Et si le scandale de la pédophilie n’était que l’une des réalités auxquelles l’Eglise se doit de faire face avec lucidité et courage ?
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Cet article a été repris sur le site Atlantico, celui de la Conférence catholique des baptisés francophones (CCBF), Tabgha et le site de Confrontations (Association d’intellectuels chrétiens) ainsi que sur le blogue A la table des chrétiens de gauche, que je remercie.
Il a été réactualisé le 13 mars 2016 pour tenir compte de quelques points factuels signalés dans tel ou tel commentaire dont le lecteur peut prendre connaissance. Il a également été enrichi de quelques liens nouveaux indiqués par des astérisques.
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Le film Spotlight s’est vu couronner, le 28 février, comme meilleur film de l’année par le jury des Oscar à Los Angeles. Distinction méritée pour un récit parfaitement maîtrisé qui, comme on le sait, retrace l’enquête menée au début des années 2000 par la cellule d’investigation du quotidien américain Boston Globe, concernant les agissements de prêtres pédophiles. Un scandale qui, par son ampleur – 243 condamnations de prêtres et religieux – allait acculer le diocèse de Boston à la faillite et déferler comme un tsunami sur l’Eglise catholique, partout à travers le monde, entrainant dans son sillage des dénonciations massives en Irlande, Allemagne, Autriche, Belgique et Pays-Bas notamment.
Assurément Spotlight fait œuvre de justice et de réhabilitation pour toutes les victimes de la pédophilie au sein de l’Eglise catholique. Et l’on ne peut que se réjouir de l’accueil reçu au Vatican même et ailleurs, par la sortie mondiale du film. «Le film convainc par sa trame. Et n’est pas un film anticatholique» écrivait au lendemain de la remise des Oscar, Lucetta Scaraffia, éditoraliste de l’Osservatore Romano. Quelques jours plus tôt, Mgr Charles Scicluna, aujourd’hui évêque de La Valette (Malte) ancien responsable du dossier des prêtres pédophiles au sein de la Congrégation pour la doctrine de la foi, déclarait au quotidien italien la Repubblica : «Ce film, tous les évêques et les cardinaux, surtout les responsables des âmes, devraient le voir, parce qu’ils doivent comprendre que c’est la dénonciation qui sauvera l’Eglise, et pas l’omerta». On ne saurait être plus clair.
De nouvelles «affaires» à la une de l’actualité
Est-ce à dire pour autant que la pédophilie ne serait plus désormais, pour l’Eglise, qu’un mauvais et tragique souvenir ? Hélas, il n’en est rien ! Hasard du calendrier, au lendemain du triomphe Hollywoodien de Spotlight s’ouvrait, en Australie, l’audition du cardinal Georges Pell, ancien archevêque de Melbourne et de Sydney, aujourd’hui à la tête du nouveau secrétariat pour l’économie du Vatican. Il lui est reproché d’avoir fermé les yeux sur les agissements criminels de prêtres, postérieurement aux années 1970, dont certains ont fait plusieurs dizaines de victimes conduisant à des suicides, à l’alcoolisme ou à la dépression. S’il a reconnu que l’Eglise australienne avait «fait d’énormes erreurs» il appartiendra à la justice de situer son degré de responsabilité personnelle.
Plus près de nous, début février, c’est le cardinal archevêque de Lyon, Philippe Barbarin qui se trouvait à son tour mis en cause. Les membres de l’association La Parole libérée, créée au mois de décembre 2015 par d’anciens jeunes scouts victimes du père Bernard Preynat, dans les années 1986-1991, ayant décidé de porter plainte pour non dénonciation de faits de pédophilie. Ils reprochent notamment au cardinal Barbarin d’avoir nommé le père Preynat Doyen, en 2013, alors qu’il avait connaissance de ses agissements depuis 2007-2008. Le soupçon de non dénonciation volontaire vise rétrospectivement ses prédécesseurs, les cardinaux Decourtray et Billé, aujourd’hui décédés, qui auraient été informés des agissement du prêtre. La justice est donc saisie qui a pris une première décision en ouvrant une enquête préliminaire. Elle aura à se prononcer.
Disons-le tout net, si ces crimes pédophiles commis par des prêtres catholiques dans divers pays du monde, représentent une tache morale terrible pour l’Eglise, encore faut-il raison garder. Ce qui suppose de ne pas voir un pédophile potentiel en tout ecclésiastiques et d’éviter de chercher l’origine de ces comportements déviants et criminels dans l’obligation du célibat sacerdotal (*) qui n’a rien à voir en cette affaire, même si le soupçon est régulièrement avancé par tel ou tel. Cela étant précisé non pour disculper l’institution ecclésiastique mais pour situer les vraies responsabilités, les vraies causes et examiner si l’Eglise est allée au bout de l’exigence de vérité qu’elle proclame, de manière à nous garantir que le passé appartient définitivement au passé. Or, la réalité semble plus complexe.
Quand le pape François impose la «tolérance zéro»
Soyons justes : il faut reconnaître au pape Benoît XVI d’être sorti du déni et de l’immobilisme, contrairement à son prédécesseur dont la sainteté, qu’on le veuille ou non, reste entachée d’une grande faiblesse face au scandale pédophile, malgré un timide début de prise en compte sur sa fin de vie. De son côté, dès son élection, le pape François a solennellement confirmé le principe d’une «tolérance zéro» devenue la règle officielle dans l’Eglise catholique. Rendre justice aux victimes et combattre le mal à sa racine doivent désormais primer sur le souci de protéger l’institution. Le 25 mars 2014, le pape François installait officiellement une Commission pontificale pour la protection des mineurs présidée par le cardinal de Boston Sean Patrick O’Malley. Il a créé, plus récemment, un tribunal spécial chargé de se prononcer sur l’abus de fonction des évêques qui n’auraient pas donné suite aux dénonciations de pédophilies qui leur étaient parvenues. Un tribunal qui peut être saisi par les fidèles.
En France, la Conférence des évêques a pris fermement position sur ces questions, dès 2000, en pleine tourmente liée à la condamnation de l’abbé Bissey suivie de celle, symbolique mais ferme, de son évêque Mgr Pican. Trois ans plus tard paraissait la brochure Lutter contre la pédophilie, complétée et remise à jour en 2010, largement diffusée auprès du clergé et des éducateurs catholiques.
De la protection des mineurs à celle des personnes vulnérables
S’agissant d’abus sexuels commis sur mineurs, par des membres du clergé, il semble donc que le dispositif aujourd’hui mis en place soit opérationnel, pour peu qu’on l’utilise. Mais d’autres ombres demeurent au tableau. En février 2012, l’Université Grégorienne organisait à Rome, à la demande de Benoît XVI, un symposium international de plusieurs jours réunissant évêques et supérieurs religieux. Objectif : «la mise en œuvre de la protection des mineurs et personnes vulnérables face aux abus sexuels.» La question, en effet, déborde largement la seule pédophilie puisqu’elle touche également des adultes « vulnérables » notamment au sein de certaines institutions religieuses. En introduction, le cardinal Levada, alors Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, avait également rappelé aux participants «la nécessité d’évaluer attentivement la sélection des candidats au sacerdoce et à la vie religieuse, celle de programmes de formation humaine, qui inclut une formation sexuelle adéquate.» Manière de mieux souligner le souci de prévention qui doit désormais habiter chaque évêque, chaque supérieur, lorsqu’il appelle de jeunes adultes à un ministère susceptible de le mettre en contact avec des jeunes ou des personnes fragiles.
Martial Maciel ou le mystère de l’impunité
Or, sans vouloir ici être exhaustif, ce qui n’est pas l’objet de cet article, et sans sombrer dans l’amalgame vis à vis des « nouvelles communautés » charismatiques ou nouveaux mouvements dont certains n’ont connu aucune dérive, force est de constater qu’au cours des dernières décennies, les plaintes se sont accumulées, les «affaires» multipliées, sanctionnées par des mises à l’écart de fondateurs, des procès canoniques, des mises sous tutelle ecclésiastique. Chacun garde en mémoire le scandale lié au fondateur des Légionnaires du Christ, le prêtre mexicain Marcial Maciel qui, sur près d’un demi-siècle et en toute impunité, a abusé de centaines d’enfants, requis les «services sexuels» de certains séminaristes, s’est mis en ménage avec trois femmes qui lui ont donné des enfants dont il lui est arrivé d’abuser… Un panorama auquel il faut ajouter la toxicomanie et des propos, affirmés par les uns mais contestés par d’autres selon lesquels il ne croyait pas en Dieu mais au diable… (1) Et cela avec la protection des plus hautes autorités du Vatican, les ouvrages des meilleurs vaticanistes en témoignent aujourd’hui de manière incontestable. Benoit XVI lui-même, dont l’attitude face à la pédophilie tranche pourtant avec celle de son prédécesseur, n’a jamais engagé de procès canonique à l’encontre du père Maciel jugé trop âgé… évitant ainsi des révélations sans doute gênantes pour l’institution (1).
Je conserve le souvenir personnel d’une visite à Rome, vers la fin du pontificat de Jean-Paul II, où un cardinal de Curie, de retour du Mexique, me vanta ouvertement le dynamisme et la sainteté des Légionnaires du Christ qui apportaient à l’Eglise : « de la jeunesse, des vocations et des subsides.» J’avais en mémoire la confidence recueillie quelques heures plus tôt auprès d’un autre interlocuteur du Vatican m’avouant que c’est dans les rangs de ce mouvement que l’on trouvait le plus de réductions à l’état laïc dans les deux ans suivant les ordinations…
En France, des «affaires» peu claires
Il s’agit là, certes, d’un cas extrême. Mais qui pose au moins deux questions que l’on peut élargir à d’autres communautés nouvelles : comment cela a-t-il été possible aussi longtemps et peut-on continuer à dire, une fois le plus fort de la crise dépassé, que si «le fondateur était déviant ou pervers l’œuvre reste saine…» ? Alors même que les principaux responsables choisis par lui sont souvent demeurés en place et que le charisme mis en œuvre reste habituellement celui du fondateur.
Pour la France, les cas de dérives sectaires dans les communautés nouvelles sont nombreux : abus de pouvoir ecclésiastique, exploitation, abus sexuels, violences psychologiques, contrainte morale, expulsions brutales sans explication… Avec à la clé autant de vies brisées parfois jusqu’au suicide, et des difficultés à se construire un avenir en confiance. Tour à tour, ont été épinglés par la presse et les médias : les Béatitudes, la communauté Saint-Jean, celle de Bethléem, l’Institut du Christ Roi, les Travailleuses missionnaires de l’Immaculée, le Pain de Vie, le Verbe de Vie… et Points Cœur qui vient de connaître, début 2016, un nouveau rebondissement avec la suspension a divinis de son fondateur, le père Thierry de Roucy, par Mgr Rey (*) évêque de Fréjus-Toulon dont il dépend. L’étonnant étant que cette suspension ait été prononcée pour simple désobéissance (l’intéressé refusant de s’installer dans le diocèse) alors que sa condamnation canonique de 2011, confirmée en appel, pour des faits autrement plus graves dont certains pouvaient entrainer l’excommunication (absolution du complice), s’est soldée par une simple interdiction de confesser les membres de Points Cœur pendant trois ans…
Et l’on pourrait, hélas, multiplier les exemples de situations peu claires. On peut être surpris que le père Marie-Dominique Philippe, dont la communauté Saint Jean a reconnu par euphémisme qu’il avait posé des « actes contraires à la chasteté » sur des femmes et certains frères, ait bénéficié à sa mort, en 2006 d’obsèques solennelles retransmises en direct sur KTO depuis la primatiale Saint Jean de Lyon. A cette date, personne n’était donc au courant de la moindre rumeur ? On peut s’interroge de même sur son frère, le père Thomas Philippe, accompagnateur spirituel de Jean Vanier, décédé en 1993, soupçonné d’abus à caractère sexuel sur des femmes majeures. Comment éviter aujourd’hui le soupçon qu’il y ait pu y avoir d’autres victimes parmi les personnes fragiles accueillies dans les communautés de l’Arche ? Là encore, personne ne s’était donc aperçu de rien ?
