objectivité ( a moins qu’elle ne soit completement aneantie et ne puisse reagir ).
– Néanmoins, après des années voire des décennies, la personne a pris en principe du recul, et, même si elle est encore révoltée, elle se montre d’avantage capable d’analyser les choses.
– Et, surtout, il existe des criteres objectifs d’une emprise spirituelle qui commencent à être bien perçus maintenant.
Pele- mêle :
1 ) culte exhate et impossible à remettre en cause chez ses « fidèles, « du « gourou «- fondateur considere déjà comme un « saint. »
2) idéalisation de la communauté considérée comme la voie « royale « supérieure à toute autre de la « volonté de Dieu «.
3) totale absence de discernement a l’entrée et donc atteinte à la liberté intérieure des personnes.
4) conditions de vie irréalistes et décisions du « gourou » dépourvues de tout bon sens et de tout souci du bien être matériel, psychologique, spirituel des membres.
5) absence de lieux de parole ou exprimer librement et en confiance, difficultés personnelles et interrogations.
6) concentration de toutes les pouvoirs et fonctions ( de décisions, d’accompagnement spirituel, de confession) entre les mains du « gourou »( du moins quand ce dernier est prêtre ). Mais ce « gourou » peut être une femme ou un laïc pourvus d’une aura spirituelle.
7) confusion du for interne et du for externe
8 ) critiques externes, même minimes, interprétées comme synonymes de persécution. Ce qui renforce l’unité du groupe autour du « gourou ».Critiques internes considérées immmediatement comme synonymes de désobéissance et de tentation du démon donc nombreux recours aux exorcismes ou exclusion immédiate.
9) contournement des décisions des autorités ecclésiales légitimes.
10) exigence de transparence des membres envers le gourou et, inversement, culte du secret. Fonctionnement à double niveau, apparent et réel.
11);spiritualité unique ( celle du « gourou ) fausse ou gravement déviante, en particulier à propos de l’obéissance.
12) grand nombre d’entrées accompagnées de sorties tout aussi nombreuses de personnes abîmées voire dévastées ( suicides, mises en hôpital psychiatrique. grandes difficultés de réinsertion professionnelle etc…)
Tous ces critères sont des indices objectifs d’un système abusif.
Le problème est qu’ils n’entrent pas, pour la plupart. dans les catégories de la justice civile.
Merci Marie-Christine pour vos développements qui me paraissent justes et pertinents dans les cas extrêmes de dérives sectaires.
Il y a sans doute des communautés où c’est moins global et où l’on ne retrouvera pas l’ensemble de ces dérives sectaires,et là c’est plus difficile.
Malheureusement Michel, et je crois qu’on le découvre en ce moment, ces dérives sont présentes dans toutes ces communautés qui tombent les unes après les autres. A des degrés sans doute divers, mais on les retrouve systématiquement. Celle où j’ai vécu ainsi que Marie-Christine, cochait toutes les cases qu’elle a detaillées -oui, je retrouve tout -, l’air de rien puisque la façade était terriblement séduisante. Et Bethléem par exemple vit pire encore.
Michel,
Je viens juste de vous répondre que le statut canonique est très important, qu’il existe aussi de nombreuses lacunes dans le code de droit canonique pour s’opposer aux abus de pouvoir, toujours possibles dans une communauté d’humains qui ne sont pas des anges.
Je rajoute, comme le dit Anne, qu’hélas les communautés « à problèmes « cochent bien toutes les cases énoncées, parce qu’on a voulu faire prévaloir, avec une très grande naïveté, l’inspiration de l’Esprit Saint ( et pas seulement dans les communautés charismatiques ) sur les garde- fous nécessaires.
Le catho ( même évêque ) devrait donc se défier de son premier réflexe ( très beau en soi mais, suite à l’expérience, dangereux pour lui-même et pour les autres ) de faire confiance avant de se renseigner de façon précise. Il y va de sa responsabilité personnelle.
Et je rajoute aussi, à la suite d’Anne, qu’il y a, on le sait maintenant, des communautés établies sur des bases théologiques et spirituelles completement déviantes ( frères et sœurs de St Jean, Bethleem dont la fondatrice était une fille spirituelle du P.Marie- Dominique Philippe etc..) où ont eu lieu des choses extrêmement graves.
A Isabelle et à tous,
Il me semble, je peux me tromper, que ce sur quoi nous butons, dans le catholicisme comme dans l’orthodoxie, est la notion de « tradition », vue essentiellement ou uniquement comme l’héritage des apôtres.
Or la tradition est surtout la révélation incessante de l’Evangile à son Eglise.
Si on oublie cela, les réformes sont impossibles puisque considérees comme une trahison. Et l’Eglise est de moins en moins vivante puisque, pour employer le langage de la foi, le souffle de l’Esprit Saint y est en quelque sorte empêché ou limité à des interventions « acceptables », quasi conditionnées par l’homme.
