Retour à la rédaction où m’attendent quelques centaines de courriels. Il n’y a que dans la marine où l’on parle de trimaran… Ici le tri est tout sauf drôle . Il comporte son lot de publicités pour du viagra (son prix est stable depuis des mois) ou pour des masques anti grippe A (H1N1) avant qu’il n’y ait « rupture de stock sur le marché » ! Tu parles !
Parmi ces messages la lettre circulaire d’un ami éditeur qui publie, son premier livre de spiritualité. J’avais voici quelques semaines reçu ce qu’on appelle un « jeu d’épreuves » de l’ouvrage. Sa lecture m’a été insupportable. Il est des amalgames inacceptables. Ecrire, par exemple, à propos de certains catholiques : « Combien aujourd’hui sont victimes de jugements sévères parce qu’ils sont contre l’avortement, l’euthanasie, l’homosexualité. » peut laisser entendre que les trois « actes » seraient à mettre sur le même plan.
Cela me rappelle le triste paragraphe 492 du Catéchisme de l’Eglise catholique abrégé : « Sont des péchés gravement contraires à la chasteté, chacun selon la nature de son objet : l’adultère, la masturbation, la fornication, la pornographie, la prostitution, le viol, les actes homosexuels. » Viol et masturbation sur un pied d’égalité, en réponse à une question que personne ne songe à se poser : « Quels sont les principaux péchés contre la chasteté ? ». On finit par comprendre pourquoi des prêtres pédophiles ont pu ne pas juger plus grave d’abuser d’enfants que de se livrer au plaisir solitaire.
Mais plus que tout me hérisse cette idée, maintes fois reprise dans le livre, selon laquelle toute prière serait quasi automatiquement exaucée à qui sait prier. Et donc que ne recevoir du Ciel aucune réponse manifesterait simplement la carence, crasse et coupable, de celui qui la formule. Oser écrire : « Ce n’est pas un caprice que de demander un vélo rouge plutôt qu’un vélo. Nous saurons alors que s’il est rouge, Dieu a répondu à notre demande » tient de la provocation.
Il est tant d’hommes et de femmes qui, à genoux, supplient le Ciel non pas de les sauver de leur cancer ou de protéger leurs enfants du divorce mais de les arracher à leur péché et qui se heurtent à ce qu’ils perçoivent comme le silence de Dieu, pour ne pas ressentir ce propos comme un caprice d’enfant gâté. Sans doute lui et moi partageons nous la même foi. Je crains que nous n’ayons pas la même religion.