Un mea culpa… en forme d’aveu d’impuissance.
Il y a d’évidence, selon les cas, soit un manque de surveillance et de discernement, soit une opacité incompréhensible de la justice ecclésiastique, depuis longtemps dénoncées par des familles de victimes réunies notamment au sein du collectif «Appel de Lourdes 2013» (2). Cet automne-là, au terme de l’Assemblée plénière qui venait de prendre connaissance de leur «dénonciation de pratiques relevant de dérives sectaires à l’intérieur même d’institutions d’Eglise», Mgr Georges Pontier, nouveau président de la Cef, accusait réception et affirmait la détermination des évêques à lutter contre ces dérives. Mais sa réponse même avait les tonalités d’un aveu lorsqu’il écrivait : «Nous avons interpellé des responsables (de communautés nouvelles) pour leur faire part de nos interrogations. Bien souvent, alors, nous n’avons reçu de la part de tous ceux à qui nous nous adressions que méfiance et silence. Je peux vous assurer que ce n’est pas un réconfort de savoir que nos remarques d’alors étaient justifiées.» Qui avait donc autorité sur elles ? Faut-il comprendre qu’aucune hiérarchie ecclésiastique n’est compétente pour contrôler leurs activités et leurs agissements ?
Récemment la Cef a créé une cellule pour les dérives sectaires dans les communautés catholiques, dirigée par un évêque relevant directement de la présidence de la Conférence. Mais la question reste posée de l’autorité réelle des Conférences épiscopales sur des évêques qui, canoniquement, restent maîtres en leur diocèse. Pourtant sont-ils les mieux placés pour opérer, individuellement, un vrai discernement ? Et ont-ils toujours et partout la volonté de le faire lorsque leur histoire personnelle les lie étroitement à telle ou telle communauté ou à telle ou telle personne ? Le doute est permis, ici ou là !
Evaluer la sélection des candidats au sacerdoce
Reste enfin la délicate question des séminaristes qui portent l’avenir du presbytérat. Ce n’est pas sans raisons que le cardinal Levada appelait en 2012 à « évaluer attentivement la sélection des candidats au sacerdoce et à la vie religieuse.» Prévenir vaut toujours mieux que guérir, même dans l’Eglise. Une fois encore, gardons nous de tout amalgame. La plupart des séminaristes ont une parfaite conscience de la portée de leur engagement et le ressort intérieur, psychologique et spirituel, nécessaire pour lui être fidèle. Mais lorsqu’on sait que nombre de communautés nouvelles mettent fièrement en avant les vocations qu’elles donnent à l’Eglise, comment ne pas s’interroger sur les critères de discernement opérés par certains responsables ecclésiastiques désormais convaincus de dérives ?
Il n’est point besoin de forcer la confidence pour entendre des supérieurs de séminaires s’étonner que tel ou tel candidat au sacerdoce, sur lequel ils avaient en équipe discerné une forme d’immaturité affective, au point de le dissuader de poursuivre dans cette voie, se soit retrouvé quelques mois plus tard, accueilli à bras ouverts dans quelque diocèse du Sud de la France où l’évêque local se prévaut d’une grande fécondité vocationnelle ?
Alors oui, le succès mondial de Spotlight peut être une vraie chance pour l’Eglise. Si elle sait avec humilité aller au bout de sa démarche de vérité. Mais trop d‘ombres demeurent. Un article récent du vaticaniste italien Marco Politi souligne les résistances de l’institution, aussi bien au niveau de la Secrétairerie d’Etat que de certains épiscopats, à la lutte contre l’omerta engagée par le pape François. Il n’hésite pas à écrire : « La question de la pédophilie risque de devenir une épine dans le pontificat de François» pour la simple raison que « Excepté les cas où c’est imposé par la loi du pays, la majorité de l’épiscopat mondial ne veut pas entendre parler d’obligation de dénonciation.» Mais aussi parce que le pape François (*) lui-même donne parfois le sentiment de ne pas vouloir ou pouvoir trancher vraiment sur l’attitude de ceux qui, au Vatican, continuent de plaider pour une certaine prudence.
Une Eglise marquée par la peur
Au terme de ce trop long mais tout aussi bien trop bref panorama, une impression domine : celle d’une Eglise qui ne parvient pas totalement à surmonter sa peur. C’est ce qu’exprime bien Marie Collins, membre de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, elle-même jadis victime, en Irlande, d’un prêtre pédophile : « Encore trop de catholiques ont peur pour la réputation de l’Eglise ». Elle dit vrai en insistant sur le fait qu’à ce jour c’est une certaine base catholique de fidèles qui se montre plus inquiète que nombre d’épiscopats qui ont commencé à prendre les choses en mains. A cette première peur il faut ajouter celle de jeter le discrédit sur des communautés nouvelles longtemps regardées et présentées, non sans raisons, comme un véritable renouveau pour l’Eglise, même si, là encore, les évêques sont devenus plus lucides sur les grandeurs et faiblesses du renouveau charismatique. Enfin peur de voir se réduire comme peau de chagrin le nombre d’ordinations sacerdotales si l’on devait appliquer avec rigueur les critères d’admission à la prêtrise définis par Rome…
La peur ultime, chez nombre d’évêques, est sans doute d’avoir à envisager la fin d’une Eglise cléricalocentrée, aujourd’hui artificiellement maintenue, non sans difficultés, par l’accueil massif de prêtres étrangers, et de devoir enfin prendre réellement au sérieux le sacerdoce commun à tous les baptisés. Faute de s’être interrogé vraiment sur les causes de l’effondrement des vocations au sein d’une jeunesse catholique aussi généreuse que dans le passé.
Aujourd’hui face aux risques toujours possibles d’agressions pédophiles ou de dérives sectaires, ce ne sont pas ses ennemis qui acculent l’Eglise au changement et au choix courageux de la vérité, ce sont ses propres enfants qui l’exigent, sans ressentiment ni agressivité mais avec détermination.
© René Poujol
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(*) Ce lien a été mis postérieurement à l’écriture de cet article.
(1) Benoît XVI a été élu en 2005, la même année le père Marcial Maciel quitte la direction des Légionnaires du Christ, puis toute vie publique l’année suivante. Il meurt en 2008 sans qu’aucun procès canonique ait été ouvert à son encontre.
(2) Collectif Appel de Lourdes 2013, Yves Hamant, membre du collectif : LourdesMMXIII@gmail.com
On peut également signaler une autre association de défense des victimes de dérives sectaires dans les communautés religieuses :
http://www.avref.fr/
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Quelle intensité dans ce texte ! Tout est dit et hélas nous sommes consternés……
Citant le vaticaniste italien Marco Politi : « La question de la pédophilie risque de devenir une épine dans le pontificat de François» pour la simple raison que « Excepté les cas où c’est imposé par la loi du pays, la majorité de l’épiscopat mondial ne veut pas entendre parler d’obligation de dénonciation. »
Est-ce parce que la « tolérance zéro » risque d’être du pipeau ?
Non ce n’est pas du pipeau mais on voit bien que certains évêques sont bousculés par une décision de transparence qui ne correspond pas aux habitudes passées. C’est d’autant moins du pipeau que, comme je l’indique dans mon article, le pape François vient de mettre en place un tribunal spécial pour traiter des cas d’évêques qui auraient omis de dénoncer des prêtres pédophiles, tribunal qui peut être saisi par les fidèles.
C’est bien vrai, il existe à présent un tribunal spécial chargé de juger les évêques ayant couvert des prêtres auteurs d’abus sexuels sur mineurs.
Mais cette instance judiciaire existe en fait depuis le 10 juin 2015, c’est-à-dire depuis bientôt 1 an !
En nous référant au cas de l’affaire Barbarin, ne devons-nous pas craindre que l’Eglise se limite – tout au plus – aux éventuelles condamnations qui auront été prononcées au niveau de la justice civile, pour ensuite les traiter au niveau de son instance judiciaire spéciale ?
(la question se pose de manière plus aiguë encore dans les pays où il n’existe aucune obligation de dénoncer de tels crimes de pédophilie à la justice civile!)
Or à défaut d’un jugement qui ne soit pas à la traîne de la justice civile, autrement dit d’un jugement indépendant, que représentera donc cette soi-disant « tolérance zéro » ?
Au sein de l’Eglise catholique, s’attaquer à n’importe quel sujet de mœurs est particulièrement délicat, et c’est d’autant plus délicat lorsque ces sujets de mœurs sont répertoriés comme des crimes.
Car il s’agit alors de s’attaquer, ni plus ni moins, à des crimes.
De même que sous la torture il est possible d’obtenir n’importe quel aveu, sous la contrainte il est possible d’obtenir n’importe quel silence.
S’agissant des actes de pédophilie, le silence contraint – résultant d’une application de la « loi du silence » – est systématiquement destiné à protéger le coupable.
Basée sur l’adage « ce dont on ne parle pas, c’est comme si ça n’existait pas », la « loi du silence » – qui a fait ses preuves dans la mafia comme dans l’Eglise catholique – a été une stratégie gagnante à tous les coups. Car elle permettait habilement de déplacer le problème.
Au XXIème siècle, la « loi du silence » étant depuis des lustres la procédure normale à suivre dans les cas litigieux, le plus grand problème auquel l’Eglise catholique se trouve confrontée actuellement est celui de l’abolition de cette « loi du silence » – pour la faire évoluer vers une « libération de la parole » (un concept auquel le nom de l’association « La Parole Libérée » fait explicitement référence).
Mais aussi étonnant que cela paraisse, c’est là qu’intervient la fameuse « tolérance zéro » qui vient d’être annoncée par le Magistère de l’Eglise catholique
(une « tolérance zéro » introduite ainsi non pas vis-à-vis des pédophiles eux-mêmes – comme on aurait pu s’y attendre – mais vis-à-vis des ecclésiastiques qui persisteraient à obtempérer à la traditionnelle « loi du silence », continuant ainsi à protéger – comme dans le passé – les prêtres pédophiles : ne serait-ce pas là une manière de compliquer la solution du problème au lieu de la simplifier ?)
Quant aux chances de succès de cette nouvelle sorte d’« aggiornamento » dans l’Eglise catholique, voici ce qu’en pense le vaticaniste italien Marco Politi :
« Excepté les cas où c’est imposé par la loi du pays, la majorité de l’épiscopat mondial ne veut pas entendre parler d’obligation de dénonciation. » (cité dans votre billet)
Merci pour cette excellente analyse à laquelle je souscris.