Je ne m’aventurerai qu’avec prudence sur un terrain miné pour lequel je n’ai aucne autre compétence que le « bon sens de la foi » qui nous est commun. Du fait même de son incarnation le christianisme a traversé les siècles en s’inculturant sans cesse, en s’enrichissant de l’approfondissement de sa compréhension du dépot de la foi. Ce qui a pris différentes formes au travers du Magistère, de la liturgie, du droit, de l’exercice de l’autorité dans l’Eglise. Or, il n’est pas nécessaire d’avoir l’esprit tordu pour se rendre compte que l’homme étant ce qu’il est, il est des strates de cette tradition qui ont été plus remises en cause qu’affinées ou complétées par des strates ultérieures. En sorte que chacun peut, en fonction de sa sensibilité propre, faire mention de la Tradition en se référant aux périodes qui ont sa préférence. Nous expliquer, comme le font certains, que la Tradition se confondrait avec le Concile de Trente, au XVe siècle, est une belle supercherie ! Oui, le Concile Vatican II, sur bien des points, a voulu renouer avec la « vraie » tradition, bien antérieure. Voilà bien une réalité qu’on ne peut aborder avec infiniment de respect, d’humilité, et de capacité à se laisser « décentrer » de ses a priori culturels.
Nous venons d’apprendre la dispairion de Bernard Sesboué sj, l’un de nos plus brillants théologiens. J’ai rarement aussi bien perçu qu’à travers ses livres, combien fidélité et liberté étaient les deux faces d’un même respect de la Tradition, d’une même quète de vérité.
René, j’ai encore sans doute réfléchi trop vite, je parlais en fait de l’état actuel de l’Eglise et de ses forts points de blocage, et du coup de division, que je trouve impressionnants.
Peut-être manquons-nous de penseurs comme Bernard Sesboué, je ne sais pas. J’aimerais comprendre
Mon cher René, je relis ton billet sur ce sujet au lendemain du lancement du synode dans notre diocèse normand (Bayeux-Lisieux) et j’avoue ma perplexité. Avec mon épouse, nous animons la démarche dans notre paroisse (nous avons un peu pressé notre curé et avons commencé à réunir un groupe de paroissiens qui ont envie de « se bouger »…). Nous abordions donc ce processus de manière très positive. Hier, la cathédrale de Bayeux était pleine. Et l’assistance était composée de « piliers de paroisses », femmes et hommes engagés depuis longtemps. Que de bons signes ! Or, nous avons assisté à une célébration qui n’avait rien d’un appel. Pas de souffle, pas d’enthousiasme ! Après une présentation rapide du processus, un mot de notre évêque qui a parlé du rapport de la CIASE et nous a invités à la pénitence (mais nous, laïcs, qu’avons nous à nous faire pardonner sur ce sujet ???), puis nous avons subi un simulacre de « lectio divina » avant un jeu de questions réponses « plus langue de buis, tu meurs » entre deux laïcs nous il nous a surtout été dit qu’il était interdit de sortir des clous ! Nous avons compris qu’il fallait passer plus de temps à prier et à lire la Parole qu’à écouter, à s’écouter les uns les autres, à écouter ceux qui sont aux marges de notre Eglise ! Pas un instant, l’assistance n’a été invitée à poser ses questions (c’était jouable dans un temps limité..). Nous avons deux mois et demie avant la remise copie, mais on ne nous invite qu’à faire deux réunions d’ici la fin de l’année.
Le cardinal Greschi avait dit : « wake up ! ». Le cardinal Schonbörn (que nous connaissons bien : il passe non loin de chez nous quelques jours de vacances tous les ans) insiste sur la nécessité de se mettre à l’écoute. Certes, de l’Esprit Saint, mais pas que… Ici nous avons compris qu’il fallait mieux rester en sommeil et confier à nos prêtres et aux laïcs qui travaillent dans les services du diocèse, le soin de faire le boulot et de s’en remettre à eux. Bref, on nous a fait comprendre que nous étions un troupeau, que nous devions rester à genoux et soumis.
De notre côté, avec notre groupe de paroissiens, le coup est parti. Pas question de doucher leur enthousiasme, mais tout de même, ce n’est pas de très bon augure !!!
PS. Je n’ai pas ton adresse mail, peux-tu me l’adresser ?
Ce que tu décris là me désole… sans me surprendre vraiment. Je crains que l’attitude que tu as rencontrée dans ton diocèse ne soit, en réalité, celle que l’on retrouvera un peu partout. Ici, sur Créteil, notre évêque a aussi lancé le Synode ce samedi au cours d’une messe à la cathédrale. J’étais en Bretagne pour trois jours et n’ai pu m’y rendre. J’ai cru compendre que nous allions avoir une grille de lecture de ce qu’on attendait de nous, quelques mois poour répondre avant que « l’équipe diocésaine » n’en fasse la synthèse qui sera transmise à la Cef fin février. Quid de « l’équipe diocésaine » ? Mystère ! Si je m’attarde à ce détail c’est que pendant trois ans (2014-2016) j’ai été membre du Secrétariat général de notre Synode diocésain. J’avais eu notamment pour tâche de rédiger la synthèse des plus de 1 000 contributions de la phase de consultation (après qu’à une vingtaine de personnes nous en ayons assuré le dépouillement). Un travail passionnant. Fort de cette expérience, j’ai fait savoir au diocèse (où Mgr Blanchet a remplacé Mgr Santier) que j’étais disponible pour travailler sur ce dossier du synode sur la synodalité. C’était avant l’été. A ce jour personne n’a jugé bon de me répondre. Sans doute croulent-ils sous les bonnes volontés… Sic transit gloria lundi !