A Copenhague, la défense d’intérêts nationaux antagonistes n’a pas permis aux dirigeants de la planête de se montrer à la hauteur de leur mission historique. Est-ce à dire qu’il appartient désormais à d’autres de prendre le relais ?
A son habitude, Michel Serres ne prends pas de précaution oratoire pour commenter le sommet raté de Copenhague : « Copenhague est à la géopolitique ce que les accords de Munich, en septembre 1938, ont été à la politique : un compromis lâche et dilatoire » (Le Monde du 22 décembre).
La question qu’il soulève dans cet entretien n’est rien moins que celle de l’inadaptation de nos processus démocratiques, face aux révolutions qui s’opèrent sous nos yeux. Pourtant, est-il aussi simple d’écrire, à propos des dérèglements du climat et de leurs conséquences : « Deux groupes de personnes sont donc en jeu : un groupe d’experts qui savent mais qui ne sont pas élus, et un groupe d’élus qui ne savent pas. » Avant de plaider, il est vrai, pour « l’implication » des uns et des autres dans la vie de la Cité.
Ce qui semble acquis, hélas, est la paralysie de l’ONU. Et l’on voit mal comment gérer l’après Copenhague, en essayant de mettre d’accord, demain, 192 chefs d’Etat et de gouvernement qui n’ont pas réussi à s’entendre hier, sur un ordre du jour bien balisé. Mais qui donc parlera au nom de l’intérêt général ?
Dans un ouvrage récent, déjà évoqué dans ce blog (lire au 2 octobre : demain l’apocalypse ?) le scientifique « athée » (la précision n’est pas insignifiante) Jacques Blamont écrit ceci : « Si l’on veut essayer d’empêcher la catastrophe, il faut créer un mouvement ; ce mouvement, il faut qu’il soit de nature spirituelle. » et, plus loin : « Le message à élaborer est spirituel, et il ne peut être entendu que s’il a pour origine une autorité incontestée dans ce domaine. D’où une possible distribution des tâches : aux Eglises la parole ; à l’ONU le bras séculier. »
J’ignore si Jacques Blamont est dans le vrai. Mais l’appel de Benoît XVI pour la journée mondiale de la paix, lancé à la veille de la conclusion du sommet de Copenhague allait bien dans ce sens d’un plaidoyer vibrant pour l’intérêt général (lire au 16 décembre : « le pape vert »). Faut-il, ici, faire remarquer à nos confrères journalistes, prompts à « bouffer du pape » à tout propos, que ce texte là, courageux, lucide, vigoureux, rendu public alors que le thème abordé faisait la une de tous les journaux et bulletins d’information, a fait l’objet d’un boycott total sur les antennes.
Il y a quelques jours, dans le grand auditorium des Bernardins, à Paris, à l’occasion des 10 ans de la chaîne de télévision catholique KTO, quelques journalistes de médias chrétiens débattaient avec le porte parole de la Conférence des évêques de France sur le thème de la communication dans l’Eglise. Sujet oh combien d’actualité ! Et plus encore au lendemain d’une nouvelle tempête médiatique autour de la possible béatification de Pie XII qui, du coup, fragilise toute autre parole émanant de tel ou tel acteur de la vie ecclésiale, fut-il le premier d’entre eux !
Certes le temps de l’Eglise n’est pas le temps des médias. Mais une religion de l’incarnation peut-elle se désintéresser à ce point de l’impact prévisible de ses actes et de ses paroles ? A l’heure où certains semblent vouloir réhabiliter la « prudence » de Pie XII, que ne s’inspirent-ils de ce même devoir de « prudence », auquel ils semblent tellement attachés, lorsqu’ils conseillent le pape ?
Quand est ce que dans nos sociétés actuelles, les Etats pourront mettre en place des systèmes fiables et efficaces (donc coûteux) pour lutter contre les contrevenants au niveau international, du type d’Interpole par exemple ?
Hors mis les moyens à mettre en place pour réussir, il faudra que ces mêmes Etats soient réellement motivés. Et pour ce faire, ils devront changer le fusil d’épaule pour pouvoir correctement protéger les êtres vivants en mettant à contribution la minorité d’importants « irresponsables » avides de biens matériels, qui mettent en péril toute la création.
Par l’amplification par exemple de l’injustice, de la famine, de l’illettrisme, du chômage, de l’industrialisation, de la pollution, de la déforestation, des dérives financières et de la concurrence (guerre économique)… Cette action ne peut être menée sans un grand mouvement commun, venant de l’esprit humain (avec l’aide de Dieu) dans chaque Etat et personne de bonne volonté (adulte et responsable). Pour construire un avenir pour nos sociétés.
Pour ma part la « prudence », je la verrais plutôt dans ce qu’il faut « lier » ou « délier » ? « Garder » ou « perdre »… ? A ce niveau un véritable discernement est indispensable. La dualité entre le bien et le mal. Ces notions qui permettent aux hommes de se situer pour évaluer ; afin d’évoluer sereinement.
Alors, faut il encore et trop souvent que le mal, l’individualisme et la mort, nous bousculent pour que nous sachions enfin choisir in extrémiste l’autre option, qu’est le bien, l’unité et la vie pour pouvoir encore « faire chanter la vie » de génération en génération ?