Je suis un ancien légionnaire du Christ et l’un des signataires du Collectif que vous avez cité. Je suis un peu étonné par une chose que vous dîtes à propos du père Maciel: « des propos longtemps réitérés sur le fait qu’il ne croyait pas en Dieu mais au diable »
J’ai connu le père Maciel en personne, écouté ses conférences, lu ses lettres (les authentiques comme les fausses)… Je crois avoir lu à peu près tout ce qui a été écrit dans toutes les langues à son sujet… et je n’ai jamais lu une telle chose. Quelle est votre source?
Maciel était un psychopathe, un gourou et un pervers sexuel. Sans doute a-t-il été conduit dans la perversion par quelques diablotins, certes, mais je ne pense pas qu’il ait jamais fait un acte de foi dans le diable.
Quant à sa foi en Dieu, je ne crois pas non plus qu’il ait avoué un jour « ne pas croire en Dieu ». La seule chose, c’est qu’à la fin de sa vie, lorsqu’il n’était plus valide et était obligé de rester enfermé dans une communauté religieuse, il aurait effectivement manifesté du « dégoût » pour la vie religieuse (ce qui n’est d’ailleurs pas très étonnant: tant qu’il était valide, il ne l’observait pas…). Un témoignage affirme également qu’avant de mourir, il aurait refusé de demander pardon et de recevoir les sacrements. Mais on n’en sait pas plus.
Merci de votre commentaire. Je sais dans quel ouvrage retrouver ce que j’affirme concernant le père Maciel. Le temps de faire ma recherche et je vous poste les références sur ce blogue.
Voici ma source : Nicolas Diat, L’homme qui ne voulait pas être pape. Albin Michel 2014, p. 249. Je cite :
«Le 30 janvier 2008, le père Maciel meurt à Houston dans une maison de la Légion. Les circonstances de sa mort restent entourées d’un halo de mystère. Un haut prélat de la secrétairerie, proche de Benoît XVI, me confia il y a peu : « Le fondateur de la Légion est décédé dans des conditions dramatiques. Son successeur, le père Corcuera, et toute la direction, étaient présents à Houston. Alors que les médecins avaient fait savoir à son entourage que la fin était proche, Marcial Maciel refusa les derniers sacrements et la confession. Il ne voulait pas entendre parler de Dieu ni de l’Eglise. Il a dit au père Corcuera qu’il ne croyait qu’au diable et à ses œuvres. Dès lors, le directeur de la Légion a décidé de faire appel à un exorciste. Celui-ci est resté deux jours entiers avec Marcial Maciel. Le père Corcuera nous a confié ensuite que Marcial Maciel ne priait plus depuis de nombreuses années, qu’il ne disait jamais sa messe quotidienne, qu’il avait la sainte communion en horreur et qu’il ne priait pas son brévaiaire. Mais surtout, le père Corcuera devait nous avouer qu’il y a quelques années, Marcial Maciel lui avait dit qu’il avait un commerce régulier avec le diable. Après l’exorcisme, Marcial Maciel a accepté de se confesser et d’assister dans sa chambre à la messe. A l’extrémité de a vie, Marcial Maciel est mort en chrétien, après avoir passé son temps sur terre dans la débauche et le paganisme les plus éhontés.»
Cette source n’est pas fiable du tout. D’ailleurs cet homme a cité plusieurs pages de mon livre dans le sien… sans me demander l’autorisation, puis il a retiré la suite des mes conclusions pour y mettre les siennes à la place. Manière de dire : « Laissez moi passer: MOI je vais vous expliquer la vérité. »
Je suis très en colère contre ce genre de journalistes qui ré-écrivent l’histoire pour protéger l’institution plutôt que d’accepter la vérité telle qu’elle est. Je connais personnellement la plupart des victimes du père Maciel, et je connais également l’une des personnes qui était là, à ses côtés, au moment de sa mort.
Je vous assure que cette source n’est absolument pas solide.
Maciel n’a justement pas accepté de se confesser.
C’est ce journaliste – entre autre – que j’ai dénoncé lors de la conférence que j’ai donnée à Stockholm, l’été dernier: https://www.youtube.com/watch?v=O9JuJNHNI1U
Pourquoi raconte-t-il cela ?
Et bien je crois qu’il y a là une façon d’essayer de dédouaner la responsabilité de la hiérarchie. Même processus dans le livre de Giansoldati: on dépeint le père Maciel comme un génie du mal : soit en invoquant un lien secret avec le démon, soit en insistant sur son intelligence prodigieuse.
En fait, Maciel était un crétin, un véritable crétin : et c’est cela le plus honteux dans cette histoire. Le Vatican s’est fait mener en bateau pendant 60 ans par un type qui n’aurait même pas du être ordonné.
L’ironie de l’histoire, c’est que durant toute sa vie, des légendes dorées ont été écrites sur sa vie héroïque, extraordinaire et pleine de miracles. Mais bien sûr, tout était faux : lui-même racontait sa propre histoire de façon toujours auto-hagiographique (l’un de ses premiers secrétaires particuliers, Federico Dominguez dénonce les mensonges du père Maciel dans une lettre au Vicaire de l’archidiocèse de Mexico, en 1954 : http://www.lenversdudecor.org/ARCHIVE-La-lettre-du-frere-Dominguez-sur-le-pere-Maciel.html (§7 et 8)
Si vous saviez tout ce qu’on a appris sur l’histoire du père Maciel : il avait eu des apparitions de la sainte Vierge! Il pouvait lire dans votre âme comme on lit dans un livre ouvert! Il avait fait des miracles, guéri des cancéreux… et s’était même battu durant toute une nuit contre le démon!
Et aujourd’hui, c’est le même processus, mais inversé : ce serait un génie du mal qui aurait fait un pacte avec le démon etc.
Bonjour,
Je me permets d’insister. L’histoire reportée dans le livre de Nicolas Diat sur l’allégeance supposée du père Maciel au démon est une invention. Je regrette que vous n’ayez pas corrigé ce point dans votre article.
J’ai eu un échange avec Malen Oriol, ex supérieure générale des laïques consacrées, qui était auprès du père Maciel lors de ses derniers jours. Je lui ai transmis le passage que vous citez, et voici ce qu’elle m’a répondu (Depuis, elle a quitté le mouvement avec un certain nombre de femmes consacrées, et a fondé une nouvelle communauté religieuse)
« Hola Javier,
(…) Perdona mi tardanza en responder pero entre una cosa y otra lo había archivado y estaba pendiente.
Sobre lo que me preguntas pues realmente los datos no son certeros ni veraces (…)
Espero que todo te vaya bien. Con un saludo y deseándote lo mejor,
Malén O
Si vous ne comprenez pas l’espagnol: elle dit que ce passage du livre de Nicolas Diat est à la fois faux et malhonnête.
Cher monsieur, l’article initial disait : « Un panorama auquel il faut ajouter la toxicomanie et des propos longtemps réitérés sur le fait qu’il ne croyait pas en Dieu mais au diable… » L’article, comme on peut l’observer, a été corrigé en ces termes : « Un panorama auquel il faut ajouter la toxicomanie et des propos, affirmés par les uns mais contestés par d’autres selon lesquels il ne croyait pas en Dieu mais au diable… » Mais c’est bien volontiers que je publie votre commentaire.
« éviter le ridicule de chercher l’origine de ces comportements déviants et criminels dans l’obligation du célibat sacerdotal qui n’a rien à voir en cette affaire. » Je vois mal comment on peut défendre que le célibat n’a rien à voir avec la pédophilie : à mon avis c’est un argument fallacieux destiné à protéger l’institution Eglise, ne rien changer surtout, pas de remise en question, c’est pratique !
« le pape François lui-même donne parfois le sentiment de ne pas vouloir ou pouvoir trancher » : oui tant qu’on continuera à dissocier l’acte et la personne, on persiste à maintenir l’ambiguité c’est encore un argument qui permet de protéger les personnes, là encore il faut accepter que l’Eglise condamne elle même ses propres pédophiles au lieu de les protéger ! Mais cela n’est pas encore ancré dans l’esprit des responsables sans doute au nom de la miséricorde… alors que pour les homosexuels il n’y en a pas de miséricorde ni pour les femmes qui avortent… C’est cette différence de traitement qui est scandaleuse et qui ne passe pas et malgré cela, aucune réforme en vue…
Pardonnez-moi de ne pas vous suivre dans votre raisonnement. Je persiste et signe : il n’y a aucun lien démontré entre célibat et pédophilie. La plupart des victimes de la pédophilie le sont de proche parents la plupart du temps mariés et pères de famille. Si le célibat sacerdotal et la continence qu’il suppose sont vécus comme insupportables par certains prêtres… c’est le plus souvent dans une vie affective parallèle hétérosexuelle ou homosexuelle qu’il se réfugient, pas dans la pédophilie. C’est tellement évident à comprendre qu’on ne comprend même pas pourquoi cela ferait débat sinon comme argument fallacieux pour ceux qui contestent par principe le débat ecclésiastique.
Je ne conteste pas « par principe » le célibat ecclésiastique, je suis vraiment sincère dans tout ce que je dis et je le pense vraiment, cela vous a échappé… Mais surtout, ce qui est fallacieux c’est cette généralisation que vous faites ! Se réfugier dans une relation hétérosexuelle dans les milieux catholiques peut être très long c’est pourquoi la pédophilie peut être une tentation immédiate et facile, malheureusement, c’est cela qui me parait évident à moi ! Les pédophiles catholiques ont décidément de beaux jours devant eux dans un tel déni malheureusement et surtout de pauvres proies à détruire, victimes innocentes.
Je persiste à dire qu’aucune enquête ne vient corroborer votre propos et je regrette, pour ma part, qu’aucun chercheur ne se soit jamais penché sur la question. Pour le reste, il n’y a pas, hélas, que les pédophiles catholiques qui aient de beaux jours devant eux !
Vous avez complètement raison, René, la pédophilie n’a rien à voir avec le le célibat. Elle est d’abord le plus souvent intra-familiale, les services sociaux et les brigades des mineurs savent bien combien les cas d’inceste sont fréquents ; elle est ensuite le fait de personnes au contact des enfants de par leur profession ou leur activité.
Merci de ce commentaire, peut-être le plus profond que j’ai lu, le plus complet. La conclusion dit tout .
Ce n’est pas aimer l’Eglise que de se taire c’est l’aimer que de dire. Il ne s’agit pas de chasse aux sorcières ( encore un mot féminin !) mais de dire aux évêques : Attention danger !
je pense que le plus grand nombre est désemparé, incompétent et incrédule.
Vouloir laisser croître sans contrôle réel des communautés pourvoyeuses de prêtres en raison de la pénurie est une faute grave.
Tout sauf un laïc ou une femme : telle est la devise de beaucoup qui conduit à des choix inconscients de personnes fragiles aux histoires compliquées qui ne peuvent être pasteurs vraiment.
Danger pour elles et pour leurs communautés .
Il faut que nous soyons nombreux, parents, grands-parents, animateurs de catéchèse à dire à nos évèques: « n’ayez pas peur, protégez les enfants et les personnes fragiles des prédateurs, c’est cela qui grandit l’Église, pas le silence. Nous, peuple de Dieu, vous soutenons dans ce combat. »
Remarquable, René. Ton texte mériterait d’être lu et commenté dans tous les diocèses. Peut-être sera-t-il analysé au sein de la Conférence des évêques de France qui va se réunir dans quelques jours à huis clos à Lourdes. Espérons-le.
Tu poses de vraies questions. Elles attendent de vraies réponses de la part d’une institution qui donne, parfois, le sentiment d’aller dans le mur, sans volonté (ou si peu) de changer de trajectoire.
