« La messe de tout le monde »

Le livre de Jean Noël Bezançon est une merveille de culture, d’intelligence et de foi profonde. Où il nous démontre comment la réforme liturgique voulue par le concile Vatican II, et aujourd’hui suspectée ici ou là, fut un vrai retour à la messe des origines.

N’ayant pu finalement assister, le 11 décembre, à la conférence de Jean-Noël Bezançon donnée à Saint Jacques du Haut Pas (Paris) à laquelle nous conviait la « conférence des baptisés de France »,  je me suis précipité sur son dernier ouvrage : « La messe de tout le monde »  (Cerf), dont on m’avait dit le plus grand bien.  Je ne saurais trop vous en recommander la lecture. Ce livre est un vrai bonheur pour le coeur et l’intelligence.

« La messe, écrit l’auteur, a évolué selon les pays et les époques., marquée par les cultures différentes. C’est la logique de l’incarnation. La messe n(‘est donc pas identique à Rome et à Constantinople. Et chaque fois que l’Eglise a entrepris d’en réformer le déroulement, comme le fit Paul VI, ce ne fut jamais pour innover mais, au contraire, pour se rapprocher des origines »(1)

Jean Noël Bezançon rappelle, à juste titre, que les premières communautés chrétiennes célébraient l’eucharistie dans les maisons particulières comme le rapportent les Actes. Et que « lorsque, sortis des persécutions, les chrétiens ont construit leurs propres bâtiments, ils reprirent les plans, non des temples, mais des synagogues juives, lieu de réunion, de prière et d’étude. » (2)

Si, au soir du vendredi Saint, le voile du Temple de Jérusalem s’est déchiré de haut en bas, c’est bien pour signifier la fin de la séparation entre le sacré, réservé aux prêtres, et le profane. En finir avec le principe du célébrant, dos au peuple, marmonant en latin des prières incompréhensibles pour le commun des fidèles n’a jamais été que le juste retour à la vraie messe. Celle où c’est l’ensemble du peuple chrétien, corps mystique du Christ, qui « célèbre »  la liturgie à la gloire du Père.

Il faudrait citer tout le livre, ce qui n’est pas ici mon propos. Je retiendrai cependant cette ultime passage : « De vraies distorsions sont apparues dans l’Eglise chaque fois qu’on est passé de la perspective du service à la problématique du pouvoir (…) Il n’est pas surprenant qu’aujourd’hui, un demi-siècle après Vatican II, les tentatives pour resacraliser la liturgie aillent de pair avec la tentationc  de recléricaliser l’Eglise, si on entend par là la monopolisation par les clercs de toutes les responsabilités et de tous les pouvoirs, y compris le savoir théologique que certains souhaiteraient leur réserver. » (3)

(1) page 29 ; (2) p.113 ; (3) p. 146.

8 comments

  • Merci, Monsieur René Poujol pour votre blog.

    Celui-ci me permet de m’exprimer librement et ce qui va de soi, aussi avec modération 😉 Grace à vous, cela m’aide aussi à avancer dans ma foi en renforcant mes convictions religieuses.

    Merci aussi pour l’information concernant le livre de Jean Noël Bezançon.
    Le choix (bon rythme de votre blog) de votre thème « La messe de tout le monde », me renvoi aux informations suivantes :
    http://viechretienne.catholique.org/cec/5310-paragraphe-2-l-eglise-peuple-de-dieu-corps
    « Article 9 : « Je crois à la sainte Eglise Catholique »
    Paragraphe 2 : L’Eglise – Peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple de l’Esprit Saint
    I. L’Église – Peuple de Dieu
    781  » A toute époque, à la vérité, et en toute nation, Dieu a tenu pour agréable quiconque le craint et pratique la justice. Cependant, il a plu à Dieu que les hommes ne reçoivent pas la sanctification et le salut séparément, hors de tout lien mutuel ; il a voulu au contraire en faire un Peuple qui le connaîtrait selon la vérité et le servirait dans la sainteté. C’est pourquoi il s’est choisi le Peuple d’Israël pour être son Peuple avec qui il a fait alliance et qu’il a progressivement instruit (…). Tout cela cependant n’était que pour préparer et figurer l’Alliance Nouvelle et parfaite qui serait conclue dans le Christ (…). C’est la Nouvelle Alliance dans son sang, appelant un Peuple, venu des Juifs et des païens, à se rassembler dans l’unité, non pas selon la chair, mais dans l’Esprit  » (LG 9). …/…
    804 On entre dans le Peuple de Dieu par la foi et le Baptême.  » Tous les hommes sont appelés à faire partie du Peuple de Dieu  » (LG 13), afin que, dans le Christ,  » les hommes constituent une seule famille et un seul Peuple de Dieu  » (AG 1). …/… »

    Sachons en cette occasion « faire chanter la vie » à l’unisson.
    Joyeux Noël à vous et à toute la création 🙂 Marcopolano.

  • Joyeux Noël à vous !
    je repense en ce jour à la messe sur le monde de Teillard de Chardin
    c’est l’humanité toute entière qui est portée telle quelle est à chaque instant dans les Eucharisties sur toute la terre.
    « un enfant nous est né , un fils nous a été donné » c’est Dieu même pour chaque homme sur terre.
    c’est le cadeau de Noël!

  • Je viens de relire, il y a peu, à l’invitation de l’Église, la vie du pape saint Damase.
    Il a vu que les chrétiens de Rome ne comprenaient plus le grec, langue liturgique de l’époque.

    Il a donc fait célébrer la messe en latin, et a chargé son secrétaire, saint Jérome, de traduire la bible en latin, la « vulgate », pour que le vulgus la comprenne. Déjà « la messe de tout le monde »…

    Il eu affaire, lui aussi, à des gens qui soutenaient qu’on ne pouvait célébrer qu’en grec !
    Le grec n’a été la langue de (presque) tout le monde que dans un deuxième temps de la vie de l’Église : saint Pierre devait faire mémoire du Seigneur en araméen.

    Aujourd’hui syriaques ou chaldéens ont conservé leur liturgies dans des langues anciennes.

    Je préfère vivre la messe dans ma langue que de voir des gens qui ignorent ce qui se passe et – au moins pire – récitent le chapelet pendant la consécration.

    Fraternellement

  • que ce soit dans n’importe quelle langue , la consécration se reconnaît….et si des personnes récitent le chapelet elles ne savent pas ce qui se passe !
    je préfère la messe dans ma langue , mais je reconnais que quand on va a l’étranger on peut chanter comme tout monde ….!

  • Bonsoir,
    je suis très supris par ce livre sur le ‘Saint Sacrifice de la Messe’, et par son titre provocateur (sans sacré, c’est à dire sans référence au sacrifice…).
    Je n’ai clairement pas l’impression qu’il ait été rédigé en communion avec notre Saint Père le Pape, qui a justement publié un motu proprio à ce sujet !
    Ce n’est pas un exemple d’esprit de communion, ni de réconciliation…
    Cdlt

  • Je n’ai pas encore lu ce livre dont on me dit grand bien.
    Il me paraît clair que la célébration dans les langues vernaculaires est une bonne chose, et je m’en réjouis.
    Je suis beaucoup plus réservé en revanche sur cette manie de parler de messe « dos au peuple », la plupart du temps pour fustiger cette attitude, quand il s’agit simplement de « se tourner vers le Seigneur », prêtre et assemblée ensemble tournés vers l’Orient qui symbolise le Christ ressuscité.

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