Sur Face Book, un groupe de chrétiens entend profiter des JMJ de 2013 à Rio de Janeiro et de la proximité du 50e anniversaire de l’annonce de la convocation du concile Vatican II, pour mettre en avant la « figure » de l’ancien archevêque de Recife Dom Helder Camara.
Même si les journalistes deviennent de plus en plus attentifs à ce qui se passe sur «la toile» (Internet), l’événement, pour l’heure, n’a guère nourri de larges commentaires. Le 9 septembre dernier, en quelques heures, la «page» ouverte sur Facebook, le 2 mai précédent, avec pour titre Dom Helder Camara Santo Subito est passée, subito précisément, de 27 à… 720 supporters. Par quel miracle ? Je crois, en toute modestie, avoir ma part de responsabilité dans ce mini-tsunami médiatico-ecclésial. Au lendemain de la béatification du pape Jean-Paul II, dans un article de mon blog (www.renepoujol.fr), je saluai la mémoire du pape défunt, indiscutablement «homme de Dieu», tout en invitant mon Eglise à une « plus généreuse ouverture à d’autres visages de sainteté, représentatifs des différentes formes de vie chrétienne au service du même évangile.» Et de citer : les moines de Tibhirine, Mgr Oscar Roméro et Dom Helder Camara. Le même jour, Philippe Giron, webmestre du site diocésain de Saint-Brieux et Tréguier, initiait sur Facebook, un comité de soutien à la béatification de l’ancien archevêque de Olinda et Recife.
Le deuxième acte s’est joué à Madrid, le 21 août dernier, lorsque Benoît XVI a convoqué la jeunesse du monde en 2013 pour de nouvelles JMJ à Rio de Janeiro, donc au Brésil. L’idée s’imposait d’elle-même. Le pape a toujours souhaité offrir à la jeunesse des «modèles de vie chrétienne», plus même : des modèles de sainteté. Pourquoi ne pas profiter de la dynamique de Rio pour promouvoir le procès en béatification de Dom Helder Camara qui, pour beaucoup représente l’icône même du témoin de l’Evangile auprès des plus pauvres, en Amérique latine ? A Madrid la rencontre de notre webmestre avec quelques confrères de l’hebdomadaire la Vie a été l’occasion de relancer le processus. On connaît la suite !
Il y aurait quelque naïveté, cependant, à imaginer qu’il suffise de créer le buzz sur Internet pour contraindre la Congrégation romaine pour les causes des saints. Béatification et canonisation sont l’aboutissement de processus généralement longs et complexes. Il revient toujours au diocèse d’appartenance du «futur» bienheureux, d’introduire la cause. Sans cette démarche initiale, aucun espoir de béatification. Or le diocèse de Recife n’a jamais rien engagé concernant Dom Helder Camara. Et pour cause ! En 1985, lorsqu’il part à la retraite, à 75 ans, il est remplacé à l’archevêché de Recife par Mgr José Cardoso Sobrinho. Celui-là même qui, il y a deux ans, s’est illustré dans l’affaire de l’excommunication de la mère de la petite Jessica et des médecins ayant procédé à l’avortement de la fillette, violée par son beau père. En 1985, succédant à Dom Helder, il avait repris possession, dès son arrivée, du palais épiscopal abandonné par son prédécesseur, avant de remettre en cause l’essentiel de son héritage : les communautés ecclésiales de base et les groupes d’évangélisation de quartiers.
Dans le même temps fut orchestrée auprès du Vatican, une véritable campagne de dénonciation et de dénigrement contre celui qui avait coutume de dire : «Quand je donne à manger aux pauvres, on dit que je suis un saint. Quand je demande pourquoi ils sont pauvres, on me traite de communiste.» On sait la crainte nourrie par Jean-Paul II, fils d’une Pologne asservie par le communisme, contre les dérives marxisantes possibles des théologies de la Libération. Dom Helder Camara, d’évidence, a injustement fait les frais de cette peur et d’un procès en suspicion parfaitement injustifié.
A l’heure où l’Eglise catholique s’apprête à célébrer le 50e anniversaire de l’annonce, par le pape Jean XXIII, de la convocation de Vatican II, les initiateurs de la campagne Dom Helder Camara Santo Subito, entendent réhabiliter, notamment auprès des générations JMJ qui n’en possèdent pas la mémoire, l’image de l’évêque qui joua, au concile, un rôle de tout premier plan, avant de s’en faire le témoin et l’acteur prophétiques. Comment pourraient-ils rencontrer vraiment cette Eglise du Brésil en ignorant tout de celui qui avait fait de sa vie un combat incessant pour la justice comme condition de la paix, pour la non-violence active, pour une Eglise pauvre au service d’une humanité fraternelle ?
Il est urgent de rendre à la jeunesse du monde celui qui, pour des millions et des millions de croyants, incarne un visage rayonnant de sainteté au service des plus pauvres et de l’Evangile. En souhaitant que la vox populi qui, jusqu’au Xe siècle, suffisait à faire les saints dans notre Eglise, sache toucher le cœur et la raison du nouvel archevêque de Olinda et Recife, Mgr Antônio Fernando Saburido, et le convaincre d’engager enfin la procédure de béatification de Dom Helder Camara.
(Forum publié dans la Voix de l’Ain le 6 octobre 2011)
je partage entièrement ce commentaire qui rend justice à un grand saint de notre époque