Merci François. J’ai bon espoir que ma contribution ne passe pas totalement inaperçue !
Je suis prêtre retraité. Dix ans après mon ordination j’ai rencontré l’âme-sœur, une enseignante croyante, militante et charmante! Nous avons eu une relation amoureuse merveilleuse qui m’a épanouis. Malgré la séparation, je rends grâce à Dieu Source de tout amour. Grâce à cette relation et aux amitiés féminines, j’ai tenu le coup ! Mais quand il y a trop de solitude et pas assez d’affection dans la vie d’un prêtre, c’est dangereux. En ce sens je comprends la réflexion de Jobinette sur l’obligation du célibat. « Il n’est pas bon pour l’homme d’être seul… » (Genèse 2,18) L’avenir de l’Eglise catho-romaine c’est d’appeler au ministère presbytéral en priorité des gens mariés. Je pense qu’alors il y aura moins de scandales!
Dans le film on parle de 6 p.cent de prêtres pedophiles, quelle est le p.centage chez les hommes mariés dans le diocèse de Boston? Et dans d’autres diocèses?
Je suis incapable de répondre à cette question. Je regarde si je trouve des éléments.
C est le genre de propos qui me fait bondir ! Le fait qu il existe des pédophiles laïcs doit-il nous faire minimiser l’horreur des actes commis par des ministres ordonnés ?
J’ai connu, personnellement, plusieurs candidats au sacerdoce, jugés inaptes par leur supérieur, accueillis à bras ouverts par des évêques.
Tant que l’on n’aura pas changé de théologie dans les séminaires, les discours des supérieurs de séminaires et de noviciats-scolasticats seront inutiles et mensongers. Bien sûr, il faut être attentif aux tordus, mais il est tout aussi indispensable de ne pas en fabriquer.
Nous sommes dans une idéologie du sacerdoce. Le prêtre est sacré, il est homme de pouvoir, conféré par Dieu. Tout cela s’oppose à une théologie des ministères, c’est-à-dire du service, qui n’a de sens que comme service d’une communauté. Le sacerdoce est un en soi, le ministère est référé à des personnes. C’est la communauté ecclésiale qui appelle (et non pas Dieu), ordonne et envoie en mission. Il suffit pour s’en convaincre de relire le dialogue initial du rituel d’ordination. La mission est reçue avant d’être le fait d’un soi-disant charisme personnel (Cf. tant de dérives sectaires et morales, notamment dans les communautés nouvelles. Prenez Maciel, Philippe, Roucy, etc. Ils se sont tous fabriqué leur jouet. Même Preynat a créé un groupe scout hors de tout mouvement. Ainsi on échappe à tout regard extérieur.)
Le séminaire ne peut continuer à être un lieu protégé, loin du travail pastoral ordinaire, loin de la vie ordinaire, contrairement à l’idéologie dominante. La propédeutique peu encore moins être pensée comme un approfondissement spirituel, loin de la confrontation avec la pastorale ordinaire, parce qu’en christianisme le spirituel est charnel, que celui qui fait l’ange fait la bête, entendez le démon.
La présence des femmes dans la formation (qui ne peut se réduite aux cours !) est encore trop réduite (et c’est un euphémisme). La formation est encore trop pensée comme un mixte de cours et d’accompagnement spirituel. C’est profondément insuffisant.
La désacralisation des ministères est indispensable, non seulement pour lutter contre la pédophilie mais encore pour envisager une manière plus saine de vivre en Eglise. A part quelques autoritaires malades, peu d’évêques ou de supérieurs aujourd’hui, revendiquent leur autorité. Ils n’en ont pas besoin. Ce sont les gens eux-mêmes qui sacralisent le clergé, parce qu’ils le souhaitent, parce qu’une partie de ce clergé leur dit que c’est ainsi qu’il faut faire et qu’ils sont trop contents d’entendre cela. Jean-Paul II et Benoît XVI ont ici une responsabilité certaine.
Je ne vois pas comment le François ne devra pas recevoir la démission de plusieurs de ses proches collaborateurs. Ecouter les victimes, ce n’est pas seulement les rencontrer et les laisser parler. C’est changer la manière de conduire l’Eglise. Sans quoi, c’est une écoute de façade qui méprise en fait les victimes. Leur parole une fois encore n’a pas de poids, n’est pas entendue, ne sert à rien.
Quant à ceux qui ont luté et lutent pour que les conférences épiscopales n’aient pour ainsi dire aucun pouvoir, mais soit seulement un service des évêques, ils portent une lourde responsabilité, car ils interdisent toute contrainte à un évêque. Le pouvoir de l’évêque est quasi sans contre-pouvoir, du moins s’il ne veut pas jouer la carte canonique des conseils. Plusieurs évêques n’ont pas de conseil diocésain de pastoral sous prétexte que ce n’est pas obligatoire, plusieurs évêques écoutent aussi poliment leur conseil du presbyterium que les victimes, mais ne changent rien à leur décision, sous prétexte que ce conseil n’est que consultatif. C’est une interprétation étroite et fautive du droit. Les Conférences épiscopales, sur certains points comme l’exercice du pouvoir d’un évêque, devraient avoir un droit de regard. Chaque fois qu’un évêque joue perso contre la quasi-totalité des autres, c’est mauvais signe.
Merci René, de ce texte éclairant.
Je crois que les choses se jouent autour de la question du pouvoir. Le verbe « abuser » dit bien les choses: abus de pouvoir qui consiste à transformer les personnes en choses, l’objet sexuel en étant un exemple parmi d’autres, mais il y a bien d’autres manières d’exercer une emprise sur les personnes, les tenant dans une fascination qui paralyse leur liberté. Que les fondateurs, par exemple, aient une forte personnalité, une aura qui attire vers eux beaucoup de gens, est un fait largement attesté dans l’histoire. Mais quels sont ceux, les « vrais » fondateurs, qui ont aidé à se constituer des personnalités vraiment libres et non pas agissant dans l’ombre mimétique du fondateur? A trop se focaliser sur les prouesses sexuelles de tel ou tel (voire tel élément folklorique), on risque de ne pas prêter attention au plus important.
Merci René pour cet excellent papier, toutefois trois choses ont retenue mon attention. Premièrement vous présentez Mgr Scicluina comme responsable des affaires de pédophilies à la CDF, ce qu’il fut, mais il ne l’est plus, il est aujourd’hui évêque à Malte, et c’est le Mgr. Robert un américain qui lui a succédé. Deuxièmement, vous dites que Benoît XVI n’aurait pas eu le courage d’entamer un procès contre le fondateur des Légionnaires, lorsqu’il était le Card Ratzinger Préfet de la CDF, mais en fait, il désirait le faire depuis longtemps et se trouvait bloqué systématiquement par Jean-Paul II. D’ailleurs il est intéressant de voir que le procès sur le fondateur des légionnaires commença quelques jours après son élection de Benoît XVI. Finalement, il y a une difficulté qui n’a pas été relevé dans votre article, c’est la difficulté des victimes d’abus à se faire entendre par la Conférence des évêques de France. Elle s’est toujours refusée à créer une cellule d’accueil nationale pour les victimes, renvoyant systématiquement la question de l’accueil des victimes aux seuls évêques diocésains. C’est un problème pour de nombreuses victimes, qui n’ont pas été accueillies comme il aurait fallu par l’évêque de leur lieux de résidence, où bien parce que c’est leur lieu de résidence justement ne désirent pas entrer en contact avec l’évêque diocésain. Pour le reste c’est un excellent papier, bravo et merci.
@ Stéphane Joulain
Les victimes n’ont rien à attendre des évêques, ni d’aucune instance interne à la religion.
En revanche, les victimes peuvent attendre des juridictions de la république laïque française.
En ayant connu un certain nombre, c’est toujours vers les tribunaux que j’ai incité ces victimes à aller.
Avec succès d’ailleurs, puisque certains prêtres pédophiles se sont retrouvés derrière les barreaux.
Seul lieu où il ne peuvent être néfastes qu’à … leur compagnon de cellule… et encore !
Lu attentivement. Bravo. L’auteure de « Esprit de corps, L’Eglise contre la pédophilie » que je suis, paru à une époque où personne – surtout pas Bayard Presse – ne voulait en parler, ne peut que te féliciter. Gros travail, très belles synthèse, très juste. Bravo d’avoir bien insisté sur la vacuité du débat « et si les prêtres n’étaient pas célibataires » dont on nous rebat les oreilles dans les médias, et d’avoir mis l’accent sur les fragilités des communautés dites nouvelles.
J’ai bien sûr beaucoup aimé Spotlight. J’ai seulement regretté qu’il n’y ait pas, avant le générique de fin, des phrases, sous forme par exemple de téléscripteur, pour féliciter du beau travail qu’a fait l’Eglise depuis cette période. Ce qu’on écrivait à l’orée des années 2010 était encore mal reçu. Ce sont pourtant exactement les propos qu’ont repris les papes… plus tard.
Votre article, particulièrement pertinent et assez complet, montre à quel point la religion chrétienne est à des années-lumière du message d’origine de l’Évangile de Jésus. C’est horriblement vrai dans le domaine des mœurs mais également vrai dans bien d’autres.
La seule question qui vaille : comment en est-on arrivé là au fil des siècles…?
Les réponses sont multiples mais il est évident que la misère affective de la plupart des prêtres est une explication qui peut être mise en avant. Cette misère affective je l’ai côtoyée largement, dans mon métier de psychologue. Quand la misère affective du prêtre rencontre celle de femmes mariées, ces dernières se laissent embobiner par des prêtres en manque de relations sexuelles, dominés par leurs pulsions, qu’ils sont incapables de maîtriser, malgré le sacrement censé les en tenir éloigné.
Les quelques cas qui, dans ces domaines, ont pu faire l’actualité, ne sont qu’une toute petite partie émergée de l’iceberg des « relations secrètes et intimes » conduites par des prêtres mettant les femmes sous influence, au nom même de l’amour de Dieu ! Un comble ! Ceci s’ajoutant à leur amour effréné pour les petits garçons et petites filles… avec les dégâts irréversibles des victimes au plan psychologique que la médecine connaît très bien.
Écrire dans l’article « qu’il faut raison garder ». Je veux bien… à condition de mettre cette raison face aux débats irréversibles concernant les milliers d’hommes et de femmes victimes et marqués à vie par la pratique de prêtres pervers.
Ordonner prêtre des hommes mariés pourrait peut-être diminuer le nombre de déviances sexuelles. Mais cela ne résoudra pas le fond du problème.
Le fond du problème est à la fois dans les positions défensives du Vatican, du Pape, des prélats, des évêques, qui préfèrent le déni à la vérité. On peut le comprendre, vue l’ampleur de la vérité il faudrait pouvoir assumer ! Sans sombrer ! les « aveux » actuels du Vatican n’existent que parce qu’il y aura eu des scandales et des procès menés devant les tribunaux par les victimes. Sinon tout serait encore sous contrôle et sous silence absolu.
Le fond du problème est dans la formation des futurs prêtres. Installer des filtres contre les déviances sexuelles représentent le minimum du minimum syndical ! C’est bien plus vaste que ça ! Il s’agit d’une formation humaine et humaniste aux profondeurs de l’homme en ses diverses réalités composant psychoaffective, psycho spirituelle, nécessitant un « travail sur soi approfondi ». Or, l’Eglise préfère s’en remettre en permanence à la « magie » des sacrements.
Voir à ce sujet les travaux de Martine Sevegrand concernant Marc Oraison et ses tentatives d’œuvre salvatrice. Chargé de déceler chez les séminaristes « les troubles caractériels, sexuels ou névrotiques susceptibles d’être des contre-indications à la vie sacerdotale », M. Oraison épinglait des séminaristes répondant à ces critères. Il était alors accusé, par les évêques : « de mettre en péril des vocations ».
Ordonner prêtre des séminaristes identifiés pédophiles, sous prétexte que le sacrement du sacerdoce va les guérir, le jour-même de leur ordination est d’une ineptie crasse !
Et pourtant cela existe comme thèse officielle dans l’église : L’ Encyclique Sacra virginitas affirme qu’ « en acceptant cet état de virginité et de célibat [les prêtres] reçoivent de Dieu la grâce à l’aide de laquelle ils pourront garder leur promesse. Les faits démontrent le contraire… et les faits sont tétus !
Certes, cette encyclique date de 1954, mais elle est encore parfaitement d’actualité, quand on voit les positions du Vatican sur ce sujet aujourd’hui. Même mis devant le fait accompli de la réalité des faits révélés, même acculés, des évêques demeurent dans le silence (Barbarin et autres aujourd’hui…). Silence qui ne peut s’interpréter à ce stade paroxystique, que comme une complicité perverse. On se dit que rien n’est changé et le Magistère démontre une incapacité nettement établie de s’extraire de ses déviances…
Je m’arrête là. Ces exemples parmi d’autres soulignent l’ampleur de la catastrophe d’une religion qui a trahi son fondateur Jésus. l’Esprit de Jésus est ailleurs. Rejoignons-le là où il est…
A la question posée par le voyageur : « La seule question qui vaille : comment en est-on arrivé là au fil des siècles…? » il me semble qu’on pourrait y répondre en citant Henri Tincq:
« Parce qu’on est certain désormais que ce scandale [la pédophilie] ne se résume pas à la faute d’individus clivés et immatures, introduits par effraction dans une structure comme celle de l’Église, mais qu’il est le fruit d’une défaillance collective, d’une culture cléricale, d’un système d’autorité qui croit pouvoir échapper à la justice des hommes, aux règles élémentaires de transparence et de démocratie. Ce scandale n’est pas seulement la conséquence de pratiques laxistes ou dilatoires, mais d’une vaste culture du secret, de dénégation, de repli sur des réflexes d’autodéfense institutionnel, d’une antique volonté de régenter les consciences. » (voir ci-dessous)
http://www.slate.fr/story/114639/abus-sexuels-pretres-acharnement
Voilà qui résume bien ce que j’ai tenté maladroitement d’exprimer.
Hélas, le raisonnement de H. Tincq, , en substance, peut se transposer dans d’autres domaines tout aussi sensibles, concernant la religion chrétienne.
En particulier sur la domination des consciences, pour ne pas dire le viol de celles-ci.
On est bien loin de la parole de Jésus…
@Le Voyageur.
Je trouve votre généralisation inacceptable. Non, on ne peut pas dire, comme ça, sans nuance, que toute la religion catholique serait à des années lumières du message d’origine de l’Evangile de Jésus. La religion catholique c’est quoi ? C’est qui ? Que faites-vous des centaines de milliers d’hommes et de femmes qui, à travers le monde, se mettent au service des plus pauvres, gratuitement sans rien attendre de personne ? Ils sont aussi le visage de la religion catholique que vous décriez.
Je ne vous suis pas davantage sur la « misère affective de la plupart des prêtres ». Sur quelle science objective s’appuie votre affirmation ? Qu’il y ait chez certains prêtres, une certaine misère affective, c’est possible, probable même. Prétendre qu’il suffirait de les marier (avec un homme ou une femme, au choix) pour régler la question me semble être une approche bien simpliste de la réalité humaine. Car enfin, la plupart des actes de pédophilie (souvent incestueux) étant commis par des proches parents des victimes, mariés et pères de famille, il faut croire que ces hommes-là, même mariés, n’ont pas pas davantage dépassé une certaine misère sexuelle. Alors, en quoi la liberté offerte aux prêtres de sa marier serait-elle un sésame assuré vers l’équilibre affectif ?
Je crois qu’il existe, dans nos sociétés modernes, une incompréhension totale du célibat consacré, sacerdotal ou religieux. Parce que nous avons fait de la sexualité, libérée, l’alpha et l’oméga de toute vie épanouie. Le fait de vouloir marier régulièrement Jésus avec une Marie-Madeleine des Evangiles procède de ce désir de le voir vivre «comme tout le monde» car, au fond, on l’aime bien ce Jésus, et l’on n’imagine pas qu’il puisse être différent de nous… Si la libération sexuelle (que je ne regrette pas) nous avait apporté, collectivement, une totale libération, cela se saurait. Relisons La tyrannie du plaisir de mon ami Jean-Claude Guillebaud, ou tout simplement Baudelaire : « Pendant que des mortels la multitude vile, sous le fouet du plaisir, ce bourreau sans merci, va cueillir des remords dans la fête servile…» Il y aurait fort à dire sur la misère sexuelle des accros au porno, sauf que c’est politiquement incorrect ! Sous peine d‘être accusé de sexophobie par Libé ou l’Obs.
Vous pointez la question, essentielle en effet, de la formation des prêtres. Mais là encore, toute généralisation est impossible. Prétendre qu’elle serait inexistante, l’Eglise s’en remettant à la seule «magie» des sacrements pour que la grâce de Dieu vienne à suppléer les faiblesses humaines et les tentations, est presque diffamatoire. Qu’il y ait encore, ici ou là, des lieux d’Eglise où cette logique prévaut, c’est probable. Mais la majorité des épiscopats a dépassé cela depuis longtemps. D’ailleurs vous-mêmes faites référence à une encyclique de… 1954 et à la pensée de Marc Oraison qui est décédé à la fin des années 1970… Depuis, l’Eglise a tout de même réfléchi à ces questions ! Si je puis évoquer, dans mon article, pour la dénoncer, l’hospitalité contestable accordée à certains candidats au sacerdoce par quelques évêques peu regardants, c’est bien parce qu’en amont il y avait eu, précisément, formation et discernement. Les textes du Vatican rappelant cette exigence sont légion.
A trop vouloir prouver et généraliser, je crois que vous tombez dans la caricature en dépeignant une Eglise monolithique sous des traits qui, en fait, appartiennent pour l’essentiel au passé.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que vous trouvez « inacceptables » mes propos. Je trouve plutôt inacceptable le spectacle que les dirigeants de votre religion donnent à voir….
Vous ne m’aimez pas, c’est assez clair !
Vous me faites toutefois l’honneur de publier mes propos imbuvables à vos yeux.
Je vous en sais gré.
Cela vous permet aussi d’y ajouter ce que je ne dis pas, par extrapolations aléatoires dont je vous laisse bien entendu l’appréciation.
Quant au soulignement, en guise de justifications des inacceptables que je dénonce, « que des centaines de milliers d’hommes et de femmes qui, à travers le monde, se mettent au service des plus pauvres, gratuitement sans rien attendre de personne ». Tant mieux, d’autant que j’en fais partie, sans toutefois appartenir à votre religion, comme plusieurs milliards de personnes dévouées et actives dans le monde….
Curieuse, tout de même, la conception que vous avez du dialogue où je devrais me contenter de recueillir pieusement vos pensées sans jamais émettre la moindre objection. Je laisse juges les lecteurs de ce blogue.
Je vous signale tout de même que nous ne serions pas là à débattre, dans un forum où je vous permets de vous exprimer en toute liberté, si je n’avais pris l’initiative, sur ces sujets sensibles, de publier un article que je ne pense pas particulièrement complaisant vis-à-vis de mon Eglise.
Le dialogue suppose toujours un cadre qui le favorise au mieux si possible, surtout dans des expressions de divergences. Dire que mon texte est inacceptable. Ce n »est pas un dialogue c’est un jugement. Mais je ne souhaite pas polémiquer. C’est sans intérêt.
Vous faites un développement sur le célibat du prêtre. J’ai dit clairement que la question n’était pas dans le célibat, mais dans la misère affective de l’isolement.
Quant au célibat, il a pour moi un sens en effet. Tout comme le couple en a un. Mais l’obligation du célibat pour les prêtres me semble fermer un battant de la porte à l’Esprit…
Reste que l’essentiel de mes propos n’était pas à cet endroit. Et je ne crois pas avoir écrit que des imbécillités.
Par ailleurs, que vous abordez des sujets « sensibles » j’ai tendance à penser que c’est bien là votre rôle d’homme de médias. Et loin de moi de vous en faire le reproche au contraire.
Si, comme vous avez raison de le dire, il ne convient pas de généraliser cette citation de Henri Tincq à d’autres domaines que celui de la pédophilie, il ne convient pas non plus – à mon avis – d’édulcorer ni de minimiser la situation.
En nous limitant donc au scandale de la pédophilie, j’insisterais plutôt sur la pertinence de ladite citation :
« il [le scandale de la pédophilie] est le fruit d’une défaillance collective, d’une culture cléricale, d’un système d’autorité qui croit pouvoir échapper à la justice des hommes, aux règles élémentaires de transparence et de démocratie. Ce scandale n’est pas seulement la conséquence de pratiques laxistes ou dilatoires, mais d’une vaste culture du secret, de dénégation, de repli sur des réflexes d’autodéfense institutionnel, d’une antique volonté de régenter les consciences. »
En particulier « le système d’autorité qui croit pouvoir échapper à la justice des hommes, aux règles élémentaires de transparence et de démocratie. » :
Car même avec la mise en place – avec plusieurs siècles de retard (!) – d’un tribunal spécial au sein d’une Congrégation du Vatican pour la protection des enfants et mineurs, l’association américaine de victimes de la pédophilie SNAP estime « que ce n’est pas encore suffisant, dans la mesure où ces jugements restent internes à l’Église et confidentiels. Durant ces décennies de crise [de 1990 à aujourd’hui], les commissions, les procédures, les protocoles et les promesses ont abondé. Mais ils ont été dépourvus de signification, estime la SNAP. Aussi longtemps que des prêtres sont chargés de s’occuper des autres prêtres qui ont commis ou couvert des crimes sexuels, peu de choses changeront.»
Et encore « … la culture du secret, de dénégation, de repli sur des réflexes d’autodéfense institutionnel …» :
Car cette omerta imposée aux victimes de la pédophilie est scandaleuse et aura causé des dégâts incommensurables.
Merci le voyageur
Oraison je l’ai connu il avait la formation pour voir les dangers .
Maïs aujourd’hui les évêques ordonnent des prêtres qu’ils savent fragiles et je suis soft !
Tout sauf accepter la sexualité des prêtres , la possibilité de laïcs , et de femmes !
Merci pour ce précédent exposé. Le problème est que les évêques s’arrogent le pouvoir de ne pas se soumettre aux droit des Etats parce qu’ils estiment que le pouvoir spirituel est supérieur au pouvoir temporel ce qui maintient l’Eglise catholique dans la situation d’un Etat dans l’Etat et Rome entretient cet esprit : il y a là une faille exploitée par les pédophiles, c’est pourquoi je disais qu’ils continueront encore longtemps.
Il en va de même concernant le droit du travail : il n’y a toujours pas de Convention Collective qui régit les personnels des paroisses et diocèses sans espoir de plan de promotion de carrière, et on tolère cela !
Je ne crois pas qu’on puisse écrire cela. Rome demande désormais aux évêques précisément, de se soumettre aux lois de leurs pays… sauf que ces lois ne sont pas les mêmes selon les pays. Et les évêques ne peuvent en aucune manière s’arroger le « pouvoir de ne pas se soumettre », ce qui supposerait qu’ils imposent leur point de vue à la société civile, ils peuvent tout au plus essayer de s’en affranchir, à leurs risques et périls, ce qui n’est pas la même chose.
Pour ce qui est du droit du travail vos remarques sont aujourd’hui largement dépassées. Des conventions collectives existent. Une décision récente des évêques a prévu la création d’une branche spécifique pour les laïcs en mission ecclésiale. Tout n’est sans doute pas parfait mais on ne peut pas écrire que rien n’existe !
Dans son article « Mise en cause de Mgr Barbarin : sortir des approximations » paru dans Le Figaro du mardi 8 mars 2016, Jean-Marie Guénois écrit :
« Il n’en reste pas moins que l’Eglise catholique a mis beaucoup trop de temps à prendre vraiment au sérieux le poids du viol, de ses effets, et du scandale de l’omerta qu’on imposait aux victimes. Elle paie très cher aujourd’hui cette immunité qu’elle accordait à ses brebis galeuses. »
…
« … des avocats qui ont obligé, preuves à l’appui, les évêques à enfin reconnaître qu’ils avaient pour désastreuse habitude de gérer ces questions en déplaçant les prêtres incriminés de paroisses en paroisses sans prévenir du danger qu’ils représentaient. Car c’était ainsi… ».
Quant à l’article « L’affaire de pédophilie à Lyon déchire l’Eglise française » paru dans L’Express de ce mercredi 9 mars 2016, il se termine ainsi :
« Interrogé sur l’éventualité d’une démission, Monseigneur Barbarin dit qu’il « pense aux victimes », mais précise que son retrait de ses fonctions « n’est pas une question d’actualité. Si je suis fautif, si je suis ‘occasion à scandales’, alors là on verra. La justice va faire son travail ». Un quart de siècle après les faits. »
Pour savoir s’il est « fautif », qu’une personnalité aussi éminente que le Cardinal Barbarin s’en remette aux arguties d’avocats plutôt qu’à sa conscience personnelle me laisse pantois.
Qui êtes-vous pour juger ?
Monsieur de Guibert,
Que je m’étonne de ce que « le Cardinal Barbarin s’en remette aux arguties d’avocats » pour savoir « s’il est fautif » reste même en deçà de l’opinion exprimée par Isabelle de Gaulmyn qui écrit dans La Croix :
« Mais se mettre au clair avec la justice n’est pas suffisant. Cela pourrait être compris comme un réflexe d’appareil, si cette démarche s’arrête là. Car il y a, au cœur de ces affaires, des personnes, des victimes, que l’Église semble avoir encore bien du mal à écouter. »
« On pourrait évidemment se contenter de dire « Couvrez cette insuffisance que je ne saurais voir. »
Vous êtes dans le procès d’intention.
Que le Cardinal Barbarin réponde devant la justice suite à une plainte pour l’attitude qu’il a adoptée dans cette affaire 25 ans après les faits est une chose, et donc sur ce plan il s’en remet à la justice.
Que vous arguiez de cela pour laisser supposer qu’il n’a pas agi en conscience et qu’il s’en remet aux arguties d’avocats plutôt qu’à sa conscience personnelle est une attaque ad hominem qui relève du procès d’intention, et c’est votre accusation perfide qui me laisse pantois.
Je valide ce post mais ne mettrai pas en ligne les commentaires à venir qui voudraient orienter nos échanges vers « l’affaire Barbarin ». Je ne souhaite pas qu’un article qui se voulait beaucoup plus large dans son approche tourne à la polémique autour d’un homme. Désolé !
René,
Ce serait très dommage que vous ne mettiez pas en ligne les conclusions très pertinentes auxquelles est arrivée la Commission interdiocésaine belge qui – sans concerner directement la France – sont relatives à des délits comparables de pédophilie dans l’Eglise catholique (voir ci-dessous)
http://www.cathobel.be/wp-content/uploads/2016/02/Rapport-points-de-contact-2012-2015.pdf
(hélas, le sujet est ultra-sensible en ce moment, j’en suis bien conscient, aussi je vous comprendrais parfaitement de ne plus insister)
Le rapport de la Commission interdiocésaine belge précise :
« Impossible pour l’Eglise d’annuler le passé. Elle a seulement essayé d’offrir ce qui a tant manqué autrefois : l’humanité et la solidarité. Les Évêques et les Supérieurs Majeurs de Belgique veulent assumer leur responsabilité face à l’injustice causée dans le passé à des enfants et des jeunes, par des personnes agissant dans une fonction pastorale. De nombreux entretiens avec les victimes nous ont appris que chercher avec ces dernières comment les aider au mieux, peut constituer une forme de réparation de la souffrance causée. » (voir ci-dessous)
http://www.cathobel.be/wp-content/uploads/2016/02/Rapport-points-de-contact-2012-2015.pdf
L’Eglise catholique a proclamé – de tout temps – qu’elle n’est pas une institution basée sur la « démocratie ».
Pour les délits de pédophilie, ne devrait-elle pas exclure également la notion de « prescription » dont peuvent bénéficier les coupables jugés dans le civil ?
Un grand merci pour cette article, après avoir vue le film .
Un espoir pour quelques humains….
« Ce scandale n’est pas seulement la conséquence de pratiques laxistes ou dilatoires, mais d’une vaste culture du secret, de dénégation, de repli sur des réflexes d’autodéfense institutionnel, d’une antique volonté de régenter les consciences. »
Je pense vraiment que le problème de fond est là .
Sauver l’institution ou penser la sauver ainsi .
Même si le sujet est tout autre le film : »les innocentes » le dit d’une autre manière .
Le silence tue , l’obéissance aveugle aussi, la peur également.
Le pouvoir ferme les yeux .
Se méfier de ceux qui se disent plus blancs que neige. Parmi eux il y a des prédateurs et des pervers .
Comment prévenir : déjà en évitant de vouloir combler la pénurie des vocations à tout prix ( Il vaut mieux un prêtre de moins qu’un prêtre que l’on met en danger et qui sera un danger), en cherchant d’autres solutions éventuellement , en modifiant la formation des prêtres en les formant avec des femmes étudiantes comme eux , en ne les ordonnant pas comme des dieux , en ne leur demandant pas l’obéissance absolue à l’évêque mais en leur demandant de répondre à cette seule question : celle de Pierre : et toi m’aimes -tu ?
Mais ce qui est valable pour les prêtres est valable à tous les niveaux .
C’est un problème important car aujourd’hui en France les jeunes prêtres qui arrivent au sacerdoce me semblent souvent bien fragiles.
Oui Claudine: « chercher d’autres solutions »:
ex: la mixité dans la formation théologique
(séminaristes avec étudiantes et étudiants);
éviter les mots « sacerdoce », « sacerdotal »
qui sacralisent le ministère presbytéral…
Article et commentaires passionnants.
Dénoncer la pédophilie, il le faut, encore et encore.
Et partout, pas seulement dans l’Eglise.
Aussi longtemps que le silence pourra être imposé à quiconque en vue d’occulter des crimes de pédophilie au sein d’une organisation, quelle qu’elle soit, la pédophilie risque de s’y reproduire.
Or cette « loi du silence » n’a pas sa place dans notre Église.
Alors que l’Église catholique revendique – haut et fort – un statut n’ayant rien à voir avec celui d’une institution du monde, c’est pour le moins étonnant que la « loi du silence » y ait prospéré à ce point!
On peut parfaitement comprendre qu’une institution ait ses règles internes de fonctionnement spécifiques. Et d’ailleurs les religions sont spécialistes du genre !
À partir du moment où des faits délictueux sont observés par les adeptes- responsables de ladite institution, à partir du moment où cela relève du code pénal, les tribunaux de la république doivent systématiquement en avoir connaissance et juger les faits condamnables dans le cas du système judiciaire en place.
Or, pour éviter tout cela et étouffer au maximum ces pratiques lamentables, les hiérarchies ecclésiastiques ont toujours opté pour la loi du silence et des compromissions internes. Je doute que cela ne change, malgré les belles déclarations qui peuvent se faire actuellement. Disons que ceux qui auront la malchance de « se faire prendre » serviront de vitrine à tout ce qui demeurera caché au fond des boutiques nauséabondes.
Cela vaut-il la peine de continuer à concourir à la survie d’une telle église ?
N’est-ce pas d’une certaine manière finir par se faire complice des ignominies… ?
pour ma part, je suis parti. Pas en premiers pour ces raisons de déviances sexuelles d’ailleurs… mais à force de voir une institution travestir le message de Jésus Cela finit par devenir intolérable.
Le débat, autour de cet article, se développe tout naturellement dans l’espace de ce blogue mais également sur ma page Facebook où ont été postées les différentes reprises de ce texte par des sites ou blogues amis. Il se nourrit également de « messages privés » reçus par courriel auxquels il m’est difficile de faire publiquement référence sans l’autorisation de leur auteur. Mais il me semble honnête d’en tenir compte dans la dialogue que je poursuis ici avec celles et ceux qui veulent bien me lire.
La question la plus souvent évoquée, par les uns et par les autres, est celle d’un lien possible entre pédophilie et célibat sacerdotal obligatoire, que j’aurais écarté un peu rapidement. En témoigne ce post de mon ami Jean-Louis Schélgel sur Facebook :
« Jean-louis Schlegel Très bon article, René, et merci des liens. Ne pas oublier un certain livre de 1996, intitulé Les Naufragés de l’Esprit, Ed. du Seuil. Tu n’ouvres pas le chapitre du lien avec le célibat sacerdotal obligatoire : j’ignore ce qu’il en est, mais le nombre d’affaires de ce genre, précisément dans l’Eglise et précisément avec des prêtres, est quand même impressionnant – et tout autant le déni quand on évoque ce point… »
Je voudrais redire ici ce que j’ai déjà exprimé : mon regret qu’aucune étude sérieuse n’ait été engagée à ce propos. Il faudrait regarder en effet, sérieusement, la réalité de la pédophilie dans les églises protestantes et orthodoxes où le mariage des pasteurs et des prêtres est possible. Un ami évoquait, hier encore devant moi, certaines statistiques venues des Etats-Unis affirmant que 20% du clergé serait pédophile. Une récente enquête du Monde montrait que les statistiques, en cette affaire, sont difficiles à manier. Je conserve en mémoire l’ouvrage publié en 2003 par les éditions Bayard « Le nouveau visage des prêtres », dont l’auteur, Donald Cozzens, théologien, docteur en psychologie, ancien supérieur de séminaire aux Etats-Unis, montrait que les affaires dénoncées par une certaine presse relevaient plus de l’éphébophilie que de la pédophilie proprement dite (p.216). Bref, dans bien des cas, il s’agissait plus de relations de type homosexuelles que réellement pédophiles. Comme on le voit aujourd’hui avec la « seconde » affaire imputée au cardinal Barbarin.
Je note, d’ailleurs, dans un article récent, ce commentaire du psychiatre Jean-Paul Miallet : »Je ne pense pas que le célibat des prêtres soit le grand responsable de ces affaires de pédophilie (…) Le célibat des prêtres ne me choque pas, s’il est un choix libre et mûri, et ce n’est pas lui qui favorise la pédophilie mais bien la façon dont l’église, embarrassée par la sexualité, a longtemps préféré se taire et ignorer le sujet. » Voici les références de l’article : http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/03/11/le-celibat-des-pretres-ne-favorise-pas-la-pedophilie_4881424_3232.html
Mon sentiment est plutôt que l’acceptation de sa propre sexualité, à laquelle chacun est confronté, est sans doute une épreuve redoutable lorsqu’on perçoit en soi-même une attirance qui n’est pas celle qui est légitimée par la société (pédophilie) ou par son environnement familial proche (homosexualité par exemple). Et que, pour certains hommes au tempérament religieux, peut exister la tentation d’entrer dans les ordres, à la fois dans l’espoir de maîtriser cette sexualité « avec la grâce de Dieu » mais aussi de n’avoir pas à s’en expliquer publiquement puisque le choix d’une vie de continence, au moins apparente, semble justifiée par une vocation sacerdotale ou religieuse.
C’est bien cette possibilité qui fonde l’exigence du discernement pour tout candidat au sacerdoce et rend coupable, pour ne pas dire criminelle, toute attitude laxiste d’accueil, au seul motif inavoué de nourrir les statistiques et d’asseoir ainsi, dans l’Eglise, une ligne idéologique, en se prévalant d’une grande fécondité spirituelle. Les révélations qui se font jour actuellement, pourraient bien porter un coup fatal – et salutaire – à cette forme de dérive.
Analyse qui paraît très juste pour la gynécologue avec aussi le danger extrême de séparer de la femme très tôt les futurs prêtres .
Mais beaucoup veulent à nouveau séparer filles et garçons au pied de l’autel : attention danger !
Car rien ne vaut la mixité pour discerner. Peut-être faudrait-il rendre le célibat ecclésiastique facultatif et, pourquoi pas, ouvrir aussi la possibilité pour des prêtres homosexuels de vivre en couple stable et reconnu .
Je sais que là j’aborde un sujet difficile pour l’Eglise mais ne pas regarder la réalité de la vie sexuelle en face, met le prêtre ou le religieux en danger.
Nier la sexualité c’est nier l’humanité des personnes.
« Partout, les silences institutionnels ne résistent pas, ou plus. Et c’est bien ainsi.
…
L’Église affronte ici un risque majeur si elle ne fait pas face à ce nouveau monde avec courage et probité, celui d’être considérée comme une institution sans foi ni loi. Une double peine. » (voir ci-dessous)
http://temoignagechretien.fr/articles/la-loi-contre-le-silence
L’Eglise Catholique a certainement des efforts à faire.
Mais si cette affaire s’emballe autant et occupe autant la sphère médiatique c’est parce que l’ampleur du phénomène pédophile est insupportable.
On s’indigne contre l’Eglise Catholique parce qu’il est toujours plus facile de s’indigner contre son curé que contre son père, son beau-père, son frère, son cousin, voire sa mère (les femmes aussi commettent des agressions pédophiles). Or pour que les affaires pédophiles soient connues il faut qu’elles aient fait l’objet d’une plainte et que cela ait abouti à une condamnation.
Le plus grand danger pour nos enfants, c’est la famille et non pas l’extérieur (l’école, les scouts, la chorale, les enfants de Chœur…) et cette vérité là est insupportable.
Il est très probable que de très nombreuses familles sont concernées par les agressions pédophiles.
Je suis médecin gynécologue et beaucoup de femmes dans ma clientèle parlent d’agressions incestueuses. La plupart de ces histoires qu’elles me racontent n’ont pas fait l’objet d’un dépôt de plainte.
Depuis que je pose la question systématiquement, je suis effaré par le nombre de réponses positives.
Dans ma famille, il y en a eu aussi. Je ne peux pas affirmer que ces histoires arrivent dans toutes les familles mais en tous cas certainement dans beaucoup d’entre elles.
Je ne prétends pas que cela rend les crimes commis par un prêtre moins grave. D’une certaine manière c’est plus grave parce que très longtemps l’Eglise a gardé la posture de l’Institution qui faisait la morale à tout le monde.
Oui, cher confrère, je ne peux hélas que confirmer ce que vous soulignez.
En tant que praticien de l’aide à la personne (en retraite aujourd’hui), je ne peux que confirmer, hélas, vos propos concernant certaines pratiques de la sphère familiale. Elles sont en effet bien plus répandues que ce que l’on pourrait croire. Elles demeurent le plus souvent dans le silence pesant qui ne fait qu’augmenter les traumatismes constatés.
Que le phénomène pédophile soit important dans l’église catholique (je veux dire en quantité), est indéniable.
Tout aussi indéniable le silence pesant et assourdissant.
Mais la mise en parallèle église/famille n’est sans doute valable que pour ce constat.
L’église catholique ne se considère pas comme une institution « ordinaire ». Elle s’estime avoir une origine dans la divinité. Elle a donc vocation à la perfection et à l’irréprochable. La manière dont elle a pu « couvrir collectivement » des actes odieux (et la pédophilie n’est qu’un exemple parmi d’autres de ces actes odieux), montre qu’elle n’est pas capable d’atteindre le but pour lequel elle se croit en état d’y accéder.
Une famille ne s’estime pas être dans l’obligation d’accomplir une mission divine. Certaines peut-être, pourquoi pas, mais la majorité d’entre elles, laïque, reproduit l’ordinaire générationnel qui l’enchaîne à sa condition. Ceci n’est évidemment pas une justification des déviances, mais au contraire un appel à la clarification par l’intervention de la Justice des hommes (et non pas d’un tribunal ecclésiastique semi–complice, qui pratique la justice au rabais de l’entre soi), et de la nécessaire condamnation des faits, générant une peine pénale pour l’auteur, tout en espérant l’amendement de la personne, par la mise en place d’un suivi psychologique et social. Mais sans sanction, le fait délictueux demeure potentiellement en attente de sa répétition. Surtout dans ces domaines là.
Or l’Eglise préfère s’en remettre à la « magie » de la prière et des rites expiatoires et sacramentels.
– tu as fauté, c’est pas grave, on te change d’endroit et ne recommence plus…
Ces pratiques ont largement démonté leur inefficacité.
Une famille engluée dans ses problématiques complexes de déviance des mœurs, ne prétend pas faire la morale à la terre entière.
L’église, si, comme vous le soulignez fort justement.
Qu’elle fasse la morale ? Pourquoi pas ! Si elle estime que c’est sa vocation.
Mais manquer à ce point d’exemplarité, en tolérant l’intolérable, c’est largement criminel.
C’est comme si un jury d’assises acquittait un violeur d’enfants qui a reconnu les faits en toute connaissance de cause. En lui disant : va et ne pèche plus !!
À peine sorti, il récidive….
Voyageur, je ne vous suis pas sur vos critiques et pourtant, je le suis moi même… On ne peut pas condamner la miséricorde parce qu’elle est un élément essentiel de résilience pour l’être (Victor Hugo l’a montré dans les misérables, relisez le passage où l’évêque pardonne le vol des chandeliers, c’est probablement cette confrontation à la miséricorde qui transforme le voleur).
Or toute l’action de l’Eglise repose sur ce fonctionnement, que les médias et le monde ne comprennent pas renvoi à la conscience qui permet de recevoir le pardon et la miséricorde pour la redonner aux autres.
Je ne suis pas certaine qu’en cas de condamnation par la justice, l’Eglise cesse cette pratique fondatrice tout comme je ne suis pas certaine non plus qu’elle soit condamnée. Nous sommes là sur un point de divergence entre la justice de Dieu (qui nous apprend la miséricorde) et celle des hommes qui s’appuie sur le droit mais probablement, il faut les deux pour vivre un chemin spirituel authentique.
Merci Jobinette pour votre commentaire qui pose une vraie question que je n’ai guère vu abordée en ces temps de lynchage médiatique.
Bien sûr le souci des victimes doit être premier toujours et partout.
Mais en cette année de Jubilé de la miséricorde, je me demandais : la pédophilie serait-elle le seul crime impardonnable ?
La miséricorde ne peut occulter bien sûr la nécessité de la justice et la de la protection des plus faibles, mais qu’en est-il de ceux qui ont commis ces crimes dans la mesure où ils les reconnaissent et s’en repentent ?
Jésus a dit : « Malheur à celui par qui le scandale arrive », et il a dit aussi : « Moi non plus je ne te condamne pas. Va et ne pèche plus ».
J’espère n’être pas compris de travers en écrivant cela ; il ne s’agit en rien d’une quelconque complaisance, mais bien d’une interrogation métaphysique sur le salut et le pardon offert à tous par le Christ.
Bonjour,
Puis-je me permettre d’intervenir dans vos échanges ?
« La miséricorde ne peut occulter bien sûr la nécessité de la justice et la de la protection des plus faibles » et je lis dans votre conclusion qu’il s’agit « d’une interrogation métaphysique sur le salut et le pardon offert à tous par le Christ. » Je me placerais plutôt sur le plan de la vie ici-bas, il nous revient, chacun à notre place et à notre mesure, de prendre soin de nos frères. Je ne doute pas que le pardon fasse grandir celui qui le donne et celui qui le reçoit. Ce qui n’exlut pas dans le cas d’une personne qui a des tendances pédophiles (de surcroit lorsqu’il y a eu passage à l’acte) de prendre soin d’elle en mettant en place, autant qu’il est possible, de ne pas la mettre dans des conditions qui favorisent ou rendent possible le passage à l’acte avec les conséquences sur les victimes. Il s’agit de tenir la tension entre la responsabilité de la personne et la phrase de Paul : « je ne fais pas le bien que je voudrais et je fais le mal que je ne voudrais pas ».
Par ailleurs, je ne méconnais pas l’aspect emballement médiatique en lien avec la manif pour tous … où le discours a complètement occulté les nombreux enfants victimes de maltraitance familiale dont la maltraitance sexuelle sans oublier la maltraitance psychologique et l’emprise perverse. Le discours de Mgr Barbarin était sur ce point particulièrement monolithique.
Les nouveaux développements de l’information vont vraisemblablement amener un passage au second plan de « l’affaire », les questions demeurent et nécessitent réflexion de fond qui ne sont pas du ressort d’un cabinet de gestion de crise.
Merci Camille-madeleine pour votre commentaire.
Je suis complètement d’accord avec vous.
Le lynchage médiatique dont fait l’objet injustement le Cardinal Barbarin risque de faire occulter les véritables questions que pose la pédophilie, en premier lieu quand elle est le fait de prêtres ; c’est du reste ce que René Poujol a voulu faire dans son article.
Il y a depuis l’affaire Dutroux une prise de conscience de la gravité des actes pédophiles, loin de « l’air du temps » des années 70 où des intellectuels pétitionnaient dans la presse pour la liberté sexuelle avec les mineurs.
On peut regretter que l’Église n’ait pas été plus lucide dans cette époque troublée, mais à sa décharge il est vrai qu’elle a toujours du mal à se faire entendre sur toutes ces questions « sociétales » liées à la sexualité…
Ce mercredi 16 mars 2016, la rédactrice en chef Sophie de Villeneuve écrit dans Croire :
« Comment se positionner face au déferlement médiatique qui vise à déstabiliser le cardinal Barbarin et, qui au-delà de sa propre personne, éclabousse l’Eglise toute entière ? C’est à la justice désormais qu’il convient de voir si le cas du P. Bernard Preynat fut correctement traité par le diocèse de Lyon. La nouvelle affaire, qui concerne le P. Billioud, curé de l’église de l’Immaculée Conception Conception (non loin de la gare Part-Dieu et du quartier de la Guillotière), vient s’ajouter au sordide déjà révélé par les plaignants de l’association de défense des victimes, La parole Libérée. « Je veux dire avec la plus grande force que jamais, jamais, jamais je n’ai couvert le moindre acte de pédophilie », a affirmé l’archevêque de Lyon, lors d’une conférence de presse en marge de l’assemblée des évêques à Lourdes, mardi 16 mars 2016. Et on le croit. Des actes de pédophilie n’ont pas été couverts, c’est un fait. Mais des prédateurs ont été sciemment laissés à des postes importants. Ils ont été responsables de la vie spirituelle et ecclésiale de milliers de paroissiens. Qu’il y ait eu manquement à la plus élémentaire prudence, au discernement le plus basique, est une évidence. Le pape François en appelle à la « tolérance zéro ». Il est temps de la mettre en pratique. »
Ce mardi 15 mars 2016, Camille Michel vient d’écrire sur http://www.lespheniciennes.fr:
« … les avocats s’organisent et dénoncent l’acharnement et le règlement de comptes. Ils sont les pires ennemis de Mgr Barbarin, car ils présentent le visage d’une Eglise Catholique incapable de se remettre en cause, qui considère une critique comme une attaque anticatholique, « christianophobie » pour reprendre le jargon, allant souvent jusqu’à justifier de la justesse de la position doctrinale par une sorte de martyr qui corrobore la démarche : « S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi », déclare en écho Jésus dans l’Évangile de Jean. »
Bonjour,
L’emballement médiatique est la hauteur de celui qui avait été lancé dans nombre d’église le 15 août 2012. Et si toutes nos assemblées priaient pour les victimes de l’Eglise que ce soit par leurs membres pêcheurs ou par les campagnes (passées ou récentes) d’incitation à la division ?
D’autre part :
Chacun a le droit d’être défendu …. Donc Mgr Barbarin fait appel à un grand et discret cabinet de gestion de crise et à un avocat de renom qui s’adjoint une équipe compétente. Et pendant ce temps-là, les diocèses nous rappellent que l’Eglise de France est pauvre et nous demandent d’être généreux.
J’ai mal à notre Eglise et comme toujours dans ces cas-là me reviennent les propos anti cléricaux familiaux.
« L’Eglise de France n’a pas vraiment évolué dans sa prévention des abus sexuels » (Karlijn Demasure) (voir ci-dessous)
http://www.cathobel.be/2016/03/18/prevention-abus-sexuels-ne-attendre-quun-scandale-eclate/
Dans l’évaluation des comportements humains, on peut toujours essayer – après coup – de relativiser « le moins bon », le « mauvais » et même le « très mauvais », en particulier en faisant preuve de « miséricorde ».
Mais puisqu’une évaluation équitable du « moins bon », du « mauvais » et du « très mauvais » restera toujours extrêmement difficile à faire, il faut tout faire pour anticiper la situation.
Et c’est là que l’Eglise de France a du pain sur la planche (voir mon post ci-dessus)
Car ne dit-on pas que prévenir vaut mieux que guérir…
Constat amer : dimanche, nous avons prié pour « notre Eglise malmenée », aucune intention spécifique pour les victimes. Lorsque on nous propose de prier pour « notre Eglise malmenée », dois-je comprendre que nous prions pour les clercs ou pour tout le Corps du Christ ? l’adjectif possessif fait, me semble-t-il toute la différence. Alors, j’ai éprouvé de la tristesse, de la honte et puis de la colère et je me suis sentie bien seule.
Je comprends votre réaction, Camille-madeleine, mais je pense que vous interprétez de travers cette intention de prière : notre Église est en effet malmenée, les victimes, les clercs, les coupables et les innocents, vous qui éprouvez de la tristesse, de la honte, puis de la colère, et nous tous, Corps du Christ.
Vous n’êtes pas seule !
Camille Madeleine
oui je comprends votre réaction et la partage .
Dans beaucoup de prières universelles aujourd’hui on prie pour l’Eglise et non ses victimes
on prie pour les chrétiens massacrés
Mais très peu de prières s’ouvrant sur le monde
Oui je le supporte de moins en moins
Les chrétiens massacrés apprécieront votre indifférence…
L’ouverture sur le monde en général quand on n’est pas capable de s’ouvrir d’abord aux souffrances de ses frères, c’est un peu suspect.
Au lieu de banaliser l’expression d’ « Eglise malmenée » – en mettant tout le monde dans le même sac – concentrons-nous peut-être sur la connotation d’une Eglise « malmenée ».
Ne faudrait-il pas comprendre, par exemple, qu’aux yeux des victimes de la pédophilie, cette Eglise ainsi « malmenée » ne fait que récolter ce qu’elle a semé ?
Le « même sac », c’est le Corps du Christ ! Et sans faire d’amalgame pour autant !
Avec ou sans amalgame, vous oubliez cependant de répondre à la question de savoir si, aux yeux des victimes de la pédophilie, la partie d’Eglise « malmenée » à présent – parce que restée trop longtemps inerte et impuissante à réagir – ne récolte pas aujourd’hui ce qu’elle a semé hier.
La partie d’Église la plus « malmenée », et c’est un euphémisme, ce sont les victimes des prêtres pédophiles.
Que l’Église dans son ensemble soit « malmenée » par cela est une évidence dont tout le Corps souffre ; je ne suis pas là pour régler des comptes, je ne me dissocie pas de cette Église que j’aime et qui est ma mère, même si elle récolte ce qu’elle a semé.
« Tel le clown qui pensait dans sa naïveté que le cirque du monde tournait sous son autorité, voici l’Eglise malmenée, payant cher ses anciennes prétentions ou ce qui, en elle, a pu faire souffrir. »
…
« Une liberté est à construire entre la fuite en avant dans le toujours plus – jusqu’à l’encombrement généralisé et le cynisme d’un monde sans illusion ni compassion, sans vrais desseins collectifs, sans convictions, sans loyauté, sans fidélité – et la restauration peureuse d’un ordre ancien imaginé pur promu par les fondamentalistes, éliminant toute critique. »
(voir ci-dessous)
https://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/viespirituelle/documents/lettre-rentree-2010.pdf
Une intervention remarquable à écouter :
Pédophilie : la colère de l’abbé Grosjean
http://www.dailymotion.com/video/x3zper4_pedophilie-la-colere-de-l-abbe-grosjean_tv?
Etre en colère contre la famille Eglise parce que un, des clercs l’ont salie en abimant des enfants, j’ai écouté attentivement ce prêtre. J’aurais aimé que cette colère soit dite de manière aussi véhémente lorsque des enfants ont été, sont encore aujourd’hui, abimés par un membre de leur famille biologique. Je n’ai entendu, mes oreilles étant très certainement sélective sur ce sujet douloureux, que l’exaltation de la famille idéale. Pour certains, cette parole-là est juste in-supportable.
D’autre part, j’aimerais savoir si les prêtres sont formés à repérer les signes de souffrance d’un enfant, d’un adolescent. Ceci concerne chacun de nous mais particulièrement les prêtres qui sont amenés à recevoir la parole vraie des enfants.
Il s’agissait dans cette émission de réagir sur la pédophilie dans l’Église commise par des prêtres.
Il est bien vrai que la majorité des actes de pédophilie sont commis ailleurs, dans le cadre des familles biologiques ; cela est bien connu des services sociaux, de la police et de la justice, mais ne faites pas reproche à l’abbé Grosjean d’avoir répondu sur la question des prêtres sans botter en touche en parlant des incestes.
Merci pour votre article
Bravo au journaliste et au chrétien. Cher René tu as fais là un travail remarquable qui rend hommage aux victimes à qui on reproche en plus de faire le scandale en parlant. Merci pour eux
Bravo pour cet article si complet et si « sage ». J’apprécie tout spécialement le dernier paragraphe qui parle de la fin d’une Eglise cléricalocentrée qui fait peur à beaucoup de cathos et aux évêques bien sur.
Je vis cela dans mon village péri-urbain où il n’y plus de messe dominicale et où l’on ne nous permet pas d’ouvrir l’église un dimanche (par mois!) pour un temps de prière, de peur de dévaluer l’eucharistie qui est célébrée dans un lieu unique plus central… Quand il n’y aura même plus de prêtre pour célébrer dans ce lieu unique, que seront devenues nos petites communautés locales ? Quelle visibilité ?
J’ajouterai que ces communauté locales sont encouragées à se retrouver autour de la Bible (ce qui est très bien) mais ne peuvent célébrer ce qu’elles vivent à l’église le dimanche ou le samedi….
Fanette
Réunie à Lourdes, l’Assemblée plénière des Évêques avait donné mandat au Conseil permanent de la Conférence des Évêques de France (CEF) pour prendre des décisions. Au nom de la CEF, son président Mgr Georges Pontier s’est exprimé comme suit dans Le Monde de ce mercredi 13 avril 2016 :
« …De même, nous devons prendre les mesures canoniques qui s’imposent et enlever à l’auteur de ces actes toute responsabilité auprès de jeunes ou d’enfants. Notre collaboration avec les autorités judiciaires doit être totale, notre écoute des victimes ouverte et bienveillante. Nous avons également entrepris un travail de sensibilisation et de formation auprès des séminaristes, des prêtres et des éducateurs intervenant auprès d’enfants ou de jeunes dans les structures liées à l’Eglise. Nous souhaitons ardemment que tout cela porte ses fruits et que les procédures prévues soient appliquées. … »
Suite à une accusation de pédophilie par Monsieur Martin-Vallas et dont les faits remontent même aux environs de 1960 (voir ci-dessous) :
http://www.bfmtv.com/societe/paris-un-ancien-eleve-d-une-ecole-jesuite-accuse-un-pretre-de-pedophilie-968040.html
et en évitant de se réfugier derrière une quelconque prescription, les Jésuites de la Province de France n’hésitent pas à s’exprimer courageusement ci-dessous :
http://www.jesuites.com/2016/04/communique-de-la-province-de-france-face-aux-situations-dabus-sexuels/
« La vérité vous rendra libre : Retour sur la pédophilie dans l’Eglise » par François Euvé, dans la revue Etudes de mai 2016 (voir ci-dessous):
https://www.revue-etudes.com/article/la-verite-vous-rendra-libre-17558
L’association « la Parole libérée » réagit aux annonces de l’épiscopat français (voir ci-dessous) :
http://fr.radiovaticana.va/news/2016/04/13/p%C3%A9dophilie__la_parole_lib%C3%A9r%C3%A9e_r%C3%A9agit_aux_annonces_de_l%C3%A9piscopat_fran%C3%A7ais/1222478
La fraternité sacerdotale Saint Pie X n’échappe pas aux dérives sectaires dénoncées dans cet article, comme en témoigne le « livre noir » publié mi-mai par l’AVREF. Le plus troublant, à la lecture de ce document, est l’attitude de la Congrégation pour la doctrine de la foi qui continue d’accorder des délégations de pouvoirs aux responsables de la FSSPX pour instruire eux-mêmes les procès canoniques relatifs à ces delicta gravira… avec une efficacité douteuse.
http://avref.fr/fichier/AVREF%20Livre%20Noir%20FSSPX%2012.05.2016.pdf